La Réforme en Suisse

Par Jean-Luc WermeilleLa critique du trafic des indulgences par Luther (1517) aboutit à son excommunication (1521). Les idées nouvelles circulent néanmoins en Helvétie via Zurich et Bâle. Le passage à la Réforme de Zurich (1525) les fait progresser en Suisse orientale tout d’abord. L’abolition de la messe à Berne (1528) marque ensuite une étape décisive pour la Réforme car des villes alliées lui emboîtent rapidement le pas : Bienne, Mulhouse, Bâle, Schaffhouse, Neuchâtel. Par l’intermédiaire de Farel, Berne fait également pression pour imposer la Réforme à tous les bailliages sur lesquels elle exerce une influence politique (Aigle, Morat, Grandson, Orbe, Echallens). En 1536, en venant libérer Genève qui vient d’adhérer à la Réforme, Berne contribue à l’abolition de la messe dans de vastes territoires appartenant jusqu’alors à la Savoie comme le Pays de Vaud, le Pays de Gex et la région de Thonon. Dans les villes épiscopales (Genève, Lausanne), une partie des bourgeois espérait gagner en influence en se débarrassant de l’évêque. Par contre, les résistances à la Réforme sont particulièrement vives dans des régions montagneuses comme Les Ormonts (VD) ou le Hasli (BE). Dans certaines villes comme Grandson, Orbe, Echallens, Le Landeron, Sion, Loèche, Porrentruy, le débat entre les deux camps est vif et perdure de longues années.

La justification par la foi

Par François-Xavier Amherdt
Photo : CIRIC
« Ainsi Abraham crut-il en Dieu, et cela lui fut compté comme justice. » (Galates 3, 6) Ce ne sont pas les œuvres que nous faisons qui nous « obtiennent » le salut, comme on « mérite » un diplôme en accumulant les points crédits. Nous ne le dirons jamais assez, avec Paul et Thérèse d’Avila : « Ma grâce te suffit », nous confie le Seigneur, « Sola gratia », proclamait déjà Luther, il y a 500 ans.

La thématique court à travers toute la Lettre aux Galates à propos de l’attitude répréhensible de Pierre : celui-ci en effet renonce à prendre ses repas avec les païens à Antioche, sous la pression de chrétiens de l’entourage de Jacques à Jérusalem issus du judaïsme et réticents à abandonner les pratiques de la Loi de Moïse, comme la circoncision ou l’interdiction de partager la table avec des non-circoncis (cf. Galates 2, 11-14). Paul fait alors de vifs reproches au « chef des apôtres » et réaffirme son évangile : « Ma vie présente dans la chair, je la vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré pour moi. Je n’annule pas le don de Dieu : car si la justice vient de la Loi, c’est donc que le Christ est mort pour rien. Ainsi, ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. » (Galates 2, 20-21) « Sola fide », clame également Luther, hélas pas entendu en 1517 : c’est la foi seule qui sauve, développe l’apôtre des nations en Galates 3-4. C’est elle qui nous ouvre à l’action de la grâce et à l’œuvre de l’Esprit Saint et nous fait entrer dans le monde de la promesse.

Après l’Année sainte de la Miséricorde, au cours de laquelle il s’agissait de recevoir l’indulgence plénière du Père, et non de la « gagner », cette question de la justification par la foi, cœur de la Réforme prônée par le moine de Wittenberg, demeure – hélas pourrait-on dire – plus actuelle que jamais. Et dire qu’il a fallu près de 500 ans pour que la Fédération luthérienne mondiale et l’Eglise catholique signent un accord à ce propos en 1999 ! Nous sommes sauvés non par nos œuvres, mais en vue de poser des œuvres de miséricorde !

Réformes et transitions!

Par Pascal Bovet
Photos: DR, Jean-Claude Gadmer


La Réforme du XVIe siècle
La grande division de 1054 a donné naissance à une Eglise chrétienne divisée en Eglise orthodoxe, surtout orientale, et en Eglise latine dite romaine, surtout occidentale.

Cette Eglise latine a connu des réformes locales (cathares, Vaudois, hussites) mais la grande remise en question est celle initiée au XVIe siècle par les thèses de Martin Luther, suivies par des Réformateurs.

Quelques causes

Une pensée prenant en compte l’Antiquité païenne se développe à la Renaissance ; les mythes antiques sont à la mode. Le retour aux origines semble répondre aux questions du moment, et en même temps, le passé est mis à l’épreuve des découvertes.

Une dimension mondiale élargie : Christophe Colomb ouvre la porte à la mondialisation. Copernic annonce Galilée avec sa compréhension du cosmos.

L’Eglise contrôle la pensée qui doit répondre à celle de Dieu. Devant la mort si présente avec les épidémies de peste, une inquiétude : qu’est-ce que l’homme ? Qui est Dieu ?

L’invention de l’imprimerie rend possible et rapide la propagation de la pensée nouvelle.

Des pratiques devenues courantes dans l’Eglise ajoutent à la confusion: la conduite de ses ministres, grands et petits, est critiquable et leur formation fort légère. Les indulgences qui semblent acheter la grâce de Dieu et le salut, la commande qui permettait aux princes de placer leurs pions dans les évêchés avec cumul des prébendes… Martin Luther a bien su les relever. Il prône un retour aux origines pures de l’Eglise et rejette ce qui apparaît comme des ajouts : vénération des saints, sacrements, hiérarchie, etc.

S’appuyant rapidement sur les pouvoirs en place, la Réforme a eu pour effet paradoxal de renforcer le pouvoir civil sur celui de l’Eglise. Le principe « telle région, telle religion » a mis sur les routes bien des chrétiens, catholiques et protestants.

