Les chartreux

De nombreuses communautés composées de religieux ou de laïcs sont présentes en Suisse romande, comme autant de témoins de la vitalité et de la diversité de l’Eglise. Ce mois-ci, cap sur les chartreux de La Valsainte qui mènent une vie de prière et de solitude.

PAR PASCAL ORTELLI | PHOTO : JEAN-CLAUDE GADMER

Nom officiel: Ordre des chartreux ou Ordre cartusien.

Fondateur: saint Bruno (vers 1030 – 6 octobre 1101).

Date de fondation: 1084 pour la Grande Chartreuse et 1295 pour La Valsainte.

Sigle: O. Cart.

Devise: « La Croix demeure tandis que le monde tourne ».

Habit : une tunique blanche et une cuculle (scapulaire avec une bande de tissu qui
relie les deux pans) avec capuchon, de même couleur.

Organisation: chaque monastère est dirigé par un prieur élu au service des moines
du cloître (prêtres) et des frères convers.
Les moines du cloître passent la majorité de leur temps en ermitage, véritable « désert à l’intérieur du désert », composé d’une chambre, d’un atelier et d’un jardin où ils prient, travaillent, mangent et dorment. Ils ne sortent de la cellule que pour les activités communes prévues : prière liturgique à l’église, récréation et promenade hebdomadaire.
Les frères occupent une cellule plus petite, sans jardin ni atelier, car une part importante de leur journée se passe dans le lieu où chacun travaille, en solitude, au service de la communauté.

Mission: la contemplation et la prière continuelle vécues dans une consécration totale
à Dieu, en renonçant aux contacts sociaux ordinaires autant que le permettent l’équilibre
des personnes et la charité chrétienne.

Présence en Suisse et dans le monde: La chartreuse de la Valsainte dans le Val de Charmey (FR).
Outre la maison-mère dans le massif de Chartreuse au-dessus de Grenoble, l’ordre compte une vingtaine de monastères dans le monde dont cinq de moniales.

Une particularité: le grand office liturgique de la nuit entre minuit et 2h du matin.

Pour aller plus loin: le film Le grand silence, disponible sur playsuisse.ch

«Etre chartreux, c’est…» par un chartreux de la Valsainte

« Une vie de silence, de solitude pour Dieu, de prière continuelle. Une vie de louange, qui s’étend durant la liturgie de la nuit, lorsque le monde sommeille. Une vie partagée avec des frères, où chaque solitaire accomplit sa tâche, dans la charité mutuelle. Une vie exigeante : comme pour Jésus, le désert est le lieu du combat spirituel. Mais le Christ est notre paix ! Il mène le chartreux dans la solitude pour l’unir à Lui dans un amour intime, qui se diffuse dans la prière pour tous les hommes, surtout les plus souffrants. »

Une église toute neuve, pari sur l’avenir

La communauté de Gland était en fête dimanche 13 février pour la consécration de sa nouvelle église. Fruit d’un travail de longue haleine, moderne et fonctionnelle, elle permettra aux catholiques de Gland et de toute l’Unité pastorale (UP) Nyon-Terre Sainte de se rassembler et de se ressourcer pour être témoins du Christ au cœur du monde.

PAR GENEVIÈVE DE SIMONE-CORNET | PHOTOS : PHILIPPE ESSEIVA

Elle a fière allure, l’église Saint-Jean Baptiste qui conjugue l’acier, le béton, le bois et le verre dans une belle harmonie. Quel signe d’espérance ! Il en a fallu du professionnalisme, de l’enthousiasme, de la persévérance et de la foi pour mener à bien ce projet ! Aujourd’hui, il faut habiter cette église et la faire vivre. Pour qu’elle devienne un lieu ouvert à tous, accueillant et stimulant.

Consacrer une église est un événement rare à notre époque, marquée par la crise de l’Eglise et la désaffection des lieux de culte. Pour Gilles Vallat, président de la paroisse de Nyon, c’est « un véritable défi, une folie même » dans une société matérialiste et individualiste. Et un pari sur l’avenir : « Oui, malgré les vicissitudes de notre époque, nous pensons que dans trente, cinquante ans, voire un siècle, il y a aura toujours des chrétiens qui se réuniront à Gland pour célébrer le Christ ».

La messe de consécration, célébrée le 13 février par Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg, fut sobre, joyeuse et recueillie. L’occasion de remercier tous les acteurs d’une belle aventure et de se réjouir de pouvoir désormais se réunir dans un lieu de beauté et de simplicité qui invite à la prière. Brigitte Besset, présidente du Conseil de communauté, a rendu grâce pour « cette nouvelle église qui a été projet, puis construction et qui devient aujourd’hui maison de prière ». Ce jour, s’il marquait l’aboutissement de nombreux efforts – il a fallu douze ans pour que le rêve devienne réalité –, était aussi un commencement: les paroissiens de Gland-Vich-Coinsins et leurs pasteurs ont les yeux tournés vers l’avenir dans le désir d’être des pierres vivantes de l’Eglise. Car un bâtiment est d’abord au service d’une communauté.

Tisser une histoire

La dédicace transforme un bâtiment en un lieu de culte, un lieu où Dieu est présent. La nouvelle construction devient, selon le Père Norbert Hennique, directeur du Service national français d’art sacré, « un signe de transcendance dans notre société sécularisée. Pour les uns un témoin du passé, pour d’autres un lieu de prière, de recueillement, de célébration toujours actuel ». Ni salle de spectacle ni musée, mais des murs au service d’une communauté vivante qui y trouvera de quoi nourrir sa foi et témoigner. Et qui y tissera une histoire au gré des rassemblements et des sacrements.

Pour l’architecte Flavio Boscardin, du bureau Coretra à Nyon, une église « doit pouvoir transmettre du bien-être, des émotions. Pour certains, des rites de passage et des souvenirs seront liés à ce lieu ». L’artiste, Alain Dumas, a relevé la présence de trois colombes, symboles de l’Esprit Saint, qui soulignent l’idée de cheminement dans l’espace liturgique : la première, sur la cuve baptismale, dans le narthex, rappelle le baptême et invite à entrer ; la seconde, sur l’ambon, souligne l’élévation de la Parole ; la troisième oriente la porte du tabernacle vers l’autel. Au cours de son travail s’est dégagée, sur la face avant de l’autel, une veine grise qui évoque l’hostie partagée – un « cadeau ».

Une messe riche de sens

En ouverture de la célébration de la dédicace, le curé modérateur, Jean-Claude Dunand, a salué « une journée cadeau » pour la communauté de Gland, la paroisse et l’Eglise. A suivi une liturgie qui a comporté nombre d’étapes riches de sens. Au début, Mgr Morerod s’est rendu à l’entrée de l’église pour déposer une boîte en inox contenant des documents – les plans de l’église, des noms et un numéro spécial de L’Essentiel – dans une cavité recouverte d’une pièce en bronze gravée. Pour dire à ceux qui nous suivront qui est à l’origine de ce projet.

Puis l’évêque a béni l’eau de la cuve baptismale et en a aspergé l’assemblée, l’autel et l’ambon. Après la liturgie de la Parole, le rite de la dédicace a commencé par la litanie des saints. Ont suivi la prière de la dédicace, l’onction de l’autel et des murs, l’encensement de l’autel et l’illumination de l’autel et de l’église. La célébration, animée par une chorale de jeunes, fut sobre, avec la présence de trois anciens gardes suisses en uniforme.

Signes de Dieu

Dans son homélie, Mgr Morerod s’est interrogé : « Si Dieu est partout, pourquoi bâtir une église ? Pour que le peuple se rassemble au nom de Dieu et parce que l’édifice que Dieu bâtit, c’est nous : nous sommes l’Eglise, le corps du Christ, nous sommes des signes de Dieu, des signes paradoxaux. Et pourtant, Dieu agit à travers nous et à travers cette église. »

Pourquoi ? « A cause de nous, car nous ne connaissons le monde et Dieu que par nos sens. Et Dieu en tient compte, c’est pourquoi il nous donne des signes : la beauté de la création qui révèle sa grandeur ; cette église ; le peuple rassemblé ; et le signe le plus grand, frappant, complet, inattendu, paradoxal : le Christ. C’est pour nous que tous ces signes existent, car passant par eux, Dieu se met à notre niveau parce qu’il nous aime. Tellement qu’il nous rend partie prenante de son œuvre. C’est un signe d’espérance qu’il choisisse des signes comme nous et comme cette église au travers desquels il peut manifester sa présence. » Et cette église « ne prend sens et vie que si Dieu s’y trouve ».

A l’issue de la messe, la partie officielle, dans la salle communale, fut l’occasion pour les autorités politiques de se réjouir et de remercier les catholiques de Gland et environs pour cette initiative au service de la population (lire l’encadré ci-dessous).

Deux concerts donnés l’après-midi dans l’église par le chœur gospel Accroch’chœur de La Lignière et le chœur mixte de Gland « Le Chêne » ont clôturé ce jour de fête ensoleillé au-dedans comme au-dehors.

