Statue de la Vierge noire…

La Vierge porte Jésus dans ses bras.

… église des cordeliers (Fribourg)

PAR AMANDINE BEFFA | PHOTO : JEAN-CLAUDE GADMER

Au XVIIe siècle, de nombreux Fribourgeois se rendent à Einsiedeln. En effet, le sanctuaire schwytzois est un des lieux de pèlerinage les plus importants de Suisse. Naît alors la volonté de construire une réplique de la Vierge noire et de la chapelle qui l’accueille. Le but est de permettre à ceux dont les finances ou la santé rendent un long voyage impossible de bénéficier des grâces. Einsiedeln est très lié à la détresse et à la maladie. Les pèlerins ramenaient dans leurs bagages des copies de la statue. Ces répliques en argile étaient porteuses de protection et de guérison.

Jean Ulrich Wild, le fondateur du projet fribourgeois, s’engage par contrat à financer non seulement la construction du sanctuaire, mais aussi le matériel nécessaire à la célébration des messes. Les cordeliers, pour leur part, promettent de chanter en chœur dans la chapelle tous les samedis et à l’occasion des fêtes mariales.

Il existe plus de 500 Vierges noires en Europe. Plusieurs tentatives d’explication de leur couleur ont été proposées. Une relecture ultérieure les lie au verset du Cantique des cantiques : « Noire, je le suis, mais belle. » (1, 5) Toutefois, la théorie la plus probable est celle de l’oxydation des pigments. La peinture blanche contient du plomb qui, avec le temps, noircit. Les fidèles se sont progressivement attachés à la couleur des statues. Ainsi, quand en 1803, la Vierge d’Einsiedeln a été restaurée, retrouvant sa teinte claire d’origine, les pèlerins ne l’ont pas acceptée. La statue a alors été recouverte de peinture noire. Le modèle fribourgeois est peint en noir depuis sa création pour correspondre au modèle.

La Vierge porte Jésus dans ses bras. L’enfant tient dans la main un oiseau. Il pourrait s’agir d’un
chardonneret. L’oiseau annonce la Passion. La couleur rouge de sa tête évoque le sang versé et son nom rappelle la couronne d’épines. Cela donnerait un autre sens aux riches atours dont Jésus est paré. C’est un roi, mais pas à l’image de ce monde.

Portrait de Sœur Marie Bénédicte…

… de la communauté du Monastère de Géronde

PAR LAURA PELLAUD
PHOTOS : LDD, MARIE-FRANÇOISE SALAMIN

Sœur Marie-Bénédicte, vous êtes l’une des douze sœurs qui forment la communauté de Géronde, comment avez-vous choisi de la rejoindre ?

Avant de choisir, j’ai été choisie. A travers la lecture de l’Evangile, Jésus-Christ s’est révélé comme l’Amour qui peut combler un cœur, remplir une vie. Des rencontres, des événements, m’ont orientée vers la vie monastique et, plus précisément, vers Géronde. Un jour, après avoir découvert, par la lecture, saint Benoît et la vie cistercienne, je suis venue pour «voir»…

Et qu’avez-vous trouvé ?

Des sœurs saisies, elles aussi, par l’amour du Christ, appelées à le préférer à tout. C’est lui qui continue de nous rassembler, qui suscite l’entraide, le partage, le pardon mutuel, afin que nous soyons un signe d’unité et de communion. Ce vivre ensemble pourrait être étouffant si le silence n’était pas là pour assurer à chacune un espace intérieur personnel pour vivre avec Dieu une relation unique. En ce qui me concerne, je suis comme aimantée par la prière de Jésus au désert ou sur la montagne dans la solitude et dans la nuit. Dès mon entrée au monastère, j’ai aimé le lever très matinal et la prière prolongée qui précède le lever du jour, vécue d’abord ensemble à l’église puis, dans l’écoute personnelle de la Parole de Dieu. Cette longue veille prépare à la célébration de l’eucharistie et oriente la journée.

Cette journée, de quoi est-elle faite ?

Ceux qui entendent la cloche de Géronde savent que des temps de prière jalonnent la journée. Mais le travail, y compris le travail manuel, est tenu en haute estime dans notre tradition spirituelle. Il est éclairé par l’exemple de Jésus qui s’est présenté comme « celui qui sert ». Au monastère, chacune accomplit le travail qui lui est confié dans les différents services de la maison ou bien dans la fabrication des hosties, l’accueil des hôtes, la vente du vin. Nous ne sommes plus en mesure de cultiver nous-mêmes les vignes mais le travail reste une composante de nos journées, il est un lieu où le don de soi donne leur poids de vérité aux paroles prononcées dans la prière.

Quelles autres dimensions de votre vie aimeriez-vous encore évoquer ?

En ce moment, beaucoup se réjouissent de voir l’Eglise se lancer dans une démarche synodale faite de dialogue et de concertation. Or, cette manière de consulter la communauté en vue de prendre une décision est prévue par saint Benoît dans sa Règle écrite au VIe siècle. Cela vaut au niveau du monastère et au niveau de notre Ordre. Un autre point est la question de l’environnement. Le monastère est établi dans la solitude, on y vit en silence, dans un climat de simplicité qui doit caractériser les bâtiments, la prière, le style de vie. Nous veillons aussi à la sobriété dans l’usage des moyens de communication tout en restant très à l’écoute des souffrances et des attentes de notre monde pour leur donner voix dans la prière.

Pouvez-vous rappeler un souvenir ?

Je n’ai jamais oublié un certain dimanche d’été où, à la tombée de la nuit, au moment de fermer la porte du monastère, j’ai vu arriver un jeune homme qui gardait un air d’enfant. Tout en lui, son allure, ses vêtements usés, son sac de pèlerin, m’ont fait penser à saint Benoît Labre, mais un Benoît Labre très propre ! Je lui ai proposé d’entrer au parloir et, tout de suite, il m’a dit qu’il était venu pour poser une question. Il s’appelait Kevin, venait d’Australie et faisait le tour du monde à pied avec sa Bible pour seule richesse. Il la feuilletait déjà et, arrivé au chapitre 22 de l’Evangile selon saint Luc, il posa le doigt sous le verset 19 : il (Jésus) dit : « Ceci est mon Corps donné pour vous. » Il voulait savoir quel sens les catholiques donnent à ces paroles. Dans son Eglise, issue de la Réforme, il avait appris qu’elles ont un sens purement symbolique. Mais cela le laissait insatisfait, il pressentait que Jésus avait voulu dire davantage. J’ai donc essayé de lui dire, tant bien que mal, notre foi en la présence réelle de Jésus-Christ dans l’eucharistie. Un éclair de joie a brillé dans ses yeux et nous sommes restés en silence. Puis, je lui ai proposé de manger et de faire halte au monastère pour la nuit. Non, il n’avait pas besoin de cela. Il avait reçu ce qu’il cherchait et, sans tarder, il est reparti, enveloppé par la grande paix du soir. Le souvenir de cette rencontre reste gravé en moi.

Jeux, jeunes et humour – mars 2022

Par Marie-Claude Follonier

Question d’enfant

Que fête-t-on le 25 mars ?
Célébrée depuis le VIIe siècle, l’Annonciation est une fête importante qui passe souvent inaperçue en plein Carême. On y commémore l’annonce faite à Marie par l’ange Gabriel comme quoi elle serait la mère du Sauveur. Comme l’Eglise a fixé la naissance de Jésus au 25 décembre, il est logique que le moment de sa conception virginale dans le sein de la Vierge ait été arrêté neuf mois plus tôt, signe d’une grande régularité dans les cycles… liturgiques.

par Pascal Ortelli

Humour

Deux vignerons vaudois sont attablés dans une auberge de Saint-Saphorin. Au même moment, entre un couple d’adeptes de la course à pied ruisselants de sueur. 
Ils s’installent près de nos deux viticulteurs et appellent le garçon. Celui-ci leur propose trois décis de Saint-Saphorin pour étancher leur soif. Le couple surpris leur rétorque :
– Mais dis donc garçon, le vin ne fait pas passer la soif, vous le savez bien !
Et les deux vignerons de s’exclamer : 
« Heureusement ! »

par Calixte Dubosson

Une seconde conversion (Marc 10, 17-22)

PAR FRANÇOIS-XAVIER AMHERDT | PHOTO : DR

Cela n’est pas propre aux religieux, religieuses et personnes consacrées, qu’elles demeurent dans leur communauté ou qu’elles changent de vie. Tout être, à un certain moment de son chemin spirituel, est invité à vivre comme une seconde conversion, celle par laquelle, après l’enthousiasme des débuts, où il a l’impression de faire des choses POUR Dieu, il en vient à se laisser pleinement conduire par l’Esprit Saint, à lui donner le gouvernail de sa vie, et donc à faire désormais l’œuvre DE Dieu (opus Dei, en latin, au sens premier de l’expression).

