Laurine Moulin: «Dieu, c’est la Beauté dans ma vie»

Laurine Moulin:  «Dieu, c’est la Beauté dans ma vie»

A 21 ans, Laurine Moulin est directrice de chœur et future chanteuse professionnelle. Sa foi en Dieu repose sur «la beauté des choses aussi inutiles qu’essentielles» – tels que le chant et l’art sacré. C’est ce qui donne du sens et de la cohérence dans sa vie.

PAR CATH.CH
PHOTOS : GRÉGORY ROTH, THÉOPHILE BLOUDANIS

Amoureuse de la musique classique et chorale

Née à Martigny en 1999, Laurine Moulin baigne dans le chant depuis son plus jeune âge. Elle prend ses premiers cours d’orgue vers quatre ans déjà. « Ma maman était organiste amateur, précise-t-elle. A quatorze ans, je suis partie étudier l’allemand dans le Haut-Valais. Et c’est dans une école de chant à Brigue que j’ai eu un énorme déclic : je suis tombée amoureuse de la musique classique et chorale. La musique, c’est mon truc, et c’est cela que je vais faire. Sans vraiment savoir si j’allais en faire de ma vie. »

A ce moment-là, elle arrête l’orgue, parce qu’elle débute le Collège à Saint-Maurice. Parallèlement, elle s’inscrit au Conservatoire de Sion. Elle joue du violon pendant quelque temps, mais se concentre surtout sur le chant et la direction. Ces années de Collège, de 2014 à 2019, sont pour elle une période assez intense, avec une formation en tous points : intellectuelle, musicale, mais aussi humaine et spirituelle.

« Cela m’a permis d’évoluer et de grandir dans ces domaines-là. Mais il était de plus en plus clair que je voulais faire de la musique mon métier, même si je me rendais bien compte que c’est un « choix dangereux ». » Après le Collège, Laurine s’inscrit donc en cours pré-professionnel à Sion, une année de formation pour se préparer aux examens d’entrée aux Hautes écoles d’art.

Se rendre proche et faire du bien

« Pendant cette année-là, mon idée était aussi de me rendre proche des gens et de leur faire du bien. Pas très étonnant : à la maison, on m’appelle le Saint-Bernard. Il y a de nombreuses anecdotes à ce sujet : depuis toute petite, j’ai toujours eu le souci des autres, avant de me soucier de moi-même souvent. Je suis très sensible à ce que ressentent les autres, et j’ai souvent envie de décharger les autres de leur fardeau. »

Elle effectue des stages en soin dans des homes de la région. « J’ai été marquée par l’histoires de vie des résidents. Parfois, ils en avaient les larmes aux yeux. Dans leur histoire, ils finissent souvent par parler de Dieu. C’était vraiment beau, même s’il ne m’était pas toujours possible de mettre une barrière émotionnelle. L’expérience fut belle, mais c’est la musique qui m’appelle, et je ne peux pas faire autrement. »

En 2020, elle réussit les examens à la Haute école de Berne, mais faute de places, elle commence des études de musicologie et d’histoire à l’Université de Fribourg, tout en prenant des cours de direction avec Jean-Claude Fasel et des cours de chant avec Jean-Luc Waeber. En 2021, elle est prise à la Haute école de Genève et va démarrer son cursus professionnel en
septembre. Son objectif est de faire de l’opéra.

La foi: une question de cohérence

Laurine redécouvre le sens de la foi, pendant sa préparation à la confirmation. Elle commence à se poser des questions de cohérence. « Pourquoi est-ce que je fais ma confirmation ? Pourquoi vais-je à la messe ? Parce que j’y ai trouvé du sens et de l’importance. Même si, comme tout le monde, j’ai eu des détours dans ma foi, des hauts et des bas. »

Pour la Valaisanne, la foi n’est pas un ensemble de règles et d’impératifs. Mais pour savoir qui elle est vraiment, la chanteuse a eu besoin de faire le lien entre ce qui se passe dans sa vie et ce qui fait sens. « Pourquoi fais-je de la musique ? Est-ce que ce n’est pas simplement me faire du bien parce que j’aime chanter ? Et j’ai fini par trouver : Dieu, pour moi, c’est la Beauté. Et la Beauté, c’est l’œuvre de Dieu. C’est ce patrimoine invisible, qui est plus qu’essentiel dans nos vies. Il est dans la beauté de la musique, de l’art, des langues, la littérature, le théâtre, etc. A plus forte raison pour moi qui fais du chant : un art invisible et éphémère. L’Amour du Christ, aussi, est invisible, mais c’est ce pourquoi je veux travailler. »

L’importance de l’inutile et de la beauté

« Je me bats pour que les autres comprennent l’importance de l’inutile et de la beauté. Nous avons été créés avec des sens : c’est pour pouvoir s’émerveiller. Si tout était gris et que nous enlevions l’art et tout ce qui est abstrait, nous serions vides. Il faut donner le goût de la beauté : faire connaître le patrimoine que tous les artistes et compositeurs ont porté siècles après siècles. Ma foi se repose sur l’inutile de la beauté. Le compositeur suisse Frank Martin résume très bien ce propos : « Chercher à créer de la beauté est un acte d’amour. » Chanter, c’est bien un acte d’amour. »

En août 2019, le Chœur des jeunes de Martigny se reforme et Laurine en prend la direction. L’ensemble compte aujourd’hui 25 membres, de 14 à 30 ans, et anime huit messes par an et quelques représentations. Elle chante aussi une fois par mois la messe baroque avec l’Ecole Maîtrisienne de la Cathédrale de Sion et fait partie d’un quatuor de chant sacré.

Une terre de mission

Durant l’été 2021, elle s’est mise en route sur la Via Francigena, jusqu’à Rome. Ce fut pour elle également une occasion de découvrir la beauté, dans les échanges avec les pèlerins et les hôtes, mais aussi en arrivant dans cette vaste basilique Saint-Pierre, qu’elle qualifie « de véritable œuvre de Dieu faite de mains d’hommes ».

Laurine note que l’Eglise en Occident est en plein changement. « A l’avenir, l’Eglise en Europe ressemblera de plus en plus à une terre de mission. Les chrétiens seront appelés à découvrir la foi autrement, à se recentrer sur l’essentiel. Et l’Eglise devra se renouveler. Cela ne veut pas dire de changer son discours de fond, son Evangile et ses fondements, mais de changer son organisation et ses structures, afin d’être davantage missionnaire. »

Un patrimoine culturel et millénaire

Malgré les crises et les scandales que traverse l’Eglise, Laurine continue à croire. Pourquoi ? « Parce que Dieu nous a donné son Fils. S’Il a fait ce grand sacrifice, nous pouvons bien faire de petits sacrifices. Cet homme qui a donné sa vie pour nous et nos péchés. Si cela s’est passé il y a deux mille ans et que les gens ont continué à croire ; si tout ce patrimoine culturel et spirituel, cette tradition millénaire, ce chant sacré ont subsisté, ça ne peut juste pas être du vent. »

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