Le chrétien et la politique

Le chrétien et la politique

Toute l’équipe de Saillon propose cet article écrit dans les années 80 par Vital Darbellay, conseiller national de 1979 à 1995, et paru cette année dans le livre « Vital Darbellay Artisan de solidarité » rédigé par son frère Charly. Ce texte écrit il y a près de 40 ans est pourtant proche, aujourd’hui encore, de nos réalités.

Texte de Charly Darbellay
Photo: Laurence BuchardLa question de savoir s’il est possible de concilier un engagement chrétien et un engagement politique se pose régulièrement. D’autant plus qu’il est de bon ton aujourd’hui de considérer la politique comme une chose sale, dont il faut savoir se tenir à distance.

Nous rencontrons d’ailleurs, dans ce domaine comme dans d’autres, des opinions tout à fait opposées. Certains vous diront que politique et religion n’ont strictement rien à voir l’une avec l’autre et d’autres vous diront qu’elles sont absolument liées.

Une fois de plus, c’est au milieu qu’il faut chercher la vérité pour constater d’abord que religion et politique se situent à des plans différents et répondent à des buts différents.

La religion, ainsi que l’étymologie nous l’indique, est l’ensemble des relations de l’homme avec Dieu. Son but, nous conduire dans de bonnes conditions vers les « fins dernières » en particulier vers la Vie éternelle.

La politique, c’est l’organisation de la cité terrestre, de manière que les hommes puissent s’y épanouir et y vivre en harmonie les uns avec les autres.

En fonction de ces niveaux différents, les deux choses sont distinctes et l’on ne peut pas transposer sans autre dans la législation l’ensemble de l’ordre moral. On est obligé, en démocratie, de tenir compte de l’ensemble des volontés, de respecter ceux qui ne partagent pas nos conceptions.

En religion, ce qui est est, un commandement est un commandement et un dogme est un dogme. En politique, il n’y a pas de dogme ; on le répète volontiers, la politique c’est l’art du possible et par conséquent aussi l’art du compromis. Pour faire passer une idée, pour établir un certain ordre, il faut qu’ils soient acceptés par une majorité.

D’où nécessité pour le chrétien de cultiver l’esprit critique. Il doit se souvenir que tout ce qui est légal n’est pas forcément moral et rien ne nous oblige à faire tout ce qui est autorisé par la loi.

Cet esprit critique, nécessaire, n’est cependant point suffisant. Le chrétien a aussi le devoir de s’engager pour l’organisation de la société. Et, il ne peut pas s’y engager en faisant fi de ses convictions. Il ne peut point se présenter comme une commode de nos grands-mères qui aurait un tiroir pour la pratique religieuse, à n’utiliser si possible que le dimanche, un autre pour la profession et un troisième pour la politique.

Non, la vie d’un homme est une. Et pour le chrétien, impossible de participer à l’organisation de la cité sans tenir compte de l’amour dû à ses frères, à tous ses frères, proches ou lointains, sans tenir compte de l’échelle des valeurs que le christianisme, à la suite du Christ, a mis en place.

Il a le devoir d’essayer de concrétiser ses idées dans la vie de tous les jours, de faire en sorte que les valeurs morales ou spirituelles soient prises en compte.

Que l’on me comprenne bien, les valeurs matérielles méritent aussi d’être défendues, souvent d’ailleurs, elles conditionnent les autres valeurs. Ainsi par exemple, il n’est guère possible de pratiquer une bonne politique sociale sans une économie solide qui en fournisse les moyens. Les valeurs matérielles sont cependant subordonnées à l’homme ; elles doivent être orientées vers l’homme ; elles sont un moyen non pas un but.

Et c’est souvent une déception pour le chrétien de constater que dans notre monde, de plus en plus matérialiste, lorsqu’une valeur morale ou spirituelle est en conflit avec une valeur matérielle, c’est presque toujours cette dernière qui a le dessus. On a souvent l’impression que le franc est la valeur suprême.

Il est bon alors de revenir à la source, à l’Evangile, à la doctrine sociale de l’Eglise qui s’en est largement inspirée, et d’y retrouver ce souci du respect de chacun, avec une prédilection marquée pour le plus petit, pour le plus faible, pour le marginal, même s’il faut à l’occasion y sacrifier quelques parcelles de notre opulent confort.

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