Au service de tous

Trois salles sous l’église, accessibles de façon indépendante et équipées d’une cuisine, de sanitaires et d’un parking, serviront de lieux de réunion pour les paroissiens. Elles pourront aussi être louées pour accueillir des expositions, des rencontres, des conférences ou des concerts. L’Association culture et rencontre de Gland et environs, fondée en 2021 sous l’impulsion du comité de pilotage, gérera les réservations. Association à but non lucratif, apolitique et aconfessionnelle, elle veut encourager la convivialité.

GdSC

Retour aux sources

En forme de cône tronqué, la nouvelle église de Gland peut accueillir 250 fidèles. Sa forme ronde rappelle les églises paléochrétiennes – un retour aux sources – et facilite la communion. Si sa façade est recouverte de plaques métalliques, l’intérieur est en bois. On y pénètre de deux côtés : par le parvis sud, avec la porte principale et des escaliers ; et le parvis nord, qui permet d’entrer de plain-pied. L’église bénéficie d’un éclairage naturel avec un interstice entre le cône et la toiture et, derrière l’autel, un puits de lumière.

Le mobilier liturgique se veut d’une noble simplicité. En marbre Bleu de Savoie, il est l’œuvre du sculpteur français Alain Dumas. On pénètre dans l’église en passant par le narthex où nous accueillent les fonts baptismaux – circulaires, ils permettront le baptême des bébés par immersion; une fontaine y évoque l’eau source de vie.

L’autel est orné de motifs sphériques évoquant la symbolique romane du cercle (l’univers céleste) qui s’inscrit dans la forme carrée (le monde terrestre). Le siège de la présidence forme, avec l’autel et l’ambon, un triangle équilatéral rappelant la Trinité. Il est en bois de noyer, comme la croix, en forme de Tau, reprise de l’ancienne chapelle.

GdSC

Portrait de Sœur Marie Bénédicte…

… de la communauté du Monastère de Géronde

PAR LAURA PELLAUD
PHOTOS : LDD, MARIE-FRANÇOISE SALAMIN

Sœur Marie-Bénédicte, vous êtes l’une des douze sœurs qui forment la communauté de Géronde, comment avez-vous choisi de la rejoindre ?

Avant de choisir, j’ai été choisie. A travers la lecture de l’Evangile, Jésus-Christ s’est révélé comme l’Amour qui peut combler un cœur, remplir une vie. Des rencontres, des événements, m’ont orientée vers la vie monastique et, plus précisément, vers Géronde. Un jour, après avoir découvert, par la lecture, saint Benoît et la vie cistercienne, je suis venue pour «voir»…

Et qu’avez-vous trouvé ?

Des sœurs saisies, elles aussi, par l’amour du Christ, appelées à le préférer à tout. C’est lui qui continue de nous rassembler, qui suscite l’entraide, le partage, le pardon mutuel, afin que nous soyons un signe d’unité et de communion. Ce vivre ensemble pourrait être étouffant si le silence n’était pas là pour assurer à chacune un espace intérieur personnel pour vivre avec Dieu une relation unique. En ce qui me concerne, je suis comme aimantée par la prière de Jésus au désert ou sur la montagne dans la solitude et dans la nuit. Dès mon entrée au monastère, j’ai aimé le lever très matinal et la prière prolongée qui précède le lever du jour, vécue d’abord ensemble à l’église puis, dans l’écoute personnelle de la Parole de Dieu. Cette longue veille prépare à la célébration de l’eucharistie et oriente la journée.

Cette journée, de quoi est-elle faite ?

Ceux qui entendent la cloche de Géronde savent que des temps de prière jalonnent la journée. Mais le travail, y compris le travail manuel, est tenu en haute estime dans notre tradition spirituelle. Il est éclairé par l’exemple de Jésus qui s’est présenté comme « celui qui sert ». Au monastère, chacune accomplit le travail qui lui est confié dans les différents services de la maison ou bien dans la fabrication des hosties, l’accueil des hôtes, la vente du vin. Nous ne sommes plus en mesure de cultiver nous-mêmes les vignes mais le travail reste une composante de nos journées, il est un lieu où le don de soi donne leur poids de vérité aux paroles prononcées dans la prière.

Quelles autres dimensions de votre vie aimeriez-vous encore évoquer ?

En ce moment, beaucoup se réjouissent de voir l’Eglise se lancer dans une démarche synodale faite de dialogue et de concertation. Or, cette manière de consulter la communauté en vue de prendre une décision est prévue par saint Benoît dans sa Règle écrite au VIe siècle. Cela vaut au niveau du monastère et au niveau de notre Ordre. Un autre point est la question de l’environnement. Le monastère est établi dans la solitude, on y vit en silence, dans un climat de simplicité qui doit caractériser les bâtiments, la prière, le style de vie. Nous veillons aussi à la sobriété dans l’usage des moyens de communication tout en restant très à l’écoute des souffrances et des attentes de notre monde pour leur donner voix dans la prière.

Pouvez-vous rappeler un souvenir ?

Je n’ai jamais oublié un certain dimanche d’été où, à la tombée de la nuit, au moment de fermer la porte du monastère, j’ai vu arriver un jeune homme qui gardait un air d’enfant. Tout en lui, son allure, ses vêtements usés, son sac de pèlerin, m’ont fait penser à saint Benoît Labre, mais un Benoît Labre très propre ! Je lui ai proposé d’entrer au parloir et, tout de suite, il m’a dit qu’il était venu pour poser une question. Il s’appelait Kevin, venait d’Australie et faisait le tour du monde à pied avec sa Bible pour seule richesse. Il la feuilletait déjà et, arrivé au chapitre 22 de l’Evangile selon saint Luc, il posa le doigt sous le verset 19 : il (Jésus) dit : « Ceci est mon Corps donné pour vous. » Il voulait savoir quel sens les catholiques donnent à ces paroles. Dans son Eglise, issue de la Réforme, il avait appris qu’elles ont un sens purement symbolique. Mais cela le laissait insatisfait, il pressentait que Jésus avait voulu dire davantage. J’ai donc essayé de lui dire, tant bien que mal, notre foi en la présence réelle de Jésus-Christ dans l’eucharistie. Un éclair de joie a brillé dans ses yeux et nous sommes restés en silence. Puis, je lui ai proposé de manger et de faire halte au monastère pour la nuit. Non, il n’avait pas besoin de cela. Il avait reçu ce qu’il cherchait et, sans tarder, il est reparti, enveloppé par la grande paix du soir. Le souvenir de cette rencontre reste gravé en moi.

Pourquoi quittent-ils la vie consacrée ?

Ils ont dit oui à Dieu en pensant que c’était pour la vie. Il arrive pourtant que certains religieux et religieuses discernent que leur place n’est plus là. Eclairage sur les motivations qui les poussent à quitter la vie consacrée et les implications de la remise en cause de leur engagement.

PAR MYRIAM BETTENS | PHOTOS : JEAN-CLAUDE GADMER, PXHERE, DR

Dieu écrit droit avec des lignes courbes.

«Les responsables de l’Eglise ne sont pas vraiment préparés à ce type de situations», affirme Maxime Morand, consultant en ressources humaines et lui-même prêtre ayant quitté le ministère. De nombreuses personnes se sont adressées à lui au moment de quitter une institution religieuse. Pourtant, « cette sortie est canoniquement assez simple à effectuer », se souvient Geneviève*. « La supérieure générale m’a déliée de mes vœux. Elle a également communiqué à l’évêque ma décision de partir. Pour ma part, j’ai rencontré ce dernier au tout début de mon temps d’exclaustration », poursuit-elle. Après plus de trente ans de vie communautaire, elle décide de quitter son Institut qui lui accorde trois ans afin de vérifier que sa décision est juste. Des deux côtés, « il y a un processus de deuil à mener » et cette autorisation à vivre à l’extérieur de sa communauté pour un temps défini fait partie d’un sain(t) cheminement de discernement, juge Sœur Marie-Brigitte Seeholzer, supérieure des Ursulines de Fribourg. «En congrégation, nous osons parler des questions de sortie, de fidélité à notre vocation ou de changement de communauté. Cette démarche me semble importante, à la fois dans une fidélité à soi-même et à l’appel de Dieu.»

Un faisceau de circonstances

« Ma vocation avec le Christ n’est plus dans ce style de vie », reconnaît Geneviève qui refuse dans un premier temps d’accepter cette réalité qui s’impose peu à peu. Elle a également de plus en plus de peine à supporter « de ne pas être simplement Geneviève, témoin du Christ, mais uniquement Sœur Geneviève ». Presqu’à en perdre son identité. Matthieu*, quant à lui, prend conscience qu’il « attendait de la vie religieuse la réalisation de quelque chose qui ne s’est pas donné ». Néanmoins, il reste moine durant plus de vingt ans et ce n’est qu’au moment du premier confinement qu’il reconnaît le sentiment d’oppression et d’enfermement qui le limite. Pour André*, c’est un faisceau de circonstances qui l’ont mené à reconsidérer son choix de vie, dont un important problème de santé. Il quitte sa communauté pour « cet ailleurs où il pourra servir Dieu d’un cœur plus tranquille ». Ces trois anciens religieux considèrent que leur communauté a accepté et accompagné moralement comme financièrement leur choix, ce qui n’est pas toujours le cas.

