Le maître et le Big Bang

Georges Lemaître réussit à convaincre le Pape de tenir la foi et les sciences sur des plans séparés.

Par Pierre Guillemin | Photo : DR

Qui était l’abbé Georges Lemaître (1894-1966), religieux, prêtre, mathématicien, cosmologue à l’origine de la théorie du Big Bang, c’est-à-dire l’explication scientifique de la création de l’univers, nommé par le pape Jean XXIII, en 1960, prélat domestique ainsi que président de l’Académie pontificale des sciences ? Einstein disait de lui qu’il était « celui qui avait le mieux compris la relativité générale » ! Beaucoup de physiciens, de nos jours, pensent qu’il aurait partagé le prix Nobel de physique avec Arno Penzias et Robert Wilson, s’il avait été vivant en 1978.

En octobre 2018, la communauté astronomique internationale lui a rendu un bel hommage en le reconnaissant de facto comme l’un des pères de la théorie du Big Bang et en recommandant de renommer la célèbre loi de Hubble en loi de Hubble-Lemaître.

Mais le Big Bang, qu’est-ce que c’est ? L’idée développée par l’abbé Georges Lemaître est que si on inverse la trajectoire de toutes les galaxies de l’univers et qu’on regarde où elles étaient dans le passé, on obtient une convergence en un point unique c’est-à-dire, un état initial de l’univers que Georges Lemaître a décrit comme « la théorie de l’atome primitif » et qu’on appelle aujourd’hui le Big Bang.

Cette théorie révolutionne notre perception du monde et de l’univers. Mais si l’on pouvait croire que cette même théorie réfute la création de l’univers par Dieu, Georges Lemaître a aussi été toute sa vie un fidèle serviteur de l’Eglise catholique, à la foi sincère et affichée. Science et religion ont été pour lui deux attitudes intellectuelles qu’il a réussi à faire cohabiter dans un seul homme, dans une seule vie. 

Fiat lux

Quand en 1951 Pie XII déclare, dans une tentative de concilier la lettre de la Bible aux avancées de la science, que le Big Bang est le « Fiat lux initial, l’instant où le cosmos est sorti de la main du créateur », George Lemaître n’est pas d’accord et réussit à convaincre le Pape de tenir la foi et les sciences sur des plans séparés : il s’oppose donc à une vision concordiste de la science qui est un système d’exégèse consistant à interpréter les textes sacrés de la religion de façon qu’ils concordent avec les connaissances scientifiques de l’époque. La conséquence et le risque d’une telle attitude concordiste sont de conduire à l’immobilisme scientifique. 

Ainsi, le mariage de raison entre science et foi est-il définitif ? Georges Lemaître répond : « Oui, à condition que les chercheurs restent dans leur domaine de compétence. Les scientifiques doivent savoir où se termine la science et où commencent la philosophie et la théologie. »

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