Science et foi (fides et ratio): une réflexion

Science et foi (fides et ratio): une réflexion

Heureux de rendre service, c’est avec enthousiasme que Nicolas Donzé a accepté l’invitation de l’équipe de rédaction à porter un regard qu’on sait inspiré sur le sujet. Merci Nicolas, nous te lisons dans ce texte continu , comme si tu t’adressais à chacun de nous.

PAR NICOLAS DONZÉ, BIOLOGISTE, LOC
PHOTO: HÔPITAL DU VALAIS

Saint Jean-Paul II disait que pour permettre le voyage dans le ciel de nos ignorances, nos âmes sont équipées de deux ailes : la science et la foi. Ainsi, dès notre naissance, nous prenons (ou espérons) prendre le contrôle de notre corps, le vaisseau de notre pèlerinage terrestre. Dès notre premier cri, notre premier son entendu, notre premier paysage vu, notre curiosité nous noie de questions qui trouvent des réponses parfois dans des actes de foi, parfois dans des chemins de raisons. Ainsi avançons-nous vers ce « Graal » que nous construisons avec nos réponses.

Pour bien comprendre les univers que sont ces deux mots, une sainte du XIe siècle, Hildegarde von Bingen, nous permet de voir leur complémentarité. Elle pensait que nous étions construits en trois dimensions : un corps, sorte de fantôme d’une éternité recherchée et qui porte en lui ce mystère qu’est la mort. Puis, habite en nous une âme qui agit comme le pilote de ce corps. Enfin, vit un esprit, qui ouvre à notre âme les portes de la contemplation divine. Elle imaginait d’ailleurs que la santé était l’harmonieuse communication de l’esprit, l’âme et le corps, et la maladie que pleure le corps trouvait son origine dans une relation houleuse entre ces trois éléments.

Dans cette conception, il y a un continuum entre la science et la foi qui permet de réfléchir sur une maladie en particulier que la médecine moderne traite avec difficulté : la dépression nerveuse. Les flèches de cette maladie nous clouent au sol, et comme un papillon épinglé, nous empêche de voler. Souvent, la réponse de la science se trouvent dans des médicaments qui retirent ces flèches. Mais, lorsque les épingles ont été retirées, existe-il un médicament pour nous redonner « l’envie de voler » ? Cette envie se cache-telle dans la force que l’esprit donne à notre âme ? Cette question nous fait quitter les chemins battus de la science… On quitte le « comment » traiter une maladie, ses mécanismes pathologiques, pour travailler le « pourquoi » suis-je malheureux, comprendre la cause. On peut donc supposer que la médecine moderne traite les symptômes de la maladie et la foi aide à comprendre l’origine des souffrances du corps.

D’ailleurs, la science se perd dans la foi que l’on a en la science. En effet, souvent j’entends dire, en ces temps de pandémie : « je ne crois pas à ce vaccin », ou l’inverse « j’y crois ». Ou encore, certains annoncent : « je ne me vaccine pas car Dieu me protège ». Est-ce la bonne approche ? La science se caractérise par des méthodes que notre cerveau tente de construire, par des doutes, des remises en question, des échecs et parfois de magnifiques succès qui permettent le développement de nouvelles thérapies. La foi est, elle, un chemin dans une nuit éclairée par une lumière que nos yeux aveuglés par nos peurs, nos colères, nos jalousies, nos égoïsmes ne voient plus. Et malgré elle ou peut-être grâce à elle, osons-nous quand même avancer dans cette nuit. Ainsi, parfois les maladies que la science ne résout pas toujours, nous obligent-t-elles à abandonner nos certitudes, à laver nos yeux et nous tourner vers cette flamme qui devient soleil. Et, la science nous conduit vers la foi, car elles sont toutes deux filles du même père.

Un des plus grands mystères que la science n’a pas encore compris se lit dans une question, la dernière question que posa Pilate à Jésus. On peut lire dans l’évangile de saint Jean, 18 : 36-38 : Pilate lui dit : « Alors, tu es roi ? » Jésus répondit : « C’est toi-même qui dis que je suis roi. Moi, je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix. » Pilate lui dit : « Qu’est-ce que la vérité ? » Et à partir de ce moment, Jésus se tait. Il ne répond pas à cette question fondamentale. Probablement, parce qu’Il mesure que Pilate ne comprendrait pas qu’un chemin de foi, un chemin d’amour lui permettrait de compléter les réponses que la science seule ne peut résoudre.

La vie est ainsi très mystérieuse. Peut-être que Dieu inscrit en nous les contours d’un dessin de l’aventure terrestre que nous devons colorier. La foi nous permet de voir ces contours et la science aide au coloriage.

Retrouvez les vidéos de Nicolas Donzé, biologiste chef adjoint à l’Institut Central des Hôpitaux à Sion.
L’infatigable vulgarisateur des sujets aussi cruciaux que la consommation de toxiques et leur action sur la santé des ados en particulier apporte là où on l’invite un regard de scientifique précieux .
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