Propos recueillis par Vincent Lafargue
Photo : DRT’es-qui? Damien Savoy, 31 ans, marié à Maria, heureux père de deux enfants (et d’un troisième en février), habitant le canton de Fribourg.Tu t’engages où? Je suis organiste titulaire de la basilique Notre-Dame (église rouge) de Neuchâtel. Je joue aussi dans les paroisses de Châtel-Saint-Denis et Poliez-Pittet, et je dirige quatre chœurs, dont deux chœurs d’église, à Botterens et au Crêt.
Damien, l’Eglise de demain sera… ? … jeune, engagée et belle. Belle, elle le sera par sa sainteté, mais aussi, je l’espère, en cultivant cette beauté artistique qu’elle a toujours encouragée.
Baudelaire disait que la musique creuse le ciel. Creuse-t-elle ton ciel ? Oui. La musique a un aspect intrinsèquement spirituel, comme le disait saint Augustin avec sa célèbre formule : « chanter c’est prier deux fois ». Ceci dit, lorsqu’on est le dimanche derrière ses claviers, il est parfois difficile de vivre pleinement la célébration. Mais cette sacralité de la musique nourrit l’organiste même quand il passe le Notre Père à préparer ses partitions pour l’Agnus !
Comment se passe le contact avec les autres acteurs de la liturgie ? Très bien. Même lorsque j’essaie de proposer mon regard de musicien professionnel et mes goûts personnels de manière parfois critique, c’est en général bien accueilli. Il me tient à cœur d’avoir d’excellents contacts avec les personnes que je côtoie en Eglise. Il y a longtemps que je fais de la liturgie puisque la première fois que j’ai joué « Entre le bœuf et l’âne gris » à la messe de Noël, j’avais 8 ans. Plus que la connaissance théorique de la liturgie, l’important est de sentir ce qui se passe sur le moment : improviser pour accompagner un rite qui se prolonge ou répondre en musique à ce qu’a dit le prêtre dans son homélie sont des compétences appréciées des autres acteurs de la liturgie.
Un compositeur préféré ? J’aime presque tout ! Evidemment, comme organiste, aimer Bach est une évidence ! Mais j’y ajouterai un compositeur moins connu : Louis Vierne, titulaire jadis à Notre-Dame de Paris, qui a inauguré l’orgue de la basilique de Neuchâtel en 1929 et qui s’est impliqué dans la construction de cet instrument.
Que dirais-tu aux jeunes pour qu’ils s’engagent en Eglise ? Je leur dirais que l’important est de ne pas avoir peur de s’engager là où l’on est. Chacun a des charismes, des compétences, et on en retire énormément. Commencer par servir la messe, être lecteur dans sa paroisse apporte beaucoup : j’ai commencé moi-même ainsi.
Par François-Xavier Amherdt
Photo : CiricCertes, la pastorale dite « spécialisée » – mais chaque pastorale n’a-t-elle pas un objectif et des destinataires spécifiques ? – ne peut pas « promettre » aux personnes atteintes de différents handicaps que le Seigneur va toutes les guérir « miraculeusement ». La dimension physique des guérisons demeure exceptionnelle ; elle peut advenir dans un lieu de pèlerinage ou par l’intercession d’un(e) saint(e). Le sacrement des malades y fait d’ailleurs explicitement allusion.
Reste que les miracles de l’Evangile, dont celui du sourd s’exprimant difficilement, propre à Marc (7, 31-37), sont narrés comme offrant les signes du Royaume déjà présent en la personne du Christ. Et la Parole de Dieu, accueillie dès notre baptême lors de l’Ephata (en araméen, « ouvre-toi », la formule utilisée par Jésus pour supprimer la surdité et le bégaiement de l’homme), par les signes de croix sur les yeux, les oreilles, la bouche, le front, les épaules et le cœur, continue encore aujourd’hui de nous délivrer des maux qui nous affectent tous et toutes.
Lorsque nous refaisons ce triple geste au moment de la proclamation de la Bonne Nouvelle dans les diverses liturgies, nous pouvons tous sans exception
(re)demander au Père, du fond de notre être : « Viens travailler les sens de nos corps et de nos âmes, que nous puissions accueillir ton œuvre en vérité ; viens nous arracher à nos paralysies, nos aveuglements et nos enfermements, qui que nous soyons. »
C’est pour cela d’ailleurs que la catéchèse spécialisée aime tant recourir aux démarches et rituels symboliques. Les personnes handicapées sont souvent bien moins sourdes, aveugles ou boiteuses que ceux que le monde considère comme « bien portants ». Et elles proclament l’œuvre de l’Esprit avec ô combien plus de force que beaucoup d’entre nous, qui ne sommes guère des « disciples missionnaires ». Le pape François ne s’y trompe pas : en toute occasion, il prend dans ses bras des enfants, des jeunes, des adultes souffrant de handicap pour signifier l’étreinte du Père céleste et leur redire : « Ouvre-toi. »
Par Thierry Schelling
Photo : CiricDu 10 au 12 juin 2016, dans le cadre du Jubilé de la Miséricorde, les personnes malades et handicapées avaient été conviées par le pape François pour un temps fort. Et ses paroles le furent tout autant ; la citation est longue mais lourde de réalisme : « On considère qu’une personne […] portant un handicap ne peut pas être heureuse, parce qu’elle est incapable de mener le style de vie imposé par la culture du plaisir et du divertissement. A cette époque où un certain soin du corps est devenu un mythe de masse et donc une affaire économique, ce qui est imparfait doit être masqué, parce que cela porte atteinte au bonheur et à la sérénité des privilégiés et met en crise le modèle dominant. Il vaut mieux maintenir ces personnes séparées, dans une ‘‘enceinte’’ – peut-être dorée – ou dans les ‘‘réserves’’ du piétisme et de l’assistantialisme, afin qu’elles n’entravent pas le rythme du faux bien-être. Dans certains cas, on soutient même qu’il vaut mieux s’en débarrasser le plus tôt possible, parce qu’elles deviennent un poids économique insoutenable en un temps de crise. »
Salve d’applaudissements sur la place Saint-Pierre, car le Pape dénonce le maquillage du bien portant hypocrite que notre monde veut nous vendre au profit de la vie vraie, limitée certes – et parfois gravement –, mais toujours incommensurablement digne, parce qu’humaine, justement !
