Le mouvement des Focolari

De nombreuses communautés composées de religieux ou de laïcs sont présentes en Suisse romande, comme autant de témoins de la vitalité et de la diversité de l’Eglise. Ce mois-ci, cap sur les Focolari.

PAR PASCAL ORTELLI | PHOTO: DR

Fondatrice: Jeune institutrice, Chiara Lubich (1920-2008) initie, en pleine guerre, un nouveau style de vie au service de l’unité et d’une fraternité universelle renouvelée, en s’inspirant des principes de l’Evangile, en écho avec les valeurs présentes dans d’autres religions et cultures.

Dates clés:
1943 : une première communauté démarre à Trente. Les habitants l’appellent focolare (de l’italien « foyer »), car l’amour y circule comme dans une famille. Le nom est resté;
1948 : l’écrivain et journaliste Igino Giordani devient le premier focolarino (sorte de laïc consacré) marié et un grand promoteur du mouvement à l’internationale;
1962 : le pape Jean XXIII reconnaît officiellement le mouvement;
1987 : les Focolari, par le biais de leur organisation « Humanité Nouvelle » sont reconnus comme ONG par l’ONU ;
1998 : Chiara Lubich reçoit le Prix européen des droits de l’homme.

Organisation: Le mouvement, présidé par une femme d’après ses statuts, est présent dans 182 pays. En Suisse, il compte environ 1000 membres et est en contact avec quelque 20’000 personnes. Les formes d’engagements sont variées (rassemblement de jeunes, journée de formation pour les familles et groupes locaux de partages, volontariat, etc.). Les focolarini s’engagent à maintenir le « feu » allumé et vivent en petite communauté de laïcs, tout en travaillant dans le monde et en mettant en commun ce qu’ils possèdent.

Mission: Vivre l’unité dans la diversité, en contribuant à davantage de fraternité dans le monde.

Présence en Suisse:
A Zurich s’ouvre un premier focolare en 1961 puis à Genève, Lugano et Berne.
A Baar démarre en 1975 un centre de formation qui regroupe aujourd’hui la cité pilote «Pierre angulaire».
A Montet, un centre international assure depuis 1981 la formation des jeunes qui souhaitent entrer dans un focolare.

Une particularité: En 1962, en voyant l’abbaye d’Einsiedeln, Chiara Lubich a l’idée de créer des cités-pilotes composées de maisons, lieux de travail et d’école témoignant de l’idéal d’unité du mouvement.

Pour aller plus loin: focolari.ch

« Le mouvement des Focolari, c’est… »

par Paul Legrand, focolarino à Montet

… répondre à l’appel du Christ : « Viens, suis-moi ! Laisse tout pour moi ! Vis ce que j’ai demandé : « là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux » » (Mt 18, 20). Après l’avoir vécu en Italie, Belgique, Kenya, Congo, je le vis maintenant avec une centaine de personnes de 35 nations à Montet dont la moitié, des jeunes, porteront ce feu de l’Evangile vécu dans les différents continents au terme de leur année vécue ici.

La foi qui se met à l’œuvre

PAR SERGE LILLO
PHOTO : LDD

En voyant l’évolution de notre société, nous pourrions être inquiets face à l’ampleur de la mission d’être chrétien dans le monde actuel. Et pourtant, si nous nous replongeons dans le passé, nous voyons que la tâche des chrétiens a souvent été difficile; mais Dieu s’est toujours occupé de faire évoluer son peuple sous le souffle de son Esprit Saint; et comme il l’avait dit à saint Pierre: «Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle.» (Mt 16, 18)

Etre chrétien, c’est donc mettre son espérance dans le Seigneur, et avoir la foi que c’est bien Dieu qui dirige son Eglise et la fait évoluer contre vents et marées à chaque étape de l’histoire.