C’est le cas du jeune homme riche (Marc 10, 17-22) dont aucun des trois évangiles synoptiques ne mentionne qu’il était « jeune ». Son désir, tel qu’il est formulé à l’adresse de Jésus en accourant vers lui et en se mettant à ses genoux, est plus que recommandable : « Que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? » Il appelle même le Christ « Bon Maître », entraînant la première partie de la réaction du Fils de Dieu qui le renvoie au seul Bon Maître, le Père.

Puis l’homme abonde dans le sens de la deuxième partie de la réplique du Seigneur, en affirmant que « dès sa jeunesse », il a accompli les commandements du Décalogue (Exode 20, 12-16) : il n’a ni tué, ni commis d’adultère, ni volé, ni proféré de faux témoignage. Admirable fidélité qui provoque un regard d’amour porté sur lui par Jésus !

Et pourtant, cela ne suffit pas, car voilà que retentit le second appel : « Une seule chose te manque, si tu désires te faire un trésor dans le ciel : va, vends ce que tu as, donne-le aux pauvres, puis suis-moi. » Quelle radicalité ! Quelle exigence ! Le Seigneur veut que nous lui donnions tout, que nous lâchions la maîtrise de notre existence, que nous quittions la toute-puissance et que, comme Thérèse de Lisieux, nous nous jetions dans ses bras. Le texte ne dit pas si l’homme riche a accepté finalement de solder tous ses biens, qu’il avait abondants. Marc dit simplement qu’il s’en alla tout triste.

Quelque orientation que nous prenions dans notre vie, que nous options pour un autre chemin ou que nous poursuivions dans la ligne de la vocation première, un abandon décisif dans les mains de Dieu est requis. Avec l’assurance que le Seigneur ne nous laisse jamais tomber.

Sacrée(s) fidélité(s) !

PAR LE CHANOINE LIONEL GIRARD
PHOTO : MADEMOISELLE BÉRAUD-VILLARS

Si par le baptême, notre vie est fondamentalement consacrée à Dieu, certains d’entre nous ont modalisé cet appel en répondant par leur profession des vœux évangéliques, à suivre le Christ à l’écart selon le charisme propre de chaque institut.

Par leur temps de probation, ils ont dû vérifier que cet élan aussi généreux que radical n’émanait pas seulement d’un désir personnel ou d’une séduction passagère mais s’ancre bel et bien en Dieu. Ainsi l’avis de leur communauté valide de son vote cet engagement pour la vie.

Cependant les motivations des premiers temps vont vite apparaître différentes de celles qui leur permettront de persévérer dans la fidélité… et face à ces épreuves incontournables, il arrive que certains
ne voient d’autre issue que de devoir y renoncer.

Choix déchirant pour le consacré, pour sa communauté et tout son entourage.

Comment accompagner ces dispenses qui constituent une rupture existentielle sans tomber dans un jugement accusateur blessant la charité ? Car même confrontés à cette réorientation, le Seigneur ne saurait les abandonner. Reconnaissons que sa fidélité rejoint nos infidélités chroniques et nous donne la grâce de recommencer encore et encore.

Oui prions pour les consacrés qui au désert, mènent un vrai combat spirituel dont les fruits portent nos familles, nos paroisses, nos missions pastorales et manifestent cette espérance que confère la foi. Aidons-les à persévérer toute une vie durant et si besoin, à passer les caps difficiles des épreuves où son amour nous façonne afin de témoigner qu’il est l’auteur du Salut.

En librairie – mars 2022

Par Calixte Dubosson et la librairie Saint-Augustin

Des livres

Vivre en Dieu
Claire Dumont

Dans la tradition chrétienne, diverses formes de vie consacrée sont apparues pour répondre à la quête humaine et spirituelle. Certaines ont développé davantage le service évangélique de la charité envers les pauvres. D’autres se sont tournées résolument vers la recherche d’absolu inscrite dans nos cœurs. Toutes, à leur source, ont bénéficié d’une expérience bouleversante des fondateurs et des fondatrices. 
Dans ce livre, l’auteure s’applique avec bonheur à dévoiler les nouveaux visages de la vie consacrée, précieux trésor dans des vases d’argile. Elle ouvre à une vision plurielle et créatrice, où la quête de l’Absolu est première.

Editions Mediaspaul

Acheter pour 27.70 CHF

Le chemin des estives
Charles Wright

« Partout, il y avait trop de bruit, trop de discours. Un jour, j’en ai eu marre de cette frénésie et je suis parti. Certains vont chercher le bonheur en Alaska ou en Sibérie, moi je suis un aventurier de la France cantonale. » Sans le moindre sou en poche, misant sur la générosité des gens, un jeune aspirant jésuite s’échappe de la ville et de la modernité avec le désir de renouer avec l’élémentaire. Il s’offre une petite promenade de sept cents kilomètres à pied. Le chemin des estives, récit de ce voyage, est une ode à la liberté, à l’aventure spirituelle. On y croise les figures de Rimbaud, de Charles de Foucauld, mais aussi des gens de caractère, des volcans, des vaches. Au fil des pages, une certitude se dessine : le bonheur est à portée de main, il suffit de faire confiance et d’ouvrir les yeux.

Editions Flammarion

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Dieu passe tout près de nous
Bénédicte Delelis

D’une plume poétique et nourrie par les plus grands auteurs, Bénédicte Delelis nous entraîne dans une aventure spirituelle lumineuse. Ses méditations s’appuient sur l’exemple des saints comme sur les situations de notre vie ordinaire pour y découvrir, sous le poids des épreuves ou le voile du quotidien, la force de la Résurrection déjà à l’œuvre. Elle éclaire d’une manière aussi incarnée qu’enthousiasmante les mystères de la foi pour nous aider à en vivre.

Editions Emmanuel

Acheter pour 25.50 CHF

Dessine-moi la prière
Laure Enplume – Alba Ariza

« Dessine-moi un mouton », demande le Petit Prince. Et Saint-Exupéry s’en tire en dessinant la caisse où est le mouton. Avec Dessine-moi la prière, c’est le trésor de notre vie intérieure qui est donné à voir en dessins. Nous suivons deux adolescents : Pablo, plein de questions et Tim son ami enthousiaste qui vient de découvrir la vie spirituelle. Pour partager ses découvertes, Tim fait un résumé en dessins. Pablo a la mauvaise idée de les regarder en cours et se les fait confisquer. S’ensuit une recherche pleine de péripéties qui les conduit jusqu’à une abbaye…

Editions du Carmel

Acheter pour 22.50 CHF

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Le Seigneur est toujours présent, quel que soit notre chemin de vie !

Si le thème de ce mois nous parle de la vie consacrée en communauté avec ses défis, ses succès, ses échecs, nous pouvons poser un regard interrogateur sur les laïcs qui ont reçu un appel différent.

PAR THÉRÈSE GERBER | PHOTO : ORDOVIRGINUM.FR

Dans la discrétion, de nombreuses personnes donnent du temps au Seigneur, dans la prière, l’adoration, l’Eucharistie plusieurs fois par semaine. Parmi elles, nous trouvons des laïcs qui vont jusqu’à faire un engagement, comme une consécration. Quelques exemples se trouvent proches de chez nous, même dans nos paroisses.