Et de conclure : « C’est notre capacité d’aimer qui nous rendra heureux, et seulement cela ! » Avec un critère de discernement bien utile : « La manière dont nous vivons la maladie et le handicap est un indice de l’amour que nous sommes disposés à offrir. La manière dont nous affrontons la souffrance et la limitation est un critère de notre liberté de donner sens aux expériences de la vie, même lorsqu’elles nous semblent absurdes et imméritées. »
Hors texte, il avait ajouté que les paroisses qui fermeraient leurs portes aux handicapés…devraient être closes pour crime de lèse-humanité ! A bon entendeur…
«Ce qui manque dans les villes, c’est l’écoute. Passer des petits moments ensemble, entrecoupés de belles paroles. Souvent, lorsque j’arrive aux Tables, je suis fatiguée, j’ai de la peine à me concentrer. Puis, petit à petit, je parviens à me rassembler. Alors je me sens mieux.»
Par Nicole Andreetta
Dessin de SoniaLes Tables ainsi évoquées par Sonia sont des rendez-vous hebdomadaires qui ont pour cadre des cafés-restaurants du canton de Genève. L’Association Co’errance est à l’origine de cette démarche. Son intention est de proposer à toute personne isolée, fragile psychiquement, en situation précaire… un moment de rencontre où l’on partage, en toute convivialité, une boisson ou un repas. Il s’agit également d’offrir une présence pour se soutenir mutuellement et partager le poids et les difficultés de la vie quotidienne au-delà des cloisonnements sociaux.
Des animateurs bénévoles, expérimentés dans le domaine de la santé psychique, assurent la permanence. Chacun, quels que soient son âge, son statut social ou sa motivation, est le bienvenu.
« Cette manière de se rencontrer permet à chacun d’avancer à son propre rythme. C’est un moment bienfaisant dans une société en pleine mutation où il faut progresser sans cesse pour ne pas être largué », explique Béatrice Louis, l’une des initiatrices des Tables.
Ce soir-là, dans un café du centre-ville de Genève, silence et bribes de conversation se succèdent. Tout à coup, Garam se lance et parle de ses vacances dans le Jura. Garam n’est pas un grand causeur, il s’exprime avec parcimonie. Alors tout le monde l’écoute avec attention. Ce moment de sa vie qu’il prend le temps de partager devient important pour chacun. Puis Garam se tait. Il ne reprendra plus la parole. Mais la discussion est lancée. A la fin, Sonia conclura : « C’est ça la bonne vie, la belle vie, la vraie vie ! C’est pourquoi je continue à venir. J’ai besoin des autres pour m’enraciner dans cette atmosphère de Co’errance ! »
Co’errance propose encore un atelier-théâtre, des soirées-jeux, des balades le dimanche… différentes activités pour aider à trouver du sens dans une vie pleine d’errance.
Par Claude Jenny et Sœur Franziska Huber de la Librairie Saint-Augustin, Saint-Maurice
Des livres
«Comment supporter patiemment les personnes qui nous dérangent»
Un petit livre qui connaît un joli succès et qui est destiné à nous « apprendre à avoir de la patience avec les autres comme Dieu en a avec nous » ! Supporter avec patience étant l’une des œuvres de miséricorde dont devrait s’acquitter chaque chrétien, l’auteur, Christian Albini, puise des clefs dans l’Ecriture sainte pour nous aider à supporter ceux que nous n’arrivons pas à aimer. Un livre utile !
Editions des Béatitudes, Petits traités spirituels. 65 pages.
La spiritualité de Maurice Zundel, décédé en 1975, ne perd en rien de sa pertinence et continue de susciter un large intérêt. France-Marie Chauvelot propose une anthologie originale basée sur l’œuvre orale du prêtre suisse en apportant de multiples éléments, en grande partie inédits, qui ouvrent des « fenêtres sur la vie de l’homme avec Dieu », écrit l’abbé Marc Donzé, président de la fondation Maurice Zundel, qui a signé la préface.
La théologienne alsacienne protestante Marion Muller-Colard, devenue très médiatique grâce à son dernier ouvrage sur « L’Intranquillité », propose les commentaires de l’Evangile qu’elle a rédigés durant trois ans pour le journal « Réforme ». Une auteure qui signe une lecture très personnelle de l’Evangile.
Le film de Renaud Fely et Arnaud Louvet raconte le combat mené par François d’Assise et ses frères pour aider les pauvres, au grand dam d’une Eglise de l’époque qui ne voulait pas de ce nouvel ordre religieux du Poverello. Ce film, peu goûté par la critique à sa sortie cet été, est désormais disponible en DVD.
Le troisième opus d’un en-semble choral, les DAC (Dei Amoris Cantores), qui évangélisent par une musique conçue pour toucher les cœurs en profondeur. Des voix superbes, des compositions originales. Du pur chant polyphonique dans toute sa grandeur.
Par Vincent Lafargue Photo: DRUne chose est de penser la question de la mort assistée dans un bureau, un code de lois civiles ou de droit canonique à la main. Une autre est d’être confronté sur le terrain aux réactions des proches, notamment des enfants.
Après la mort de son grand-père, décédé grâce aux « bons soins » d’Exit, un petit garçon m’interpelle et me dit : « Tu sais, grand-papa, il ne m’aimait plus. Il a voulu mourir. »
J’avoue avoir cherché mes mots… n’avoir pas trouvé… et avoir pleuré avec lui. Cet enfant avait parfaitement conscience de ce qui s’était passé : son grand-père s’était donné la mort. Comme chaque personne confrontée à un suicide – mais sans les armes que les adultes déploient pour supporter leur chagrin – il se trouvait face à une foule de questions, une foule de « Pourquoi ? » qui tournaient dans son esprit et auxquels aucun accompagnateur d’Exit n’est venu l’aider à répondre. Cet enfant mettra des années à guérir de ce deuil.