Mais être chrétien, c’est également agir et vivre dans ce monde en perpétuelle évolution, en imitant le Christ ; car comme le dit saint Jacques dans sa lettre : « Mes frères, si quelqu’un prétend avoir la foi, sans la mettre en œuvre, à quoi cela sert-il ? »
(Jc 2, 14)

Et imiter le Christ, c’est mettre en œuvre la loi qu’il nous a transmise : celle de l’amour ! L’amour pour Dieu et l’amour pour notre prochain. Suivre Jésus, c’est accueillir l’autre comme il est, en dépassant les divisions, les croyances ou les origines.

Le pape François nous envoie d’ailleurs ce message depuis le début de son pontificat : « Etre Peuple de Dieu, selon le grand dessein d’amour du Père, cela signifie être le ferment de Dieu dans notre humanité, cela signifie annoncer et apporter le salut de Dieu dans notre monde, qui est souvent égaré, qui a besoin d’avoir des réponses qui encouragent, qui donnent de l’espérance, qui donnent une nouvelle vigueur sur le chemin. » (Audience générale du 12/06/2013)

Bonne lecture !

« Ni les premiers, ni les plus écoutés »

PAR THIERRY SCHELLING | PHOTO : PXHERE

Changement d’époque

Le pape François l’a répété: «Nous (L’Eglise catholique, ndlr) ne sommes plus en chrétienté, nous ne le sommes plus! Nous ne sommes plus les seuls aujourd’hui à produire la culture, ni les premiers, ni les plus écoutés.» Et cela requiert un changement de mentalité qui prend du temps et qui n’est jamais un acquis mais un devenir, un chemin. Seulement en connaissant et en aimant ce monde dans lequel nous vivons, alors nous pouvons évangéliser plus adéquatement sans faire ni les perroquets ni les bulldozers! Dans la sobriété. On est loin des ovins de Panurge!

Multiculturalité

Une deuxième caractéristique de ce monde : sa pluriculturalité, inéluctable et inhérente notamment à la vie urbaine, premier biotope où l’on constate la « déchristianisation » selon l’ancien modèle de lecture. Et François prône le dialogue avec cette diversité sous nos fenêtres, pour toucher les cœurs avant tout dans le témoignage sincère et modeste de notre foi. On est loin des processions tape-à-l’œil !

Religiosité du peuple

Enfin, François recommande une attention toute particulière à la religiosité populaire, à la façon qu’ont les gens d’exprimer spontanément leurs croyances, leur spiritualité, leur foi. Même si pas toujours correspondantes « aux normes », elles sont expressions premières et profondes dans leur cœur. C’est en les accueillant comme telles qu’on peut ensuite partir d’elles pour se (re)connecter à l’Evangile, ferment infini de conversion, même pour le plus grand mystique !

Cela rappelle un Jésus qui rencontra une Samaritaine…

Vivre en vérité

POUR L’ÉQUIPE PASTORALE: SOPHIE DUVILLARD
PHOTO : PIXABAY

Il y a encore quelques semaines, alors que nous étions au plein cœur de la vague, au beau milieu d’une crise sanitaire interminable, nous nous demandions si nous allions finalement être submergés. Emportés dans un tourbillon vertigineux, nous avons dû chercher au plus profond de nous les forces pour ne pas sombrer. Cette crise a eu cela de bon qu’elle nous a obligés à nous questionner au sujet de ce qui était essentiel pour nous, à propos de nos modes de vie, de consommation, nos responsabilités dans les enjeux climatiques, la qualité de nos relations humaines, le sens de nos pratiques religieuses, nos désirs pour le monde de demain, nos rêves. Nous avons pris conscience de ce que nous voulions, et aussi et surtout, de ce que nous ne voulions plus. Tout en espérant que cette prise de conscience soit durable…

Notre Eglise aussi a été bouleversée. Alors que nous ne pouvions plus nous rassembler comme avant autour de la Parole et pour l’Eucharistie, nous avons dû inventer d’autres moyens pour nourrir notre foi. Beaucoup ont pris l’habitude des messes télévisées notamment et y ont trouvé de quoi répondre à certaines de leurs attentes. Aujourd’hui, les églises ont rouvert leurs portes.
Y trouvons-nous toujours ce dont nous avons besoin ? Alors que nous commençons à sortir la tête de l’eau, nous réalisons que nous avons soif. Soif de vérité.