Les Maisons d’adoration, fondées en 1998, s’adressent aux laïcs vivant dans le monde, qu’ils soient célibataires ou mariés. Ils ont pour mission d’essaimer pour porter au monde l’Amour de Jésus-Eucharistie, par un ministère de visitation accompli dans la simplicité de leur vie quotidienne. L’adhésion aux Mai-sons d’adoration est préparée par un cheminement en trois étapes : 1. Donation à Marie ; 2. Renouvellement des promesses du baptême, de la confirmation et du mariage pour les époux ; 3. Consécration à la personne vivante du Christ, par laquelle s’expriment l’attachement au Seigneur et le désir de vivre en union avec lui. Leur modèle de vie est la Sainte Famille.
www.lesmaisonsdadoration.com

L’ordre des vierges consacrées, créé en 1970, par le pape Paul VI. Une vocation encore méconnue mais qui, de par son insertion dans le monde, fait pleinement sens à notre époque. Il existait déjà dans l’Eglise primitive des formes de vie consa-crée : des femmes choisissaient volontairement la chasteté et la virginité perpétuelle. Cette vocation spécifique et originale permet en effet à des femmes de recevoir une consécration de la part de leur évêque diocésain tout en demeurant dans leur contexte de vie et non plus en intégrant une communauté monastique. Leur célibat est une manière de se donner entiè-rement à Dieu, dans une relation étroite avec l’Eglise en se mettant à son service, tout en restant dans le monde.
www.ordovirginum.fr

La Famille Solitude Myriam, fondée au Canada en 1981, soutient des personnes ayant vécu une séparation ou un divorce. En découvrant de plus en plus la grandeur du sacre-ment de mariage, elles approfondissent le mystère, afin de le vivre pleinement, et cela même au-delà du divorce. Là aussi, après un cheminement, des étapes d’acceptation, de pardon, de réconciliation, il y a la possibilité de faire un engagement qui consiste à renouveler les promesses du baptême et du sacre-ment de mariage, pour vivre la fidélité à leur sacrement de mariage. Ces laïcs se mettent au service, à la suite du Christ, dans les situations auxquelles ils sont confrontés, tout en priant pour les familles et les prêtres.
www.famillesolitudemyriam.org

Voici un aperçu de quelques possibilités d’engagements, il en existe certainement d’autres. Si vous souhaitez en parler, n’hésitez pas. Un témoignage de vie est toujours un cadeau qui peut aider d’autres personnes à trouver leur chemin.

Une vie consacrée à la musique

Témoignage de Valentin Villard, compositeur, organiste, chef de chœur

PROPOS RECUEILLIS PAR CHANTAL TERREAUX | PHOTOS : CINDY DELABAYS

C’est très tôt que Valentin décide de consacrer sa vie à la musique. Il apprend le piano dès 6 ans et à 11 ans il participe, dans le cadre de son école, à une création musicale. Là, il se rend à l’évidence que la musique fait partie de sa vie, il s’y consacrera. Il compose d’ailleurs déjà.

A 19 ans, il dirige son premier chœur à la paroisse catholique de Morges.

Valentin reconnaît volontiers devoir beaucoup aux chœurs d’église puisque c’est par eux qu’il décrochera ses premières commandes en tant que compositeur.

Travailler comme musicien professionnel, suppose des horaires de travail bien particuliers et souvent variables. Le matin est consacré à la composition, ainsi que bien souvent le début d’après-midi, puis vient le moment de préparer la répétition du soir, ensuite un entraînement à l’instrument reste indispensable. Après une petite pause, les répétitions commencent vers 19h30-20h et se prolongent facilement jusque vers 22h30.

La grande partie du travail est dédiée à la composition, puis à l’orgue car pour assurer un minimum de revenus, il faut s’investir dans plusieurs paroisses. Valentin est organiste dans quatre paroisses du Gibloux, ainsi que chef de chœur et organiste, dans notre UP, à Massonnens.

Ainsi, son travail se prolonge le week-end, entre divers concerts et toutes les prestations qu’il assure dans les paroisses. Là où cela se complique, c’est évidemment lors des fêtes religieuses qui ont lieu en même temps dans chaque paroisse. Notre musicien donne alors la priorité à Massonnens puisqu’il y est directeur et organiste, et trouve des remplaçants organistes pour les autres paroisses où il est actif.

Actuellement, Valentin dirige un chœur profane, « Elle en C » et le chœur mixte de Massonnens, qui en plus de l’animation des messes paroissiales s’adonne aussi à la musique profane, pour des concerts et parfois des cafés-théâtres.

Valentin consacre environ la moitié de son temps à la musique liturgique.

Comme dit plus haut, il est reconnaissant de l’opportunité que lui a offerte le milieu catholique qui, alors qu’il était encore adolescent, lui a passé ses premières commandes. Et durant longtemps, une grande part de son travail était dédiée à la musique liturgique. Son langage musical s’est formé avec la musique religieuse, cela faisait partie de son identité. La poursuite de sa formation rime bien sûr avec un élargissement de l’exploration et une diversification de son travail, mais qui reste, imprégné d’une grande spiritualité.

N’est-ce pas le propre de la musique et de l’art en général de nous transporter dans un monde spirituel, au-delà de notre vie corporelle ? C’est ce qui fait toute la beauté de l’art et qui le rend important dans nos vies.

Valentin exprime cela en disant que : « Pour lui la musique entraîne le compositeur dans un mouvement ascendant, de la terre vers le ciel. »

Certainement pas uniquement le compositeur d’ailleurs, mais les interprètes et les auditeurs aussi, et le manque de la période difficile que nous vivons encore, l’a fait ressentir a beaucoup d’entre nous.

Le compositeur aime le défi qu’il doit relever lorsqu’il compose pour un chœur amateur et une assemblée paroissiale. Il doit concilier qualité musicale et accessibilité à tous, tout en ayant un niveau qui motive ses chanteurs, le tout dans une tonalité, une musicalité qui porte la prière.

A ce moment de l’entretien, je lui ai demandé s’il pense alors qu’il est indispensable d’avoir la foi pour se consacrer à ce type de musique ?

Son expérience vaudoise lui ferait répondre oui, car le chœur qu’il a dirigé n’avait d’existence que pour l’animation liturgique. Depuis qu’il est dans notre canton, les chœurs chantant aussi en certaines occasions du profane, il est moins affirmatif. Mais en tout cas, le directeur et compositeur doit avoir un profond respect et une très bonne connaissance de la culture chrétienne, une bonne compréhension, une ouverture à ce monde, pour pouvoir œuvrer dans ce registre.

Avoir une porte ouverte à « quelque chose » est important, sinon il y a une forme d’hypocrisie. Il faut une cohérence entre ce que l’on fait et vit sinon les chanteurs le ressentent et l’assemblée aussi.

On dit volontiers que chanter c’est prier deux fois. Lorsque tu composes, est-ce qu’on pourrait dire que c’est prier trois fois ?

« Oh, c’est saint Augustin qui a dit ça… La musique est un art abstrait, immatérielle. Lorsque l’œuvre est achevée, on n’a rien dans les mains, on ne peut pas toucher, se saisir de la musique et en cela, je pense que la musique se rapproche de la prière, c’est un peu comme s’il y avait deux couches de spirituel l’une sur l’autre. Cet aspect impalpable fait que la musique a ce rôle de connexion spirituelle très fort.

Je ne pense pas que composer c’est prier trois fois, c’est comme écrire un roman mais on utilise des notes au lieu des lettres. Mais quand même, lorsque je compose un chant religieux, le sens des paroles me fait choisir un autre ton que pour du profane, je ne composerais pas un air de valse musette. Dans la musique religieuse, il y a un aspect transcendant, de transformation.

Ce n’est pas prier trois fois, mais me consacrer à la musique religieuse m’aide à vivre ma foi. Et j’ai le désir de faire quelque chose de beau, qui me pousse, ainsi que les chanteurs et l’assemblée, au-delà de… »

Le chemin de croix de la Rencontre

L’art pour donner accès au sacré, le sacré pour donner accès à l’art

Ce mois-ci, nous donnons la parole à Romaine Masserey qui partage le chemin de croix depuis plus de 20 ans avec des personnes de tous horizons. A chaque fois, l’Esprit Saint surprend, provoquant la rencontre entre la soif de chacun et l’abondance de la Source divine.
Cher lecteur, aujourd’hui, par ces quelques lignes, c’est à toi qu’elle aimerait faire découvrir ou redécouvrir cet extraordinaire chemin que nous offre le Père par son Fils pour faire de nous des êtres d’Amour.