Je ne juge pas les personnes qui estiment souffrir à un point tel que la vie leur devient insupportable. Je leur demande simplement de mettre dans la balance la souffrance de leurs proches – et notamment celle des enfants – après leur suicide. RIEN, à mon humble avis, ne justifie d’infliger des années de souffrance à un enfant. Rien.
Maman, médecin-adjointe au CHUV et femme engagée dans sa foi, Bérengère Rozier semble avoir une vie trépidante. Pourtant, lorsque vous la rencontrez, c’est une femme calme qui affiche une grande paix intérieure.
Propos recueillis par Véronique Benz Photo : DR8h30 mercredi matin, je retrouve Bérengère Rozier à la sortie de la messe à Renens. Comme elle travaille à 80%, le mercredi est son jour de respiration. « Mercredi matin, je commence par participer à l’Eucharistie. J’aime ces célébrations de semaine où nous avons du temps pour nous recueillir. Je consacre la journée à des activités avec les enfants, je prends du temps pour moi, je suis à la maison. »
Le reste de la semaine, la vie de Bérengère est rythmée par sa famille et son travail. « Le matin j’accompagne mes enfants à l’école. J’arrive au CHUV entre 8h et 8h30. Mon quotidien s’écoule entre consultations, enseignements, formations et management. » Une journée qui est généralement ponctuée par les appels téléphoniques de ses enfants. Le soir, elle rentre chez elle entre 18h30 et 19h15. « Tout de suite ma vie de maman reprend le dessus : faire les devoirs avec les enfants, préparer les repas, ranger la maison, etc. »
Bérengère Rozier avoue avoir toujours eu des engagements au sein de l’Eglise. « Enfant, j’aimais lire à la messe, j’ai également été choriste. Durant mon adolescence, j’ai eu la chance de participer à des rencontres organisées par la communauté de l’Emmanuel. Puis j’ai rencontré des aumôniers dominicains à la faculté de médecine de Montpellier. J’ai commencé alors un cheminement spirituel. J’avais beaucoup de questions. On vit des choses pas forcément faciles, il faut savoir mettre des limites à son engagement de médecin. »
Impliquée dans sa paroisse
Arrivée en Suisse, Bérengère a tout de suite pris contact avec la communauté paroissiale où elle habitait. « J’ai assez vite senti que j’étais bien à Renens. J’ai accompagné mes enfants durant leur parcours catéchétique, mais j’avais le désir de m’engager davantage, alors j’ai été voir le prêtre et je lui ai demandé s’il avait besoin de moi. » Le prêtre lui a proposé de former un groupe de lecture d’Evangile. « Nous avons commencé par lire l’Evangile en faisant des liens avec notre quotidien. Il me semblait que cette manière était très intellectuelle. J’ai alors suggéré des images pour porter notre discussion. Après avoir réfléchi sur l’exégèse du texte, avec le support de photos nous échangeons dans des domaines plus émotionnels. » A côté de cela, Bérengère fait également partie d’un groupe de révision de vie.
Bérengère essaie de mettre de la cohérence dans sa vie de femme, de mère et de médecin. « Etre cohérente entre sa vie de foi, sa vie personnelle et sa vie professionnelle n’est pas simple tous les jours », reconnaît-elle. « Lorsque du jour au lendemain mon mari est parti, cela m’a fait un énorme choc, mais cela m’a permis de mettre de la cohérence dans ma vie. Il y a un but et il y a un chemin avec ses difficultés. De nombreux soutiens existent. J’ai appris à demander de l’aide. Nous pouvons faire de multiples choix et nous pouvons arriver à vivre ces choix. » Bérengère admet qu’assumer ses choix, c’est également assumer les critiques des gens. « Il faut se libérer de certaines règles qui ne sont pas les nôtres, que nous n’avons pas choisies. Tout ce qui nous fait du mal, il faut apprendre à le laisser de côté. »
Art et foi
« Ces dernières années, j’ai recherché dans mes rencontres la spiritualité chez les personnes afin de pouvoir en discuter et la partager. J’ai des amis bouddhistes, animistes, évangéliques. Les gens ont besoin de connexion spirituelle. » Dans la vie de foi de Bérengère, l’art contemporain tient une grande place. « Je suis touchée par l’émotion de certains artistes. Dès que je le peux, je vais voir des expositions d’œuvres contemporaines. Avec mon travail je voyage souvent. Lors de ces déplacements, je prends toujours du temps pour aller admirer des œuvres d’art. Je ressens un bien-être à travers leur contemplation. Un bien-être que j’éprouve également lors d’une méditation ou d’une adoration. C’est cette émotion que j’essaie de retrouver dans toutes ces expériences. »
« Ce que vous faites aux plus petits, c’est à moi que vous le faites. » Cette phrase a beaucoup fait réfléchir Berengère. « J’ai envie de voir en chaque
être humain le visage du Christ. Tout comme les gens peuvent voir en moi le Christ. Regarder les personnes avec les yeux du Christ et voir le Christ dans chacun. » C’est ainsi que Bérengère essaie de travailler avec ses patients. « Je les accueille avec beaucoup de respect et de confiance. Au fur et à mesure des rencontres je vois que certains patients sont connectés au niveau spirituel. Certains me disent « je prie pour vous » et d’autres me parlent de leur spiritualité. » Le médecin allopathe trouve essentielle cette unité entre soins et spiritualité.
Biographie
Bérengère Rozier est d’origine française. Elle vit dans notre pays depuis 11 ans. Divorcée, elle est maman de 3 enfants. Médecin-adjointe au CHUV à 80%, elle est spécialisée en rhumatologie, ostéoporose et maladies rares des os.