«Les responsables de l’Eglise ne sont pas vraiment préparés à ce type de situations.»

Maxime Morand
Quitter sa communauté est un choix de vie difficile à évoquer.

Des signes trompeurs

« Du jour au lendemain, je n’avais plus de communauté, plus de travail. Je n’existais plus », raconte Isabelle*. Un douloureux sentiment « d’effacement » qu’elle ne cache pas. La petite communauté de femmes dont elle fait partie traverse alors une crise sans précédent. « A partir du moment où on a cette vocation, on ne veut pas décevoir Dieu, on veut faire sa volonté. Savoir porter sa croix, consentir à des sacrifices fait encore partie de l’enseignement et interpréter les signes qui nous disent de sortir comme une croix à porter mène droit dans le mur. » La jeune religieuse cherche du soutien auprès des frères qui les accompagnent spirituellement. A leurs yeux, c’est elle le problème : elle doit partir. Après le choc de cette annonce, une difficulté plus grande encore se présente. Elle ne peut prétendre au chômage, son emploi auprès des frères n’a jamais été établi contractuellement. En plus de cela, la communauté n’a pas cotisé pour elle à la prévoyance vieillesse. Mis à part Geneviève, dont la communauté a effectué toutes les démarches en ce sens, les autres témoins se sont tous retrouvés au sortir de la vie religieuse avec un trou béant dans l’AVS et le deuxième pilier. Certains d’entre eux ont d’ailleurs eu recours aux conseils de Maxime Morand pour parvenir à une « convention de sortie » avec leur congrégation.

Un texte passé sous les radars

En octobre 2020, la congrégation romaine pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique a publié Le don de la fidélité, la joie de la persévérance. Le texte, passé inaperçu, présente des « orientations » pour prévenir les abandons de vie consacrée ou, le cas échéant, les accompagner au mieux. Une sorte de guide pour accompagner les situations de séparation d’un Institut. Le document comporte trois parties. La première vise à mieux penser les situations de mal-être qui provoquent les crises. La deuxième veut soutenir l’effort de la persévérance par un accompagnement et un discernement adéquat. La troisième donne les normes canoniques en la matière. Cette partie s’achève sur le rappel de l’aide qui devrait légitimement être apportée à celui quittant son Institut et la responsabilité inhérente à chacun : « Celui qui abandonne doit se poser des questions sérieuses sur les raisons de la perte de son choix vocationnel. Celui qui reste, sur la cohérence de son demeurer et ses éventuelles implications dans les causes de l’éloignement et de refroidissement de la persévérance de qui est parti. »

Le regard des autres

Outre l’aspect financier, ce changement de statut a aussi impliqué une grande part de culpabilité pour chacun des témoins. « Revenir sur une parole donnée est extrêmement violent », relève André. Echec, désaveu, infidélité sont quelques exemples d’expressions employées à l’encontre de ces « démissionnaires », tous reconvertis professionnellement. Sœur Marie-Brigitte souligne « qu’on s’imagine parfois la vie religieuse comme quelque chose de trop statique », un idéal de perfection remis en question depuis Vatican II. « L’habit ne fait pas le moine, mais fait l’image qu’on a de lui », abonde Geneviève. Aujourd’hui, elle se dit témoin du « Verbe fait frère » et peut le transmettre sans avoir cette couleur religieuse qui la précède dans toute relation. Comme les autres, elle est convaincue que le chemin emprunté n’est pas une rupture, mais une continuité de sa vocation initiale.

«En congrégation, nous osons parler des questions de sortie, de fidélité à notre vocation ou de changement de communauté..»

Soeur Marie-Brigitte, supérieure des Ursulines de Fribourg

L’après de la vie religieuse

En France, le Réseau Véro (reseauvero@gmail.com), fondé en 2014, accompagne ces « ex » religieux. Il fonctionne essentiellement par le bouche-à-oreille, mais est connu des instances ecclésiales. Il favorise la rencontre amicale et apporte aussi un soutien matériel. Rien de similaire en Suisse. Plusieurs témoins relatent le recours aux conseils de Maxime Morand, appelé en renfort par les instances ecclésiales ou les religieux eux-mêmes. Le consultant accompagne, notamment, les personnes dans la négociation de « conventions de sortie ». Il a d’ailleurs publié en 2020 avec deux pasteurs, Cultures chrétiennes et pratiques ressources humaines, un manuel d’accompagnement dans les situations de la vie ecclésiale.

Une messe radiodiffusée riche d’harmoniques

La messe radiodiffusée sur RTS Espace 2 du dimanche 16 janvier était retransmise de l’église Saint-Robert de Founex. Une célébration tournée vers la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens célébrée par l’abbé Jean-Claude Dunand, curé modérateur.
La prédication était assurée par la diacre Christel Hofer.

PAR GENEVIÈVE DE SIMONE-CORNET
PHOTOS : ELISABETH HAUSER

C’est la communauté de Founex qui, dimanche matin 16 janvier, rejoignait par les ondes les auditeurs de Suisse romande. Une messe célébrée par l’abbé Jean-Claude Dunand, curé modérateur, et concélébrée par l’abbé André Fernandes, curé répondant. Elle était animée par Nathalie Breault avec à l’orgue Olivier Borer. Quelques paroissiens de Nyon s’étaient joints à la communauté pour apporter leur soutien dans les parties chorales. L’homélie avait été confiée à la diacre Christel Hofer, de la paroisse de Terre Sainte-Céligny de l’Eglise évangélique réformée vaudoise. L’occasion pour elle de souligner la diversité des dons ou charismes, des ministères et des modes d’action.

Ensemble dans nos différences

Dans son homélie, Christel Hofer a commenté la deuxième lecture, tirée de la première lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens, rappelant la diversité dans l’unité de l’Esprit. Les gens à qui Paul s’adresse vivent dans une ville riche « où règnent le pluralisme et le syncrétisme religieux. Au sein même de la communauté des croyants, il existe des divergences d’opinions », a-t-elle précisé en ouverture. Il en est de même aujourd’hui, à l’intérieur de nos communautés et entre nos Eglises, « qu’elles soient protestantes, catholique, évangéliques ou orthodoxe », dans lesquelles nous vivons notre foi de diverses manières : les attentes diffèrent et la difficulté à communiquer est une réalité – sur certains points, comme la Covid-19, cela peut être source de discorde.

Mais la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens nous invite, a poursuivi la diacre, « avec nos similarités et nos différences, à vivre quelque chose ensemble dans l’unité de la foi qui nous anime ». Ainsi, « prenons le temps de partager ce que nous vivons dans nos différentes communautés, de partager sur nos différences et sur nos similarités, et rappelons-nous que nous croyons au même Dieu ». Et que chacun reçoit un ou des dons de la grâce qui « proviennent tous du même et seul Esprit ». Pour Paul, « la diversité des dons de la grâce, la diversité des ministères et la diversité des modes d’action sont offertes à chacun et chacune dans l’unité de l’Esprit pour le bien de tous ».

A l’exemple de la Trinité

Diversité des dons de la grâce, d’abord. Ce sont les charismes, « des dons offerts à tous par l’Esprit. Il n’y en a pas un qui domine les autres. Ils sont tous importants. Ils sont là pour le bien de tous, pour le bien commun de notre communauté, de nos communautés ». Diversité des ministères ensuite : loin d’être « l’apanage des ministres du culte », « ils concernent aussi tous les chrétiens. Et ces ministères sont des services. Chacun d’entre nous est capable de mettre ce qu’il a reçu du Seigneur au service des autres ». Pour cela, il est invité à « suivre l’exemple du Christ, lui qui s’est mis au service des autres et surtout des plus petits ».

Diversité des modes d’action enfin : « Nous avons chacune et chacun des capacités différentes et c’est grâce à cette diversité que nous agissons pour le bien de notre communauté, de nos communautés ». Cette diversité nous est « donnée en vue du bien de tous » : les dons que nous avons reçus « sont nécessaires pour la communauté ». « Il y a diversité des dons de la grâce, mais un même Esprit. Il y a diversité des ministères, mais un même Seigneur Jésus-Christ. Il y a diversité de modes d’action, mais un même Dieu », a affirmé Christel Hofer. Et ces diversités « nous rendent capables, chacun à sa façon, de manifester l’amour de Dieu ».

« La Trinité est pour nous un exemple de la diversité dans l’unité de Dieu, lui qui est à la fois Père, Fils et Saint-Esprit. Et c’est à l’exemple de leur modèle de relation que nous pouvons, nous chrétiens, trouver la juste articulation entre la diversité et l’unité », a relevé la diacre en conclusion.