TEXTE ET PHOTOS PAR ROMAINE MASSEREY

Le chemin de croix est un outil thérapeutique de pointe alliant art, spiritualité et psychologie, de l’art thérapie avant l’heure. Le chemin de croix nous permet de rétablir le lien d’amour qui devrait nous unir à nous-mêmes ainsi que à ce qui est autre que nous-mêmes. Plus ce lien est faible et fragile, plus il y a risque de mal être et de maladie. Le renforcement de ce lien permet à notre dynamique de vie de prendre le dessus sur notre dynamique de mort et de souffrance.

Une œuvre sacrée pour la personne dans sa globalité

Les scènes représentées à chaque station sont des images structurantes chargées de sens. Les stations forment dans leur ensemble une œuvre représentant le processus d’individuation. L’œuvre du chemin de croix est composée pour nous, sur mesure, elle est identitaire de la nature humaine.

Bien souvent, nous ne voyons pas les choses comme elles sont, mais comme nous sommes. Ce que nous voyons et ressentons devant une station relève de ce que nous vivons ou avons vécu ! Les scènes structurantes des stations sont des modèles influents bien plus complets que ce que nous en percevons dans un premier temps. Les scènes nous invitent à rectifier notre pensée. Les émotions qui en découlent alors sont plus positives et influencent positivement l’homéostasie 1 du corps. La Passion du Christ offre un soin englobant le mental, les émotions ainsi que le corps de la personne.

Les artistes qui créent des chemins de croix s’approprient parfois l’œuvre et la falsifient quelque peu. Cela n’a guère d’incidence en soi car l’Esprit Saint qui est derrière le projet fait son propre œuvre.

Derrière l’œuvre, LA Rencontre

Les scènes représentées aux stations sont des supports d’expression de l’Esprit Saint. Au fur et à mesure de la contemplation et des révélations de chaque station, l’œuvre laisse transparaître un processus qui existe sur le plan subtil. Nous ne pouvons pas contrôler ce processus, il est d’un ordre différent de celui de l’imagination ou des connaissances personnelles. Il est bien établi, fondamental, universel.

Petit à petit, devant l’évidence de l’existence de ce processus, la personne entre en relation avec lui et commence à se spiritualiser. Elle découvre alors une intelligence supérieure. Cette intelligence interagit avec notre intellect, mais également avec notre affect. De même qu’elle donne une réponse intellectuelle aux questions intellectuelles, elle donne une réponse affective aux questions affectives que nous nous posons. La douceur et la tendresse émanant d’une source indépendante de nous-mêmes nous touchent peu à peu.

Pour communiquer avec la Source, la Passion du Christ nous réapprend l’art de la prière. Elle nous apprend la sagesse de l’émotion et du sentiment. Cette sagesse est nécessaire à la prière afin que celle-ci ne soit pas qu’un ensemble de mots, la prière est ce que nous sommes. L’intellect ainsi que l’affect de la personne peuvent dès lors fonctionner ensemble, de façon éclairée et nourrie. La relation réciproque avec Dieu s’établit.

Chacune des scènes du chemin de croix met en avant un soin différent. Dieu nous donne l’entier du mystère de la Passion à chaque station même s’il est réparti visuellement et conceptuellement sur les 14 stations. Sans forcément en avoir conscience, nous recevons l’entier de ce mystère en chaque instant.

La Passion du Christ nous livre un extraordinaire mode d’emploi de l’Homme et de sa rencontre fondatrice avec Dieu. Elle rétablit le sens ainsi que le lien, deux éléments indispensables à l’équilibre.

ECCE HOMO

Quelques stations sur le site paroisses-sierre.ch

Chemin de Résurrection »

Par Chantal Salamin-Bérard

Cet ouvrage écrit par Marcel Dürrer nous fait entrer dans le mystère du Chemin de Résurrection qui propose un chemin pour repérer dans nos vies ces signes qui nous « ressuscitent ». C’est un chemin pour aujourd’hui, qui puise sa source dans le chemin de croix et propose 14 pas à franchir à partir des mystères essentiels de la vie : la rencontre, l’amour, la souffrance, la mort et la renaissance. Une étape préalable « La porte, le seuil » nous invite à y entrer autrement et une étape finale « La Table » nous invite à partager plus loin. Le défi de chaque pas est de se laisser transformer par la force de Dieu qui a ressuscité son Fils, à laisser parler l’image en soi.

Chemin de Résurrection, Marcel Durrer, Editions Saint-Augustin.

Vincent Fournier, artiste chrétien

Il n’est pas très courant de rencontrer de nos jours et sous nos latitudes un artiste contemporain qui témoigne de son inspiration profondément chrétienne. Dans l’échange, lui-même explique qu’il a œuvré à contre-courant, le monde de l’art entre 1990 et 2020 s’opposant souvent à la spiritua­lité chrétienne. A forte tendance matérialiste, il n’y avait guère que la spiritualité bouddhiste ou zen qui pouvait s’y faufiler. Vincent Fournier sent pourtant depuis peu l’arrivée d’une nouvelle génération, beaucoup plus curieuse et ouverte, marquée également d’une grande soif spirituelle.

PAR DAVID RODUIT | PHOTO : GILBERT VOGT
TEXTE ET PHOTOS PAR VINCENT FOURNIER

Biographie express de Vincent Fournier

Originaire de Beuson et de Veysonnaz ; habite à Saint-Léonard ; époux de Christine ; papa de trois enfants et grand-papa d’une petite-fille ; âgé de 61 ans ; après le collège scientifique, footballeur professionnel pendant
12 ans, tout en suivant en parallèle l’école des Beaux-Arts à Lausanne ; proche des capucins de Sion ; actuellement artiste.

Lors de mon appel téléphonique, Vincent Fournier s’était réjoui de ma proposition de rencontre et s’était montré tout de suite disponible. A travers les articles qu’il m’avait envoyés avant notre rendez-vous et ensuite à travers notre entretien, je compris pourquoi. Selon lui, l’art se présente comme un mode d’expression qui veut communiquer comment l’artiste perçoit la vie. Cette conception très personnelle, unique, a pour vocation ensuite d’être partagée à tous les hommes. D’où le défi pour l’artiste de façonner une conception qui lui soit propre, tout en parlant aux autres.

Ce que Vincent Fournier désire transmettre est la présence du Christ qui a commencé à habiter son monde intérieur dès enfant. Son inspiration prend source dans les Evangiles, les écrits des saints et dans la prière. Les lectures spirituelles nourrissent également sa compréhension du monde, par exemple celles du théologien suisse Maurice Zundel, qui, à une époque où l’accent avait été mis sur la morale, se battait pour affirmer la priorité d’un christianisme mystique.

Le langage de notre artiste sera celui de la pauvreté des moyens, de la simplicité, de la vacuité… afin de permettre justement une rencontre avec la Présence.

La matière, en lien avec le mystère de l’Incarnation, revêt beaucoup d’importance dans sa recherche artistique… Tissus, papiers neufs ou de récupération, cartons, images, cadres, planches ou blocs de rocher à l’âge plus que vénérable et au multiple tonnage sont convoqués afin de tracer un chemin du spectateur à la Présence, le conduisant à un au-delà qui est celui du Christ Ressuscité.

A la source de sa démarche, avant la pensée, se trouvent la vie et l’intuition. Ce n’est qu’après que l’analyse ou la raison confirme ce en quoi l’artiste s’est d’abord reconnu. Parfois, les choses arrivent même sans qu’elles aient été consciemment recherchées… et soudain tout devient évident, comme une révélation. A l’entendre, il me semblait que, comme artiste, il devait consentir à une certaine pauvreté, s’efforcer d’être disponible à ce que le Seigneur un jour dans sa grâce et providence allait lui donner, rejoignant d’abord son cœur, puis celui de ceux qui communieraient à travers son art à une même Présence.