Par Thierry Schelling Photo : La Vie Dans son message aux malades pour l’année 2015, François rappelle la valeur de son accompagnement, avec réalisme : « un service […] fatigant et pénible » s’il se prolonge dans le temps. Mais « avec une foi vive, nous demandons à l’Esprit Saint de nous donner la grâce de comprendre la valeur de l’accompagnement, si souvent silencieux, qui nous conduit à consacrer du temps à ces sœurs et à ces frères qui, grâce à notre proximité et à notre affection, se sentent davantage aimés et réconfortés ». Il parle de ministère.
D’où sa pensée précise sur le thème de la fin de vie : « Quel grand mensonge se dissimule derrière certaines expressions qui insistent tellement sur la “qualité de la vie”, pour inciter à croire que les vies gravement atteintes par la maladie ne seraient pas dignes d’être vécues ! » C’est le fruit d’une foi tiède qui oublie le sens de paroles telles que « c’est à moi que vous l’avez fait » dans le célèbre texte matthéen (cf. Mt 25). Notre style de vie frénétique, hâtif, accéléré nous ferait « désapprécier » la valeur de perdre, mais plus justement dit, de prendre son temps auprès d’un souffrant : on y expérimente et exerce tout à la fois les qualités de « la gratuité, de l’acte de prendre soin, de se charger de l’autre… », détaille-t-il.
François conclut en rappelant que le commandement d’amour qui caractérise notre foi est double : la sortie de soi vers Dieu, et son corollaire, « la sortie de soi vers le prochain » qu’on résume sous le vocable de « charité » ou « miséricorde » envers autrui. Or, assure-t-il, « la charité a besoin de temps » pour se déployer, comme on a besoin de temps pour accompagner un agonisant.
Il met cela en pratique en janvier 2016 en visitant des patients en état végétatif et des pensionnaires d’un EMS, dans la banlieue romaine. Le communiqué du Saint-Siège est sans appel : « Face à la culture du déchet, le Pape a voulu montrer la grande importance et le prix qu’il accorde aux personnes âgées, aux grands-parents, et la valeur et la dignité de la vie dans toute situation. »
A noter qu’il a réformé (novembre 2016) l’Académie pour la vie – organisme romain pour la réflexion et la recherche sur la vie et sa sauvegarde – en insistant sur l’aspect pastoral et pratique des « théories » sur la vie, le mariage, les soins, la maladie, la souffrance. Et en y incluant notamment une nouvelle catégorie de membres : de jeunes chercheurs de moins de 35 ans pour ouvrir l’Académie sur de nouvelles idées…
Midi tapant. Au 3e étage, 14, avenue de la Gare à Sion, les convives s’installent autour des tables. Le repas peut commencer. Un repas simple, sain et équilibré proposé sous le signe de l’amitié et de la fraternité. Les conversations vont bon train.
Peines, joies, difficultés, grands et petits soucis… tout est bon à partager !
Créé il y a vingt ans par Sœur Marie-Ernest, infirmière en psychiatrie retraitée, l’Accueil Hôtel-Dieu reçoit entre 9h et 16h, chaque jour de la semaine, une quarantaine de personnes. Joëlle Carron, animatrice pastorale, et Marie-Jeanne Mukorugomwa, entourent l’équipe de bénévoles indispensables au fonctionnement du lieu.
La frontière entre les personnes qui accueillent et celles qui sont accueillies est ténue.
Chacun a quelque chose à donner, chacun peut recevoir.
Enseignant retraité, Marc est bénévole depuis deux ans et demi. Il aide à la préparation du repas et assure le service : « Je croise régulièrement des habitués de l’Hôtel-Dieu en ville. Auparavant, je ne voyais pas cette partie de la population. Venir ici m’a ouvert les yeux ! »
Une dame âgée vient régulièrement à l’Accueil Hôtel-Dieu pour manger. Elle trouve ce qui est proposé meilleur que les repas livrés à domicile. Ici, elle rencontre du monde. C’est sa sortie de la journée.
Guadaloupe est une habituée des lieux. De ses doigts de couturière habile elle a, pour le bonheur de tous, confectionné les personnages de la crèche de Noël l’an passé.
Comme le souligne Joëlle : « Dans le respect de la liberté de chacun, nous fonctionnons un peu comme une famille élargie. Le lien premier qui nous relie est un lien fraternel. Un lien qui nous amène, pour un moment, à cheminer ensemble, à nous faire grandir, à nous mettre debout… »
Un service diocésain de la diaconie
Le 16 juin 2017, Mgr Lovey, évêque de Sion, a officiellement inauguré le Service diocésain de la diaconie en mandatant six membres de l’Eglise dont Joëlle Carron. « Il ne faut pas se dédouaner du souci du plus pauvre. Si les chrétiens n’ont pas le monopole de l’attention aux frères souffrants, celle-ci fait véritablement partie de la mission de l’Eglise », dit Mgr Jean-Marie Lovey.
Propos recueillis par Vincent Lafargue
Photo : DRT’es-qui? Justyna Lotocka, 39 ans, théologienne, originaire de Pologne, habitant Lausanne.
Tu t’engages où? Je m’engage en aumônerie auprès des jeunes de l’Université de Lausanne. 50% de mon poste d’aumônerie est au service de l’UNIL-EPFL, 50% au service de gymnases.
Justyna, l’Eglise de demain sera… ? … en renouvellement constant, accueillante à l’image de l’icône de la Trinité.
Quels sont les défis de l’aumônerie de l’UNIL ? Le but de l’aumônerie est évidemment de répondre aux jeunes, à TOUS les jeunes quelle que soit leur religion, leur spiritualité. Un de nos rôles est de veiller à la paix entre les peuples sur le campus, à la promouvoir. Nous organisons donc diverses activités, expositions, célébrations, prières de Taizé, soirées d’échange autour de thèmes spirituels pour que chacun puisse s’exprimer et que le partage entre religions soit une réalité entre nous. Nous emmenons aussi des jeunes pour expérimenter le bénévolat à travers l’une des œuvres de la fondation Mère Sofia, la soupe populaire de Lausanne. C’est l’occasion pour des universitaires de se confronter à la vie des plus pauvres. Des excursions sont aussi organisées (marche dans le désert, montée au Grand-Saint-Bernard, visites touristiques…).