500 ans plus tard

En ce début du XXIe siècle, Galilée a eu raison ; on a même visité ces régions lointaines et on s’est rendu compte que l’univers est encore plus vaste que ce qu’on avait imaginé. On scrute l’infiniment grand comme l’infiniment petit. La pensée a connu sa révolution et des « Lumières » lui ont redonné un éclat. L’homme est mieux connu, jusque dans son psychisme et son corps. Menacé par la maladie, il tend à se protéger jusqu’au refus de la mort.

La communication est à portée de chacun, rapide, sans secret. Des royaumes se sont mués en démocraties qui s’unissent et se laïcisent. Les populations tendent à s’agglutiner dans les cités, laissant aux campagnes une vocation écologique; on délocalise en mondialisant. L’homme en est-il plus heureux? A-t-il encore un lien nécessaire avec Dieu ?

Réaction catholique

L’Eglise du XVIe siècle a entendu en partie les contestations et y a répondu par différents moyens, dont le Concile de Trente que l’on appelle quelquefois la Contre-Réforme.

A la fin du XIXe siècle, elle a tenu concile et a consolidé le pouvoir du pontife de Rome, allant ainsi à l’opposé des vues de la Réforme. A la fin du XXe siècle, un nouveau concile lui permit cette fois-ci d’avoir un regard plus vaste sur son rapport au monde et sur son propre fonctionnement.

Mais les grandes déclarations officielles n’épuisent pas les aspects pratiques qui subsistent quand de nouvelles problématiques naissent : le vaste domaine de la procréation avec ses possibilités techniques, les relations interhumaines mises en évidence lors du dernier Synode sur la famille, l’universalité de l’Eglise de plus en plus difficile à gérer pratiquement, la place des laïcs et spécialement des femmes dans l’Eglise, les relations de l’Eglise avec les autres communautés de foi reviennent régulièrement en discussion.

Réforme perlée?

L’Eglise est toujours à réformer (Ecclesia semper reformanda) : l’adage traverse l’histoire chrétienne de saint Augustin à Karl Barth. Une réforme aujourd’hui ? Un contexte nouveau s’est façonné. Il met au premier rang non plus la référence à Dieu, mais la liberté de pensée et de croyance. Contester Dieu était encore une manière de lui laisser une place ; l’indifférence l’ignore. A chacun sa foi et sa liberté de conscience, si possible éclairée.

Pourtant on a des raisons de regarder en avant avec confiance. La pratique du gouvernement de l’Eglise donne des signes de renouveau. La démission surprise du pape Benoît XVI tord le cou au concept d’un pape « à vie », lui qui a reconnu, dans ses dernières conversations, que l’Eglise doit trouver une nouvelle forme de présence. Le choix d’un pape « venu d’ailleurs », la manière de François de se présenter comme évêque de Rome avant d’être pape permet un autre ton dans le dialogue œcuménique. Son initiative de sonder les catholiques durant le dernier Synode sur la famille va dans le sens d’un décentrement de la seule curie romaine au profit du peuple de Dieu. Sa détermination à mettre de l’ordre dans les dossiers de la banque du Vatican ne déplairait pas à Luther et le remaniement de la curie est en voie de réalisation. Symboliquement, son refus de loger dans les appartements traditionnels du palais et l’abandon de certains signes pontificaux montrent son souci d’une image renouvelée de l’Eglise catholique.

Dans nos communautés

La réforme de nos communautés se fait-elle au même rythme ? La désertion des Eglises dans l’Eglise catholique, en Europe notamment, l’absence des jeunes dans les pratiques, le manque de prêtres sont des réalités figurant dans la liste des difficultés. La vie de famille inquiète beaucoup de monde, le mariage, la procréation dans des contextes difficiles, l’accompagnement en fin de vie interrogent les fidèles – pour combien de temps encore ? Le canton de Fribourg entreprend une démarche pour mieux entendre les désirs des fidèles, on cherche comment renouveler le dimanche et toucher les périphéries… Mission possible ?

J’ai fait un rêve…

Dans un contexte dominé par l’individualisme, j’ai vu naître, non pas une réforme solennelle et universelle, mais des réformes comme des gouttes de pluie, perlées, par régions, suivant les besoins du Peuple de Dieu. A l’écoute de la Parole de Dieu et des enseignements de la tradition de l’Eglise, chaque fidèle est responsable à l’intérieur d’une Eglise particulière, l’Eglise de Rome présidant comme autrefois à la communion de l’ensemble. Il a fallu un siècle pour que la Réforme s’installe ; combien de temps pour une Réforme perlée ? Pas de délai mais une réforme permanente.

Origine et avenir d’une révolution

Interview de Gabriel de Montmollin, directeur du Musée de la Réforme
Par Dominique-Anne Puenzieux

Pourquoi la Réforme ?
La Réforme de l’Eglise s’inscrit dans un mouvement plus large d’émancipation culturelle et politique en Europe. On redécouvre la richesse des philosophies antiques et avec elle la grammaire des langues anciennes. On aspire à lire la Bible dans ses idiomes originels pour les traduire en mots compréhensibles.

Que veut Luther ?
Martin Luther lance un mouvement pour réformer l’Eglise et recoller avec sa source originelle qui souligne l’absolue transcendance de Dieu par rapport aux activités humaines. Sa révolution réussit au-delà de ses vœux grâce à l’imprimerie et à la soif d’autonomie des populations.