Pour nous, chrétiens, notre vérité c’est celle du Christ ressuscité, Dieu devenu humain, mort sur la croix et revenu à la vie. Mais si c’est juste une croyance, alors cet événement ne sert à rien. Pour nous chrétiens, il ne suffit pas d’y croire, il s’agit d’en vivre.

Vivre en vérité, c’est penser, agir, être en conformité avec ce que l’on croit. Vivre dans la vérité de la résurrection, de ce qui fait de nous des chrétiens, c’est donc choisir la vie. Dans nos pensées et dans nos actes quotidiens, c’est s’éloigner du mensonge et de l’hypocrisie, c’est opter pour ce qui nous élève plutôt que ce qui nous rabaisse. C’est aussi dans notre Eglise, à l’heure du prochain synode, la remise en question de notre fonctionnement, l’examen de nos pratiques à rajeunir, la redéfinition de notre mission dans ce monde. Rêvons d’une Eglise en marche, en mouvement parmi les hommes. Une Eglise proche de leurs besoins, porteuse d’espérance. Une Eglise vraie !

Rendre compte avec douceur (1 Pierre 3, 15-16)

PAR FRANÇOIS-XAVIER AMHERDT
PHOTO : PIXABAY

A bien des égards, en ce début du 3e millénaire, nous nous retrouvons dans la situation des premières communautés chrétiennes immergées et perdues dans une société qui allie indifférence et hostilité face à la foi et qui donne l’impression de vouloir – et pouvoir – se passer de Dieu. La petite voix de l’Evangile paraît complètement noyée et le christianisme, totalement ex-culturé (exclu de la culture).

L’invitation de la première lettre de Pierre aux chrétiens de la Rome impériale du Ier siècle, puisque tel est le contexte de l’épître pétrinienne, résonne donc avec une particulière acuité à nos oreilles postmodernes du XXIe siècle: « Soyons toujours prêts à rendre compte de l’espérance qui nous habite, devant quiconque nous en demande raison. » Mais, ajoute le texte, et cela vaut également pour notre situation contemporaine, «que ce soit avec douceur et respect, en toute bonne conscience, afin que, sur le point même où l’on vous interpelle – voire calomnie – soient confondus ceux qui décrient votre bonne conduite dans le Christ» (1 Pierre 3, 15-16).

Le cadre de l’époque est entièrement marqué par les persécutions dont les communautés ecclésiales étaient l’objet de la part des autorités de l’empire et des tenants des religions païennes, car les baptisés constituaient une menace pour eux. Ces velléités d’extermination n’ont hélas pas disparu de nos jours et dans bien des endroits sur la planète, revendiquer son appartenance au Christ équivaut encore à risquer sa vie.

Reste que dans nos contrées occidentales, «l’apologétique» – c’est-à-dire l’art de proposer la foi (apo logos) à ceux qui s’en détournent ou l’ignorent totalement – prend une particulière actualité. Le terme a mauvaise presse, car il est considéré comme un plaidoyer défensif et identitaire. En réalité, il correspond au témoignage positif de celles et ceux qui ont expérimenté que vivre avec Jésus n’est pas la même chose que vivre sans lui, ainsi que le proclame l’exhortation La joie de l’Evangile du pape François (n. 266) et donc qu’il s’agit d’offrir au monde, avec délicatesse et sans prosélytisme «la diaconie de la vérité», en faisant connaître l’espérance portée par la Bonne Nouvelle.

Nettoyage de printemps

PAR MYRIAM BETTENS
PHOTOS: DR

On ne peut pas dire que les épinards soient le plat préféré des enfants… Or, le Jeudi saint on n’y coupe pas et on vous dit pourquoi.

