A quel âge les sacrements?

A quel âge les sacrements?

A quel âge peut-on recevoir tel ou tel sacrement? Poser la question en terme d’âge est déjà une façon de verrouiller la réponse. Car si notre carte d’identité indique l’âge de nos artères, c’est la profondeur de notre foi et la valeur de nos actes qui indiquent notre maturité chrétienne. Et c’est plutôt de cet âge-ci dont il s’agit quand on parle de limite inférieure de réception des sacrements.

Par Vincent Lafargue
Photos : Jean-Claude Gadmer
Si la question de l’âge de réception est bien fixée canoniquement pour les sacrements de l’engagement (ordre dès 25 ans et mariage dès l’âge autorisé pour le mariage civil dans le pays en question), ainsi que pour les sacrements de guérison (onction des malades dès la naissance en cas de danger, réconciliation dès l’âge dit « de raison » à 7 ans), il n’en va pas de même pour les trois sacrements,  liés, dits de « l’initiation chrétienne » : baptême, eucharistie, confirmation.

Le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg ainsi que le diocèse de Sion ont engagé tous deux une grande réflexion sur le sujet. Les deux visent les mêmes buts :
amener le catéchumène (la personne qui demande l’initiation chrétienne) à rencontrer véritablement le Christ à travers une catéchèse intergénérationnelle d’engendrement et de cheminement. Par voie de conséquence, il s’agit aussi d’arrêter de considérer le sacrement de confirmation comme un certificat de fin de catéchisme mais bien plutôt comme le début d’une vie chrétienne adulte, avec les devoirs que cela suppose.

Le chemin concret sera pourtant très différent selon que l’on se trouvera en Valais ou ailleurs en Suisse romande dans les années à venir.

LGF : êtes-vous prêts ?

Pour le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg, la responsable de la catéchèse qu’est Fabienne Gapany repousse d’emblée toute question relative à un âge plancher. « Est-ce que la personne est prête ? » dit-elle. Voilà la vraie question. Cela suppose une tout autre vision de la catéchèse que les vieux manuels de grand-papa en forme de questions-réponses. Il ne s’agit pas d’avoir le maximum de bonnes réponses à une série de questions dogmatiques, mais bien de répondre personnellement à UNE SEULE question : suis-je prêt ? Ai-je envie de recevoir l’initiation chrétienne ? Et si j’ai été baptisé dans ma petite enfance, suis-je prêt à communier à la table du Seigneur ? Est-ce que je comprends, au moins un peu, non pas les concepts compliqués qui tentent d’expliquer la présence réelle dans l’hostie mais bien QUI se trouve dans cet apparent morceau de pain ? Suis-je prêt à la rencontre avec le Christ, en somme ?

Bien plus que la messe

Pour la confirmation, même approche : suis-je prêt à vivre de ma foi chrétienne, à appliquer les préceptes de la lettre de Jacques qui rappelle que la foi sans les actes est morte ? Suis-je prêt, non pas à venir à la messe tous les dimanches tout en recommençant à médire de mon prochain dès ma sortie sur le parvis, mais bien à appliquer les commandements aussi en dehors de la messe dominicale, dans ma vie de tous les jours ? Suis-je prêt à témoigner du Christ par toute ma vie ?

Dès lors, parler d’âge nous emmène déjà dans la mauvaise direction. Il s’agit de parler de maturité. Chacune, chacun pourra alors décider de vivre le cheminement qui le mènera à confirmer son baptême, et les parcours de catéchèse seront aussi variés que les catéchumènes du moment. C’est un vrai défi, relève Fabienne Gapany, notamment pour nos catéchistes qui n’ont plus un seul programme, une seule méthode que l’on pourrait appliquer à tout le monde, mais qui vont devoir apprendre à écouter, à accoucher la foi présente en chaque catéchumène.

Sion : la confirmation comme cadeau pour la route

Mgr Lovey à l’écoute d’une jeune qui reçoit le sacrement du « premier pardon ».
Mgr Lovey à l’écoute d’une jeune qui reçoit le sacrement du « premier pardon ».

Pour l’évêque de Sion, Mgr Jean-Marie Lovey, la confirmation ne doit pas être vue comme l’attestation d’une foi chrétienne adulte, mais bien comme le cadeau que Dieu fait à la personne qui confirme son baptême pour l’aider à cheminer et à devenir, à terme, un chrétien adulte. En ce sens, ce sacrement devrait être offert au plus grand nombre, sans dépendre d’un grand parcours de « vérification » des connaissances.

Aussi le diocèse de Sion proposera-t-il, à partir de la rentrée scolaire de cet automne, le sacrement de la confirmation dès l’âge de 11 ans. Mais ce sacrement sera suivi d’un parcours proposé jusqu’à la majorité et fait d’activités intergénérationnelles au cours desquelles les jeunes auront l’occasion de grandir dans leur foi.

Le tout pourra être ponctué par une profession de foi solennelle, devant la communauté, en fin d’adolescence, une fois le jeune prêt à rendre compte de l’espérance qui l’habite et de l’agir chrétien qui parsème ses journées.

Rencontres intergénérationnelles saisonnières

Mgr Lovey, dans les nouvelles orientations catéchétiques qu’il a promulguées tout récemment, insiste sur la transmission. La catéchèse d’un enfant commence bien avant sa naissance, lors de la préparation au mariage de ses parents.

A l’aide de quatre rencontres intergénérationnelles paroissiales par année, le diocèse de Sion espère que les fidèles prendront conscience que la catéchèse est l’affaire de tous, parents, grands-parents, parrains, marraines, et pas seulement une matière encore peu ou prou abordée à l’école en Valais.

Changer de paradigme

Les deux diocèses romands nous invitent donc à un réel changement de paradigme : ce n’est plus l’âge des artères qui est déterminant, mais bien celui de l’esprit. Et quand bien même, ce n’est pas parce que je ne connais pas forcément le dogme de la transsubstantiation sur le bout des doigts que je n’ai pas droit au cadeau de la grâce de Dieu. Au fond, ce serait faire bien peu de cas de cette grâce que de ne pas croire qu’elle va elle-même être un guide pour éclairer quelqu’un au sujet des mystères de la foi, et que leur totale compréhension préalable ne précède donc pas nécessairement la réception de cette force venue de Dieu.

Une méga-confirmation diocésaine

Suivant le modèle de plusieurs diocèses français, Mgr Jean-Marie Lovey a décidé d’une grande confirmation diocésaine à la Pentecôte 2018, histoire de permettre à celles et ceux qui seraient en parcours vers la confirmation tout en ayant dépassé l’âge de 11 ans  de pouvoir vivre ce sacrement. Ce sont plus de 3000 confirmands qui sont attendus au CERM de Martigny l’an prochain pour un événement qui les marquera au moins autant que la petite croix d’huile que leur front recevra ce jour-là.

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