Quelle réaction des catholiques ?
La Contre-réforme catholique participe aussi à l’essor de l’individu en rapprochant les prêtres de leurs paroissiens et en favorisant l’éducation, à l’instar des protestants. En Suisse, les querelles confessionnelles sont moins sanglantes qu’ailleurs. La paix religieuse profite, tout en la consolidant, de la capacité des cantons à mettre en place des compromis.

Et demain ?
L’avenir de ces deux confessions dépend de leurs capacités à emprunter à l’autre ce qu’elle a de meilleur : pour les protestants, l’inclination catholique à sacraliser  la nature à l’heure des désastres écologiques, pour les catholiques, l’inclination protestante à combiner solidarité et liberté alors que l’injustice sous toutes ses formes crée de nouvelles disparités.

Le monde bouge

Par Dominique-Anne Puenzieux
Photo : DRLe Pape twitte. Les jeunes catholiques s’informent sur les réseaux sociaux, communiquent par WhatsApp, Snapchat ou Periscope. Les lecteurs emportent leur pile de magazines dans leurs smartphones ou leurs tablettes. Les temps changent.

Fidèles à notre tradition d’innovation, nous développons en permanence notre offre digitale. Pour permettre à tous les publics, à tous les lecteurs, où qu’ils se trouvent et quelles que soient leurs habitudes, d’être touchés, informés.

Ainsi, d’ici quelques jours, nous allons maximiser le contenu de la presse paroissiale en l’exploitant sur les canaux digitaux, en plus du papier. Et ce avec les premières équipes locales qui ont accepté de tenter l’aventure.

Mais, il n’y a pas que la forme, il y a aussi le fond ! C’est pourquoi, à travers ce numéro de janvier, vous allez découvrir quelques nouvelles rubriques dans le Cahier romand. Car nous ambitionnons de toujours plus vous intéresser et de répondre à vos attentes.

Bonne lecture, sur papier ou sur digital !

Et tous nos vœux pour l’année qui commence.

« Vous devez être le sourire de Dieu », comme le disait Maurice Zundel.

Sandro Agustoni, aumônier de prison

« La prison est un milieu fermé, un milieu humain où la relation joue un rôle très important. » Sandro Agustoni fait partie de l’aumônerie œcuménique des prisons du canton de Neuchâtel. Il œuvre dans l’établissement de détention La Promenade et dans celui d’exécution des peines de Bellevue. Il essaie d’apporter en ces lieux un regard d’amour, celui du Christ.

Propos recueillis par Véronique Benz
Photos : Ldd
Aujourd’hui, il se rend à La Promenade, prison préventive. A son arrivée à 8h30, les gardiens l’accompagnent dans les différents secteurs. L’un d’eux lui transmet une feuille, il s’agit d’une demande d’un des prisonniers qui désire le voir. Il se rend chez ce détenu.

« Avec un prisonnier, nous abordons tous les sujets. Cela va de la pluie et du beau temps aux choses qui le préoccupent, à la manière dont il vit sa peine, dont il envisage de faire face à la situation. Je l’accompagne dans ce qu’il vit, en essayant de lui montrer le positif et l’espérance à venir. S’il a la foi, peu importe la religion, nous parlons de la manière dont il peut s’en nourrir durant ce temps d’enfermement. Parfois on prie ensemble. A Bellevue, établissement d’exécution des peines, nous évoquons aussi sa sortie et la façon dont il prépare sa réinsertion. »

« A Bellevue, je vais deux demi-
journées par semaine. Dans un établissement en exécution de peine, ta vie ressemble un peu à la vie normale. Tu te lèves, tu vas travailler dans les ateliers, tu reviens dîner, tu repars bosser… Pour rencontrer les détenus, j’essaie de favoriser les temps de pause. »

Sandro circule dans la prison, passant d’un étage à l’autre, échangeant au gré des rencontres. Il partage le repas de midi ou du soir dans un des secteurs avec les prisonniers. « C’est une bonne occasion de dialogues et de rencontres avec eux. »

Une présence gratuite

« L’aumônier est une présence gratuite pour le prisonnier. Nous sommes neutres, nous ne servons pas au système judiciaire. Nous sommes là simplement pour lui. L’aumônier peut créer des liens avec le psychiatre, le psychologue, l’animateur socioculturel, avec le personnel de la prison, les collaborateurs. Evidemment, il y a parfois des difficultés, des petites confrontations, mais l’aumônier est là pour amener la paix. »

Sandro parle des prisonniers qu’il côtoie avec beaucoup de pudeur et d’affection. Il essaie de regarder chaque détenu comme le ferait le Christ. « Même si la personne a fait du mal, car elle n’est pas en prison pour rien, il y a toujours une infime part de bon en elle. L’aumônier est là pour découvrir ce peu de bien et essayer de le valoriser. Ce n’est pas parce que je n’ai pas fait des choses illégales que je suis meilleur. Je peux aussi faire beaucoup de mal sans faire quelque chose d’illégal. Ceux qui ont fait des bêtises sont parfois plus proches de Dieu que les autres. Nous pouvons imaginer que nous sommes reliés à Dieu par un fil ; lorsque nous nous éloignons de son amour, le fil se casse. Chaque fois que le fil casse, Dieu fait un nœud, plus il y a de nœuds, plus le fil entre Dieu et nous est court et plus nous nous rapprochons de Dieu. »

Entre Gorgier et La Chaux-de-Fonds

Etablissement d’exécution des peines de Gorgier.
Etablissement d’exécution des peines de Gorgier.

Dans l’établissement de Bellevue à Gorgier, Sandro Agustoni anime une célébration de la Parole, parfois avec communion, le dimanche à 9h30. « Je propose toujours les lectures du dimanche. Ce sont de beaux temps de partage et de prière. » Dans la prison de La Promenade à La Chaux-de-Fonds, il y a entre 14h et 17h, plusieurs célébrations. L’organisation de la prison préventive est plus compliquée, car certains détenus, pour des raisons d’enquête et de procédure, ne peuvent pas être ensemble.

