L’espoir face à la pandémie

L’espoir face à la pandémie

PAR LE FRÈRE ANIEDI OKURE OP, DÉLÉGUÉ PERMANENT DE L’ORDRE DES PRÊCHEURS AUPRÈS DES NATIONS UNIES, PROMOTEUR GÉNÉRAL DE JUSTICE ET PAIX (OP)

Lorsque Jésus a commencé son ministère public, les foules étaient remplies d’espoir, l’espoir d’être libérées de l’oppression, de l’occupation coloniale, de la taxation forcée, de la pauvreté. Aussi, lorsque Jésus a proclamé que Dieu l’avait oint pour apporter la Bonne Nouvelle aux pauvres, la liberté aux captifs, la vue aux aveugles, la délivrance aux opprimés… (Lc 4, 8-9), il a dû attirer l’attention de ses auditeurs qui espéraient un libérateur de la puissance des ténèbres (Ac 10, 38).

La pandémie de covid a jeté un trouble sur nos vies, nous faisant aspirer à la libération des incertitudes qui nous affligent. Cependant, elle a également mis à nu le voile de ténèbres qui obscurcit les lignes d’exclusion et fait éclater au grand jour une injustice structurelle. Elle a révélé un monde marqué par de subtils programmes nationalistes et d’exclusion, par une mentalité grandissante du « nous et eux ». Même l’effort de collaboration pour s’attaquer à la pandémie a donné la priorité à des segments du monde plutôt qu’à d’autres, exposant davantage l’idéologie qui façonne notre perception de certains segments de la famille humaine.

Malgré les incertitudes auxquelles nous sommes confrontés, ce dévoilement est une bonne chose, car il a réveillé chez beaucoup un véritable esprit humain et une reconnaissance de notre interconnexion en tant que membres d’une même famille humaine. Il est réconfortant de constater que les gens s’impliquent de plus en plus dans la promotion de la justice et de la paix.

Afin de canaliser ces prises de conscience dans la bonne direction pour un plus grand impact, nous devons reconnaître que nous sommes intimement membres de notre société dont l’environnement social s’insinue dans notre pensée et notre comportement. Cela nous permettra de contrer les idéologies qui mettent à mal une approche intégrale de la vie : justice et charité, vie de prière et action publique en faveur des plus vulnérables, foi chrétienne et plaidoyer pour changer les structures de l’injustice. Cela nous aidera à réconcilier l’état d’esprit qui oppose un pan de la société à un autre et un ministère de l’Eglise à un autre, comme si le Christ était divisé (1 Co 1, 12-13) et contribuera à créer un monde meilleur que nous espérons.

Un tel état d’esprit nous permettra de surmonter ce qui semble être un schisme clandestin au sein de l’Eglise qui, à y regarder de près, trouve ses racines dans les divisions de la société. Il nous donnera les moyens de vivre notre mission de contre-culture, d’édifier la société avec les valeurs de l’Evangile afin que tous puissent vivre en sœurs et frères, qui découvrent le visage du Christ dans chaque personne rencontrée et dans chaque femme une sœur et dans chaque homme un frère ; de travailler activement à amener les membres de la famille humaine relégués aux « marges de la vie et de la société » dans le cercle familial du peuple de Dieu.

Genève, symbole de l’« unité mondiale » des Nations Unies, centre de promotion et de défense des droits de l’homme dans le monde, témoigne des efforts des frères dominicains de Salamanque qui ont pris l’initiative de défendre les droits des peuples indigènes des Amériques en appliquant les lois espagnoles au-delà des frontières de l’Espagne et en faveur des personnes abusées. Leurs efforts ont jeté les bases de la Société des Nations (ONU). La Délégation de l’Ordre auprès de l’ONU – Dominicains pour la Justice et la Paix poursuit cette tradition. La Divine Providence a voulu que la paroisse confiée aux Dominicains à Genève soit placée sous le patronage de saint Paul, le premier apôtre à dépasser la communauté fermée pour atteindre les « exclus » en dehors de Jérusalem. Puissions-nous travailler ensemble pour façonner un monde meilleur !