Des femmes à tous les échelons

Des femmes à tous les échelons

Elle a marché 1200 kilomètres entre Saint-Gall et Rome en 2016 pour demander au Pape une « Eglise avec les femmes ». Rencontre avec Hildegard Aepli, une théologienne engagée pour que les femmes ne se sentent plus « étrangères » dans leur Eglise.

Par Myriam Bettens
Photos: Myriam Bettens, DRLa silhouette de l’abbatiale de Saint-Gall se détache sur le ciel nuageux de cet après-midi hivernal. Le lieu de rendez-vous se trouve à quelques encablures, dans le Klosterhof, situé juste derrière l’édifice religieux. La sonnette retentit, mais la porte reste désespérément close. Un rapide coup de fil pour s’assurer de l’exactitude du rendez-vous et voilà qu’un visage inconnu apparaît à la fenêtre du premier étage. « Hildegard Aepli est en plein entretien, mais son bureau se trouve au deuxième étage. Montez ! », lance la femme dans un français incertain. Il est déjà presque 15h et la théologienne vient d’achever un accompagnement spirituel dans les locaux du Service de la pastorale, spiritualité et formation (Pastoralamt, Spiritualität und Bildung) de l’évêché de Saint-Gall, mais ajoute que régulièrement, vers 13h30, elle conduit des visites guidées de l’abbatiale, « en moyenne, quatre-vingt-cinq par année ».

Hildegard Aepli observe Mgr Büchel donner sa bénédiction à un pèlerin avant le départ pour Rome.

Autorisation expresse de prêcher

Celle qui, tous les matins aux alentours de 8h, emprunte l’escalier sculpté du Klosterhof 6b ne se verrait pas faire autre chose. Elle partage son temps entre l’évêché de Saint-Gall, l’équipe pastorale de l’abbatiale et différents engagements à titre d’indépendante. Son emploi du temps est varié et les rencontres enrichissantes. « J’aime cette Eglise catholique, même si certains s’imaginent que mon féminisme risque d’ébranler l’institution ecclésiale », lance Hildegard Aepli pour justifier son projet de pèlerinage entre Saint-Gall et Rome afin de réclamer une « Eglise avec les femmes » (Kirche mit den Frauen) auprès du Pape. « Il y a huit ans j’étais la seule femme à travailler pour l’évêché ; aujourd’hui, nous sommes cinq », précise l’assistante pastorale. D’ailleurs, elle estime que sa situation au sein du diocèse est privilégiée : « Le soir, vers 18h, je conduis une liturgie à l’abbatiale durant l’Avent. Mon évêque a accordé l’autorisation de prêcher à tous les théologiens laïcs, hommes et femmes, ce qui reste assez unique. » La place des femmes dans l’Eglise diffère grandement d’un diocèse à l’autre. A ce propos, Hildegard Aepli précise que si le diocèse de Saint-Gall fonctionne de cette manière, c’est grâce à « une pratique presque trentenaire d’inclusivité ».

Le rayonnement du pèlerinage

« Décider de l’avenir de l’Eglise en tenant compte de la voix des femmes constitue une différence significative » pour la théologienne. Elle considère aussi que la sensibilité à cette question est plus grande en Suisse alémanique que chez ses voisins romands ou tessinois. « Certainement l’influence italienne et française », ajoute-t-elle sans plus de détails. Aujourd’hui, le projet de pèlerinage initié en 2016 se poursuit au travers d’une plateforme (www.kirche-mit.ch) sur laquelle des personnes de tous horizons peuvent publier des textes sur le thème des femmes et de l’Eglise. Outre ce projet en ligne, le diocèse a institué une journée de pèlerinage (Pilgertag) chaque 2 mai pour continuer à sensibiliser les fidèles à cette question. « Entre cent cinquante et deux cents personnes participent chaque année à la célébration qui se déroule à l’abbatiale », déclare Hildegard Aepli.

L’Amazonie comme signe d’espoir

« Grâce au projet de marche, soutenu par l’évêque, la question des femmes dans l’Eglise n’est plus uniquement une thématique de théologiens, développe-t-elle, les fidèles ont aussi pris conscience qu’il reste encore compliqué pour une femme d’accéder à un poste à responsabilités dans l’Eglise. » Et le synode sur l’Amazonie a ouvert une brèche : « Même si le changement est encore imperceptible, je pense vraiment que maintenant l’ouverture est bien réelle », se réjouit Hildegard Aepli. Elle conclut : « Les pas sont peut-être encore timides, mais ils vont dans la bonne direction. »

Temps forts d’une journée

8h → Hildegard Aepli pousse la porte du Klosterhof 6b (l’évêché)
8h-10h → La théologienne s’occupe des affaires courantes du Service de la pastorale, spiritualité et formation
10h → Une pause permet à tous les collaborateurs de se rencontrer
10h20-12h → Plage horaire dévolue aux accompagnements spirituels
13h30-17h30 → Visites de l’abbatiale ou réunions de travail
18h → Liturgie du soir à l’abbatiale durant le temps de l’Avent

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