« Pour apprendre à connaître les prisonniers en vérité, il faut du temps. Mais ensuite une certaine amitié peut naître entre eux et moi. J’essaie de créer des ponts dans ce milieu interreligieux. Je participe aux fêtes des musulmans, car eux viennent aussi à la fête de Noël. »

« Les prisonniers ne sont pas tous des durs à cuire. Ce sont des êtres humains avec des émotions. » Sandro me cite en exemple un grand gars, beau, jeune, marrant, bien musclé car il suit des cours pour devenir professeur de fitness à sa sortie… une montagne. « Lorsque tu parles avec lui, tu découvres un être tendre, sensible et fragile. »

Prison préventive de La Promenade à La Chaux-de-Fonds.
Prison préventive de La Promenade à La Chaux-de-Fonds.

L’aumônier affirme que dans les prisons, il y a une grande concentration d’amour. « Dans la Trinité, il y a une circulation d’amour, cet amour vient jusqu’à nous. Si nous pouvons faire circuler un peu de cet amour dans des lieux où les gens ont reçu peu d’amour, alors Dieu est présent. »

L’après-midi, l’aumônier poursuit ses visites, croise les détenus, discute avec eux, individuellement ou en groupe. Il est 20h lorsque Sandro quitte la prison, le cœur empli des noms et des visages qu’il a croisés tout au long de la journée.

Biographie

Sandro Agustoni est né au Tessin. Il a vécu 3 ans comme séminariste au Salésianum à Fribourg. 

• 1990, engagé par l’Eglise du canton de Neuchâtel. 

• 1999, départ en Colombie avec la Mission Bethléem Immensee.

• 2002, retour en Suisse comme assistant pastoral pour les Montagnes neuchâteloises. 

• 2009, aumônier de prison à 50% et à 50% pour d’autres mandats. 

Sophie, maman célibataire

Les parents seuls aussi auraient voulu vivre un bel amour. Mais voilà, ils ne sont pas ou plus en couple. C’est le cas de Sophie. Difficile parfois. Mais elle avance, confiante, et nous fait partager ses ressources.

Par Bertrand Georges
Photo : Ldd
Pouvez-vous nous dire quelques mots de votre parcours ?
Après une enfance heureuse, j’ai connu une phase assez superficielle, alimentée par un salaire confortable et des expériences multiples. Tout ceci avait un côté fascinant mais ne me rendait pas heureuse. Durant cette période, j’ai rencontré celui qui deviendra le papa de mon fils Mikaël. La grossesse n’était pas prévue. Pourtant, il était hors de question pour moi de ne pas garder l’enfant. Avec le papa, nous avons tenté de bâtir quelque chose malgré tout, mais la relation a fini par casser.

Vous êtes donc maman seule. Comment vivez-vous cette situation ?
Dans l’idéal j’aimerais bien avoir quelqu’un à mes côtés. J’en ai parfois un peu gros sur le cœur. Mais même si je ne suis pas en couple, je ne suis pas seule. En effet, à l’occasion de la naissance et du baptême de Mikaël, je me suis posé pas mal de questions sur la foi et ai initié un chemin de retour à Dieu. Aujourd’hui, je peux dire que Jésus est à la première place, et cela me permet de tenir le coup au quotidien. Et puis j’ai mes parents, qui sont très disponibles. C’est précieux, pour Mikaël et pour moi.

Quelles sont vos ressources ?
La prière, les sacrements, les rencontres, les pèlerinages. J’expérimente vraiment que le Seigneur m’aide dans ma situation concrète. Et puis j’ai tout un réseau d’amis vraiment sympas sur qui je peux compter.

En plus vous trouvez le temps de vous engager ?
Le curé de la cathédrale de Sion m’a sollicitée pour l’animation de messes de familles et pour d’autres engagements liés à la communication. Je le fais volontiers parce que je suis habitée par un désir de servir. Nous sommes une belle équipe soudée. Et ça aussi ça fait du bien.

Enfin, je suis aussi heureuse de pouvoir donner ce témoignage, en souhaitant qu’il puisse encourager d’autres familles monoparentales.

Au sujet des familles monoparentales : « Quelle que soit la cause, le parent qui habite avec l’enfant doit trouver soutien et réconfort auprès des autres familles qui forment la communauté chrétienne, ainsi qu’auprès des organismes pastoraux paroissiaux. » Pape François, Amoris Laetitia, 252

Différences et complémentarités

Par Thierry Schelling
Photo : CIRIC
Pour le pape François, l’œcuménisme se décline au pluriel : celui théologique, nécessaire mais réservé aux élites pensantes. Or, la vérité chrétienne est d’abord une personne, Jésus-Christ, et donc invite à une rencontre : c’est l’œcuménisme de l’amitié et de la fraternité. Qui peut déboucher par exemple sur un mariage dit mixte pour un œcuménisme familial puisque les défis, les choix et les compromis sont d’abord au niveau du foyer. Plus universel, il y a celui de la prière et de la spiritualité partagées et vécues, comme ce que propose la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens. Enfin, celui du sang versé par les martyrs de la foi, sur lequel insiste beaucoup François. Y compris le martyre par des catholiques de membres d’autres Eglises, qu’il visite et à qui il demande pardon pour le mal commis entre chrétiens : les Vaudois italiens, les Luthériens suédois ou les orthodoxes du Phanar.