En lien avec le temps liturgique du Carême, vous pourrez découvrir des œuvres autour du Saint-Suaire de Turin qui fascine notre artiste et constitue la source de ses images. Vous pourrez également découvrir d’autres créations sur son site www.vincentfournier.ch.

Les peintures Veronica et Trace de la Résurrection

Source d’inspiration importante de mon travail depuis de nombreuses années, le suaire de Turin interroge encore aujourd’hui la science : on ne sait toujours pas comment l’image du corps d’un crucifié correspondant à celui des évangiles s’est produite sur ce tissu de lin de 440x110cm.

L’invention de la photographie a permis la diffusion de cette empreinte majestueuse. Elle rend compte parfaitement de l’image figurée sur le suaire. On peut y lire toutes les violences infligées à cet homme.

Le suaire a voyagé, il a été plié, déplié, montré, exposé, brûlé dans des incendies… Il porte les traces de ces incidents. Ce sont ces traces qui inspirent mon travail. Par exemple la peinture géométrique rose, verte, grise et blanche s’inspire des plis majeurs du suaire. Le format de la peinture est à l’échelle de celui-ci. Elle tente silencieusement et poétiquement de rappeler la seule trace de la passion et de la résurrection que la foi admet.

En dessus de cette peinture allongée on distingue une autre peinture blanche. La forme de la tache grisâtre fait penser à un visage. Il rappelle également celui du crucifié du suaire ou celui des icônes russes montrant le saint Sauveur.

C’est le visage du Christ que je veux rendre présent sans l’affirmer tout à fait pour laisser la liberté au spectateur de le reconnaître. Dans la plupart des expositions, j’accroche une peinture semblable avec le titre Veronica qui signifie vraie icône et qui fait allusion à sainte Véronique essuyant le visage de Jésus lors de la
montée au calvaire.

Chemins de traverse

PAR PASCAL ORTELLI
PHOTOS : PXHERE, DR

Les jeunes sont en quête d’absolu, dit-on. Pour ma part, cela s’est traduit à l’époque par un attrait pour la vie sacerdotale: Dieu me voulait là illico prestissimo, au risque sinon de rater ma vie de foi et ma vie tout court. C’est du moins la perception binaire que j’avais alors de la «vocation»: y répondre ou passer à côté, en ayant manqué de sauter dans le train en marche.

Comme dans la Bible, les choses ne se passent pas comme prévu quand Dieu – et non l’image qu’on s’en fait ! – s’y mêle vraiment. Discerner sa vocation pour répondre à un appel – et choisir un état de vie – ne consiste pas à suivre aveuglément un ordre de marche ou un « plan de carrière » arrêté de toute éternité. Dieu nous parle et nous guide au cœur du quotidien et des circonstances parfois tumultueuses de nos existences avec beaucoup plus de subtilité, de pédagogie, de patience et d’humour qu’avec les gros sabots et les ornières que nous endossons bien souvent quand nous le prions.

J’ai mieux compris par la suite qu’il n’y a pas une voie avec ou sans Lui, mais un sens unique. Quel que soit finalement l’itinéraire emprunté (prêtrise ou mariage), nos pas sur les chemins de traverse sont à coup sûr inscrits dans les siens. « Je suis le chemin », nous dit Jésus. L’important n’est-il pas dès lors de ne pas perdre pied sur la route ?

A Corpataux, des «Bonjour» et des «Au revoir»

Des visages souriants à nos portes

 

 

PHOTOS : CATHERINE SOLDINI
TEXTE ET PHOTO PAR CATHERINE SOLDINI, POUR LE CONSEIL PASTORAL DE CORPATAUX

Le 28 novembre 2021, tout un petit monde gravite autour de l’autel, certaines personnes, on les voit régulièrement, d’autres, on les aperçoit au loin, d’autres encore se font discrètes… mais toutes ces personnes permettent aux célébrations de se dérouler harmonieusement et dans un beau cadre.

Ainsi lors de cette célébration, nous avons à la fois accueilli et à la fois dit aurevoir !

Ce furent des instants remplis d’émotions: Mélissa et Jessica quittaient le service à l’autel et la communauté a accueilli Agathe, Albane, Naomi et Louanne qui ont reçu officiellement la croix et le « certificat » de servant de messe même si elles avaient commencé depuis un certain temps.

De même, les responsables des servants de messe:
Florence Butty et Catherine Soldini ont tiré leur révérence pour laisser la place à Adeline et Anne Meuwly !

Ces dernières porteront plusieurs casquettes : sacristines (avec l’appui fidèle de Thérèse Monney), responsables des servants de messe et auxiliaires de communion ! En particulier, Adeline s’occupe de l’animation musicale quand il n’y a pas le chœur et Anne décore désormais l’église à la place d’Alice.

Justement, nous adressons un merci tout particulier à Alice Schouwey qui s’est occupée de la décoration et de l’entretien de l’église durant 35 ans. Tous ces bouquets ont varié au gré des saisons et ont été confectionnés avec beaucoup d’amour. Un bouquet géant de merci pour toi Alice.

Quant au nettoyage de l’église, c’est Judith Geinoz qui remplace dorénavant Alice.

Merci à toutes ces grandes et petites mains. Bonne continuation sur votre chemin de vie ! Qu’il soit lumineux et fleuri !

Donner du sens à l’investissement

Après vingt-trois ans de carrière chez Nestlé et alors patron de la branche chinoise du groupe, Roland Decorvet quitte tout. En 2014, il part pour diriger bénévolement le navire-hôpital Africa Mercy. Aujourd’hui, il s’engage à traduire sa foi en un capitalisme responsable et social.

PAR MYRIAM BETTENS | PHOTOS : DR

Pourquoi avoir laissé tomber le «meilleur job du monde» pour occuper une cabine aussi grande que votre garage ?

Au niveau professionnel, j’occupais aux yeux de tous « un des meilleurs jobs du monde », mais il y avait un stress énorme et j’avais atteint ce que je peux considérer comme mon sommet. Il valait mieux partir au sommet que continuer à faire la même chose encore pendant vingt ans. Du côté privé, le stress, les nombreux voyages et la pression me montraient clairement que continuer sur ce chemin-là aboutirait à sacrifier ma famille et mon couple. Je crois aussi profondément que chacun dans son domaine et sa profession doit refléter la gloire de Dieu. J’avais donc le besoin de retrouver un sens à ma vie en étant là pour les autres et en aidant mon prochain.

La responsabilité sociale et spirituelle fait donc partie intégrante d’une bonne gestion économique ?

Le but d’une entreprise devrait être le bien de toutes les personnes avec qui elle a des interactions. Dire qu’il n’y a que l’actionnaire qui compte n’est pas mon concept de l’économie. Aujourd’hui, les consommateurs veulent comprendre ce qu’il y a derrière les produits qu’ils achètent. Ce qui était à l’époque une sorte d’économie de niche est devenu la norme et c’est encourageant.

Une entreprise peut-elle produire de manière durable et équitable tout en étant extrêmement rentable ?

Un des problèmes que nous avons dans l’économie est ce besoin constant, dû à la pression des marchés, d’augmenter toujours plus la profitabilité. D’un autre côté, faire du bien a un coût et cela serait mentir que de dire le contraire. Pour investir dans l’équitable et le durable, il faut accepter d’être plus patient, de recevoir un retour sur investissement moins élevé. C’est un juste équilibre à trouver entre un
capitalisme sauvage et un autre beaucoup plus social.

Aujourd’hui, le continent africain est le seul à croître économiquement et au niveau de sa population. Pourquoi les investisseurs sont-ils si frileux ?

Les investisseurs européens n’investissent en Afrique que dans les domaines très rentables que sont les mines, la télécommunication ou la fintech (nouvelles technologies dont l’objectif est d’améliorer l’accessibilité ou le fonctionnement des activités financières, ndlr.), mais très peu dans l’industrie qui, elle, permettrait un vrai développement. Dans ce secteur, il faut être prêt à avoir moins de retour sur investissement avec un profil risque plus élevé. Très peu de gens sont prêts à sauter le pas. Il faut trouver un juste milieu entre les dons gratuits et un plus grand nombre d’investissements pour développer le pays.