A l’issue de la messe, un apéritif a été servi dans la salle de paroisse. Une initiative bienvenue pour mieux se connaître entre paroissiens de Founex et de Nyon.

 

Quelle vocation ?

PAR THIERRY SCHELLING
PHOTO : DR

Dieu ne (se) trahit jamais et appelle chaque baptisé.e à vivre de sa vocation de base : on pourrait dire laïque. Oui, avant tout, l’Eglise, ce sont les laïcs qui sont appelés à louer, servir et révérer Dieu par leur service de l’autre et leur relecture d’eux-mêmes. Au quotidien. Par les mille et une façons que l’humain a de vivre: métier, amour, passion, prière… Et les religieuses et religieux discernent à partir de cette vocation de base un appel spécifique. Que trois vœux (parfois quatre) viennent scander tout au long de leur vie. Jusqu’au jour où l’un ou l’autre n’épanouit pas, ou plus.

Alors on quitte les Ordres, et s’oriente différemment, non sans mal. Mais toujours appelé.e à vivre sa vocation de baptisé.e, qui, elle ne souffre d’aucune rupture. Et mûrit à chaque étape de l’existence…

On parlait de « défroqué » au temps où le moine portait le froc ! Mais l’expression est définitivement désuète. Désormais, nous portons toutes et tous des jeans !

A prier pour les vocations, on ne saurait cependant être trompé par Dieu : 400 agentes et agents pastoraux laïcs dans notre diocèse de LGF ! La moisson abondante peut s’enorgueillir d’ouvrières et ouvriers nombreux ! Regardons au bon endroit la réponse de Dieu !

«Scrutez les horizons de votre vie»

PAR THIERRY SCHELLING
PHOTO : DR

Aux religieuses et religieux (2014), François les exhortait ainsi : « Ne cédez pas à la tentation du nombre et de l’efficacité, moins encore à celle de se fier à ses propres forces. Scrutez les horizons de votre vie et du moment actuel en veille vigilante. » Une façon de centrer ses énergies et objectifs de vie différemment, voire de quitter les Ordres pour plus de cohérence…

Une manière aussi de faire comprendre que le nombre diminuant de vocations religieuses est un signe… positif des temps modernes : on s’engage autrement aujourd’hui, mais toujours au nom de sa foi ! Voyez les jeunes : service humanitaire, ONG, défense de l’environnement, des droits des minorités et autres LGBT+, bénévolat auprès des aînés, des handicapés, des malades… Aux JMJ, il n’a de cesse de leur répéter : engagez-vous sur le terrain social et politique « pour changer le monde » ! Il a eu cette formule à Rio (2013) : « Ne restez pas au balcon de la vie ! Engagez-vous ! »

Pape autrement

Lui-même, comme pontife, fait le pape autrement : premier voyage ? Lampedusa ! Parmi les premières visites romaines, un bidonville ! Il se consacre à mettre les sans-voix, les petits, les victimes de la pédophilie, les femmes battues, les itinérants, les pauvres non pas sur le devant de la scène, mais au cœur de l’Eglise, de sa raison d’être – celle de l’Eglise et celle de son pontificat. Emblématique : la statue du convoi de migrants sur la place Saint-Pierre qui, dépareillant peut-être la vision d’optique voulue par Bernini, focalise le regard non plus sur un triomphe de l’esthétique baroque, mais sur l’essentiel du message évangélique : « J’étais étranger et tu m’as accueilli. » Quitte à froisser un peu…

Laudato si’ !

Extrait, qui résume tout : « La sobriété, qui est vécue avec liberté et de manière consciente, est libératrice. Ce n’est pas moins de vie, ce n’est pas une basse intensité de vie, mais tout le contraire ; car, en réalité ceux qui jouissent plus et vivent mieux chaque moment, sont ceux qui cessent de picorer ici et là en cherchant toujours ce qu’ils n’ont pas et qui font l’expérience de ce qu’est valoriser chaque personne et chaque chose, en apprenant à entrer en contact et en sachant jouir des choses les plus simples. »

Le chemin de croix de la Rencontre

L’art pour donner accès au sacré, le sacré pour donner accès à l’art

Ce mois-ci, nous donnons la parole à Romaine Masserey qui partage le chemin de croix depuis plus de 20 ans avec des personnes de tous horizons. A chaque fois, l’Esprit Saint surprend, provoquant la rencontre entre la soif de chacun et l’abondance de la Source divine.
Cher lecteur, aujourd’hui, par ces quelques lignes, c’est à toi qu’elle aimerait faire découvrir ou redécouvrir cet extraordinaire chemin que nous offre le Père par son Fils pour faire de nous des êtres d’Amour.

TEXTE ET PHOTOS PAR ROMAINE MASSEREY

Le chemin de croix est un outil thérapeutique de pointe alliant art, spiritualité et psychologie, de l’art thérapie avant l’heure. Le chemin de croix nous permet de rétablir le lien d’amour qui devrait nous unir à nous-mêmes ainsi que à ce qui est autre que nous-mêmes. Plus ce lien est faible et fragile, plus il y a risque de mal être et de maladie. Le renforcement de ce lien permet à notre dynamique de vie de prendre le dessus sur notre dynamique de mort et de souffrance.

Une œuvre sacrée pour la personne dans sa globalité

Les scènes représentées à chaque station sont des images structurantes chargées de sens. Les stations forment dans leur ensemble une œuvre représentant le processus d’individuation. L’œuvre du chemin de croix est composée pour nous, sur mesure, elle est identitaire de la nature humaine.

Bien souvent, nous ne voyons pas les choses comme elles sont, mais comme nous sommes. Ce que nous voyons et ressentons devant une station relève de ce que nous vivons ou avons vécu ! Les scènes structurantes des stations sont des modèles influents bien plus complets que ce que nous en percevons dans un premier temps. Les scènes nous invitent à rectifier notre pensée. Les émotions qui en découlent alors sont plus positives et influencent positivement l’homéostasie 1 du corps. La Passion du Christ offre un soin englobant le mental, les émotions ainsi que le corps de la personne.

Les artistes qui créent des chemins de croix s’approprient parfois l’œuvre et la falsifient quelque peu. Cela n’a guère d’incidence en soi car l’Esprit Saint qui est derrière le projet fait son propre œuvre.

Derrière l’œuvre, LA Rencontre

Les scènes représentées aux stations sont des supports d’expression de l’Esprit Saint. Au fur et à mesure de la contemplation et des révélations de chaque station, l’œuvre laisse transparaître un processus qui existe sur le plan subtil. Nous ne pouvons pas contrôler ce processus, il est d’un ordre différent de celui de l’imagination ou des connaissances personnelles. Il est bien établi, fondamental, universel.

Petit à petit, devant l’évidence de l’existence de ce processus, la personne entre en relation avec lui et commence à se spiritualiser. Elle découvre alors une intelligence supérieure. Cette intelligence interagit avec notre intellect, mais également avec notre affect. De même qu’elle donne une réponse intellectuelle aux questions intellectuelles, elle donne une réponse affective aux questions affectives que nous nous posons. La douceur et la tendresse émanant d’une source indépendante de nous-mêmes nous touchent peu à peu.

Pour communiquer avec la Source, la Passion du Christ nous réapprend l’art de la prière. Elle nous apprend la sagesse de l’émotion et du sentiment. Cette sagesse est nécessaire à la prière afin que celle-ci ne soit pas qu’un ensemble de mots, la prière est ce que nous sommes. L’intellect ainsi que l’affect de la personne peuvent dès lors fonctionner ensemble, de façon éclairée et nourrie. La relation réciproque avec Dieu s’établit.

Chacune des scènes du chemin de croix met en avant un soin différent. Dieu nous donne l’entier du mystère de la Passion à chaque station même s’il est réparti visuellement et conceptuellement sur les 14 stations. Sans forcément en avoir conscience, nous recevons l’entier de ce mystère en chaque instant.

La Passion du Christ nous livre un extraordinaire mode d’emploi de l’Homme et de sa rencontre fondatrice avec Dieu. Elle rétablit le sens ainsi que le lien, deux éléments indispensables à l’équilibre.

ECCE HOMO

Quelques stations sur le site paroisses-sierre.ch

Chemin de Résurrection »

Par Chantal Salamin-Bérard

Cet ouvrage écrit par Marcel Dürrer nous fait entrer dans le mystère du Chemin de Résurrection qui propose un chemin pour repérer dans nos vies ces signes qui nous « ressuscitent ». C’est un chemin pour aujourd’hui, qui puise sa source dans le chemin de croix et propose 14 pas à franchir à partir des mystères essentiels de la vie : la rencontre, l’amour, la souffrance, la mort et la renaissance. Une étape préalable « La porte, le seuil » nous invite à y entrer autrement et une étape finale « La Table » nous invite à partager plus loin. Le défi de chaque pas est de se laisser transformer par la force de Dieu qui a ressuscité son Fils, à laisser parler l’image en soi.

Chemin de Résurrection, Marcel Durrer, Editions Saint-Augustin.

Rencontre avec Joëlle Carron La vie consacrée, une joie !