C’est le pape des gestes œcuméniques nouveaux : en octobre 2016, lui et Justin Welby, primat de la Communion anglicane, ont envoyé dix-neuf paires d’évêques des deux Eglises pour organiser des activités apostoliques ensemble ! Quel retournement de conduite après Pie XI qui, lui, en 1928, avait interdit aux catholiques… de participer au mouvement œcuménique ! Mesure-t-on le changement ?

Changement lent, certes : en Suède, en novembre dernier, pour le 500e anniversaire de la Réforme, le « traitement » médiatique ménagea concrètement la susceptibilité romaine : dans la cathédrale luthérienne de Lund, une prière œcuménique, en présence du primat de l’Eglise luthérienne suédoise, Antje Jackelén, et du curé, une autre femme, Lena Sjöstrand, s’est conclue par une déclaration commune cosignée par le Pape, les président et secrétaire de la Fédération luthérienne mondiale (deux hommes !) flanqués du cardinal Koch. Cherchez des photos de la signature, elles foisonnent ; de la prière commune avec Mesdames l’archevêque et le curé, beaucoup moins… Changement lent, mais certain, la cadence Bergoglio est donnée !

Le Noël de la famille Pittet

Quelque peu écoeurés par les excès commerciaux de la fête, Valérie et Daniel ont décidé de vivre Noël de manière différente.

Propos recueillis par Bertrand Georges
Photo : Ldd
Quand vos enfants étaient petits, vous avez décidé de vivre Noël autrement. Ça se passait comment?
Il est bientôt 17h. Il fait déjà nuit. Avec les enfants, on se met en route joyeusement. Il y a déjà du monde devant l’église. Chaque enfant reçoit une petite bougie à l’entrée. Il pourra la déposer devant l’Enfant-Jésus à la fin de la célébration. C’est la messe de la presque nuit de Noël.
Sur le chemin de retour, on discute de ce petit bébé, né dans le silence de la nuit avec juste son papa et sa maman et les animaux de l’étable. On parle de l’étoile qui a guidé les bergers et plus tard les mages. Une fois arrivés à la maison, le plus grand des enfants va allumer la bougie et le dernier va mettre le petit Jésus dans la crèche. Tout est calme et tranquille. On prend le temps de manger ensemble un repas froid, tout simple. On écoute quelques chants de Noël et le papa chante avec son orgue de barbarie. Il est déjà l’heure d’aller se coucher.

Et maintenant qu’ils ont grandi?
Le canevas reste le même. Un souper tout simple et déjà les garçons se préparent pour aller chanter la messe de minuit. Et le dernier chant, Douce nuit, résonne encore longtemps à nos oreilles, nous invitant à réfléchir à la simplicité de la venue de Jésus parmi les hommes. La nuit de Noël est là, un peu comme une parenthèse, un temps de renouveau dans la nuit, un temps donné pour offrir à Jésus nos pauvretés, nos solitudes. Pour dire merci, aussi. Pour prier le Prince de la Paix et être en communion avec tous ceux qui n’ont pas la chance d’avoir un foyer chaleureux, qui vivent dans la solitude, la pauvreté ou les conflits.

Un Noël centré sur l’essentiel. Et les cadeaux alors?
On se dit qu’il y a tellement d’occasions de ripailler, d’être sur son 31, d’être éclairé de mille lumières et de déballer sans fin des cadeaux… Et plus particulièrement pour les petits, d’être fêté à la Saint-Nicolas ou aux Rois mages sans oublier le Nouvel An qui est l’occasion de faire plein de projets en famille et de s’offrir des cadeaux.

Communication: le pape à la pointe

Par Thierry Schelling
Photo: DrInstagram, Youtube, CTV et Radio Vatican, www.news.va, tweet et probablement téléphone (portable ?) – puisque l’on sait que de temps à autre, le pape François téléphone à des particuliers, enfants malades, amis argentins, collègues et confrères jésuites –, le pontife n’est pas en reste avec les moyens de communication modernes, même s’il continue à donner ses bénédictions Urbi et Orbi en latin!

De plus, une fois ouverts les grands chantiers de la Réforme de la Curie romaine, après la réorganisation et l’assainissement du système financier de la Cité du Vatican comme du Saint-Siège, avec la création du Secrétariat pour l’économie en 2014, c’est au tour des médias de recevoir les statuts du nouveau secrétariat pour la communication (créé en 2015), le 22 septembre dernier ad experimentum. Regroupant le plus que centenaire Osservatore Romano, et la Salle de presse du Saint-Siège, comprenant également un pôle théologique, c’est l’occasion de l’arrivée en masse de laïcs là où, au lendemain du Concile Vatican II, on aurait encore nommé des prêtres, des évêques titulaires et des cardinaux à la tête du dicastère. Des laïcs et des laïques, selon le vœu plus d’une fois répété par le Pape lui-même de voir les femmes en position de décision au sein de l’organigramme ecclésiastique.

S’il n’est pas polyglotte – et l’avoue humblement –, le Pape parle LA langue du cœur à tous et communique, par son image amboyante sans exagération ni ornements super us, le sourire de Dieu pour tous, et à chaque visage rencontré lors de ses déambulations en papamobile, par exemple. Il demande toujours à faire et à refaire le parcours prévu place Saint-Pierre afin de rencontrer par le regard ceux qui se trouvent des deux côtés du chemin qu’il emprunte motorisé, et ce, pendant presqu’autant de temps que la catéchèse qui précède.

Il communique. Immanquable- ment. Corporellement, en embrassant un patient atteint d’une terrible déformation faciale, ou des femmes, sans ambiguïté et avec chaleur – il y a un demi-siècle, on aurait glosé sur un Papa Montini ou un Roncalli étreignant quelque demoiselle ou grand-mère en audience filmée! Aujourd’hui, non. On en fait même des pages de calendrier.

