Le fils prodigue autrement

Le fils prodigue autrement

Par Pierre Moser
Photo: DR

La conférence traitait du retour de l’Enfant prodigue.
La conférence traitait du retour de l’Enfant prodigue.

Pâques approche à grands pas. Nous retrouverons donc, lors de ce dernier dimanche de mars, quatrième dimanche de Carême, la parabole du père miséricordieux, appelée auparavant du fils prodigue. Lors de notre réunion des quatre conseils (protestants et catholiques de Champel et des Eaux-Vives) qui s’est tenue le 7 février 2019, nous avons pu assister à une conférence du Docteur Enrico Norelli sur ce passage de l’évangile de Luc (Lc 15). Cette relecture fut d’une richesse telle que j’ai eu envie d’en partager avec vous quelques pistes de réflexion ; j’espère qu’Enrico Norelli me pardonnera si j’ai trahi sa pensée par le manque d’exhaustivité dont j’aurais pu faire preuve.

Jésus choque son auditoire. Pour le mesurer, il faut effacer la couche d’anachronie que deux mille ans de chrétienté ont apporté à ce texte. Depuis le père qui cède à la requête de son fils jusqu’au manque de respect du fils pour son père, dans une société patriarcale à l’extrême, rien n’est acceptable dans l’attitude des deux principaux protagonistes. En acceptant, le père a mis en danger le patrimoine de la famille, a manqué d’autorité et s’est par cela montré un mauvais chef de famille. Le fils, lui, est déjà indigne dans son non-respect de l’autorité, dans sa volonté de ne pas assumer les vieux jours de son père. Il dénie également à son frère son futur rôle de chef de famille de son frère ainé. Bref tout est fait pour que les personnages « sympathiques » soient ceux qui respectent la loi.

Le respect de la loi et des traditions devrait être source de bonheur. Et pourtant, tous ces personnages respirent l’amertume : les scribes et les pharisiens maugréent, le frère aîné est en colère et l’assistance est choquée. Les seuls à exprimer la joie ce sont le père et le fils cadet, le premier parce qu’il a par deux fois pris le risque d’aimer sans condition, l’autre parce qu’il a su prendre le risque de retourner chez son père quitte à travailler comme un serviteur. La loi n’est donc joie que si elle permet d’oser aimer sans condition. Plus on approfondi cette réflexion, plus on se rend compte que les évangiles ne décrivent pas un mode de vie, mais plutôt une attitude qui peut s’appliquer à n’importe quelle civilisation. L’esprit de la lettre au lieu de la lettre.

Un dernier mot sur l’absence de la mère. Si elle avait été présente dans la parabole, c’est elle qui aurait pris le rôle de l’amour sans condition envers le cadet. Pour Luc, la femme, n’ayant pas de regard sur la succession, n’aurait pas pu aller jusqu’au bout de cet amour. C’est donc le père qui remplit les deux rôles. Un peu comme Dieu en somme… Merci Professeur.

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