Tous disciples d’Emmaüs

Tous disciples d’Emmaüs

Par Geneviève de Simone-CornetNous cheminons vers Pâques, la fête du passage. Passage de la mort à la vie, des ténèbres à la lumière, du doute à la foi. Longue route que ces quarante jours du carême qui nous liment, nous érodent, nous taillent pour que nous devenions toujours plus semblables à Jésus. A Noël, il s’est mis en chemin d’humanité avec nous pour vivre au plus près nos joies et nos détresses, nos questions et nos espoirs. Durant ce carême, il est au désert avec nous. Jour après jour. Viendra la Semaine sainte, la grande semaine : là, il nous précédera pour frayer le passage à la lumière dans toutes les obscurités du monde. Et les nôtres. Lent travail, à recommencer sans cesse, jusqu’à la fin du monde.

N’est-ce pas le sens du récit des disciples d’Emmaüs, ces deux hommes rejoints à l’improviste par un inconnu ? Ils quittent Jérusalem ruminant leur déception – qu’attendre encore de ce Jésus qui s’est laissé condamner et crucifier ? Un Messie ? Allons donc ! –, bien décidés à rentrer chez eux, à reprendre leurs habitudes. « Ils avaient rebouché le trou / à l’intérieur d’eux-mêmes », écrit le poète Jean-Pierre Lemaire. Finis l’ouverture, l’attente, le risque ! Morte l’espérance ! Comme ce Jésus qui leur avait promis monts et merveilles…

Seulement, ils sont en route. Et il y a cet inconnu… Intéressante, tout de même, sa façon de les questionner. Et de leur parler des Ecritures alors que le soir tombe : il trouve « des mots comme des lampes », dit le moine poète Gilles Baudry. Alors, poursuit Jean-Pierre Lemaire, « quelque chose en eux remua profondément ». A l’auberge, il disparaît. Non sans avoir, cheminant puis demeurant avec eux, élargi leur vie : « Ils s’aperçurent qu’en eux-mêmes le trou était ouvert ».

Alors, oui, ils peuvent repartir vers Jérusalem. Il s’est passé quelque chose. De l’ordre de l’intime. Le Sauveur est venu habiter leur terre intérieure pour la libérer. C’est là qu’il travaille, et son Royaume est au-dedans. Les disciples d’Emmaüs c’est moi, c’est toi, c’est nous. C’est tant de nos contemporains enfermés dans la nuit du doute, de la peur, de la souffrance. Tous rejoints par un Dieu qui fait route et demeure avec eux. Alors, quand nous fêterons Pâques, ne l’oublions pas : le passage que le Christ est venu inaugurer est offert à tout homme; et la route d’Emmaüs fait de nous des disciples. Si nous le laissons déboucher le trou.

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