Sous nos latitudes, le jeudi précédant Pâques est appelé Jeudi saint, logique me direz-vous. Il marque le début du Triduum pascal, c’est-à-dire les trois jours de Pâques célébrant la Passion et la Résurrection de Jésus. Il commémore aussi l’institution par Jésus-Christ du sacrement de l’Eucharistie, lors de son dernier repas avant son arrestation. Quant aux épinards? On y vient!

Ce jeudi n’est «saint» que dans les langues romanes et en anglais. Dans les pays scandinaves et en néerlandais, il sera «blanc» ou «pur», en relation à la couleur liturgique de cette fête. Dans les régions germanophones, on nomme ce jour Gründonnerstag, littéralement: «Jeudi vert». Cette appellation est attestée déjà depuis le XIIIe siècle, bien que son origine ne soit pas claire. L’explication la plus courante fait intervenir la racine latine de ce nom, Dies viridium, le «jour des verts». Il désignerait les personnes libérées de leurs péchés par la confession et l’absolution, qui étaient ainsi renouvelées, redevenues du «bois vert» selon la compréhension de l’Evangile de Luc. Cette interprétation semble n’être apparue qu’au XVIIe siècle. Plusieurs thèses s’affrontent pour expliquer l’origine de cette appellation.

Le canon du rite romain prévoit le blanc comme couleur liturgique du Jeudi saint, or il n’existait pas de réglementation en la matière avant le XVIe siècle. Il est donc possible que ce nom de Gründonnerstag soit né de l’utilisation du vert lors de la liturgie. Une autre interprétation dérive ce nom du terme greinen, les pleurs et gémissements des pénitents du Jeudi saint auraient donné, par réinterprétation étymologique populaire, Grüner Donnerstag, puis l’appellation actuelle. La dernière justification en appelle à la coutume, attestée depuis le XIVe siècle, de manger des légumes particulièrement verts et des herbes nouvelles le Jeudi saint. A la fois conforme aux prescriptions du jeûne de Carême, elle était aussi liée à l’idée préchrétienne selon laquelle cela permettait de «nettoyer» le corps des impuretés accumulées et d’absorber la force du printemps. Aujourd’hui encore, dans de nombreuses régions germanophones et en Alsace, il est d’usage de manger «la soupe du Jeudi saint» ou… des épinards accompagnés d’un œuf.

Recette: Soupe aux herbes printanières du Jeudi saint

Temps de préparationTemps d’attentePortions
30 minutes30 minutes4

Ingrédients

  • 1 oignon
  • 1 cuillère à soupe de beurre
  • 2-3 pommes de terre
  • 1 litre de bouillon de légumes
  • Une grosse poignée: d’orties, d’herbe aux goutteux, d’achillée millefeuille, de dent-de-lion, d’ail des ours, de lierre terrestre, de plantain lancéolé, d’oseille et de roquette
  • 100 ml de crème fraîche
  • Sel
  • Poivre
  • Jus de citron
  • Noix de muscade
Dans les régions allemandes, on nomme le Jeudi saint Gründonnerstag: Jeudi vert.

Préparation

  1. Emincez l’oignon et faites-le chauffer avec le beurre dans une marmite à soupe.
  2. Coupez les pommes de terre en petits morceaux, ajoutez-les aux oignons et laissez mijoter un peu.
  3. Déglacez les légumes avec le bouillon de légumes et laissez-les mijoter doucement pendant 10 minutes.
  4. Lavez les herbes et les hacher finement. Ajoutez-les à la préparation et laissez la soupe infuser pendant 5 bonnes minutes, sans la faire bouillir.
  5. Ajoutez la crème et réduisez la soupe en purée à votre convenance.
  6. Salez et poivrez puis ajoutez de la muscade et du jus de citron selon vos goûts.

Astuce

Si vous ne trouvez pas dans votre jardin ou au marché les herbes mentionnées plus haut, vous pouvez aussi les remplacer par d’autres ingrédients de cette liste dans les mêmes proportions: ciboulette, chou, épinard, persil, poireau, cresson, mâche, jeunes feuilles de cassissier ou de groseillier ou de groseillier à maquereau, jeunes feuilles de sureau noir.

