Une heure avec Louisa Schouwey

Une heure avec Louisa Schouwey

Louisa Schouwey, 19 ans, est étudiante au collège Sainte-Croix. Paroissienne du Christ-Roi, elle dirige le petit chœur des enfants. Elle a réalisé son travail de maturité sur l’encyclique Laudato si’ du pape François.

Propos recueillis par Paul Salles
Photos: L. Schouwey
Pourquoi avoir choisi ce thème ?
Dans le cadre de mes études, j’ai dû réaliser un travail de maturité et j’ai choisi de me pencher sur deux thèmes que j’avais envie d’approfondir : la religion et l’écologie. C’est assez naturellement que je me suis concentrée sur l’encyclique Laudato si’ que le pape François a écrite en 2015. Je l’ai lue et présentée comme idée de travail à mes professeurs qui m’ont aidée à préciser la problématique : cette encyclique apporte-t-elle du nouveau à l’écologie ? C’est ainsi que je me suis principalement concentrée sur le concept d’écologie intégrale. 

Qu’est-ce que l’écologie intégrale ?
C’est le fait de lier l’écologie environnementale, l’écologie sociale et l’écologie politique. C’est d’ailleurs le titre de mon travail : « Tout est don, tout est fragile, tout est lié. » Faire le lien entre tous les aspects des différents courants écologiques est à mon sens le point fondamental et l’apport nouveau de cette encyclique. 

« Tout est don », expliquez-moi ?
Cette phrase renvoie au thème de la création : la terre, la nature, mais aussi l’humanité dans toutes ses dimensions sont un don, un cadeau que Dieu nous fait. Le pape nous invite à considérer un véritable Évangile de la création. D’une part l’Ancien et le Nouveau Testament nous révèlent que Dieu a tout créé pour nous le confier, comme le cadeau originel dans lequel il est donné à chacun de vivre. 

D’autre part cette création, la nature qui nous fait vivre, la société qui nous environne, est aussi un livre de révélation du mystère de Dieu. En créant et en nous confiant son œuvre, Dieu nous dit quelque chose de lui-même. Par ailleurs, affirmer que tout est donné à toute l’humanité permet de poser l’idée de la destination universelle des biens : l’ensemble de la création est donné à l’ensemble de l’humanité. 

Sans remettre en cause le principe de la propriété individuelle, il apparaît injuste qu’une minorité de personnes s’approprie la majorité des biens et des richesses sans tenir compte du bien de ceux dont on a l’impression que la voix ne compte pas, alors qu’ils sont pourtant si nombreux.

Que signifie « Tout est fragile » ?
Nous savons que si Dieu prend soin de nous confier la création, c’est pour veiller sur quelque chose de fragile et dont il faut prendre grand soin pour ne pas qu’elle s’abîme. C’est peut-être la facette la plus connue de l’écologie : la nature souffre, des espèces végétales et animales disparaissent, les glaces fondent, des écosystèmes sont bousculés et modifiés, on parle de réchauffement climatique… Mais il ne faut pas oublier que nos sociétés elles-mêmes sont fragiles, l’humanité aussi est fragile et marquée par le péché. La fragilité de l’homme, c’est de céder à ses mauvais penchants, de ne pas respecter la création et sa place de créature. Il n’est pas tout-puissant : une logique du progrès et de la croissance sans fin est inhumaine, sans compter toutes les erreurs et le mal que l’humanité peut faire vis-à-vis d’elle-même et de la nature.

Et enfin pourquoi « Tout est lié » ?
Lorsque le Pape affirme que tout est lié, il signifie qu’on ne peut pas traiter seulement un aspect de la question de l’écologie. La sauvegarde de la création, la lutte contre le réchauffement climatique et le soin au vivant sont indissociables des problématiques liées à la migration, à la lutte contre la pauvreté et à la mondialisation. Le pape rappelle que nous sommes appelés à « entendre tant la clameur de la terre que la clameur des pauvres » (Laudato si’, 49). Le fonctionnement d’une société a des répercussions à court, à moyen et à long terme sur notre environnement et sur le bien des personnes qui la composent. Il y a par conséquent une vraie question sociétale et politique. Par ailleurs, le pape s’attache à donner le sens de la sauvegarde de la création. En mettant l’accent sur la sauvegarde de la maison commune, et en faisant référence au Cantique des Créatures de saint François d’Assise, il affirme que si l’on porte atteinte à la création, c’est en quelque sorte aussi au créateur que l’on porte atteinte.

Que retenez-vous de ce travail ?
C’est un pas en avant dans l’Église, car auparavant, nous avions l’impression que ce thème n’était pas pris au sérieux dans les milieux ecclésiaux. J’ai eu l’occasion de lire plusieurs réactions de chrétiens, et pour certains, la lecture de l’encyclique, fut une véritable révélation, un électrochoc. De plus, s’engager dans cette question permet de rejoindre nos contemporains, particulièrement les jeunes, pour qui c’est un enjeu majeur. On le voit bien avec les marches et les grèves pour le climat qui sont portées par des étudiants. Il ne s’agit pas d’une mode ou d’un mouvement pour des athées militants, mais d’une authentique part de la vie et de l’engagement chrétien. C’est également un renfort de poids pour le mouvement écologique : désormais nous ne devrions plus pouvoir nous dire catholiques et nous désintéresser ou dédaigner cette question. 

Dans ce sens, faire ce travail de maturité m’a permis de mettre des mots sur mes convictions écologiques et chrétiennes. Cette encyclique m’a permis d’unifier ces deux dimensions en moi. 

À travers vos observations, avez-vous eu l’impression que des choses ont bougé dans l’Église locale, à Fribourg ?
Oui, il y a des petites choses qui ont germé : le jardin des capucins avec Lionel Avanthay, des conférences ou des groupes de gens qui en parlent et qui cherchent des solutions. Mais je n’ai pas non plus pu beaucoup chercher. Je me suis surtout concentrée sur le texte et j’ai beaucoup aimé l’approfondir et le travailler. 

Comment ont réagi vos amis et votre famille quand vous avez choisi ce thème ?
Il est vrai que la première réaction de plusieurs personnes était de dire : « Quoi, il y a un lien entre la religion et l’écologie ? » Effectivement, ce travail m’a permis de parler d’écologie à des catholiques et de parler de la foi à mes amis écologistes.

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