Le Mois missionnaire extraordinaire

Le Mois missionnaire extraordinaire

Octobre a été décrété par le pape François «Mois missionnaire extraordinaire». L’occasion de réfléchir sur le sens actuel du mot «mission».

Par Nicolas Maury
Photos: Missio, Nicolas Maury, DR

Martin Brunner-Artho, directeur de Missio.

« Chaque année, octobre est un mois missionnaire dans l’Eglise catholique », explique Martin Brunner-Artho. « En 2019 – année du centenaire de la lettre apostolique Maximum illud du pape Benoît XV qui se détourne des tendances colonialistes –, le pape François a voulu le qualifier « d’extraordinaire » pour nous inviter à être de plus en plus Eglise en mission. » Pour assurer le bon déroulement de cet événement, le directeur de Missio Suisse, l’une des 118 œuvres pontificales missionnaires nationales, a travaillé d’arrache-pied avec son équipe. « Le thème « Baptisés et envoyés : l’Eglise en mission dans le monde » a de quoi nous inciter à réfléchir au sens de notre engagement », enchaîne Sylvie Roman. 

Aujourd’hui coordinatrice du bureau romand de Missio, elle a l’expérience du terrain. « Après mes études, je rêvais de vivre une expérience dans un pays dit du Sud. Grâce à l’association Voyage-Partage, je me suis retrouvée à Madagascar, accueillie par des sœurs franciscaines. » Plus tard, c’est en Zambie qu’elle s’est rendue, avec des motivations fort semblables : « Aller à la rencontre d’une autre culture et découvrir d’autres visions du monde. Si certains partent pour apporter quelque chose au Sud, j’y allais davantage avec l’envie de m’imprégner d’un air d’Afrique pour être en mesure ensuite de rapporter un bout du Sud au Nord. »

Pour Sylvie Roman, le thème « Baptisés et envoyés » nous invite à la réflexion.

 

«Etre un exemple»

Avant son départ, Sylvie a été rendue attentive à la nécessité d’être à l’écoute. « Il ne s’agit pas d’apporter nos compétence telles quelles, mais de les mettre en commun avec celles des personnes avec qui nous allons collaborer. » 

Ces propos, Mgr Robert Miranda les souligne. En 2005, il est devenu le premier évêque du diocèse de Gulbarga en Inde, après en avoir été le premier prêtre catholique. « C’est en 1978 que j’ai été ordonné prêtre et je suis resté quatre ans dans la région de Mangalore. L’évêque m’a choisi pour y être le premier missionnaire de Gulbarga. Ce fut un choc de devoir quitter Mangalore. Ma valise n’était pas grande. J’avais trois habits, une Bible et quelques livres. » Les débuts furent difficiles. « Il y avait environ vingt catholiques et on se rencontrait le dimanche. Tout a commencé par des sourires et des « namasté » en joignant les mains. L’évêque avait insisté : la première année tu ne fais rien, tu étudies les lieux. J’ai donc observé la culture des gens, leur façon de vivre, leurs besoins. » 

Sa compréhension change peu à peu. « Au début, je pensais que la mission était de proclamer la Bonne Nouvelle et surtout de gagner de nouveaux catholiques. Aujourd’hui, étant donné toutes les bonnes choses que le Seigneur a faites pour moi, je dois témoigner que Dieu, notre Père, nous aime. Chacun de nous. La mission c’est se mettre au service. Etre un exemple. »

Le symbole de sainte Thérèse de Lisieux

A des milliers de kilomètres de l’Inde, Mgr Jean Scarcella, abbé de Saint-Maurice et responsable du dicastère Mission de la Conférence des évêques suisses, relève : « Avant de partir loin, la mission commence devant notre porte. Ensuite elle s’étend au monde en faisant connaître le Christ, premier missionnaire, en témoignant de la beauté et de la force de son Eglise. Et Dieu sait si c’est important aujourd’hui à travers toutes les blessures qu’elle a commises et qu’elle doit subir aussi. » Pour Mgr Scarcella, un élément constitue encore un préalable : « Avant le pas de la porte, il y a d’abord moi-même et ma rencontre personnelle avec Jésus. C’est ensuite que je peux vivre une rencontre communautaire. L’engagement chrétien n’a de sens que dans l’implication que j’ai moi-même au milieu de tout le peuple chrétien. »