Soif de sacré

A tour de rôle, des jeunes de divers cantons romands profitent de cet espace de liberté pour évoquer un sujet qui les intéresse. Au tour du Fribourgeois Antoine Bernhard de prendre la plume.

PAR ANTOINE BERNHARD | PHOTOS : DR

Vendredi saint, l’an dernier. J’entre dans une église valaisanne pour l’office. Je prends au passage le petit livret proposé aux fidèles pour accompagner la liturgie. Quelle n’est pas ma surprise? L’illustration qui accompagne les textes liturgiques n’est pas une icône, une croix ou quelque autre symbole religieux, mais le dessin mignon d’un enfant tenant un ballon en forme de cœur.

Ainsi, alors que l’Eglise s’apprête à vivre la solennité la plus importante du calendrier liturgique, que nous lisons les textes de la Passion du Christ, mort pour racheter nos fautes, alors que les catholiques du monde se préparent pour Pâques, nous n’avons rien d’autre à proposer qu’un symbole frelaté. Ce petit enfant avec son ballon, ce n’est pas l’Amour du Christ. C’est une image, produite par notre société consumériste, qui ne représente qu’un amour pauvre et mièvre, à la mode bisounours. Non, l’Amour du Christ s’est d’abord manifesté pour nous sur la croix, là où un Dieu fait homme a accepté de souffrir pour nous.

Nous nous posons la question : comment être chrétien dans un monde qui ne l’est plus? La question devrait plutôt être : sommes-nous encore chrétiens ? Que dire de notre foi, si un ballon en forme de cœur pour tout symbole de l’Amour du Christ nous suffit ? Avant d’être déchristianisé, notre monde a perdu tout sens du sacré, de la verticalité. Mais notre Eglise semble parfois être la première à tout désacraliser, et à tous les niveaux. Il faut désormais être cool, en phase avec le monde. Il faut tout aplatir, arrondir les angles, communier au progressisme obligatoire. Malheureusement, quand l’Eglise donne l’impression d’avoir pour seul projet que celui d’être le reflet flétri d’un monde sans repères, je ne m’y reconnais plus et avec moi de nombreux jeunes que je côtoie.

Nos contemporains – les jeunes en particulier – ont soif de sacré, Si l’Eglise n’en est plus le pourvoyeur, où le trouveront-ils ? De plus en plus nombreux sont ceux d’entre nous qui retrouvent l’expression du sacré dans la célébration du rite tridentin. Loin d’une crispation passéiste – comme certains voudraient le faire accroire – il y a là une soif authentique de vérité qui devrait enseigner toute l’Eglise.

Vitraux du Père Kim En Joong…

… chapelle Notre-Dame-de-Compassion (Martigny)

PAR AMANDINE BEFFA | PHOTO : JEAN-CLAUDE GADMER

La chapelle de La Bâtiaz à Martigny est depuis longtemps un lieu de prière et de pèlerinage pour la région. Les nombreux exvoto datant des XVIIIe et XIXe siècles qui ornent les murs de l’édifice consacré à Notre Dame de Compassion en sont un témoignage. Lors de la restauration de 2012, Léonard Gianadda1 est sollicité. Il offre alors des vitraux du Père Kim En Joong.

Né en Corée en 1940, l’artiste est élevé dans la tradition taoïste. Il étudie les beaux-arts à Séoul et enseigne le dessin au séminaire de la ville. C’est là qu’il découvre la religion catholique, notamment grâce à ses élèves. Il est baptisé en 1967 et devient dominicain quelques années plus tard. Il est connu comme le peintre blanc de la lumière.

L’œuvre de Kim En Joong est pensée comme l’irruption de la lumière dans les ténèbres. Il affirmait ainsi dans une émission sur KTO, en mai 2016: «Mon travail est d’être chasseur de ténèbres.» L’artiste fait le choix de ne pas nécessairement donner de légende ou d’explications pour laisser chacun libre de son interprétation. Il perçoit néanmoins son œuvre comme une invitation à découvrir Dieu. Il utilise son art pour prêcher, dans la lignée de ses prédécesseurs de l’Ordre des Prêcheurs qui utilisaient leurs mots. Il fait sienne une phrase de Stendhal selon qui la beauté est comme une promesse du bonheur.