Qu’est-ce que le public de l’université a de particulier pour une aumônière ? Ce sont des personnes de passage. L’accueil a une très grande importance du coup, et les liens qui peuvent se nouer entre elles aussi. Etre créatrice de liens me plaît beaucoup : lorsque je vois que des jeunes venus du monde entier se rencontrent à l’aumônerie et échangent leurs coordonnées, se découvrent moins seuls, alors c’est une grande joie. Parfois aussi, des jeunes qui ont quitté l’université reprennent contact avec moi une ou deux années plus tard et c’est très agréable de voir ce lien qui continue entre eux et Dieu.
Une anecdote ? Ce jeune qui se rit des personnes « croyantes non pratiquantes » car il est exactement l’inverse : il se dit agnostique mais participe aux prières de Taizé et va régulièrement à Taizé lui-même : « Moi je suis pratiquant mais pas croyant ! » dit-il. Il est à l’image de ce que nous pouvons proposer ici : beaucoup de jeunes sont en profonde recherche spirituelle, en recherche de Dieu, de valeurs. Ils ne sont pas forcément liés, dans leur identité, à une tradition ou une religion, mais ils cheminent. Dieu agit à sa manière dans le cœur de chacun… et ces jeunes sont formidables !
Dé•connexion Re•connexion Une spiritualité chrétienne du numérique ?
Le père Ludovic Frère, qui reçoit les pèlerins à Notre-Dame de Laus, livre une réflexion sur la manière d’intégrer le numérique dans la vie spirituelle. Smartphones, tablettes et autres bidules connectés nous relient magnifiquement aux autres et sont de nouveaux outils d’évangélisation. Mais ils présentent aussi des dangers! Le chrétien doit donc savoir trier. Conseils d’un théologien pour utiliser le numérique.
La grande pédagogue Maria Montessori pouvait bien l’affirmer, elle qui a passé sa vie à étudier le développement de l’enfant et à prôner un enseignement qui le considère dans son ensemble. Elle a ouvert la voie à une école où l’enfant apprend autrement. Et avec plaisir !
Editions Desclée de Brouwer, sortie début septembre
Acheter pour 31.40 CHFComment être chrétien dans un monde qui ne l’est plus Le pari bénédictin
Comment les chrétiens peuvent-ils faire face à un environnement de plus en plus hostile à la pensée chrétienne? Selon le journaliste américain Rod Dreher, auteur de cet essai, les chrétiens doivent tout simplement s’inspirer du modèle de saint Benoît «pour bâtir des communautés ouvertes, engagées et solidaires au milieu du monde». La traduction d’un livre très lu outre-Atlantique.
L’automne, temps idéal pour marcher! Donc peut-être pour recourir à ce guide de la journaliste Gaële de La Brosse qui nous fait découvrir de multiples autres chemins que celui de Compostelle, menant vers un sanctuaire ou permettant de cheminer sur les traces d’un saint. Une trentaine d’itinéraires dans l’Hexagone pour se mettre en route !
La Procure et le magazine «Panorama» ont décerné le Prix du Livre de spiritualité 2017 à la théologienne protestante Marion Muller-Colard pour son dernier livre, «L’intranquillité», que nous avions présenté dans cette rubrique.
Ouvrages disponibles notamment dans les librairies Saint-Augustin de Saint-Maurice (avenue de la Gare, tél. +41 24 486 05 50, librairievs@staugustin.ch) ou de Fribourg (rue de Lausanne 88, +41 26 322 36 82, librairiefr@staugustin.ch)
Par Pascal Bovet
Photo : Jean-Claude Gadmer La vallée connaissait les rochers et les forêts ; c’étaient les matériaux pour la construction des maisons.
Le XXe siècle a « inventé » le béton : il a remonté la vallée de la Dixence et produit le fameux barrage-poids de béton.
Plus bas, à Hérémence, quand le besoin d’une nouvelle église s’est fait sentir, le béton s’est imposé.
Ainsi aujourd’hui, dans la vallée, avec un dessin plus élaboré qu’un barrage, se dresse l’église d’Hérémence au milieu du village.
De la montagne, on y retrouve les faces ciselées, découpées, creusées… c’est le paysage de la région.
Du barrage, même puissance du béton qu’on n’a pas économisé ; il faut du solide, qui résiste au temps, On attend cette qualité du barrage et de l’église : qui des deux durera plus longtemps ?
Le barrage est là-haut, seul. L’église est au milieu du village et couvre de l’ombre de sa masse les maisons traditionnelles en bois, brunies par le soleil des ans, blotties à ses pieds, comme les poussins sous la poule ou les brebis autour du berger : sécurité, confiance, ralliement.
L’église est jeune d’un demi-siècle, le village est « de toujours » : belle rencontre des âges !
Coiffée de la croix, elle porte haut dans le ciel du Val d’Hérens le signe d’une présence chrétienne.
Une autre visite nous conduirait à découvrir la vie plus intime de cette église.
Architecte : Walter Föderer, Zurich, église consacrée en 1971.
Choisir le thème de la fin de vie, c’est traiter du moment le plus sensible de la vie de chaque être. Pour le chrétien, ce devrait être une étape sereine, vécue dans la foi et l’accompagnement de l’Eglise. Mais dans une société davantage imprégnée de choix individualistes, et avec un vent favorable pour le suicide assisté, le sujet se complexifie. Petit vade-mecum de questions qui taraudent les esprits et auxquelles l’Eglise doit répondre.
Par Claude jenny
Photos : Ciric, DRRésumons ce que l’Eglise dit aujourd’hui sur ce thème si délicat de la fin de vie.