Martin Brunner-Artho a un discours similaire : « Au cours de mes expériences en Bolivie et au Kenya, nous avons longtemps considéré la mission comme une activité dans les pays du Sud. Ici en Suisse, nous avons tendance à parler de la pastorale. Au mieux, de nouvelle évangélisation, mais rarement de mission. Au cours des dernières années, cette division a commencé à se dissoudre progressivement. On parle beaucoup plus de mission dans son propre pays. Le pape François, qui utilise le terme de manière détendue, y a sans doute beaucoup contribué. » Comme le rappelle Mgr Jean Scarcella, sainte Thérèse de Lisieux est la patronne des missions. « Elle n’est jamais sortie de son monastère, mais elle a sans cesse porté ce souci de l’évangélisation en priant pour le monde. Or, sa fête est le 1er octobre, jour qui lance ce mois extraordinaire. C’est un symbole très fort. » Au quotidien, de nombreuses initiatives sont mises en place en Romandie. « Ce mois est l’occasion pour chacun de redécouvrir sa vocation missionnaire au quotidien. Par exemple, le vendredi 4 octobre, avec des jeunes du diocèse de Sion, nous profiterons de la Foire du Valais à Martigny pour aller à la rencontre des gens et leur témoigner ce que François nous rappelle dans Christus Vivit : “Le Christ t’aime, Il te sauve et Il est vivant !” La soirée se poursuivra par un concert de pop-louange et un temps d’adoration à l’église de Martigny-Ville », indique Aline Jacquier, jeune catholique valaisanne engagée.

Au-delà des frontières

« Je pense que la mission est avant tout rencontre, dialogue, lien, échange et partage, conclut Sylvie Roman. On apprend les uns des autres, on prend conscience que nous sommes une seule et même grande famille sur cette Terre, notre maison commune à préserver. Avec Dieu, il n’y a pas de frontières. »

Pour en savoir plus :
https://getauftundgesandt.ch/fr/agenda/ 
https://getauftundgesandt.ch/fr/decouvrir/

La mission est aussi à notre porte.

 

Trois temps forts

Comme l’explique Martin Brunner-Artho, trois éléments principaux sont prévus sur le plan national durant ce mois d’octobre. « Pour l’ouverture, nous avons cherché un lieu à valeur symbolique et nous avons trouvé le baptistère de Riva San Vitale au Tessin, le plus vieux de Suisse. Il nous permet de nous placer au début de la chrétienté sur le territoire suisse et de nous appuyer sur la richesse de ce lieu pour démarrer le Mois missionnaire extraordinaire. »

Riva San Vitale, où s’ouvre le Mois missionnaire extraordinaire.

Deuxième moment fort : le 20 octobre. « Une Eglise qui n’annonce pas la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ est morte. C’est pourquoi les Eglises locales se soutiennent mutuellement, afin que chacune puisse vivre sa mission en échangeant des ressources tant matérielles que spirituelles. C’est le but du Dimanche de la Mission universelle: un dimanche de solidarité missionnaire et fraternelle ! »

Quant à la conclusion de ce mois, elle n’en sera pas vraiment une. « Voulons-nous revenir à la vie quotidienne à la fin du mois ? Non, parce que le MME se veut « un temps extraordinaire de prière et de réflexion sur la mission ad gentes » afin de vivre ensuite notre mission avec un élan renouvelé. C’est pourquoi il n’y aura pas de clôture, mais un envoi ! C’est comme la fin d’une messe. Le « ite missa est » n’est pas une conclusion, mais un envoi des fidèles dans toutes les nations et réalités de la vie. »

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