Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur de l’Entremont (VS), mai 2020
Photo: Annelyse Bérard
Bien chères et bien chers,Il y a quelque temps, en Carême, nous avons lu cet Evangile : « Quand tu pries, ne te tiens pas debout dans la synagogue ou aux carrefours, mais retire-toi et ferme la porte. Prie ton Père qui est présent dans le secret… » Nous étions loin d’imaginer que les événements allaient nous prendre au mot ! J’écris ces lignes à l’heure de Pâques, mais lorsque vous les lirez, nous serons certainement encore confinés chez nous.
Nous vivons tous un moment difficile. Notre vie a basculé dans une nouvelle dimension. Au début, je me disais : ce que nous vivons, ce n’est « pas normal ». J’ai alors senti dans mon cœur une autre réponse. Non, ce qui n’est « pas normal », c’est la vie que nous menions AVANT ! Courir au travail, bouger sans cesse jusqu’au bout du monde, encombrer notre dimanche de mille et une choses… Ça allait trop vite, et nous avons été arrêtés.
Tout cela nous fait réfléchir. On doit se poser seul, face à soi-même. Et on se rend compte que de cette tragédie il y a quelque chose qui émane, de l’ordre du bien. On retrouve des gestes d’entraide. On réapprend à vivre simplement en famille. On redécouvre notre nature et nos jardins.
L’épidémie a imposé des distances d’hygiène dans les rencontres, mais les cœurs se sont rapprochés. J’ai discuté profondément avec des personnes qui me semblaient éloignées de moi. C’est comme si l’épreuve avait aplani certaines méfiances. J’ai découvert chez beaucoup une foi que je croyais morte et qui est bien vivante. Il y a un « plus » dans nos rencontres, un parfum de sacré. C’est précieux d’entendre dire : « Tu me manques ! », « Courage ! » « Tiens bon ! ».
Ce sont ces mots que nous voudrions vous dire, nous, Réné-Meinrad, Gildas et moi-même, prêtres de vos paroisses : Vous nous manquez beaucoup, et pourtant vous êtes là, dans nos messes et dans nos prières. Nous vous portons chaque jour, en particulier ceux qui souffrent, qui angoissent ou qui vivent péniblement la solitude.
Je croyais que célébrer la messe sans aucun fidèle serait triste. Mais j’ai pris conscience du monde qui habitait mon cœur de prêtre. Auparavant, je me concentrais sur ceux qui étaient là. Maintenant je prie davantage pour tout le monde, sans faire de classement, ou d’exception. Je demande la grâce que chacun reçoive ce dont il a besoin au fond de lui-même.
J’aimerais surtout vous dire ma foi que Dieu vous aime énormément, qu’il est avec vous, à vos côtés. Je crois en son amour, capable de toujours tirer un bien plus grand d’un moment difficile. L’Amour transforme les ténèbres en lumière, le désert en jardin, la tristesse en joie. C’est cela Pâques, c’est cela la résurrection.
Nous nous réjouissons tellement du jour où nous pourrons à nouveau célébrer ensemble ! Quelque chose me dit que ce dimanche-là, ce sera grande fête, apéro compris ! En attendant, mettez bien ce temps à profit pour cultiver votre cœur et y planter toutes sortes de bonnes choses. Nous les récolterons le temps venu.
A très bientôt, courage et confiance !
Joseph Voutaz ainsi que Gildas Chibozo et René-Meinrad Kaelin