Suicide assisté : c’est non
L’Eglise dit clairement son opposition au suicide assisté (lire la rubrique « Bible » de l’abbé Amherdt en page VI). Le pape l’a dit aussi : on ne tue pas la vie ! On doit accompagner la fin de vie (lire l’article « Theo » de l’abbé Schelling en page VIII) : « Je ne peux pas concevoir le suicide assisté », disait Mgr Jean-Marie Lovey en réponse à une religieuse valaisanne qui prône publiquement le contraire. « L’Eglise prend fait et cause pour la vie avec le respect et la dignité totale de l’être humain quel que soit son état. En contribuant à banaliser la mort et le suicide des personnes, on donne un signal contraire », explique l’évêque du diocèse de Sion 1. « Le suicide assisté est un acte gravement contraire à la loi divine. C’est un homicide contre soi-même », lâche l’abbé Jean-Michel Moix, vicaire à Champéry. Une voix discordante existe, celle d’un prêtre belge, l’abbé Gabriel Ringlet, qui s’exprime régulièrement en Suisse romande. Il a publié un livre sur le sujet 2.
La Conférence des évêques suisses (CES) a mandaté sa commission d’éthique pour travailler à la rédaction de directives que les évêques devraient étudier durant leur session d’automne. Le nouveau président de cette commission, François-Xavier Putallaz, a accepté de s’exprimer à titre personnel. Pour ce professeur de philosophie à l’Université de Fribourg, « c’est inacceptable, car un suicide est toujours un drame. Le fait qu’il intervienne avec Exit n’y change rien. « C’est une violence contre soi-même, contre Dieu, et surtout contre les autres », ajoute-t-il. « La vie est un don qu’il ne nous appartient pas de supprimer », corrobore l’abbé Pierre-Yves Maillard, vicaire général du diocèse de Sion. Il y voit un enjeu de société. « Chaque personne, quel que soit son âge ou son état, doit se sentir utile, valorisée. Jusqu’à la fin », ajoute l’abbé Maillard.
1 « Nouvelliste », 25.2.2016 2 « Vous me coucherez nu
sur la terre nue », Albin Michel, 2015
Soins palliatifs : c’est oui
Les soins palliatifs aident à soulager la douleur physique.
Si l’Eglise condamne le suicide assisté, elle dit oui aux soins palliatifs. « Car ce n’est pas supprimer la vie. C’est soulager la souffrance pour permettre de consentir à la mort. C’est éthiquement tout différent », explique François-Xavier Putallaz. L’évêque de Sion estime aussi que « ce n’est pas la même chose de donner une substance à quelqu’un pour apaiser ses souffrances ou lui donner une boisson létale qui entraînera la mort. Le but de la sédation est de maîtriser la douleur et la souffrance, pas de donner la mort. » 1
Le but des soins palliatifs étant d’éviter la souffrance physique, encore faut-il que l’accompagnement de la personne souffrante ou en fin de vie soit de qualité. C’est là que se situe le véritable enjeu.
Lorsqu’une personne entre dans un EMS, c’est pour y vivre la dernière étape de sa vie. « C’est notre mission de lui offrir un accompagnement global qui soit rempli de compétences », dit Philippe Genoud, directeur de la Maison Saint-Sylve, à Vex. « Nous avons sensibilisé tous nos collaborateurs à cette mission. Pour qu’ils comprennent que c’est aussi une humanité qui vient à eux. Et qu’il importe de donner sens à ce qu’ils font », explique-t-il.
« Notre rôle est d’offrir la meilleure alternative au suicide assisté, donc un accompagnement de qualité, y compris au moyen des soins palliatifs. Nous arrivons à de bons plans de soins. Tout le personnel a été sensibilisé et formé à cet accompagnement de fin de vie qui implique évidemment des soins médicaux, mais aussi une démarche empathique, une écoute active, une démarche altruiste », commente le directeur de Saint-Sylve. Une question s’impose : tous les EMS garantissent-ils en termes de compétences cet accompagnement de qualité ? D’où l’importance de la formation. « Toute l’équipe de la pastorale de la santé va suivre une formation sur ce thème », annonce François Vallat, responsable de la pastorale de la santé pour l’Eglise fribourgeoise.
1 « Nouvelliste », 25.2.2016
Accompagner avec Exit : c’est oui
Accompagner aussi bien que faire se peut.
L’Eglise doit-elle accompagner une personne qui a recours à Exit ? « L’Eglise doit accompagner toute personne en fin de vie. C’est un geste d’amour, d’infinie tendresse. Donc le prêtre ou l’agent pastoral doit accompagner, et même jusqu’au bout, jusqu’à la frontière s’il en a la force. Mais il doit être d’une intransigeance absolue par rapport à l’acte », explique le professeur Putallaz. « Je dirais à la personne : comme chrétien, je ne peux pas approuver votre geste. Mais, si vous le souhaitez, je reste disponible pour continuer d’échanger avec vous, pour vous accompagner », explique Bernadette Lopez, aumônière à l’Hôpital de Morges. « Bien sûr qu’il faut accompagner. Mais c’est au choix du prêtre ou de l’agent pastoral de savoir jusqu’où il peut aller », estime l’abbé Pascal Desthieux, vicaire épiscopal pour le canton de Genève.
Célébration : c’est oui
Tout catholique qui décède a droit à une cérémonie funèbre. Y compris les personnes qui se suicident. Donc aussi celles qui recourent à Exit. Les avis sont quasi unanimes : le prêtre doit accepter. Les exceptions sont rares. « Comment il parlera du départ de la personne durant son homélie lui appartient : c’est à lui de sentir comment dire les choses au mieux », selon l’abbé Pascal Desthieux. « Il faut dire la vérité, ne rien cacher », estime le professeur Putallaz.
