Le mariage, une vocation?

Le mariage, une vocation?

Par Thierry Schelling
Photo : Ciric
Le mot « nullité » apparaît deux fois (numéro 244) dans Amoris Laetitia, pour démontrer comment le pape François l’a facilitée canoniquement par des allègements de procédures et une plus grande responsabilité portée par l’évêque vis-à-vis des couples de son diocèse 1. Le mot mariage, lui, revient plus de 200 fois ! Cependant, Amoris Laetitia n’est pas une exhortation sur le mariage mais, comme le dit le titre, sur l’amour dans la famille. On l’aurait presque oublié au vu de son traitement dans les comptes rendus des médias, les polémiques entre cardinaux ou même les propositions diocésaines pour mettre en pratique cet énième texte du magistère…

Une phrase clé du texte, mais également de la pensée du magistère, et de sa tradition semper reformanda (toujours à réformer), ancre et détermine tout à la fois ce que devraient être (à l’avenir ?) les mariages catholiques : « La décision de se marier et de fonder une famille doit être le fruit d’un discernement vocationnel » (n. 72). Tout est là : un fruit, d’abord. C’est-à-dire la conséquence, la maturation d’un vécu confronté graduellement à l’altérité de l’autre, et élagué par la « petite mort » (sic) de bien des phantasmes, rêves et chimères de la vie à deux, pour accueillir le « vrai réel » et « faire avec ». De fait, les couples qui se présentent à la cure pour demander le mariage vivent ensemble avant, à 99 % ! Ils se connaissent, donc. Mais alors pourquoi la demande de passer devant l’autel ? Sentent-ils qu’il leur manque quelque chose, quelqu’un ? Dans cette cohabitation pré-mariage, ont-ils les outils nécessaires pour faire naître le fruit de ce vécu en une vocation ? Car le pape parle de discernement vocationnel. Pour ce faire, et selon l’école ignatienne, il convient de remplir certaines conditions : mettre le Christ au cœur et devant tout ; ciseler une envie et une volonté personnelles à vouloir ce que Dieu veut pour moi, pour nous ; se prêter à la relecture de vie, dans toute sa « quotidienneté », et ce, avec un-e accompagnateur/-trice ; s’extraire du présent pour, comme dans le cadre d’une retraite, se concentrer sur la Parole de Dieu, etc. Nos CPM 2 y ressemblent-ils ?

On dit que l’Eglise catholique n’a pas une théologie du mariage, mais de sa célébration, canonique et rituelle… Cette exhortation veut ranimer l’amour en famille. Et ouvre plus de questions qu’elle n’en solutionne. Tant mieux. Mais une ultime invitation de François nous met en garde : « Rien de tout cela n’est possible si l’on n’invoque pas l’Esprit Saint, si l’on ne crie pas chaque jour pour demander sa grâce, si l’on ne cherche pas sa force surnaturelle, si l’on ne lui demande pas [de] consolider, […] orienter et […] transformer [l’amour conjugal] » (no 164). Eh bien, il y a matière à discerner !

1 Mitis Iudex Dominus Iesus et Mitis et misericors Iesus, datant du 15 août 2015.
2 CPM : Cours ou Chemin de préparation au mariage.

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