Kim En Joong explique: «Les parties blanches sont importantes dans ma peinture et elles sont un héritage de ma culture coréenne. Peut-être sont-elles l’essentiel de mes créations. Ce qui compte dans une œuvre d’art, en musique, au théâtre, en littérature ou en poésie, c’est la résonance. C’est le rôle des grandes parties blanches. Cela renvoie au mystère, à l’écho en nous. […] L’espace libre n’est pas vide, mais plénitude.»2

1 Ecouter Léonard Gianadda présenter les vitraux: www.gianadda.ch/a_decouvrir_aussi/vitraux_de_martigny/kim/

2 Les vitraux des chapelles de Martigny, Fondation Pierre Gianadda, 2014, p. 63.

Jeux, jeunes et humour – avril 2022

Par Marie-Claude Follonier

Question d’enfant

Le lapin de Pâques, un symbole chrétien ?
Les mythologies de nombreux peuples ont une déesse du printemps et de la fertilité associée parfois au lapin dont la femelle peut avoir deux portées en même temps. Dans les pays germaniques, ce ne sont pas les cloches qui ramènent les œufs de Pâques, mais bien les lapins. Les enfants leur construisent un nid. Lapin, cloche ou colombe, tout se mélange et se confond pour rendre compte de l’abondance de Vie offerte par la Résurrection.

par Pascal Ortelli

Humour

Un évêque vient trouver un prêtre en mission au Cameroun. Il est très impressionné de ce que le prêtre a réalisé sur place : un immense hôpital, deux grandes écoles. Il lui demande où il a trouvé l’argent pour le financement. 
Le prêtre est gêné et préfère ne pas répondre. L’évêque, au nom de l’obéissance, lui somme de dire la vérité :
– Vous voyez ce château. Il est habité par un milliardaire qui m’a promis de payer les écoles et l’hôpital si je baptisais son chien.
– Et vous l’avez fait ? C’est inadmissible. La fin ne justifie pas les moyens !
Très en colère, l’évêque va se coucher. La nuit portant conseil, au déjeuner, Monseigneur, qui a aussi besoin d’argent pour son diocèse, s’adresse au prêtre :
– Pourriez-vous demander au milliardaire s’il envisage de confirmer son chien ?

par Calixte Dubosson

En librairie – avril 2022

Par Calixte Dubosson et la librairie Saint-Augustin

Des livres

L’esprit inversif du Christ
Marc Cholin

Et si on relisait les Evangiles en observant comment Jésus introduit une inversion radicale en percevant Dieu d’abord, puis les êtres humains ? Telle est la proposition de Marc Cholin. L’auteur revisite ainsi la bonne nouvelle du christianisme avec de nombreuses formules fortes sur des passages que l’on croit pourtant connaître par cœur. Le Notre Père, l’image et la ressemblance avec Dieu, la Genèse et l’histoire de la pomme, notre rapport au temps. Le chapitre sur le pardon propose de nouvelles façons d’envisager le sacrement de la confession, plus en adéquation avec notre époque. Ce livre est un vrai régal. A conseiller à tous ceux qui ronronnent dans leur foi.

Editions Salvator

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Résister au mensonge
Rod Dreher

Un beau programme de lutte contre ceux que Rod Dreher nomme les « saboteurs du royaume de Dieu », qui met le lecteur en haleine du début à la fin. Un bon antidote au marasme ambiant, capable de réveiller l’ardeur et la fougue des baptisés endormis, car, prévient l’auteur, « les dissidents chrétiens ne pourront organiser la résistance que si leurs yeux se dessillent et voient enfin la véritable nature et les méthodes de l’idéologie totalitaire ». Un ouvrage pour les soirées au coin du feu.

