Sens biblique de la bénédiction

Sens biblique de la bénédiction

Texte et photo par Bruno Sartoretti

Icône de la protection de Jérusalem, Jérusalem.
Icône de la protection de Jérusalem, Jérusalem.

La bénédiction n’évoque souvent que les formes les plus superficielles de la religion, formules marmonnées, pratiques, vides de sens auxquelles on tient d’autant plus qu’on a moins de foi. Pourtant, le dernier geste visible du Christ sur la terre, celui qu’il laisse à son Eglise et qu’a fixé l’art chrétien de Byzance et des cathédrales, est sa bénédiction (Lc 24, 50ss). La bénédiction est un don qui touche à la vie et à son mystère, et c’est un don exprimé par la parole et par son mystère. La bénédiction est parole autant que don, diction autant que bien (grec : eu-logia, latin : bene-dictio, français : éloge ou bénédiction) parce que le bien qu’elle apporte n’est pas un objet précis, un don défini, parce qu’il n’est pas de la zone de l’avoir mais de l’être, parce qu’il ne relève pas de l’action de l’homme mais de la création de Dieu. Bénir, c’est dire le don créateur et vivifiant, soit avant qu’il se produise, sous la forme d’une prière, soit après coup, sous la forme de l’action de grâces.

La bénédiction étant à la fois chose donnée, don de quelque chose et formulation de ce don, trois mots l’expriment : le substantif beraka, le verbe barék, l’adjectif barûk.

– Bénédiction (beraka) : Même en son sens le plus profane, le plus matériel, celui de « cadeau », le mot comporte une nuance très sensible de rencontre humaine. Les présents offerts par Abigaïl à David (1S 25, 14-27), par David aux gens de Juda (81S 30, 26-31), par Naaman guéri à Elisée (2R 5, 15) par Jacob à Esaü (Gn 33, 11) sont tous destinés à sceller une union ou une réconciliation. Mais les emplois de loin les plus fréquents du mot sont en contexte religieux : même pour désigner les richesses les plus matérielles, si le mot de bénédiction est choisi, c’est pour les faire monter à Dieu et à sa générosité (Pr 10, 6-22 ; Si 33, 17), ou encore à l’estime des gens de bien (Pr 11, 11 ; 28, 20 ; Si 2, 8). La bénédiction évoque l’image d’une saine prospérité, mais aussi de la générosité envers les malheureux (Si 7, 32 ; Pr 11, 26) et toujours de la bienveillance de Dieu.

– Bénir (barék) : Le verbe comporte une gamme d’emplois très étendue, depuis le salut banal adressé à l’inconnu sur la route (2R 4, 29) ou les formules habituelles de courtoisie (Gn 45, 7-10 ; 1S 13, 10) jusqu’aux dons les plus hauts de la faveur divine. Celui qui bénit est le plus souvent Dieu, et sa bénédiction fait toujours jaillir la vie (Ps 65, 11 ; Gn 24, 35 ; Jb 1, 10). Aussi seuls les êtres vivants sont susceptibles de la recevoir ; les objets inanimés sont consacrés au service de Dieu et sanctifiés par sa présence, mais non pas bénis.

– Béni (barûk) : Le participe barûk est, de tous les mots de bénédiction, le plus fort. Il constitue le centre de la formule typique de bénédiction israélite ; « Béni soit… » Ni simple constatation, ni pur souhait, plus enthousiaste encore que la béatitude, cette formule jaillit comme un cri devant un personnage en qui Dieu vient de révéler sa puissance et sa générosité, et qu’il a choisi « entre tous » : Yaël, « entre les femmes de la tente » (Jg 5, 24) ; Israël, « entre les nations » (Dt 33, 24) ; Marie, « entre les femmes » (Lc 1, 42). Aussi fréquente et aussi spontanée que le cri : « Béni N… ! », la formule parallèle : « Béni Dieu ! » jaillit également du saisissement éprouvé devant un geste où Dieu vient de révéler sa puissance. Elle souligne moins l’ampleur du geste que son merveilleux à-propos, son caractère de signe. A nouveau, la bénédiction est une réaction de l’homme à la révélation de Dieu (Gn 14, 20 ; Gn 24, 27 ; Ex 18, 10 ; Rt 4, 14). La bénédiction est toujours confession publique de la puissance divine et action de grâces pour sa générosité.

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