Un aumônier devenu patient

Un aumônier devenu patient
Tiré du magazine paroissial L’Essentiel,secteur Aigle (VD), mars-avril 2021

TRAVERSER LE COVID – Les rescapés du Covid ont une convalescence longue et difficile. Lorsque le patient est précisément celui qui accompagne spirituellement les malades depuis des années, cela colore sensiblement la situation…

TEXTE ET PHOTOS PAR VINCENT LAFARGUE

L’abbé Gérald Carrel est aumônier d’hôpital depuis plus de vingt-cinq ans. D’abord à Genève puis à Lausanne, il est actuellement responsable de l’équipe œcuménique travaillant à l’Hôpital Riviera-Chablais. Lorsqu’il a été testé positif au Covid en décembre, il a dû être hospitalisé aux
soins intensifs puis intubé et placé en coma artificiel pendant plus d’une semaine.

Se relier à Dieu
« Aux pires heures, je priais très simplement. » Il rit et ajoute : « Mais c’était à ras les pâquerettes, Notre Père, Je vous salue, Gloire à Dieu, Angelus… un élan vers Dieu, oui, mais depuis les profondeurs ! Je le priais parce que c’est ce qui a donné sens à toute ma vie et pour rester relié, c’est le sens du mot « religion » d’ailleurs. Je savais que je n’étais pas tout seul et j’ai peu à peu découvert le très grand nombre de personnes qui ont prié pour ma guérison. Impressionnant et très touchant ! J’insisterai désormais auprès des patients en leur disant : vous n’êtes pas seuls. »

Peur et culpabilité
Gérald Carrel découvre une peur qu’il ne connaissait pas. « Petit à petit, tu te rends compte que tu as frôlé la mort et cela fait peur. J’étais pendant quelque temps entre la mort et la vie, je ne voyais que quelques personnes, déguisées en cosmonautes. C’est angoissant. » Il découvre aussi une forme de culpabilité face à ses proches : « Il y a tout ce que j’ai subi… mais en tant qu’être de relation, je découvre aussi tout ce que je leur ai fait subir, sans en être responsable mais en étant en partie la cause de leurs tourments. »

La qualité de présence des soignants
L’abbé Gérald veut surtout mettre l’accent sur ces anges qui s’activaient autour de lui : « La qualité du personnel soignant est remarquable : soutien, optimisme, joie, humour… une attention à l’autre bien au-delà du geste médico-technique ! J’aimerais les remercier et leur dire de continuer à être empreints d’humanité. »

Humble dépendance
« J’ai aussi découvert ce que c’est que
d’être dépendant. Etre levé et lavé par d’autres, avec une immense douceur, fait naître une vraie humilité et non une humiliation, contrairement à ce que l’on pourrait croire. Une relation se crée entre le soignant et le patient mais la difficulté est de ne jamais savoir sur lequel on
va tomber, vu le roulement des équipes. Une nouvelle relation est chaque fois à reconstruire. Là encore, je comprendrai beaucoup mieux à l’avenir, pour l’avoir vécu de l’intérieur, ce que vivent les patients que je rencontre comme aumônier. »

 

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