Mariage nul?

Mariage nul?

Le pape François, le 16 juin 2016, a jeté un pavé dans la mare en disant tout haut ce que beaucoup pensent tout bas : une majorité des mariages religieux célébrés sont «nuls». Simplement parce que les mariés ne savent pas, ou mal, à quoi ce sacrement les engage. Ce n’est pourtant pas compliqué. Eclairage.

Par Vincent Lafargue
Photos: Ciric
Un sacrement
Le mariage religieux est, pour les catholiques, un sacrement. C’est-à-dire un signe. Comme le rappelle Mgr Jean-Marie Lovey, « tout signe renvoie à autre chose, à ce qui est signifié. Et cette “autre chose”, ici, n’est rien moins que notre Dieu Trinité ». Un sacrement, c’est aussi un cadeau de Dieu qu’on ne peut donc pas lui « rendre », à l’instar des six autres sacrements (on ne peut pas se « débaptiser » comme nous le suggèrent parfois certaines affiches, aucun sacrement ne peut être rendu à Dieu).

Une belle définition
Le dossier de mariage que remplissent les fiancés et le curé de leur paroisse (normalement, mais plus souvent le prêtre qui va célébrer leur mariage), comporte cette belle définition du mariage : « Le mariage entre baptisés est une communauté sacramentelle de vie et d’amour entre un homme et une femme. » Communauté : le couple est une petite église domestique, comme le rappelait saint Jean-Paul II en 2000 à Rome dans un rassemblement de couples ; … sacramentelle : parce qu’elle est fondée sur un sacrement, un signe qui dit Dieu et qui vient de lui ; … de vie et d’amour : parce que c’est pour toute la vie et que cela suppose l’amour total de ces deux êtres.

Quatre piliers

Ce sacrement demande, de la part des fiancés, quatre engagements, quatre « oui » (parfois condensés en un dans la célébration) : fidélité, fécondité, indissolubilité, liberté. Ce sont ces quatre piliers qu’il convient d’expliquer toujours mieux aux fiancés pour éviter un mariage nul.

FIDELITE : ce n’est pas seulement la fidélité au conjoint, mais aussi la fidélité à soi-même ainsi qu’à Dieu, à notre foi, à nos valeurs.

FECONDITE : ce n’est pas le fait de vouloir des enfants, ou la possibilité d’en avoir. En effet, l’Eglise célèbre parfois le mariage religieux de personnes qui ne sont plus en âge de procréer. C’est un terme beaucoup plus large qui pourrait se résumer ainsi : porter du fruit. Procréer en fait partie, mais adopter, fonder une association, créer quelque chose ensemble et l’offrir au monde, voilà d’autres façons de porter du fruit.

INDISSOLUBILITE : cela signifie qu’on a conscience que cet engagement est pour la vie (et seulement pour la vie, non pour la vie éternelle : le conjoint entré dans la vie éternelle vit les noces du même nom avec Dieu, raison pour laquelle le veuf ou la veuve peut alors se marier religieusement une nouvelle fois avec quelqu’un d’autre).

LIBERTE : c’est sur ce point que porte la majorité des déclarations de nullité de mariage aujourd’hui. Est-on libre de poser cet acte ? Non, on n’est pas libre si on le fait par convention familiale, pour le regard de tel ou tel, pour la robe blanche (dont on n’a, en plus, pas forcément compris le sens, voir encadré). Non, on n’est pas libre si on le fait « parce que mon conjoint y tient, mais pour moi ce n’est pas important ». Non, on n’est pas libre si on colore cette alliance de questions financières (la « dot » de jadis pouvait rendre nul le mariage auquel elle était associée, l’Eglise a souvent oublié de le dire). Non, on n’est pas libre si on se marie « parce qu’un bébé se présente ». Non, on n’est pas libre si on le fait « parce que ça se fait ». Non, on n’est pas forcément libre si l’on n’est pas mûr affectivement, et l’on sait que cette maturité vient de plus en plus tardivement dans nos sociétés occidentales. Non, on n’est pas libre, par ailleurs, si l’on est soi-même sous l’emprise de quelque chose qui diminue notre liberté d’action, qui empêche notre don total: une drogue, une influence, une profession ou une activité annexe qui prend toutes nos soirées, voire même un animal. « L’un des procès en nullité que j’ai menés, disait un juge ecclésiastique, nous a vus examiner comme pièce à conviction la photo de mariage où l’on voyait l’épouse, son chien, un espace vide et le marié plus loin. Ce dernier n’avait pas imaginé la place – au propre et au figuré – que prenait l’animal de compagnie de son épouse. »

NULLITE ou ANNULATION ?

Ainsi, si l’on ne peut « annuler » un mariage (puisque c’est un cadeau qui ne peut être rendu à Dieu), on peut cependant le déclarer « nul ». La nuance est de taille. Cela revient non pas à « rayer » un mariage mais à déclarer qu’il n’a jamais existé. Il n’y avait pas « mariage » au sens sacramentel – même si on y a tous cru, à commencer par les fiancés – parce que l’un des piliers était absent ou partiellement mais sérieusement manquant.

PROCEDURE SIMPLIFIEE

Pour faire reconnaître cette nullité, il convient alors de s’adresser au diocèse, et plus spécifiquement à l’officialité diocésaine. L’« official » est la personne chargée notamment d’étudier et d’instruire les cas de nullité de mariage au travers d’une procédure jadis coûteuse et compliquée. Pour Lausanne, Genève et Fribourg, le Père Hubert Niclasse relève que le pape François a promulgué, le 8 décembre 2015, une procédure simplifiée qui a fait exploser le nombre des demandes. Au nom de l’officialité du diocèse de Sion, l’abbé Laurent Ndambi, juge ecclésiastique, rappelle que la procédure – même simplifiée – dure au minimum six mois et demande l’intervention d’un certain nombre de personnes. Un procès en nullité fait notamment appel à un « défenseur du lien », qui est en quelque sorte l’avocat du sacrement ; c’est lui qui va défendre le mariage face à la demande de nullité.

Il ne faudrait pas considérer l’accès plus large à ces procédures comme un blanc-seing ou un appel à la séparation. Au contraire ! L’Eglise, par ce biais, rappelle la beauté du sacrement et entend offrir la possibilité d’en vivre un « vrai » à celles et ceux qui n’en avaient pas perçu toute l’étendue et avaient célébré un peu vite un mariage qui s’est avéré problématique parce que manquaient certains éléments essentiels.

Mariage en blanc

Se marier en blanc a un sens.
Se marier en blanc a un sens.

Le mariage se célèbre en blanc. C’est d’abord la couleur liturgique que revêt le célébrant (et non le rouge « couleur de l’amour », comme le font faussement certains prêtres : le rouge, liturgiquement, est la couleur du martyre, du sang, et de l’Esprit Saint, en aucun cas celle du mariage).

La robe blanche de la mariée ne dit aucunement sa virginité affichée ou supposée – il faut le rappeler à nos anciens qui y croient encore dur comme fer et qui s’offusquent devant leur petite-fille qui se marie en blanc alors qu’elle vit « à la colle » depuis des années avec son fiancé. Non ! La robe blanche de la mariée et la couleur blanche que le marié est invité à porter lui aussi, au moins en partie, sont le rappel de leur BAPTêME. Ainsi, seul le cas d’une personne non baptisée dans la foi chrétienne, épousant un catholique, supposerait que sa robe ne soit pas blanche.

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