La nature, une échelle dressée vers le ciel

La nature, une échelle dressée vers le ciel
Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte Marguerite Bays (FR), février 2021

Tout le monde connaît les références agraires ou pastorales des paraboles du Christ et chacun reconnaît qu’elles
sont nombreuses. Mais la nature se cantonne-t-elle à un rôle illustratif dans la spiritualité chrétienne, ou occupe-t-elle une place plus importante dans notre montée vers Dieu ? Faisons un bref voyage scripturaire, pour y répondre.

TEXTE ET PHOTOS PAR L’ABBE VINCENT LATHION

Dans le récit de la Genèse tout d’abord, nous voyons Dieu créer toutes choses : le ciel et les étoiles, la terre, les volatiles et les espèces marines, les êtres vivant sur terre et toutes les bêtes sauvages. A chaque nouvelle étape de sa création, Dieu constate que toute son œuvre est bonne et s’en réjouit. Signalons ici un point important : Dieu a voulu la création et l’a voulue bonne. Relevons qu’à l’opposé d’autres textes religieux de l’époque, la Bible exclut tout mélange entre Dieu et sa création. Ainsi, alors que certains peuples environnants adoraient le soleil et les astres, la Genèse les présentent sobrement comme des luminaires et les range résolument du côté des créatures ; il n’est donc pas question de se prosterner devant eux (cf. Jr 8, 2). On pourrait d’ailleurs étendre cette remarque à tous les animaux, puisque d’autres passages interdisent strictement de les adorer (cf. Sg 12, 24 et Sg 13, 10). Ainsi la Bible nous pousse à voir au-delà de la splendeur de la création. La beauté du monde est une marque de la gloire de Dieu et nous renvoie à la bonté du créateur ; en cela, elle nous aide à nous élever jusqu’à lui.

Nous voyons ensuite Dieu confier à l’homme tous les autres vivants dans le récit de la création (Gn 1, 28-29). Le Seigneur l’appelle à « dominer » sur eux, c’est-à-dire à exercer sur eux son autorité pour faire croître leur vie. L’homme est donc responsable devant Dieu des autres créatures et doit s’en occuper avec soin. Citons le livre de la Sagesse qui développe le passage de la Genèse (Sg 9 ,2) :

« Toi qui, par ta Sagesse, as formé l’homme pour dominer sur les créatures que tu as faites, pour régir le monde en sainteté et justice et exercer le jugement en droiture d’âme. »

On pourra aussi se souvenir de Noé qui, à la demande de Dieu, prend un couple de chaque espèce animale pour les préserver du déluge et pour qu’ainsi, aucune ne disparaisse. La domination de l’homme sur la nature n’est donc pas une invitation à abuser de ses ressources, ni à exercer quelques violences que ce soit contre les créatures vivantes, mais elle pose simplement une hiérarchie, un ordre, voulu par Dieu et qui participe à l’harmonie du monde.

Bien plus, la Bible à plusieurs reprises recommande à l’homme d’observer les bêtes pour acquérir la sagesse. Ainsi l’homme paresseux est invité à regarder les fourmis pour apprendre le zèle au travail (Pr 6, 6-8). De même, les damans, les lézards et les sauterelles sont aussi donnés en exemple aux hommes (Pr 30, 24-28). On pourra encore mentionner Job qui encourage ses amis à s’instruire auprès des animaux pour connaître les œuvres de Dieu (Jb 12, 7-10) ou le Christ qui invite ses disciples à s’abandonner à la providence divine comme le font les corbeaux et les lys des champs (Lc 24-27).

La Révélation nous dévoile également que la nature est directement influencée par la bonté ou par la malice des hommes. L’écologie ne saurait donc être détachée de la morale et de l’éthique dans la vision biblique. C’est ainsi que les prophètes Jérémie et Osée déclarent que la mort des animaux en Israël est due à l’inobservance de la Loi (Jr 12, 4 et Os 4, 1-3). Saint Paul lie également le renouvellement de la création au salut des hommes (Rm 8, 19-21) :

« Car la création en attente aspire à la révélation des fils de Dieu : […] avec l’espérance d’être elle aussi libérée de la servitude de la corruption pour entrer dans la liberté de la gloire des enfants de Dieu. »

Enfin, dans plusieurs passages des Ecritures, nous voyons la création entière glorifier Dieu, comme dans le psaume 148 ou dans le cantique des trois jeunes gens du livre de Daniel (Dn 3, 57-90). Dans ces textes, chaque créature rend grâce à Dieu d’une manière qui lui est propre et se joint à la prière de l’homme.

Au terme de ce bref tour d’horizon biblique, il nous est plus aisé de répondre à la question du début : non, la nature ne sert pas uniquement à offrir quelques exemples au chrétien dans sa vie de foi, comme une référence lointaine parmi d’autres. En effet, par sa richesse, elle révèle au croyant différents aspects de la perfection divine ; placée par Dieu sous l’autorité de l’homme, elle possède néanmoins sa propre fin et, tout en participant à sa louange du Seigneur, elle lui ouvre des trésors de sagesse. Enfin, la nature partage la destinée de l’homme dans son retour vers Dieu : elle s’épanouit s’il est proche de son Créateur, elle dépérit s’il s’en éloigne. La nature occupe donc une place très précieuse dans le rapport de l’homme à Dieu : avec son langage, elle nous parle du Seigneur et nous chante sa grandeur.

 

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