Il communique aussi par son recueillement lors des célébrations: tête baissée, comme s’il dormait, alors qu’il s’enfonce en contemplation, les mains croisées, assis ou debout, avant de prier et de bénir. En fonction liturgique, il est d’une sobriété très… jésuite; en dehors, il exulte de jovialité. Et les Gardes suisses qui campent devant sa chambre à Santa-Marta ne manquent pas de relever son humanité toute pareille dans le quasi-privé de l’hôtel Vatican qu’en public. Le message est clair: Dieu est bon et miséricordieux envers tous !

Justine Luisier

PROPOS RECUEILLIS PAR VINCENT LAFARGUE
PHOTOS : LDD

T’es-qui?
Justine, 22 ans, éudiante en histoire contemporaine et communication à l’Université de Fribourg. J’habite à Fribourg.
Tu t’engages où?
Je suis animatrice pour les ados à Lourdes et j’accompagne aussi les camps réflexion du Collège de Saint-Maurice.
Site des ados de Lourdes: www.pele-ete-lourdes.ch/ados

Justine, pour toi, l’Eglise de demain sera…?

Elle sera jeune, dynamique et vivante!

Ton origine valaisanne t’amène donc à faire des camps avec les jeunes de Saint-Maurice. Comment cela se passe-t-il ?

Nous organisons des camps au Simplon (une semaine avec les 3e) et au Saint-Bernard (trois jours avec les 4e). Les jeunes viennent de tous horizons. On est là pour les encadrer, déjà. Il y a bien sûr de nombreuses activités pas forcément en lien avec Dieu, mais le fait d’avoir des animateurs chrétiens engagés fait que nous sommes là pour partager avec eux leurs questions autour de la foi.

Et avec les jeunes de Lourdes, que fais-tu ?

Depuis 3 ans je pars avec les ados à Lourdes. Nous les guidons dans leur chemin de foi mais aussi pour qu’ils vivent un moment inoubliable à Lourdes, avec les malades dont ils s’occupent également.

Qu’est-ce que ces engagements t’apportent pour ta foi, ta vie chrétienne ?

Cela m’apporte beaucoup! Etre confrontée à des jeunes qui n’ont pas forcément la foi m’apprend à voir les choses différemment et à changer ma façon d’aborder les gens qui viennent d’autres horizons. Mes études en histoire contemporaine et en communication m’amènent aussi à changer mon regard, à poser sur les événements un jugement neutre. Si on peut le faire en étudiant des événements historiques, on peut naturellement le faire – ou du moins on devrait! – face à des événements de tous les jours, face à la personne qui nous parle aussi.

Qu’aimerais-tu dire aux jeunes qui hésitent à s’engager, qui disent que la religion, c’est pour les vieux ?

Je leur dirais que j’ai aussi connu une période durant laquelle je me suis dit que l’Eglise, c’était pour les vieux et pas pour moi. Mais peu à peu j’ai remarqué qu’il y avait plein d’activités pour nous, qu’il suffisait d’ouvrir les yeux parce que tout existe autour de nous. C’est à nous d’aller vers l’Eglise !

Ex-voto!

Par Pascal Bovet
Photo : Jean-Claude Gadmer

Les lieux de pèlerinages sont souvent riches en ex-voto (c’est-à-dire «selon un vœu») en remerciement pour grâces obtenues.

Ce n’est pas du Michel-Ange, c’est plus petit, mais qui peut mesurer ce qu’il y a dans le cœur de celui ou de celle qui essaie de dire Merci à un bienfaiteur ? Dans la parabole des dix lépreux, un seul est revenu, un samaritain, mal vu à Jérusalem, pour remercier Jésus. (Luc 17, 11-19)

Ces lieux de prière ont d’abord souvent accueilli une personne en situation de détresse.

Son intercession a porté un fruit: miracle ou pas, un «salut» est arrivé et le bénéficiaire exprime sa reconnaissance. «Merci pour ma guérison » peut s’exprimer de multiples manières personnelles où l’art devient second, au service de la prière; est-ce pour autant un art populaire ou naïf comme on l’appelle parfois?!

L’ex-voto ici représenté se trouve à la chapelle du Vorbourg, qui domine Delémont. L’histoire évoquée n’est pas explicite. A défaut d’historique, on peut penser à l’accueil au ciel d’un religieux. A noter que c’est la Vierge Marie qui est à l’accueil ce jour-là de 1707.

Auteur inconnu.

Histoire du cinéma

Trois périodes du cinéma religieux
Trois périodes du cinéma religieux

Par Jean-Luc Wermeille

Dès leurs tout premiers films, les frères Lumière illustrent la vie de Jésus à l’écran. Toutefois, c’est surtout après 1945 que se développent de grands péplums dont l’action se situe dans l’Antiquité et plusieurs d’entre eux sont basés sur les textes bibliques. Ben-Hur, par exemple, évoque Jésus avec beaucoup de finesse, sans jamais montrer son visage. Les années 1960 et 1970 voient l’éclosion de nombreux films qui portent un regard très critique; le cinéma religieux y fait sa crise d’adolescence en quelque sorte. Jésus de Nazareth de Franco Zeffirelli est alors l’un des rares films à succès à présenter la foi sous un jour entièrement positif. Les années 1980 et 1990 voient le «retour du religieux» avec une oraison de lms historiques (Le Nom de la Rose) ou biographiques (Hiver 54: l’abbé Pierre). On retrouve la joie d’être croyants (Sister Act). Certains de ces chefs-d’œuvre sont réalisés par des agnostiques comme Thérèse d’Alain Cavalier ou Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois. Le cinéma actuel est fait de contrastes et de paradoxes. Ainsi, dans Les Innocentes d’Anne Fontaine, ce sont les non-croyants qui portent le mieux les valeurs chrétiennes; la figure du don de soi n’est pas la mère supérieure du couvent polonais, mais une jeune médecin juive et communiste. Ce cinéma nous bouscule en interrogeant aussi bien les croyants que les non-croyants.