Dans ce cas, de quelle manière aider sans verser dans la pitié ou par pure charité ?

Entendons-nous bien, je ne parle pas de couper l’aide d’urgence ou l’apport médical des ONG en Afrique, mais je pense que ce continent possède un réel potentiel économique. Cependant, il faut être conscient que le rendement sera moindre et le risque plus élevé. Par contre, l’impact social sera énorme et aura, par ricochet, aussi une incidence sur l’Europe. Sans alternative durable sur place, les jeunes Africains tenteront toujours de traverser la Méditerranée au péril de leur vie.

Biographie express

Né dans le canton de Vaud en 1965 de deux parents missionnaires, Roland Decorvet passe les premières années de sa vie à Kinshasa (RDC). Il garde de ces années-là une affection particulière pour l’Afrique. Celui qui vendait des nouilles Maggi à Bornéo pour Nestlé est propulsé patron de la branche chinoise du groupe pendant douze ans. En 2014, il quitte tout et part avec sa famille pour diriger bénévolement un bateau-hôpital de l’ONG Mercy Ships durant plus d’un an. Fondée à Lausanne et basée sur des valeurs chrétiennes, l’ONG prodigue gratuitement des soins médicaux dans plusieurs ports d’Afrique. Roland Decorvet devient le directeur général de l’Africa Mercy et gère les quelque 450 collaborateurs bénévoles attachés au navire. Aujourd’hui, convaincu que l’industrie agroalimentaire peut aider son prochain, il s’est installé avec sa famille en Afrique du Sud pour élaborer un modèle d’affaire « mi-Nestlé, mi-œuvre d’entraide » en adéquation avec ses valeurs chrétiennes.

Confirmation à Payerne

« Entrer dans un monde nouveau »

PAR LA RÉDACTION | PHOTO : PIERRE-ANDRÉ FRAGNIÈRE

Treize jeunes de la paroisse catholique de Payerne ont reçu, ce samedi 12 février, le sacrement de la confirmation. Cette célébration marquait la fin d’un chemin de préparation d’une année et le début dans la vie chrétienne comme des adultes dans la foi. Une célébration riche en émotion pour chaque participant. «Je suis très heureuse de faire partie de la communauté chrétienne», confiait Helene Gebray après la célébration. «Pour moi, le moment le plus fort a été le partage avec les autres confirmands et les parrains-marraines avant la messe. Ce parcours m’a permis de faire connaissance avec d’autre personnes et de nouer des amitiés. J’espère que nous garderons le contact.»

Noémie Maillard se disait impressionnée par le geste sacramentel d’imposition de l’huile consacrée sur le front, fait par Mgr Bernard Sonnay, vicaire épiscopal du diocèse: «Cet instant était très émouvant: pour moi c’était comme entrer dans un monde nouveau avec le Seigneur à mes côtés. Je peux commencer mon parcours de chrétienne confirmée.»

Vincent Roggo, qui a dû lire un texte de bienvenue, avouait un léger trac avant la célébration: «Finalement cela s’est très bien passé… Cette année de préparation a été bien plus courte que je ne le pensais, y compris la retraite spirituelle à Saint-Maurice. J’aurais aimé que cela dure plus longtemps. Ces grands moments resteront dans nos mémoires.»

«Seigneur Dieu, nous voulons te confier ces jeunes qui viennent de recevoir ton Esprit Saint. Fais-en sorte qu’ils puissent devenir des témoins vivant de ton Evangile dans un monde qui a tant besoin de ta présence», à prier l’assistant pastoral Lazare Preldakaj et accompagnateur des jeunes dans les intentions de prières.

Et que l’idéal demeure !

A tour de rôle, des jeunes de divers cantons romands profitent de cet espace de liberté pour évoquer un sujet qui les intéresse. Au tour de la jeune vaudoise Marie Larivé de prendre la plume.

PAR MARIE LARIVÉ | PHOTO : DR

Source de promesses infinies, mais aussi terreau fertile des abus, l’idéal recueille nos grands
écartèlements. Car souvent, l’idéal et notre humanité s’entrechoquent. Dymas de Lassus, prieur de la Grande Chartreuse, l’évoque en ces mots : « Il y a des limites à notre être humain, à nos forces physiques à notre santé, à notre psychisme, et là se trouvent les risques de l’amour : l’amour n’a pas de limites. Personne n’aimera jamais trop, mais les moyens destinés à développer l’amour comportent des limites et si celles-ci sont dépassées, le moyen peut donner la mort au lieu de la vie » (Risques et dérives de la vie religieuse, p. 31).

Nouveaux ajustements

Quitter une communauté religieuse n’est pas quitter le grand Amour, mais plutôt un chemin qui peut y mener. On peut parler de bifurcation, de choix, de chute, de libération ou bien d’autres mots encore, car il y en a autant que d’histoires personnelles et ces mots changeront encore pour chacun, probablement, au fil du temps. Là où peuvent se mêler la culpabilité, le soulagement, la colère ou la paix, encore l’idéal fraye son chemin. Poursuivre l’Amour infini demandera de nouveaux ajustements, différents des grands élans précédents, mais dans ce nouveau quotidien, banal et commun, la sainteté peut là aussi pousser.

Points d’ancrage

« Toutes les vertus chrétiennes sont suspendues entre deux abîmes : notre être de créatures tirées du néant et l’infini de Dieu qui nous attire à lui. Que l’un des deux points d’ancrage lâche et la vertu se mue en folie. Nous n’avons pas à choisir entre l’humain et le divin, le Christ qui est notre voie a uni les deux en sa personne et la spiritualité n’est plus chrétienne si elle ne tient pas les deux ensemble », écrit encore Dymas de Lassus (p. 208). Au milieu de ces deux abîmes que beaucoup ont frôlés à des périodes de leur vie, émerge une existence à toujours davantage simplifier, loin des rêves et des craintes. Un nouveau chemin s’ouvre où, là aussi, Dieu peut être le grand idéal. Un Dieu qui reste le même alors que nous changeons, un Dieu qui nous attend, patiemment.

A tout instant, c’est dans notre plus simple humanité que l’idéal pourra être poursuivi. Non pas comme horizon grandiose et héroïque, mais dans cet équilibre du quotidien qui unit le plus grand Amour à notre humble réalité incarnée, ici et maintenant.

Acteurs ou spectateurs ?

PAR L’ABBÉ DANIEL REYNARD
PHOTO : RAPHAEL DELALOYE

Quand je pense à l’Eglise, je la voudrais telle qu’elle n’est pas: attirante, encourageante, percutante, militante, sans doute variée, qui plaise aux enfants, aux jeunes et aux moins jeunes.

J’aimerais que cette Eglise m’offre tout ce que je ne donne pas.

Seigneur, cette Eglise, tu la connais aussi bien, si ce n’est mieux que moi : elle souffle trop souvent comme une bougie épuisée. Trop petite pour ta grandeur et trop grande pour notre petitesse, mal aimée et ne sachant pas aimer.

Au fond, facile de critiquer cette Eglise, cela m’arrange de la critiquer, ainsi je suis dispensé d’y travailler.

C’est facile de voir ses faiblesses par le trou de la serrure pour me protéger de franchir la porte.

Quittons le banc des spectateurs et des moqueurs pour nous asseoir au banc des acteurs et des célébrants.

C’est seulement ainsi que j’arrêterai de regarder ton Eglise, qui est aussi la mienne, pour y vivre avec les autres.

Tu nous rassembles chaque jour, comme le berger rattrape la brebis qui boite et qui s’attarde.

Ton fils est à la tête d’un corps aux membres disjoints. Il est le premier-né d’une famille d’enfants séparés.

Mais c’est bien à l’Eglise que tu tiens et non pas seulement aux individus qui se préfèrent chacun eux-mêmes.

C’est à l’humanité entière que tu tiens et non seulement aux membres d’un club.

Ton Eglise est ainsi le signe visible de ton Esprit.

