Soeur Marie-Lucile: la joie de transmettre

Soeur Marie-Lucile: la joie de transmettre

C’est une journée maussade et pluvieuse. La vallée du Rhône est couverte d’une masse de nuages gris qui masquent les sommets des montagnes. Cette journée va être illuminée par un cadeau inattendu: ma rencontre avec Sœur Marie-Lucile, pétillante religieuse de la Sainte-Croix d’Ingenbohl.PROPOS RECUEILLIS PAR VÉRONIQUE BENZ
PHOTOS : BÉATRICE DESLARZES

Sœur Marie-Lucile me reçoit à Sierre dans l’appartement qu’elle partage avec deux de ses consœurs. Je découvre une religieuse au regard vif, au sourire lumineux, et qui malgré les ans a gardé une âme d’enfant. Le temps de l’interview, elle m’ouvre les portes de son royaume: une grande pièce qui lui sert à la fois de chambre, de bureau et de salle de cours. En y entrant, j’ai l’impression de découvrir la caverne d’Ali Baba. D’innombrables dessins et bricolages ornent les murs et les fenêtres. Sur les bibliothèques sont entassés des livres, du matériel d’enseignement, des jeux pédagogiques et des tables de calcul. Sur son bureau sont déposés pêle-mêle des boîtes, des cailloux, des coquillages… chacun de ces objets évoque un souvenir. Des souvenirs, Sœur Marie-Lucile en a à revendre. Les anecdotes fusent, parfois une date ou un nom lui échappent. «Les années sont là même si j’ai l’impression d’être toujours une jeune enseignante.» Marie-Laure (de son nom de baptême) est l’aînée de cinq filles. «J’ai eu la chance d’avoir des parents très ouverts et attentifs. Après ma première communion, j’ai eu une otite qui a duré un mois. Pendant que j’étais malade, mon papa a eu l’idée de construire une grotte de Lourdes dans le jardin. Il disait: lorsque Marie-Laure sera guérie, la grotte sera finie. Le premier jour où j’ai pu sortir, maman m’a effectivement montré la grotte.» Sa vocation, Sœur Marie-Lucile l’a ressentie à l’âge de 10 ans, à la cathédrale de Sion. «Par la suite, cet appel a été confirmé. Cet enthousiasme à suivre le Christ ne m’a plus quittée.»

Elle évoque ses études en sciences économiques et sociales à l’Université de Fribourg et les années d’enseignement qui ont suivi. «J’ai enseigné la comptabilité, l’arithmétique commerciale, le droit, l’économie politique et les mathématiques. Les maths modernes, c’était fantastique !» Elle parle de ses anciennes élèves avec beaucoup d’affection. Plusieurs d’entre elles viennent aujourd’hui lui con er leurs enfants pour des cours d’appui. Une quinzaine de jeunes bénéficient encore de son charisme d’enseignante.

Comme enseignante, quelle est la plus grande leçon que vous avez essayé de transmettre à vos élèves ?

«Le respect des autres, à l’exemple du Christ. Il y avait deux écoles de commerce à Sierre, celle des filles et celle des garçons. On nous a demandé de les fusionner en une seule. C’est celle des garçons qui est restée, mais dans notre école des Buissonnets, nous avons mis en place un enseignement basé sur la méthode Montessori.» Elle se souvient des élèves qui arrivaient à l’école le regard triste. «Quelques semaines chez nous et ils se remettaient à sourire et à revivre. J’ai apprécié cette méthode d’apprentissage qui respectait le rythme des élèves. C’était presque une école de rêve.» Sœur Marie-Lucile se rappelle avoir eu comme élèves des futurs séminaristes. «Les jeunes qui n’avaient pas fait le collège étudiaient une année ou deux chez nous avant de rentrer au séminaire.»

Comment une religieuse âgée peut-elle encore être utile?

«Elle ne sert à plus rien», me répond-elle du tac au tac. Puis elle se met à rire et continue de manière plus sérieuse: «Toute personne est utile par la prière et l’offrande même dans la maladie et la souffrance.» Sœur Marie- Lucile est remplie d’énergie. Ce qui la motive: «Le Seigneur, depuis le jour où j’ai ressenti son appel.» Se laisser aimer par Dieu et aimer les personnes, voilà tout le leitmotiv de la vie de Sœur Marie-Lucile. «Depuis que je vis à Sierre, j’ai connu sept curés. Chacun d’eux a eu le souci de nous révéler l’amour de Dieu. Je n’ai jamais été brimée par un prêtre, mis à part celui qui m’a imposé de faire les 30 jours de retraite selon saint Ignace. Mais finalement ces 30 jours ont été un vrai cadeau.»

Si un jeune me demandait comment être catholique en 2016, que lui répondriez-vous?

«Lorsque je rencontre un jeune, j’essaie de cheminer avec lui dans le respect de son projet. Je suis attentive à ce qu’il vit et j’essaie de l’encourager. Je lui conseillerais de s’attacher au Christ, de mettre le Christ au centre de sa vie et ainsi de découvrir l’amour de Dieu.»

Le sourire qui illumine son visage me prouve que c’est ce que Sœur Marie-Lucile a fait ! Et c’est bien là le plus beau cadeau qui nous est offert à Noël  l’amour de Dieu qui s’est incarné dans un enfant!

Bibliographie

Soeur Marie-Lucile Micheloud
Soeur Marie-Lucile Micheloud

Sœur Marie-Lucile est née 
à Sion en 1936, mais est originaire d’Hérémence. Après une maturité commerciale chez les sœurs Ursulines à Sion, elle travaille presque deux ans dans une banque avant d’entrer chez les Sœurs de la Sainte-Croix d’Ingenbohl. Elle étudie trois ans à l’école normale du Sacré-Cœur à Estavayer-le-Lac, puis enseigne une année à Vuadens et trois ans à l’école primaire à Sierre. Elle étudie
les sciences économiques
et sociales à l’Université de Fribourg afin de pouvoir ensuite enseigner à l’école de commerce Les Buissonnets
 à Sierre. Elle quittera cette école en 2002. Jusqu’en 2016 elle est très active dans la paroisse de Sierre notamment au secrétariat et à la rédaction du journal paroissial. Aujourd’hui elle continue
de donner des cours d’appui
à des jeunes et à des enfants.

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