La vie consacrée, une joie !

Joëlle Carron, 40 ans, laïque consacrée Responsable de la Maison de la Diaconie et de la Solidarité, un pôle de compétences des Eglises pour le service des plus pauvres, et Déléguée épiscopale à la Diaconie. Dans mon vécu hebdomadaire:

  • Un avant-goût du Royaume au Verso l’Alto, le café social des Eglises
  • Plusieurs répétitions de chœurs
  • Une coloc de jeunes à Cana-Myriam
  • Une équipe incroyable, des frères et sœurs en ministère que j’admire
  • De multiples visages, quelques bouquins, des cours de travail social et beaucoup de crêpes

TEXTE ET PHOTOS PAR JOËLLE CARRON

Parfois on m’interroge sur ma bague d’alliance. Héritée de mes arrière-grands-parents, elle est double. Les deux alliances, aujourd’hui soudées, disent la longue fidélité de Benjamin et Amanda. Cette double alliance, ma marraine de confirmation me l’a offerte lors de ma consécration le 23 août 2015. Elle est signe que nous sommes bien deux à nous être engagés ce jour-là : Dieu et moi.

Peu de gens savent que je suis laïque consacrée. Un état de vie que beaucoup vivent en toute discrétion, dans leur cadre de vie habituel. Quant à moi, mon engagement comme laïque consacrée s’est fait dix ans après mes débuts comme animatrice pastorale. Ce choix de vie unifie mon être, dit quelque chose de ce que j’aimerais vivre, même si, bien sûr, tout n’est pas toujours simple. Il dit mon envie de donner ma vie, de Le suivre dans une certaine radicalité, à travers les mêmes vœux que les religieux.

Adopter une simplicité de vie, savoir que les biens matériels sont donnés à tous à travers nous, comprendre que mon essentiel est bien autre – c’est le vœu de pauvreté. La pauvreté n’est jamais bonne en soi. Et dans mon ministère, je lutte chaque jour pour en combattre les conséquences. Vécue comme un choix, le vœu de pauvreté libère pourtant. Il me permet de passer de l’avoir à l’être.

J’ai fait le choix aussi du célibat consacré, comme une disponibilité à tous, une possibilité de faire famille avec ceux qui n’en ont pas. De vivre pleinement cette fraternité d’Evangile, complémentaire à nos fratries biologiques et tout aussi forte. Je reçois de Dieu des frères à aimer, des sœurs à chérir. Avec la conviction que le lien, déjà tissé en creux, fleurira et qu’il n’y pas de hasard si la route se fait ensemble.

Enfin, mon engagement m’a permis de choisir qui j’ai envie de suivre. « Rabbouni »… dit Marie-Madeleine. Ce maître-là fait grandir ma liberté. A son école, j’apprends à devenir plus pleinement humaine, un peu plus à son image, tout cela avec mes ratés et ma fragilité. Heureusement, il est capable d’écrire droit avec mes lignes courbes.

Mon état de vie de consacrée me rend heureuse. Heureuse car je suis à ma juste place, en famille avec ceux que la société néglige. Heureuse d’expérimenter Sa fidélité – Il est toujours là, même si je ne le suis pas. Heureuse d’oser l’autrement de l’Evangile.

 

Statue de la Vierge noire…

La Vierge porte Jésus dans ses bras.

… église des cordeliers (Fribourg)

PAR AMANDINE BEFFA | PHOTO : JEAN-CLAUDE GADMER

Au XVIIe siècle, de nombreux Fribourgeois se rendent à Einsiedeln. En effet, le sanctuaire schwytzois est un des lieux de pèlerinage les plus importants de Suisse. Naît alors la volonté de construire une réplique de la Vierge noire et de la chapelle qui l’accueille. Le but est de permettre à ceux dont les finances ou la santé rendent un long voyage impossible de bénéficier des grâces. Einsiedeln est très lié à la détresse et à la maladie. Les pèlerins ramenaient dans leurs bagages des copies de la statue. Ces répliques en argile étaient porteuses de protection et de guérison.

Jean Ulrich Wild, le fondateur du projet fribourgeois, s’engage par contrat à financer non seulement la construction du sanctuaire, mais aussi le matériel nécessaire à la célébration des messes. Les cordeliers, pour leur part, promettent de chanter en chœur dans la chapelle tous les samedis et à l’occasion des fêtes mariales.

Il existe plus de 500 Vierges noires en Europe. Plusieurs tentatives d’explication de leur couleur ont été proposées. Une relecture ultérieure les lie au verset du Cantique des cantiques : « Noire, je le suis, mais belle. » (1, 5) Toutefois, la théorie la plus probable est celle de l’oxydation des pigments. La peinture blanche contient du plomb qui, avec le temps, noircit. Les fidèles se sont progressivement attachés à la couleur des statues. Ainsi, quand en 1803, la Vierge d’Einsiedeln a été restaurée, retrouvant sa teinte claire d’origine, les pèlerins ne l’ont pas acceptée. La statue a alors été recouverte de peinture noire. Le modèle fribourgeois est peint en noir depuis sa création pour correspondre au modèle.

La Vierge porte Jésus dans ses bras. L’enfant tient dans la main un oiseau. Il pourrait s’agir d’un
chardonneret. L’oiseau annonce la Passion. La couleur rouge de sa tête évoque le sang versé et son nom rappelle la couronne d’épines. Cela donnerait un autre sens aux riches atours dont Jésus est paré. C’est un roi, mais pas à l’image de ce monde.

Le chemin de croix

La période du carême que nous vivons en ce moment nous invite à nous pencher, à l’approche de la Semaine sainte,
sur le mystère de la croix et la pratique dévotionnelle du chemin de croix. J’aimerais revenir sur l’histoire de cette pratique et sa représentation dans l’art à partir de l’exemple du chemin de croix du Christ-Roi réalisé par l’artiste
fribourgeois Armand Niquille.

PAR SÉBASTIEN DEMICHEL | PHOTOS : J. MÜLHAUSER

« Car le langage de la croix est folie pour ceux qui vont à leur perte, mais pour ceux qui vont vers leur salut, pour nous, il est puissance de Dieu. » (1 Co 1, 18) Par ce passage, saint Paul lie le langage de la croix à celui du salut. Les souffrances du Christ crucifié en rachat des péchés humains ramènent à l’essentiel de la foi catholique en la mort et la résurrection.

Histoire du chemin de croix

Le chemin de croix est un exercice de piété qui a traversé les siècles jusqu’à être intégré dans le calendrier liturgique de l’Église. Le symbole de la croix comme représentation de la Passion du Christ remonte aux premières communautés chrétiennes. Au IIe siècle, on constate un intérêt croissant pour les lieux historiques de la Passion du Christ qui deviennent des lieux de pèlerinage. Des chrétiens se rendent à Jérusalem pour faire la via dolorosa et ainsi s’unir à la Passion du Christ.

L’édit de Milan en 313 autorise la liberté de culte et met fin aux persécutions dont les chrétiens étaient victimes. Les pèlerinages en Terre Sainte deviennent alors plus fréquents. Les chrétiens de l’Antiquité reproduisent le chemin suivi par le Christ entre le prétoire (tribunal de Pilate) au bas de Jérusalem et le Golgotha (Calvaire) au sommet de la ville, lieu de la crucifixion.

Au Moyen Âge

Durant les siècles suivants, le chemin de croix ne se pratique qu’en Terre Sainte, mais les récits de voyageurs le font connaître en Europe. Ce n’est toutefois qu’au Moyen Âge, sous l’impulsion de figures marquantes telles que saint Bernard de Clairvaux et saint François d’Assise, que la pratique du chemin de croix se diffuse. À cet égard, le rôle des Franciscains est particulièrement important. Ils se voient en effet confier la garde des lieux saints au XIVe siècle et réalisent des représentations de la Passion du Christ pour permettre la méditation des fidèles sur ces mystères. Soucieux d’offrir le chemin de croix aux pauvres et invalides ne pouvant se rendre en Terre Sainte, les Franciscains souhaitent diffuser sa pratique à l’ensemble de la chrétienté.

D’abord limité à deux points (le prétoire et le calvaire), le chemin de croix est ensuite segmenté en stations dont le nombre varie entre le XVe et le XVIIe siècle pour se fixer à 14 au XVIIe siècle. En 1731, le pape Clément XII reconnaît le chemin de croix comme une prière de l’Église. Dès le
XVIIIe siècle, cette forme de dévotion se propage dans l’ensemble du monde catholique. Le privilège franciscain est également levé et sa pratique est généralisée.

Aujourd’hui, le chemin de croix a une triple dimension. Une dimension historique puisqu’il célèbre le dernier chemin parcouru par Jésus du prétoire au Golgotha en se fondant sur les textes des évangiles (Jean-Paul II en a d’ailleurs modifié certaines stations pour mieux respecter le récit évangélique) ; une dimension liturgique puisqu’il s’agit d’une prière célébrée en 14 stations ; et enfin une dimension artistique, puisque le chemin de croix est généralement représenté dans les églises.