J’y suis attaché à cette Eglise, comme vous pour le pire et le meilleur et nous sommes liés par la liberté de l’Esprit.

C’est toi Seigneur qui nous rassemble bien au-delà de nos mesquineries et de nos histoires de sacristies.

Donner du sens à sa vie, à la vie…

PAR CHANTAL TERREAUX | PHOTO : PIXABAY

Une question qui peut revenir à différentes étapes de notre existence, et qui a, pour beaucoup refait surface d’une manière plus intense en ces temps perturbés.

Une interrogation qui habite aussi, par moment, les personnes qui ont trouvé un but, un projet qui a pris une grande place dans leur vie au point qu’on peut dire d’eux: «Ils y consacrent toute leur vie.»

Avec ce verbe « consacrer », nos premières pensées vont vers ceux qui consacrent leur vie à Dieu. Dans nos contrées, notre regard se tourne tout naturellement vers La Fille-Dieu où depuis plus de 750 ans des femmes y vivent une existence toute tournée vers Notre Seigneur.

Nous pensons aussi à nos prêtres au service des nombreuses paroisses de notre unité pastorale.

Pour la plupart d’entre nous, une vie si pleinement donnée paraît inaccessible.

Pourtant je suis sûre que parmi vous, lecteurs, nombreux sont ceux qui ont mis toute leur énergie, leur existence, dans un but.

Considérons ces parents dont toutes les activités ont pour objectif premier d’offrir la meilleure vie possible à leurs enfants et de les guider afin qu’ils puissent un jour voler de leurs propres ailes.

Un autre mettra tout son cœur et son temps dans la continuité d’une entreprise familiale, d’autres encore dans le service, pour le bien de la société. On a souvent parlé ces derniers temps du personnel soignant mais on sait bien qu’ils ne sont pas les seuls indispensables à la vie.

Ainsi chacun peut, dans son activité propre, dans le but qu’il poursuit, trouver le sens qui nous permet de nous sentir utiles et en lien avec l’humanité, avec son prochain et donc avec Dieu.

Avons-nous réfléchi au sens de notre vie, en fonction de ce que nous accomplissons quotidiennement ?

Consacrer notre vie à faire bien ce que nous avons à accomplir chaque jour, c’est déjà être en chemin vers la sainteté comme nous l’a rappelé le pape François dans son exhortation sur l’appel à la sainteté « Gaudete et exsultate ».

Il est vrai aussi que, parmi nous, certains rayonnent plus particulièrement par le but qu’ils se sont fixé et apporte une coloration bienfaisante à nos existences.

Je veux parler des métiers artistiques et en particulier de l’art musical.

Vous admettrez que nos liturgies sont encore plus belles et nous portent davantage lorsqu’elles sont animées par la musique et le chant !

Le manque vécu nous en a fait prendre con­­science.

Découvrons dans ce numéro le témoignage d’un acteur talentueux de l’art choral dans nos paroisses.

Les chartreux

De nombreuses communautés composées de religieux ou de laïcs sont présentes en Suisse romande, comme autant de témoins de la vitalité et de la diversité de l’Eglise. Ce mois-ci, cap sur les chartreux de La Valsainte qui mènent une vie de prière et de solitude.

PAR PASCAL ORTELLI | PHOTO : JEAN-CLAUDE GADMER

Nom officiel: Ordre des chartreux ou Ordre cartusien.

Fondateur: saint Bruno (vers 1030 – 6 octobre 1101).

Date de fondation: 1084 pour la Grande Chartreuse et 1295 pour La Valsainte.

Sigle: O. Cart.

Devise: « La Croix demeure tandis que le monde tourne ».

Habit : une tunique blanche et une cuculle (scapulaire avec une bande de tissu qui
relie les deux pans) avec capuchon, de même couleur.

Organisation: chaque monastère est dirigé par un prieur élu au service des moines
du cloître (prêtres) et des frères convers.
Les moines du cloître passent la majorité de leur temps en ermitage, véritable « désert à l’intérieur du désert », composé d’une chambre, d’un atelier et d’un jardin où ils prient, travaillent, mangent et dorment. Ils ne sortent de la cellule que pour les activités communes prévues : prière liturgique à l’église, récréation et promenade hebdomadaire.
Les frères occupent une cellule plus petite, sans jardin ni atelier, car une part importante de leur journée se passe dans le lieu où chacun travaille, en solitude, au service de la communauté.

Mission: la contemplation et la prière continuelle vécues dans une consécration totale
à Dieu, en renonçant aux contacts sociaux ordinaires autant que le permettent l’équilibre
des personnes et la charité chrétienne.

Présence en Suisse et dans le monde: La chartreuse de la Valsainte dans le Val de Charmey (FR).
Outre la maison-mère dans le massif de Chartreuse au-dessus de Grenoble, l’ordre compte une vingtaine de monastères dans le monde dont cinq de moniales.

Une particularité: le grand office liturgique de la nuit entre minuit et 2h du matin.

Pour aller plus loin: le film Le grand silence, disponible sur playsuisse.ch

«Etre chartreux, c’est…» par un chartreux de la Valsainte

« Une vie de silence, de solitude pour Dieu, de prière continuelle. Une vie de louange, qui s’étend durant la liturgie de la nuit, lorsque le monde sommeille. Une vie partagée avec des frères, où chaque solitaire accomplit sa tâche, dans la charité mutuelle. Une vie exigeante : comme pour Jésus, le désert est le lieu du combat spirituel. Mais le Christ est notre paix ! Il mène le chartreux dans la solitude pour l’unir à Lui dans un amour intime, qui se diffuse dans la prière pour tous les hommes, surtout les plus souffrants. »

Histoire d’une vocation

Je m’appelle Lucie Moullet; en religion Sœur Anne-Cécile.

PAR SŒUR ANNE-CÉCILE MOULLET
PHOTOS : ANDRÉ BISE

Je suis née le 29 novembre 1939 à Châbles (FR) dans une famille très chrétienne. C’était au début de la guerre. Je suis arrivée en sixième position, remplaçant un frère – si l’on peut parler ainsi – décédé à l’âge de 10 mois. Lors de mon baptême, mes parents me prénommèrent Lucie comme ma marraine. J’ai grandi dans une famille harmonieuse, où l’on s’aimait.

Le Vendredi saint 1945, je fus emmenée à l’hôpital d’Estavayer-le-Lac, atteinte d’une méningite cérébro-spinale foudroyante, sans grand espoir de me sauver. Je me rappelle d’une seule chose; je disais: «J’ai mal à la tête, je veux de l’eau.» La Sœur Hubertine dit à maman: «Allez lui chercher de l’eau de Bonnefontaine.» J’ai guéri: Notre Dame avait intercédé auprès de son Fils.

Ayant terminé ma scolarité à Pâques 1955, j’ai été engagée pour travailler à l’hôpital d’Estavayer-le-Lac. Là, au contact des Sœurs de la Charité que je voyais se dévouer jour et nuit au service des malades, je me posais la question : quel sens donner à ma vie? Un jour, Sœur Marie Cécile Lottaz me taquine: «Dans trois ans, tu seras bonne pour faire comme moi .» Le soir, impossible de dormir jusqu’à ce que j’aie dit: «Et bien, Seigneur, si tu veux, dans trois ans je viendrai.»

Mes parents m’ont conduite chez les Sœurs de la Charité pour entrer au postulat le 16 septembre 1958. Après la formation religieuse, les Supérieures m’ont envoyée à l’école normale de Sainte Agnès, tenue par les Sœurs Ursulines, pour y acquérir le brevet froebélien (ndlr, enseignement pédagogique). En septembre 1963, je fus envoyée à Domdidier pour y enseigner en première année primaire. Là, pendant 23 ans, j’ai donné le meilleur de moi-même, ainsi que dans d’autres activités parascolaires.