Onction des malades: c’est selon…
Tout catholique malade ou dont la fin de vie approche peut recevoir l’onction des malades. Le prêtre peut-il donner ce sacrement à une personne qui recourt à Exit ? « En principe, si la personne a la ferme intention de mettre fin à ses jours, je dis non, car l’onction des malades est un sacrement de la vie, de la guérison. On ne peut pas en même temps demander l’aide de Dieu pour vivre et vouloir se donner la mort », estime l’abbé Pierre-Yves Maillard, qui précise toutefois qu’il peut en aller autrement pour une personne inscrite à Exit et qui demanderait le sacrement sans lien immédiat avec le passage à l’acte, et que le discernement est parfois délicat. « Je ne peux pas donner l’absolution à une personne qui n’a pas de repentir pour ses péchés ou pour l’intention qu’elle a de recourir à Exit. Et je ne peux conférer l’onction des malades puisque ce sacrement procure aussi le pardon des péchés. », dit quant à lui l’abbé Jean-Michel Moix.
« Il faut introduire là la notion de temporalité et bien distinguer toutes les situations. Notamment le moment où le sacrement est demandé », commente le professeur Putallaz. Pour l’abbé Vincent Lafargue, curé d’Evolène, « on ne sait jamais si la personne ne va pas changer d’avis et renoncer au dernier moment. Je peux dire à une personne qui va partir avec Exit : je vous donne l’onction pour que Dieu change votre cœur », dit-il joliment.
L’abbé Pascal Desthieux ne souhaite pas qu’il y ait une directive sur ce point car « je ne peux pas exclure de donner le sacrement. Tout dépend du cheminement de cette personne et du moment où elle manifeste ce désir ». « Il faut distinguer chaque cas. Laisser la liberté à la conscience du prêtre », conclut Cathy Espy-Ruf.
Exit recrute fort
La présence d’Exit n’est pas nouvelle. Cette organisation nationale – la plus active en Suisse romande – affiche 125 000 adhérents, dont 24 225 en Suisse romande. Elle a donné la potion létale à 216 personnes en 2016 en Romandie. « Cessons de faire grand cas de quelques cas ! » dit Cathy Espy-Ruf, responsable de la pastorale de la santé pour l’Eglise catholique de Genève. A la veille de l’été, un courant alémanique s’est manifesté au sein d’Exit visant à élargir ses critères d’inter-vention. Aujourd’hui, il faut souffrir d’un mal incurable ou de « polypathologies invalidantes liées à l’âge ». Demain, il suffira peut-être simplement d’avoir sa capacité de discernement pour le demander. Court-on au dérapage incontrôlé ?
Par François-Xavier Amherdt
Photo : Ciric« Dans la vie comme dans la mort, nous appartenons au Seigneur » (Romains 14, 8b). Ces paroles fortes de l’Epître aux Romains, placées dans le contexte de l’exhortation de Paul en faveur de la charité envers les personnes « faibles » et vulnérables, expliquent pourquoi l’Eglise catholique continue de privilégier les soins palliatifs face à l’accompagnement au suicide et à l’euthanasie. Il faut bien sûr tout faire pour atténuer ou évacuer la souffrance, y compris si cela peut hâter quelque peu la fin de l’existence. Mais il convient de nous en remettre « naturellement », sans aucun « acharnement disproportionné », à la volonté de Dieu, qui donne et accueille la vie. « En effet, nul d’entre nous ne vit pour soi-même, comme nul ne meurt pour soi-même. Si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur, et si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur », affirme Paul dans la plus grande de ses lettres (Romains 14, 7-8a).
Pour l’apôtre des nations, cela signifie que notre vie ne nous appartient pas : nous sommes appelés à respecter infiniment la dignité de l’ensemble de nos frères et sœurs fragiles, notamment les personnes mourantes, atteintes de différentes pathologies handicapantes ou marquées par le grand âge. Qui sommes-nous pour perdre toute considération à l’égard de notre prochain malade, et décréter que son existence n’a plus de sens ? Souvent la demande de suicide assisté ou d’euthanasie provient du regard qui est porté par les proches. Et lorsque la personne « fatiguée de la vie » est entourée d’amour, précise le personnel soignant engagé dans les unités de soins palliatifs, voilà que cette requête tombe la plupart du temps.
« Car le Christ est mort et revenu à la vie pour être le Seigneur des morts et des vivants. Mais toi, pourquoi juger ton frère ? Et toi, pourquoi mépriser ton frère ? », ajoute Paul. Cela vaut à la fois pour le respect de la dignité de chaque être, comme d’ailleurs pour le non-jugement envers ceux qui décident d’en finir avec leur vie. Qui sommes-nous pour nous permettre de juger quiconque ?
Poursuivant sa méditation sur l’Hymne à la charité (1 Co 13) 1, le pape François nous invite à nous libérer de la jalousie. Alors que l’envie nous porte à nous centrer sur nous-même, l’amour vrai conduit à se réjouir du succès des autres.
Par Bertrand Georges
Photo : DRA qui n’est-il jamais arrivé de se sentir un peu mal à l’aise en raison du succès des autres, ou de ne pas pouvoir s’en réjouir ? Pour le pape François, l’amour vrai, qui nous invite à regarder les personnes avec le regard de Dieu, nous aide à ne pas sentir le succès d’autrui comme une menace et nous libère du goût amer de l’envie. Cet amour, dit-il, « accepte que chacun ait des dons différents. Il permet donc de découvrir son propre chemin pour être heureux, permettant que les autres trouvent le leur ».
Ne pas jalouser, donc… Pourtant le Pape nous donne une autre indication éclairante lorsqu’il dit que l’amour « est ce qui me porte à m’opposer à l’injustice qui consiste en ce que certains ont trop et que d’autres n’ont rien ». Dans ce sens, je pense que la jalousie peut également être un signal qui révèle un besoin de justice et de reconnaissance. L’enfant agacé par son frère à qui tout réussit est-il simplement envieux, ou manifeste-t-il un manque de confiance en lui, un besoin d’être valorisé, un désir d’équité ? Les parents sauront être attentifs à aider leurs enfants à se réjouir du bonheur des autres tout en valorisant chacun dans ses richesses propres.