Le chemin de croix d’Armand Niquille

L’église du Christ-Roi nous offre un bel exemple de la présence du chemin de croix dans l’art. Construite en 1951, cette église accueille sa première messe en 1953 devant 1500 fidèles et est consacrée l’année suivante. En 1955, sur mandat de l’architecte Honneger, le peintre fribourgeois Armand Niquille (1912-1996) réalise le chemin de croix du Christ-Roi. L’année précédente, il avait déjà réalisé celui de Nuvilly, dans la Broye fribourgeoise. Armand Niquille est particulièrement marqué par le mystère de la croix : « Mon enfance a été ainsi marquée par le Crucifié dont le mystère, fascinant et inquiétant, faisait partie des émois d’un garçon rêveur et bagarreur. Ce n’est pas impunément que l’on représente le Christ crucifié. L’on se pose des questions. On se plonge dans la mystique chrétienne […]. Avec le Christ, il y a toujours la croix. La croix de notre rédemption et de la divinisation de notre âme. »

Le chemin de croix d’Armand Niquille s’articule autour de 14 tableaux de la Passion du Christ qui représentent chacun une station (liste en annexe). Niquille s’appuie sur la technique de l’icône. Fidèle à cette tradition, il insère ses tableaux dans le mur de béton comme dans une iconostase. Les fonds dorés polis à l’agathe, fidèles à la tradition byzantine et médiévale, symbolisent la gloire de Dieu et la lumière céleste, annonces d’une résurrection à venir.

Au niveau artistique, ce chemin de croix est assez dépouillé et représente généralement trois personnages, dont le Christ (voir station I : condamnation), dans une attitude hiératique (sacrée) et expressionniste. Certains personnages, tels que Simon de Cyrène (station V) sont vêtus d’habits contemporains. Cet anachronisme voulu doit illustrer le caractère contemporain de la Passion, que le fidèle revit à travers une méditation lors du chemin de croix. Enfin, l’artiste a veillé à représenter la figure du prêtre (station XIII). Des détails, tels que les fleurs présentes au pied de la croix pour annoncer la résurrection, contribuent à la richesse de l’œuvre.

Le frère dominicain Luc Dumas admire ce chemin de croix peu après sa réalisation et y voit une correspondance, un dialogue entre l’effet sensible et la cause intelligible à faire entendre : « Toute œuvre qui parle exige qu’on lui réponde ; et lorsque cette œuvre dit tout entière la Passion du Christ, lui ôter la chance d’un dialogue c’est lui faire perdre son sens et sa fin. »

14 stations du chemin de croix d’Armand Niquille :

I : la condamnation à mort de Jésus

II : le chargement de la croix

III : la première chute de Jésus sous le poids de la croix

IV : la rencontre avec Marie

V : le portement de croix par Simon de Cyrène

VI : le visage du Christ essuyé par Véronique

VII : la deuxième chute de Jésus

VIII : Jésus consolant les saintes femmes

IX : la troisième chute de Jésus

X : le dépouillement des vêtements

XI : la mise en croix

XII : la mort de Jésus

XIII : la déposition

XIV : la mise au tombeau

Rencontre avec Marie-Jeanne Seppey

En lien avec le thème «la joie de la vie consacrée», nous avons demandé à deux femmes, originaires de Saxon et de Fully, de témoigner de leur vie de consacrée. Merci à Marie-Jeanne et Joëlle de nous partager leur joie de servir et de se donner à la suite du Christ.

TEXTE ET PHOTO PAR MARIE-JEANNE SEPPEY

La joie du Seigneur est mon rempart ! Le retour d’exil des Israélites ressemble à notre quotidien : rebâtir une communauté, un lieu de vie. L’essentiel est ailleurs : le Seigneur cherche à vivre en nous. Telle est ma joie.

Joie de son choix qui surprend. J’ignorais ce qu’était un institut séculier. Je compris que là serait mon chemin. Etre saisi par l’absolu de Dieu en vivant comme tout le monde, par un travail. Je n’ai jamais regretté un seul jour cet engagement prononcé pour toujours. Ce n’est pas nous qui choisissons notre vocation, il nous revient de choisir le choix de Dieu.

Joie de sa présence dans mon histoire. Le pays et la famille où je suis née, les amis et les rencontres de mon village de Saxon, les professeurs lors de mes études, les personnes rencontrées : autant de médiations qui ont signifié l’attente du Christ à mon égard. Il n’a cessé de me regarder, de m’aimer, de me servir.

Joie des rencontres au quotidien. Tel élève qui découvre ce qu’est la vérité, le bien, qui prend conscience de la responsabilité de son libre-arbitre ; telle voisine qui va mourir et qui dit croire en ma foi ; tels amis invités avec qui nous cherchons à donner un sens à ce que nous vivons ; tel collègue de travail et tel membre de la famille avec qui nous échangeons : Il est là, présent.

Joie de l’expérience intérieure de sa Vie. En m’exerçant à lire la Parole de Dieu, je découvre que nous sommes les perles que le Seigneur cherche. Cela change mon regard. Il habite vraiment en moi, en chaque personne. Il passe par ma présence, mes paroles, mes actes, pour visiter et servir son peuple.

Joie de la prière d’alliance du soir. En faisant mémoire de la présence de Dieu dans ma journée, de mes parts d’ombre, je lui confie le lendemain. Ce qui advient est reçu comme de sa main. Je reste paisible et confiante, dans l’espérance.

Joie de le choisir même en exil. Parfois nous paraissons insensés pour les gens de ce monde, de nos communautés. Ce sont des moments où nous expérimentons différemment la liberté de Dieu. Tout est grâce : que ce soit le don ou la privation. C’est le moment d’offrir ma disponibilité, pour ce qu’Il veut, sans tout comprendre.

Le Christ est mon rempart. Telle est ma foi.

Une seconde conversion (Marc 10, 17-22)

PAR FRANÇOIS-XAVIER AMHERDT | PHOTO : DR

Cela n’est pas propre aux religieux, religieuses et personnes consacrées, qu’elles demeurent dans leur communauté ou qu’elles changent de vie. Tout être, à un certain moment de son chemin spirituel, est invité à vivre comme une seconde conversion, celle par laquelle, après l’enthousiasme des débuts, où il a l’impression de faire des choses POUR Dieu, il en vient à se laisser pleinement conduire par l’Esprit Saint, à lui donner le gouvernail de sa vie, et donc à faire désormais l’œuvre DE Dieu (opus Dei, en latin, au sens premier de l’expression).

C’est le cas du jeune homme riche (Marc 10, 17-22) dont aucun des trois évangiles synoptiques ne mentionne qu’il était « jeune ». Son désir, tel qu’il est formulé à l’adresse de Jésus en accourant vers lui et en se mettant à ses genoux, est plus que recommandable : « Que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? » Il appelle même le Christ « Bon Maître », entraînant la première partie de la réaction du Fils de Dieu qui le renvoie au seul Bon Maître, le Père.

Puis l’homme abonde dans le sens de la deuxième partie de la réplique du Seigneur, en affirmant que « dès sa jeunesse », il a accompli les commandements du Décalogue (Exode 20, 12-16) : il n’a ni tué, ni commis d’adultère, ni volé, ni proféré de faux témoignage. Admirable fidélité qui provoque un regard d’amour porté sur lui par Jésus !

Et pourtant, cela ne suffit pas, car voilà que retentit le second appel : « Une seule chose te manque, si tu désires te faire un trésor dans le ciel : va, vends ce que tu as, donne-le aux pauvres, puis suis-moi. » Quelle radicalité ! Quelle exigence ! Le Seigneur veut que nous lui donnions tout, que nous lâchions la maîtrise de notre existence, que nous quittions la toute-puissance et que, comme Thérèse de Lisieux, nous nous jetions dans ses bras. Le texte ne dit pas si l’homme riche a accepté finalement de solder tous ses biens, qu’il avait abondants. Marc dit simplement qu’il s’en alla tout triste.

Quelque orientation que nous prenions dans notre vie, que nous options pour un autre chemin ou que nous poursuivions dans la ligne de la vocation première, un abandon décisif dans les mains de Dieu est requis. Avec l’assurance que le Seigneur ne nous laisse jamais tomber.

A Corpataux, des «Bonjour» et des «Au revoir»

Des visages souriants à nos portes

 

 

PHOTOS : CATHERINE SOLDINI
TEXTE ET PHOTO PAR CATHERINE SOLDINI, POUR LE CONSEIL PASTORAL DE CORPATAUX

Le 28 novembre 2021, tout un petit monde gravite autour de l’autel, certaines personnes, on les voit régulièrement, d’autres, on les aperçoit au loin, d’autres encore se font discrètes… mais toutes ces personnes permettent aux célébrations de se dérouler harmonieusement et dans un beau cadre.

Ainsi lors de cette célébration, nous avons à la fois accueilli et à la fois dit aurevoir !