De 1986 à 1988, me revoilà sur les bancs de l’école… deux ans d’étude à l’Ecole de la Foi et des ministères, à Fribourg. Au terme, Sœur Elisabeth Grebex, supérieure provinciale, m’a posé la question: «Te sentirais-tu de partir en Afrique?» J’ai beaucoup prié, me suis fait aider par un Père Jésuite pour le discernement et, sentant un appel du Seigneur, j’ai répondu oui. Pendant 12 ans, à Bocaranga, en République Centrafricaine, j’ai œuvré dans la formation des catéchistes, dans la formation à la vie religieuse des jeunes filles demandant leur entrée dans notre Congrégation. Depuis l’an 2000, je suis à Yaoundé dans notre communauté pour les jeunes Sœurs étudiantes préparant leur mission pour mieux servir leurs frères et sœurs africains.

Je veux simplement témoigner que, malgré les difficultés inhérentes à toute vie, je suis heureuse et je n’ai jamais regretté mon choix.

Si vous souhaitez soutenir  le projet de formation de jeunes filles et de jeunes religieuses porté par Sœur-Anne-Cécile, vos dons sont les bienvenus sur le CCP 10-248349-5.

Pourquoi quittent-ils la vie consacrée ?

Ils ont dit oui à Dieu en pensant que c’était pour la vie. Il arrive pourtant que certains religieux et religieuses discernent que leur place n’est plus là. Eclairage sur les motivations qui les poussent à quitter la vie consacrée et les implications de la remise en cause de leur engagement.

PAR MYRIAM BETTENS | PHOTOS : JEAN-CLAUDE GADMER, PXHERE, DR

Dieu écrit droit avec des lignes courbes.

«Les responsables de l’Eglise ne sont pas vraiment préparés à ce type de situations», affirme Maxime Morand, consultant en ressources humaines et lui-même prêtre ayant quitté le ministère. De nombreuses personnes se sont adressées à lui au moment de quitter une institution religieuse. Pourtant, « cette sortie est canoniquement assez simple à effectuer », se souvient Geneviève*. « La supérieure générale m’a déliée de mes vœux. Elle a également communiqué à l’évêque ma décision de partir. Pour ma part, j’ai rencontré ce dernier au tout début de mon temps d’exclaustration », poursuit-elle. Après plus de trente ans de vie communautaire, elle décide de quitter son Institut qui lui accorde trois ans afin de vérifier que sa décision est juste. Des deux côtés, « il y a un processus de deuil à mener » et cette autorisation à vivre à l’extérieur de sa communauté pour un temps défini fait partie d’un sain(t) cheminement de discernement, juge Sœur Marie-Brigitte Seeholzer, supérieure des Ursulines de Fribourg. «En congrégation, nous osons parler des questions de sortie, de fidélité à notre vocation ou de changement de communauté. Cette démarche me semble importante, à la fois dans une fidélité à soi-même et à l’appel de Dieu.»

Un faisceau de circonstances

« Ma vocation avec le Christ n’est plus dans ce style de vie », reconnaît Geneviève qui refuse dans un premier temps d’accepter cette réalité qui s’impose peu à peu. Elle a également de plus en plus de peine à supporter « de ne pas être simplement Geneviève, témoin du Christ, mais uniquement Sœur Geneviève ». Presqu’à en perdre son identité. Matthieu*, quant à lui, prend conscience qu’il « attendait de la vie religieuse la réalisation de quelque chose qui ne s’est pas donné ». Néanmoins, il reste moine durant plus de vingt ans et ce n’est qu’au moment du premier confinement qu’il reconnaît le sentiment d’oppression et d’enfermement qui le limite. Pour André*, c’est un faisceau de circonstances qui l’ont mené à reconsidérer son choix de vie, dont un important problème de santé. Il quitte sa communauté pour « cet ailleurs où il pourra servir Dieu d’un cœur plus tranquille ». Ces trois anciens religieux considèrent que leur communauté a accepté et accompagné moralement comme financièrement leur choix, ce qui n’est pas toujours le cas.

«Les responsables de l’Eglise ne sont pas vraiment préparés à ce type de situations.»

Maxime Morand
Quitter sa communauté est un choix de vie difficile à évoquer.

Des signes trompeurs

« Du jour au lendemain, je n’avais plus de communauté, plus de travail. Je n’existais plus », raconte Isabelle*. Un douloureux sentiment « d’effacement » qu’elle ne cache pas. La petite communauté de femmes dont elle fait partie traverse alors une crise sans précédent. « A partir du moment où on a cette vocation, on ne veut pas décevoir Dieu, on veut faire sa volonté. Savoir porter sa croix, consentir à des sacrifices fait encore partie de l’enseignement et interpréter les signes qui nous disent de sortir comme une croix à porter mène droit dans le mur. » La jeune religieuse cherche du soutien auprès des frères qui les accompagnent spirituellement. A leurs yeux, c’est elle le problème : elle doit partir. Après le choc de cette annonce, une difficulté plus grande encore se présente. Elle ne peut prétendre au chômage, son emploi auprès des frères n’a jamais été établi contractuellement. En plus de cela, la communauté n’a pas cotisé pour elle à la prévoyance vieillesse. Mis à part Geneviève, dont la communauté a effectué toutes les démarches en ce sens, les autres témoins se sont tous retrouvés au sortir de la vie religieuse avec un trou béant dans l’AVS et le deuxième pilier. Certains d’entre eux ont d’ailleurs eu recours aux conseils de Maxime Morand pour parvenir à une « convention de sortie » avec leur congrégation.

Un texte passé sous les radars

En octobre 2020, la congrégation romaine pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique a publié Le don de la fidélité, la joie de la persévérance. Le texte, passé inaperçu, présente des « orientations » pour prévenir les abandons de vie consacrée ou, le cas échéant, les accompagner au mieux. Une sorte de guide pour accompagner les situations de séparation d’un Institut. Le document comporte trois parties. La première vise à mieux penser les situations de mal-être qui provoquent les crises. La deuxième veut soutenir l’effort de la persévérance par un accompagnement et un discernement adéquat. La troisième donne les normes canoniques en la matière. Cette partie s’achève sur le rappel de l’aide qui devrait légitimement être apportée à celui quittant son Institut et la responsabilité inhérente à chacun : « Celui qui abandonne doit se poser des questions sérieuses sur les raisons de la perte de son choix vocationnel. Celui qui reste, sur la cohérence de son demeurer et ses éventuelles implications dans les causes de l’éloignement et de refroidissement de la persévérance de qui est parti. »

Le regard des autres

Outre l’aspect financier, ce changement de statut a aussi impliqué une grande part de culpabilité pour chacun des témoins. « Revenir sur une parole donnée est extrêmement violent », relève André. Echec, désaveu, infidélité sont quelques exemples d’expressions employées à l’encontre de ces « démissionnaires », tous reconvertis professionnellement. Sœur Marie-Brigitte souligne « qu’on s’imagine parfois la vie religieuse comme quelque chose de trop statique », un idéal de perfection remis en question depuis Vatican II. « L’habit ne fait pas le moine, mais fait l’image qu’on a de lui », abonde Geneviève. Aujourd’hui, elle se dit témoin du « Verbe fait frère » et peut le transmettre sans avoir cette couleur religieuse qui la précède dans toute relation. Comme les autres, elle est convaincue que le chemin emprunté n’est pas une rupture, mais une continuité de sa vocation initiale.

«En congrégation, nous osons parler des questions de sortie, de fidélité à notre vocation ou de changement de communauté..»

Soeur Marie-Brigitte, supérieure des Ursulines de Fribourg

L’après de la vie religieuse

En France, le Réseau Véro (reseauvero@gmail.com), fondé en 2014, accompagne ces « ex » religieux. Il fonctionne essentiellement par le bouche-à-oreille, mais est connu des instances ecclésiales. Il favorise la rencontre amicale et apporte aussi un soutien matériel. Rien de similaire en Suisse. Plusieurs témoins relatent le recours aux conseils de Maxime Morand, appelé en renfort par les instances ecclésiales ou les religieux eux-mêmes. Le consultant accompagne, notamment, les personnes dans la négociation de « conventions de sortie ». Il a d’ailleurs publié en 2020 avec deux pasteurs, Cultures chrétiennes et pratiques ressources humaines, un manuel d’accompagnement dans les situations de la vie ecclésiale.

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