Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Vallée d’Illiez (VS), septembre 2020
Texte et photos par Pierre-André Udressy de Troistorrents
Me voilà en silence, immobile, je songe à un paysage qui m’est bien connu. Un bruit continuel d’eau agitée me berce alors que je contemple… Soudain mon esprit tressaille, où suis-je ? La hallebarde que je serre entre mes doigts me le rappelle tout de suite: oui, ce n’est pas le bruit des torrents mais bien plutôt de fontaines. Songé-je à une montagne aux sept Dents ? Ce sont là sept collines il est vrai mais ce que je vois élevé devant moi est bien étrange. C’est la Cité éternelle, devant moi sa basilique ; c’est ce pays dont je protège une des entrées. Mais que fais-je ici ? La vallée que j’ai quittée me revient à l’esprit. Oui je suis bien en service en dehors de mon pays, mais je ne suis point le premier ; de mon village même, tant sont déjà partis pour la même raison. D’ailleurs j’entends dire de ces touristes qui passent « les voilà les Suisses, qui sont là depuis plus de 500 ans ». Je reprends conscience alors et me viennent à l’esprit les motifs de la garde « pour Dieu, pour l’Eglise, pour le Pape ».Nous pouvons alors nous demander si ce pays est vraiment étranger. C’est ici la « Pierre », le roc sur lequel se sont élevés au cours des siècles ces édifices cherchant les hauteurs, pointant le ciel, et cela n’est que le symbole de la mission du « garant » de la foi, du pasteur. Finalement ce pays ne serait-il pas nôtre ? Non pas par le privilège de l’avoir acquis par la petite armée mais bien parce que l’on y trouve par lui notre destinée, qu’on est véritablement unis ?
Certes je trouve le temps de réfléchir au sens de la vie mais les nombreuses missions me ramènent bien vite à la réalité du service. C’est alors avec fierté que j’accomplis mon service, un service d’honneur bien souvent, ce qui peut paraître bien particulier dans notre monde avant tout utilitariste. Honneur, fierté, défendant le plus dignement que je puis le successeur de Pierre, et représentant tout à la fois mes origines !
Il est certain qu’il peut être désolant de songer à la situation environnante, de voir des pèlerins marcher sans savoir où ils vont, sans se tourner vers le Beau. Certes ils sont parfois laissés à eux même. Mais il n’y a pas à se décourager, je me ressaisis à nouveau et cherche à être le plus attentif que je peux. Car le service est avant tout la sécurité, la protection du Saint-Père. Nous nous devons d’être vigilants car nous ne connaissons pas le moment où adviendra quelque chose. Il me semble arriver aux oreilles ces paroles de l’apôtre « soyez sobres, veillez ».