Editions Artège

Acheter pour 27.90 CHF

Devota
Allali – Bertorello – Stoffel

A la fin du IIIe siècle, sous le règne de Dioclétien, la persécution contre les chrétiens redouble d’intensité. Tandis qu’à Rome, les chrétiens ont peur, en Corse, dans son village de Mariana, vit une jeune fille sous la protection d’Euticus, un notable converti à la religion du Christ. Mais l’arrivée du préfet Barbarus marque la fin de cette existence tranquille : notre héroïne va être arrêtée, torturée et assassinée avant que miraculeusement, son corps n’arrive sur une barque jusqu’aux rivages de l’actuelle Principauté de Monaco. Cette BD retrace la vie de cette vierge et martyre qui est à la fois patronne de la Corse et de la Principauté de Monaco.

Editions Plein vent

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La vie profonde 
Jean-Guilhem Xerri

Psychanalyste et coach, ancien interne des Hôpitaux de Paris, Jean-Guilhem Xerri propose depuis plusieurs années de s’intéresser non seulement à la santé physique et psychique, mais aussi à la santé spirituelle. A l’occasion de la publication de son nouveau livre, il évoque comment vivre plus intensément, plus profondément et surtout plus librement, dans le quotidien parfois morose que nous traversons.

Editions Le Cerf

Acheter pour 30.60 CHF

Pour commander

Le sujet est difficile

« Ah mais en fait vous aussi vous croyez en Dieu ?! »

Il y a peu j’ai appris lors de retrouvailles entre amis qu’en fait, sans qu’aucun de nous soit au courant, nous étions tous croyants. Je ne l’aurais jamais pensé, et pour cause, nous avions toujours évité le sujet. Il est vrai qu’il n’est pas toujours facile d’affirmer sa foi, dans la vie de tous les jours.

Il y a la peur d’être pris pour un extraterrestre.

La flemme de devoir répondre pour la énième fois à : « Qu’est-ce que tu penses des croisades ? »

Alors, peut-être qu’on peut essayer de témoigner de notre foi par une vie exemplaire.

Mais il faut se rendre à l’évidence si on n’en parle jamais nous sommes invisibles.

Le fait de l’avoir dit une fois ne fait pas tout non plus, une fois le moment de surprise passé l’affaire est en général rapidement enterrée. La plupart des discussions sur le sujet se terminent par : « On veut bien que tu sois croyant, mais nous ça ne nous intéresse pas ».

Jusqu’au jour où l’on est consulté, à propos d’une vidéo YouTube sur une communauté Mennonites en Bolivie: «Toi qui es croyant tu en penses quoi ?»

Le point d’accroche est maigre, le sujet difficile, mais avec de la patience, à force d’en parler, peut-être un jour arrivera-t-on à quelque chose.

«Il est vrai qu’il n’est pas toujours facile d’affirmer sa foi, dans la vie de tous les jours.»

Simon Moerschell

Chrétien ? Comment, dans un monde qui ne l’est plus ?

PAR JEAN-FRANÇOIS DELÉAVAL
PHOTO : JEAN-MARC SUDAN

La crise de la modernité touche aussi bien la politique que la spiritualité. L’obéissance aux lois civiles s’impose de plus en plus au détriment de l’Evangile et de son esprit. Les églises se vident et le message chrétien est altéré.

Pourtant, l’heure n’est pas au découragement. « Il faut simplement se convertir pleinement au Christ et s’inspirer de saint Benoît pour bâtir des communautés ouvertes, engagées et solidaires au milieu du monde. » (Rod Dreher, journaliste)

Il est évident que l’on ne peut plus se contenter d’aller à la messe le dimanche. Il faut que le choix des loisirs, des moyens de communication, de la profession, du lieu et de la manière de vie soit subordonné à l’engagement chrétien. Il faut que chaque famille ne vive pas sa foi de manière isolée mais qu’elle s’agrège en communauté de foi au sein de ce monde.

Ne l’oublions pas : les chrétiens ont mission d’évangéliser et le levain ne peut faire lever la pâte s’il ne s’y plonge pas.