Ce furent des instants remplis d’émotions: Mélissa et Jessica quittaient le service à l’autel et la communauté a accueilli Agathe, Albane, Naomi et Louanne qui ont reçu officiellement la croix et le « certificat » de servant de messe même si elles avaient commencé depuis un certain temps.

De même, les responsables des servants de messe:
Florence Butty et Catherine Soldini ont tiré leur révérence pour laisser la place à Adeline et Anne Meuwly !

Ces dernières porteront plusieurs casquettes : sacristines (avec l’appui fidèle de Thérèse Monney), responsables des servants de messe et auxiliaires de communion ! En particulier, Adeline s’occupe de l’animation musicale quand il n’y a pas le chœur et Anne décore désormais l’église à la place d’Alice.

Justement, nous adressons un merci tout particulier à Alice Schouwey qui s’est occupée de la décoration et de l’entretien de l’église durant 35 ans. Tous ces bouquets ont varié au gré des saisons et ont été confectionnés avec beaucoup d’amour. Un bouquet géant de merci pour toi Alice.

Quant au nettoyage de l’église, c’est Judith Geinoz qui remplace dorénavant Alice.

Merci à toutes ces grandes et petites mains. Bonne continuation sur votre chemin de vie ! Qu’il soit lumineux et fleuri !

Sacrée(s) fidélité(s) !

PAR LE CHANOINE LIONEL GIRARD
PHOTO : MADEMOISELLE BÉRAUD-VILLARS

Si par le baptême, notre vie est fondamentalement consacrée à Dieu, certains d’entre nous ont modalisé cet appel en répondant par leur profession des vœux évangéliques, à suivre le Christ à l’écart selon le charisme propre de chaque institut.

Par leur temps de probation, ils ont dû vérifier que cet élan aussi généreux que radical n’émanait pas seulement d’un désir personnel ou d’une séduction passagère mais s’ancre bel et bien en Dieu. Ainsi l’avis de leur communauté valide de son vote cet engagement pour la vie.

Cependant les motivations des premiers temps vont vite apparaître différentes de celles qui leur permettront de persévérer dans la fidélité… et face à ces épreuves incontournables, il arrive que certains
ne voient d’autre issue que de devoir y renoncer.

Choix déchirant pour le consacré, pour sa communauté et tout son entourage.

Comment accompagner ces dispenses qui constituent une rupture existentielle sans tomber dans un jugement accusateur blessant la charité ? Car même confrontés à cette réorientation, le Seigneur ne saurait les abandonner. Reconnaissons que sa fidélité rejoint nos infidélités chroniques et nous donne la grâce de recommencer encore et encore.

Oui prions pour les consacrés qui au désert, mènent un vrai combat spirituel dont les fruits portent nos familles, nos paroisses, nos missions pastorales et manifestent cette espérance que confère la foi. Aidons-les à persévérer toute une vie durant et si besoin, à passer les caps difficiles des épreuves où son amour nous façonne afin de témoigner qu’il est l’auteur du Salut.

Le Seigneur est toujours présent, quel que soit notre chemin de vie !

Si le thème de ce mois nous parle de la vie consacrée en communauté avec ses défis, ses succès, ses échecs, nous pouvons poser un regard interrogateur sur les laïcs qui ont reçu un appel différent.

PAR THÉRÈSE GERBER | PHOTO : ORDOVIRGINUM.FR

Dans la discrétion, de nombreuses personnes donnent du temps au Seigneur, dans la prière, l’adoration, l’Eucharistie plusieurs fois par semaine. Parmi elles, nous trouvons des laïcs qui vont jusqu’à faire un engagement, comme une consécration. Quelques exemples se trouvent proches de chez nous, même dans nos paroisses.

Les Maisons d’adoration, fondées en 1998, s’adressent aux laïcs vivant dans le monde, qu’ils soient célibataires ou mariés. Ils ont pour mission d’essaimer pour porter au monde l’Amour de Jésus-Eucharistie, par un ministère de visitation accompli dans la simplicité de leur vie quotidienne. L’adhésion aux Mai-sons d’adoration est préparée par un cheminement en trois étapes : 1. Donation à Marie ; 2. Renouvellement des promesses du baptême, de la confirmation et du mariage pour les époux ; 3. Consécration à la personne vivante du Christ, par laquelle s’expriment l’attachement au Seigneur et le désir de vivre en union avec lui. Leur modèle de vie est la Sainte Famille.
www.lesmaisonsdadoration.com

L’ordre des vierges consacrées, créé en 1970, par le pape Paul VI. Une vocation encore méconnue mais qui, de par son insertion dans le monde, fait pleinement sens à notre époque. Il existait déjà dans l’Eglise primitive des formes de vie consa-crée : des femmes choisissaient volontairement la chasteté et la virginité perpétuelle. Cette vocation spécifique et originale permet en effet à des femmes de recevoir une consécration de la part de leur évêque diocésain tout en demeurant dans leur contexte de vie et non plus en intégrant une communauté monastique. Leur célibat est une manière de se donner entiè-rement à Dieu, dans une relation étroite avec l’Eglise en se mettant à son service, tout en restant dans le monde.
www.ordovirginum.fr

La Famille Solitude Myriam, fondée au Canada en 1981, soutient des personnes ayant vécu une séparation ou un divorce. En découvrant de plus en plus la grandeur du sacre-ment de mariage, elles approfondissent le mystère, afin de le vivre pleinement, et cela même au-delà du divorce. Là aussi, après un cheminement, des étapes d’acceptation, de pardon, de réconciliation, il y a la possibilité de faire un engagement qui consiste à renouveler les promesses du baptême et du sacre-ment de mariage, pour vivre la fidélité à leur sacrement de mariage. Ces laïcs se mettent au service, à la suite du Christ, dans les situations auxquelles ils sont confrontés, tout en priant pour les familles et les prêtres.
www.famillesolitudemyriam.org

Voici un aperçu de quelques possibilités d’engagements, il en existe certainement d’autres. Si vous souhaitez en parler, n’hésitez pas. Un témoignage de vie est toujours un cadeau qui peut aider d’autres personnes à trouver leur chemin.

Confirmation à Payerne

« Entrer dans un monde nouveau »

PAR LA RÉDACTION | PHOTO : PIERRE-ANDRÉ FRAGNIÈRE

Treize jeunes de la paroisse catholique de Payerne ont reçu, ce samedi 12 février, le sacrement de la confirmation. Cette célébration marquait la fin d’un chemin de préparation d’une année et le début dans la vie chrétienne comme des adultes dans la foi. Une célébration riche en émotion pour chaque participant. «Je suis très heureuse de faire partie de la communauté chrétienne», confiait Helene Gebray après la célébration. «Pour moi, le moment le plus fort a été le partage avec les autres confirmands et les parrains-marraines avant la messe. Ce parcours m’a permis de faire connaissance avec d’autre personnes et de nouer des amitiés. J’espère que nous garderons le contact.»

Noémie Maillard se disait impressionnée par le geste sacramentel d’imposition de l’huile consacrée sur le front, fait par Mgr Bernard Sonnay, vicaire épiscopal du diocèse: «Cet instant était très émouvant: pour moi c’était comme entrer dans un monde nouveau avec le Seigneur à mes côtés. Je peux commencer mon parcours de chrétienne confirmée.»

Vincent Roggo, qui a dû lire un texte de bienvenue, avouait un léger trac avant la célébration: «Finalement cela s’est très bien passé… Cette année de préparation a été bien plus courte que je ne le pensais, y compris la retraite spirituelle à Saint-Maurice. J’aurais aimé que cela dure plus longtemps. Ces grands moments resteront dans nos mémoires.»

«Seigneur Dieu, nous voulons te confier ces jeunes qui viennent de recevoir ton Esprit Saint. Fais-en sorte qu’ils puissent devenir des témoins vivant de ton Evangile dans un monde qui a tant besoin de ta présence», à prier l’assistant pastoral Lazare Preldakaj et accompagnateur des jeunes dans les intentions de prières.

Une vie consacrée à la musique

Témoignage de Valentin Villard, compositeur, organiste, chef de chœur

PROPOS RECUEILLIS PAR CHANTAL TERREAUX | PHOTOS : CINDY DELABAYS

C’est très tôt que Valentin décide de consacrer sa vie à la musique. Il apprend le piano dès 6 ans et à 11 ans il participe, dans le cadre de son école, à une création musicale. Là, il se rend à l’évidence que la musique fait partie de sa vie, il s’y consacrera. Il compose d’ailleurs déjà.

A 19 ans, il dirige son premier chœur à la paroisse catholique de Morges.

Valentin reconnaît volontiers devoir beaucoup aux chœurs d’église puisque c’est par eux qu’il décrochera ses premières commandes en tant que compositeur.

Travailler comme musicien professionnel, suppose des horaires de travail bien particuliers et souvent variables. Le matin est consacré à la composition, ainsi que bien souvent le début d’après-midi, puis vient le moment de préparer la répétition du soir, ensuite un entraînement à l’instrument reste indispensable. Après une petite pause, les répétitions commencent vers 19h30-20h et se prolongent facilement jusque vers 22h30.