Les songes: un cinéma intérieur

Par François-Xavier Amherdt
Photo: Dr

bible-et-cinemaDifficile, évidemment, de «dénicher» dans les Ecritures des allusions anticipatrices du septième art. Sinon, peut-être, à travers le «cinéma intérieur» que se font certains personnages, réalité subconsciente des rêves qui n’a pas d’âge. Et à travers laquelle, en fait, Dieu nous parle souvent, si nous savons y être attentifs, en faire mémoire et les interpréter. Un grand spirituel d’aujourd’hui comme le moine bénédictin Anselm Grün nous invite d’ailleurs à le faire et nous donne des clés pour les décoder: le Seigneur travaille toutes les dimensions de notre être, y compris et surtout les plus profondes, notre cœur, notre âme, nos émotions, nos intuitions, notre conscience et notre inconscient.

La lecture continue « Les songes: un cinéma intérieur »

Dieu sur écran

De Ben-Hur aux Innocentes, en passant par Le Nom de la Rose ou Des hommes et des dieux, le cinéma interpelle régulièrement les croyants et les non-croyants.PAR DOMINIQUE-ANNE PUENZIEUX
AVEC FRANÇOIS-XAVIER AMHERDT ET PASCAL BOVET PHOTOS : DRDe tous temps, les chrétiens ont utilisé les moyens de communication à leur disposition pour transmettre la Parole et la foi au plus grand nombre. Et parmi ces moyens, on trouve tout naturellement le cinéma. D’ailleurs, tous les grands festivals l’ont compris en distribuant des prix œcuméniques, comme à Cannes ou à Berlin, aux films qui défendent des valeurs humaines et spirituelles. Car au-delà du pur divertissement le cinéma peut donner à réfléchir, à méditer.

En Suisse romande, la revue Ciné-Feuilles annonce chaque semaine les principales sorties et commente les passages à la télévision des films importants, à la lumière chrétienne. Plusieurs initiatives romandes font la part belle au septième art dans nos diocèses, unités pastorales ou paroisses. Ainsi, l’Eglise catholique de Genève organise «Il est une foi, les rendez-vous cinéma», durant un week-end au printemps. L’occasion de sortir l’Eglise de ses murs et d’interroger des personnages historiques sur leur relation à la foi, à travers la sélection de films choisis. Le message évangélique s’inscrit en effet dans la vie d’aujourd’hui.

Pas de cinéma de patronage!

A Châtel-Saint-Denis, l’abbé Petru Popa organise la manifestation pastorale «Cinécure» depuis quatre ans. L’occasion ici de réunir des paroissiens et de visionner avec eux un lm, présenté par une personnalité, ecclésiale ou non, puis d’échanger. «L’idée n’est pas de choisir des films édifiants ou à thématique strictement religieuse – il ne s’agit pas de cinéma de patronage! – mais de présenter de bons films qui permettent ensuite de débattre d’un sujet qui a trait à la spiritualité ou à la religion. Par exemple Million Dollar Baby, chef-d’œuvre de Clint Eastwood, permet d’aborder le thème de l’euthanasie», explique l’abbé. La lecture continue « Dieu sur écran »

Voir Dieu?

Par Pascal BovetLa grande Thérèse d’Avila, encore enfant, a fugué avec son grand frère sous prétexte de voir Dieu. «Je veux voir Dieu et pour voir Dieu il faut mourir.» Dans sa grande expérience spirituelle, elle trouvera Dieu au fond de sa demeure intérieure, son âme. Mais a-t-elle «vu» Dieu?

Saint Thomas d’Aquin cherchait plus à connaître qui est Dieu: en conjuguant sa foi et sa raison, il a approché du but.

Saint Anselme de Cantorbéry voulait comprendre pourquoi Dieu s’est fait homme. Et à la fin de sa recherche il répond: pour nous sauver!

Or, dans les Ecritures, il ne revient pas à l’être humain de voir Dieu; personne ne l’a jamais vu, selon saint Paul.

Noël s’annonce: Dieu nous visite en nous livrant sa parfaite image, son Fils. Des invitations sont lancées : venez voir, bergers et rois de cette terre, puis allez redire ce que vous avez vécu. Et le chant que vous avec entendu, apprenez-le-nous, que nous puissions chanter aussi: Joie au ciel et paix sur la terre.

Plus que l’écran, au soir de Noël, Dieu crève notre nuit en se faisant Lumière du monde.