Et dans le couple ? Qu’en est-il de cette jalousie nourrie par un désir de possession exclusive qui revêt le visage de l’inquiétude, de la peur, parfois du soupçon ? N’est-il pas normal d’être jaloux lorsqu’on aime ? « Il y a dans la jalousie plus d’amour-propre que d’amour », disait La Rochefoucauld. Ces excès de possessivité témoignent de l’amour de soi plus que de l’autre.
Ceci dit, montrer trop d’intérêt à d’autres personnes peut créer chez le conjoint un sentiment d’insécurité qui engendre la méfiance. Et il n’est pas très agréable non plus de se sentir toujours suspecté. La confiance mutuelle et les sentiments exprimés, qui dispensent de quêter ailleurs son besoin d’être aimé ou reconnu, sont des chemins pour un amour libéré de la jalousie.
Par François-Xavier Amherdt
Photo : CIRIC« Rien n’est voilé qui ne sera révélé, rien de caché qui ne sera connu. Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le au grand jour ; et ce que vous entendez dans le creux de l’oreille, proclamez-le sur les toits. » (Matthieu 10, 26b-27)
En Jésus-Christ, Dieu se « ré-vèle » à tous sans exception, surtout aux humbles et aux petits. Les deux termes ré-vélation et dé-voilement signifient « enlever le voile ». Ce qui jusqu’alors était réservé à un peuple et à une élite, voilà qu’avec le Fils de Dieu qui a pris chair humaine, tous peuvent y avoir accès. « Père, je te bénis d’avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l’avoir révélé aux tout-petits. » (Matthieu 11, 25)
Le mystère du projet divin, « enveloppé de silence » depuis des siècles (Romains 16, 25), s’est ainsi manifesté au grand jour : Dieu veut tout récapituler en son Fils et offrir à tous les êtres le salut (Ephésiens 1, 9-10), autant aux juifs qu’aux païens et à l’ensemble des nations. A la mort du Christ sur la croix, le voile du sanctuaire qui séparait le peuple du Saint des saints dans le temple de Jérusalem se déchire en deux, de haut en bas (Matthieu 27, 51). Désormais, l’accès au Père est libre et possible sans retenue, sans peur ni dissimulation.
Le mystère du face-à-face Alors que Moïse avait dû revêtir un voile sur son visage en descendant du Sinaï, où il avait pu contempler la gloire du Seigneur, de peur que les fils d’Israël en soient éblouis, c’est le visage découvert que nous pouvons désormais lire la Parole, à l’exemple de Paul, ministre de l’Alliance nouvelle (2 Corinthiens 3, 4-17). Et c’est la face dévoilée et le « chapeau bas » que nous reflétons la gloire du Christ. « Nous tous qui, le visage dévoilé, contemplons comme en un miroir la gloire du Seigneur, nous sommes transformés en cette même image (du Christ), allant de gloire en gloire, comme de par le Seigneur qui est Esprit. » (2 Corinthiens 3, 18)
Plus besoin donc de voile ni de couvre-chef, ni pour les hommes, ni pour les femmes. Nous sommes conduits au mystère du face-à-face : Apocalypse, c’est-à-dire Révélation.
Par Pascal Bovet
Photo: Jean-Claude GadmerParis a son Panthéon où reposent avec honneurs nationaux les personnes marquantes de l’histoire moderne de la France. Le canton de Fribourg a son petit panthéon où sont honorés les artisans de la vie politique et économique du canton.
Suite aux chauds « frottements » entre radicaux et conservateurs qui se disputaient le pouvoir au XIXe siècle, et en mémoire d’une fameuse journée qui avait rassemblé les forces conservatrices à Posieux (1852), aux portes de Fribourg, il fut donc décidé (1884) d’édifier un mémorial : une chapelle dédiée au Sacré-Cœur.
Mais la construction ne commença qu’en 1911 et la bénédiction marquant la fin des travaux n’eut lieu qu’en 1924. Des peintures, plus tardives encore, mettent en évidence les artisans de la gloire fribourgeoise du moment : côté gauche, sous le signe de l’épée, l’autorité religieuse avec l’évêque Mgr Besson, l’abbé Joseph Bovet, chantre du pays. aux côtés d’un bien humble prévôt, et côté droit, les autorités politiques, dont José Python, l’homme d’Etat lié à la création de l’Université.
Epoque de cohésion Cette chapelle commémorative et politique porte la marque de son temps : celle d’une république chrétienne, fondée sur une cohésion entre le politique, le religieux, le culturel, l’artisanat et l’armée. Un tout qui fait corps, sous la bannière de la foi au Sacré- Cœur.
Comme toute institution humaine, cette œuvre est marquée par le temps et réclame un rafraîchissement qui est à l’orde du jour.
Architecte : Alphonse Andrey
Décoration : Oscar Cattano
Par Nicole Andreetta Photo : Ciric« Au collège, il y a des filles qui portent un foulard, ça fait classe ! » Cette remarque de notre fille souligne le côté positif de la diversité, ainsi que l’enrichissement qu’elle pourrait engendrer.
Sa grand-mère, en revanche, ressent le port du voile comme une régression, voire un danger. C’est en luttant et en s’affirmant que les femmes de sa génération ont obtenu le droit de vote en 1971. Difficile dans ces circonstances d’associer liberté et foulard.
Mon arrière-grand-mère, paysanne d’origine piémontaise, portait quotidiennement un fichu noué sur la nuque. Elle le faisait par tradition et commodité.
Il y a moins de cinquante ans, dans certaines régions catholiques, les femmes se rendaient à la messe la tête recouverte d’une mantille. C’était un signe de respect pour un lieu consacré.
Il ne fait aucun doute que le port du voile imposé par la force est une atteinte aux droits humains ainsi qu’à la liberté des femmes. Il en va peut-être autrement lorsqu’il procède d’une démarche personnelle.
Quatre femmes de Suisse romande, deux chrétiennes et deux musulmanes, ont accepté de partager les raisons qui les ont conduites à se couvrir la tête. Leurs motivations nous ont interpellés. Nous nous sommes interrogés sur les origines de cette pratique. Nous avons cherché à comprendre son évolution jusqu’à nos jours.
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