La grande partie du travail est dédiée à la composition, puis à l’orgue car pour assurer un minimum de revenus, il faut s’investir dans plusieurs paroisses. Valentin est organiste dans quatre paroisses du Gibloux, ainsi que chef de chœur et organiste, dans notre UP, à Massonnens.

Ainsi, son travail se prolonge le week-end, entre divers concerts et toutes les prestations qu’il assure dans les paroisses. Là où cela se complique, c’est évidemment lors des fêtes religieuses qui ont lieu en même temps dans chaque paroisse. Notre musicien donne alors la priorité à Massonnens puisqu’il y est directeur et organiste, et trouve des remplaçants organistes pour les autres paroisses où il est actif.

Actuellement, Valentin dirige un chœur profane, « Elle en C » et le chœur mixte de Massonnens, qui en plus de l’animation des messes paroissiales s’adonne aussi à la musique profane, pour des concerts et parfois des cafés-théâtres.

Valentin consacre environ la moitié de son temps à la musique liturgique.

Comme dit plus haut, il est reconnaissant de l’opportunité que lui a offerte le milieu catholique qui, alors qu’il était encore adolescent, lui a passé ses premières commandes. Et durant longtemps, une grande part de son travail était dédiée à la musique liturgique. Son langage musical s’est formé avec la musique religieuse, cela faisait partie de son identité. La poursuite de sa formation rime bien sûr avec un élargissement de l’exploration et une diversification de son travail, mais qui reste, imprégné d’une grande spiritualité.

N’est-ce pas le propre de la musique et de l’art en général de nous transporter dans un monde spirituel, au-delà de notre vie corporelle ? C’est ce qui fait toute la beauté de l’art et qui le rend important dans nos vies.

Valentin exprime cela en disant que : « Pour lui la musique entraîne le compositeur dans un mouvement ascendant, de la terre vers le ciel. »

Certainement pas uniquement le compositeur d’ailleurs, mais les interprètes et les auditeurs aussi, et le manque de la période difficile que nous vivons encore, l’a fait ressentir a beaucoup d’entre nous.

Le compositeur aime le défi qu’il doit relever lorsqu’il compose pour un chœur amateur et une assemblée paroissiale. Il doit concilier qualité musicale et accessibilité à tous, tout en ayant un niveau qui motive ses chanteurs, le tout dans une tonalité, une musicalité qui porte la prière.

A ce moment de l’entretien, je lui ai demandé s’il pense alors qu’il est indispensable d’avoir la foi pour se consacrer à ce type de musique ?

Son expérience vaudoise lui ferait répondre oui, car le chœur qu’il a dirigé n’avait d’existence que pour l’animation liturgique. Depuis qu’il est dans notre canton, les chœurs chantant aussi en certaines occasions du profane, il est moins affirmatif. Mais en tout cas, le directeur et compositeur doit avoir un profond respect et une très bonne connaissance de la culture chrétienne, une bonne compréhension, une ouverture à ce monde, pour pouvoir œuvrer dans ce registre.

Avoir une porte ouverte à « quelque chose » est important, sinon il y a une forme d’hypocrisie. Il faut une cohérence entre ce que l’on fait et vit sinon les chanteurs le ressentent et l’assemblée aussi.

On dit volontiers que chanter c’est prier deux fois. Lorsque tu composes, est-ce qu’on pourrait dire que c’est prier trois fois ?

« Oh, c’est saint Augustin qui a dit ça… La musique est un art abstrait, immatérielle. Lorsque l’œuvre est achevée, on n’a rien dans les mains, on ne peut pas toucher, se saisir de la musique et en cela, je pense que la musique se rapproche de la prière, c’est un peu comme s’il y avait deux couches de spirituel l’une sur l’autre. Cet aspect impalpable fait que la musique a ce rôle de connexion spirituelle très fort.

Je ne pense pas que composer c’est prier trois fois, c’est comme écrire un roman mais on utilise des notes au lieu des lettres. Mais quand même, lorsque je compose un chant religieux, le sens des paroles me fait choisir un autre ton que pour du profane, je ne composerais pas un air de valse musette. Dans la musique religieuse, il y a un aspect transcendant, de transformation.

Ce n’est pas prier trois fois, mais me consacrer à la musique religieuse m’aide à vivre ma foi. Et j’ai le désir de faire quelque chose de beau, qui me pousse, ainsi que les chanteurs et l’assemblée, au-delà de… »

On ne va pas s’crêper l’chignon?

PAR MYRIAM BETTENS
PHOTOS : FLICKR

Salée ou sucrée, même les maladroits peuvent s’y essayer. Collée au-dessus de l’armoire de la cuisine, elle apportera fortune à l’économie familiale durant toute l’année. Tombera, tombera pas? Petite histoire de la crêpe de la Chandeleur.

Ah bon? Le chandeleur n’est pas celui qui tient la chandelle lorsque deux amoureux font des crêpes? Il s’agit bien ici de chandelles, mais de celles du nom populaire latin de festa candelarum rappelant la date à laquelle on procède à la bénédiction des cierges. Centrée sur la lumière, cette fête, d’abord païenne, rappelait que dans l’hémisphère nord, les jours rallongent, signe de l’arrivée du printemps. Christianisée, le rap- port à la lumière demeure. Elle est célébrée à Jérusalem dès le IVe siècle, dans son récit Peregrinatio Aetheriae (vers 380), la pèlerine Egérie en fait déjà mention. Etendue à l’ensemble de l’Orient chrétien, l’empereur Justinien fixe la date de la fête au 2 février et l’introduit à Constantinople en l’an 542.

Lumière du monde

Cette fête fait depuis référence à Jésus comme lumière du monde. Tel que relaté dans l’Evangile de Luc, le récit narre la Présentation de Jésus au Temple. Comme le voulait la loi de Moïse, les parents conduisaient au temple de Jérusalem tout garçon premier-né pour y recevoir une bénédiction quarante jours après sa naissance. Siméon, un homme juste et pieux, se rend au Temple poussé par l’Esprit Saint. Là, il rencontre les parents de Jésus venant accomplir les rites prescrits par la loi. Il prend alors Jésus dans ses bras et remercie le Seigneur, car il reconnaît en cet enfant la «lumière pour éclairer les nations».

Une préparation simple

Comme d’autres pâtisseries que l’on mange à cette même époque de l’année – beignets, bugnes, gaufres, merveilles – ces préparations requièrent peu d’ingrédients, faciles à se procurer et rappellent qu’après l’hiver, les provisions ne manquent pas. On a tenté de christianiser cette tradition culinaire au Ve siècle en attribuant au pape Gélase Ier la préparation de gaufres pour réconforter des pèlerins venus à Rome… mais pas de quoi se crêper le chignon.

Recette: Crêpes Suzette

Temps de préparationTemps d’attentePortions
30 minutes1 heure8

Ingrédients pour la pâte à crêpes

  • 75 g de farine blanche
  • 1 pincée de sel
  • 1 ½ dl de lait
  • ½ dl d’eau minérale gazeuse
  • 2 œufs frais
  • 25 g de beurre liquide, refroidi

Cuisson

  • Un peu de beurre ou d’huile

Ingrédients pour la sauce à l’orange

  • 60 g de sucre
  • 2 cs d’eau
  • 1 cs de beurre
  • 2 oranges bio, le zeste prélevé avec un zesteur, tout le jus
  • 3 cs de liqueur d’orange (p. ex. Grand Marnier)
  • 2 oranges pelées à vif et détaillées en suprêmes • 2 cs de cognac

Préparation des crêpes

  1. Dans un saladier, mélanger la farine et le sel et creuser un puits au milieu.
  2. Mélanger le lait, l’eau, les œufs et le beurre.
  3. Verser le liquide petit à petit dans le puits tout en remuant avec le fouet, jusqu’à obtenir une pâte bien lisse.
  4. Couvrir et laisser reposer env. 30 min. à température ambiante.
  5. Faire fondre un peu de beurre à rôtir dans une poêle antiadhésive ou y mettre un peu d’huile.
  6. Verser juste ce qu’il faut de pâte dans la poêle pour recouvrir le fond d’une couche très fine. Baisser le feu. Lorsque le dessous est bien cuit et se détache facilement, retourner la crêpe et terminer la cuisson.
  7. Couvrir et réserver au chaud. Procéder de la même façon avec le reste de pâte.

Préparation du sirop à l’orange

  1. Dans une grande poêle, porter l’eau à ébullition avec le sucre sans remuer. Baisser le feu et laisser frémir en donnant un mouvement de va-et-vient à la poêle jusqu’à obtention d’un caramel doré.
  2. Retirer la casserole du feu, ajouter le beurre, le zeste et le jus d’orange ainsi que la liqueur, puis laisser réduire le tout en sirop.
  3. Ajouter les crêpes l’une après l’autre, les plier en 4.
  4. Répartir les suprêmes d’orange par-dessus, arroser de cognac, faire flamber, hotte aspirante éteinte.
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