Soeur Marie-Lucile: la joie de transmettre

C’est une journée maussade et pluvieuse. La vallée du Rhône est couverte d’une masse de nuages gris qui masquent les sommets des montagnes. Cette journée va être illuminée par un cadeau inattendu: ma rencontre avec Sœur Marie-Lucile, pétillante religieuse de la Sainte-Croix d’Ingenbohl.PROPOS RECUEILLIS PAR VÉRONIQUE BENZ
PHOTOS : BÉATRICE DESLARZES

Sœur Marie-Lucile me reçoit à Sierre dans l’appartement qu’elle partage avec deux de ses consœurs. Je découvre une religieuse au regard vif, au sourire lumineux, et qui malgré les ans a gardé une âme d’enfant. Le temps de l’interview, elle m’ouvre les portes de son royaume: une grande pièce qui lui sert à la fois de chambre, de bureau et de salle de cours. En y entrant, j’ai l’impression de découvrir la caverne d’Ali Baba. D’innombrables dessins et bricolages ornent les murs et les fenêtres. Sur les bibliothèques sont entassés des livres, du matériel d’enseignement, des jeux pédagogiques et des tables de calcul. Sur son bureau sont déposés pêle-mêle des boîtes, des cailloux, des coquillages… chacun de ces objets évoque un souvenir. Des souvenirs, Sœur Marie-Lucile en a à revendre. Les anecdotes fusent, parfois une date ou un nom lui échappent. «Les années sont là même si j’ai l’impression d’être toujours une jeune enseignante.» Marie-Laure (de son nom de baptême) est l’aînée de cinq filles. «J’ai eu la chance d’avoir des parents très ouverts et attentifs. Après ma première communion, j’ai eu une otite qui a duré un mois. Pendant que j’étais malade, mon papa a eu l’idée de construire une grotte de Lourdes dans le jardin. Il disait: lorsque Marie-Laure sera guérie, la grotte sera finie. Le premier jour où j’ai pu sortir, maman m’a effectivement montré la grotte.» Sa vocation, Sœur Marie-Lucile l’a ressentie à l’âge de 10 ans, à la cathédrale de Sion. «Par la suite, cet appel a été confirmé. Cet enthousiasme à suivre le Christ ne m’a plus quittée.»

Elle évoque ses études en sciences économiques et sociales à l’Université de Fribourg et les années d’enseignement qui ont suivi. «J’ai enseigné la comptabilité, l’arithmétique commerciale, le droit, l’économie politique et les mathématiques. Les maths modernes, c’était fantastique !» Elle parle de ses anciennes élèves avec beaucoup d’affection. Plusieurs d’entre elles viennent aujourd’hui lui con er leurs enfants pour des cours d’appui. Une quinzaine de jeunes bénéficient encore de son charisme d’enseignante.

Comme enseignante, quelle est la plus grande leçon que vous avez essayé de transmettre à vos élèves ?

«Le respect des autres, à l’exemple du Christ. Il y avait deux écoles de commerce à Sierre, celle des filles et celle des garçons. On nous a demandé de les fusionner en une seule. C’est celle des garçons qui est restée, mais dans notre école des Buissonnets, nous avons mis en place un enseignement basé sur la méthode Montessori.» Elle se souvient des élèves qui arrivaient à l’école le regard triste. «Quelques semaines chez nous et ils se remettaient à sourire et à revivre. J’ai apprécié cette méthode d’apprentissage qui respectait le rythme des élèves. C’était presque une école de rêve.» Sœur Marie-Lucile se rappelle avoir eu comme élèves des futurs séminaristes. «Les jeunes qui n’avaient pas fait le collège étudiaient une année ou deux chez nous avant de rentrer au séminaire.»

Comment une religieuse âgée peut-elle encore être utile?

«Elle ne sert à plus rien», me répond-elle du tac au tac. Puis elle se met à rire et continue de manière plus sérieuse: «Toute personne est utile par la prière et l’offrande même dans la maladie et la souffrance.» Sœur Marie- Lucile est remplie d’énergie. Ce qui la motive: «Le Seigneur, depuis le jour où j’ai ressenti son appel.» Se laisser aimer par Dieu et aimer les personnes, voilà tout le leitmotiv de la vie de Sœur Marie-Lucile. «Depuis que je vis à Sierre, j’ai connu sept curés. Chacun d’eux a eu le souci de nous révéler l’amour de Dieu. Je n’ai jamais été brimée par un prêtre, mis à part celui qui m’a imposé de faire les 30 jours de retraite selon saint Ignace. Mais finalement ces 30 jours ont été un vrai cadeau.»

Si un jeune me demandait comment être catholique en 2016, que lui répondriez-vous?

«Lorsque je rencontre un jeune, j’essaie de cheminer avec lui dans le respect de son projet. Je suis attentive à ce qu’il vit et j’essaie de l’encourager. Je lui conseillerais de s’attacher au Christ, de mettre le Christ au centre de sa vie et ainsi de découvrir l’amour de Dieu.»

Le sourire qui illumine son visage me prouve que c’est ce que Sœur Marie-Lucile a fait ! Et c’est bien là le plus beau cadeau qui nous est offert à Noël  l’amour de Dieu qui s’est incarné dans un enfant!

Bibliographie

Soeur Marie-Lucile Micheloud
Soeur Marie-Lucile Micheloud

Sœur Marie-Lucile est née 
à Sion en 1936, mais est originaire d’Hérémence. Après une maturité commerciale chez les sœurs Ursulines à Sion, elle travaille presque deux ans dans une banque avant d’entrer chez les Sœurs de la Sainte-Croix d’Ingenbohl. Elle étudie trois ans à l’école normale du Sacré-Cœur à Estavayer-le-Lac, puis enseigne une année à Vuadens et trois ans à l’école primaire à Sierre. Elle étudie
les sciences économiques
et sociales à l’Université de Fribourg afin de pouvoir ensuite enseigner à l’école de commerce Les Buissonnets
 à Sierre. Elle quittera cette école en 2002. Jusqu’en 2016 elle est très active dans la paroisse de Sierre notamment au secrétariat et à la rédaction du journal paroissial. Aujourd’hui elle continue
de donner des cours d’appui
à des jeunes et à des enfants.

«Que l’Eglise sorte dans la rue!»

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