Résister à l’esprit de ce monde, matérialiste, technologique, suppose un christianisme, bien sûr, personnel mais aussi communautaire.

Je me souviens, il y a de cela fort longtemps, que l’on avait des gestes, discrets, mais qui montraient notre foi. Mon père faisait toujours un signe de croix avec son couteau au dos du pain avant de l’entamer.

Vous rappelez-vous, pour les plus anciens, la prière avant les repas : silence ! Puis le père de famille remerciait Dieu pour le repas qu’Il nous prodiguait et la cuisinière pour son travail.

Et la prière du soir ou du matin ? Qui la récite encore de nos jours ?

Lors des orages, une branche de buis, glissée sur le crucifix, ou l’eau bénite à l’entrée de la chambre devaient nous protéger du mauvais temps.

C’étaient des gestes, simples, visuels, mais qui rappelaient au monde que nous sommes chrétiens à tout moment de la journée.

Ainsi, l’Eglise se perpétuera par des gens convaincus qui agiront, dans le monde, selon leur foi, par des gestes qui exprimeront leur croyance.

Comment se réjouir de Pâques ?

Dans cette rubrique, L’Essentiel propose aux Evêques des diocèses de Sion et de Lausanne-Genève-Fribourg,
à l’Abbé territorial de Saint-Maurice et à leurs représentants de s’exprimer sur le sujet de leur choix. Ce mois, c’est Céline Ruffieux qui prend la plume.

PAR CÉLINE RUFFIEUX, REPRÉSENTANTE DE L’ÉVÊQUE À FRIBOURG
PHOTO : CATH.CH

A peine sortis de la pandémie, nous voilà confrontés à une autre violence, celle de la guerre, à deux pas de chez nous. Des temps de désert qui semblent se superposer les uns aux autres, qui semblent s’éterniser, sans porte de sortie. Que faire alors du Carême, cet autre temps de désert? Comment se réjouir de Pâques?

Notre foi et nos rites sont notre essentiel, c’est ce qui nous «reconnecte» à ce qui fait de nous des femmes et des hommes debout, capables de laisser passer la lumière de Dieu à travers soi, capables de vivre chaque nouveau jour comme une Pâques où la vie l’emporte sur la mort. Face à la peur et aux angoisses, face à la violence des hommes, nous sommes pleins d’Espérance et d’Amour. La force de la solidarité, de la prière et de la compassion sont forces de vie toujours renouvelées.

Jour après jour, pas après pas sur ce chemin vers Pâques, nous pouvons changer le monde. Par un regard plein de bienveillance, posé sur cet autre qui pense ne rien mériter, par un sourire gratuit à ce passant ou ce collègue, par un mot qui va relever celui qui est tombé. Changeons le monde! Le Carême ne se comprend qu’en regard de Pâques. Rappelons-nous: «La joie de l’Evangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus. Ceux qui se laissent sauver par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide intérieur, de l’isolement. Avec Jésus Christ, la joie naît et renaît toujours.»1

Malgré les violences du monde et les difficultés de la vie, nous avons reçu ce don ineffable de pouvoir se laisser sauver par le Christ. Qu’en faisons-nous alors? Pouvons-nous en témoigner dans chacun des actes que nous posons, dans chaque décision que nous prenons? Savons-nous être dans la gratitude et l’émerveillement?

«Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui, selon sa grande miséricorde, nous a régénérés, pour une espérance vivante, par la résurrection de Jésus-Christ d’entre les morts.» (1 Pierre 1, 3)

Pape François. La joie de l’Evangile – Exhortation apostolique. 2013.

Comment être chrétien dans un monde qui ne l’est plus?

PAR LE CHANOINE PHILIPPE AYMON
PHOTO : BENOIT BRUMMER

Ne faudrait-il pas d’abord se poser la question: ce monde n’est-il vraiment plus chrétien? Qu’il y ait des régions qui ne l’ont jamais été, c’est une évidence. Mais sommes-nous bien d’accord pour dire que l’Occident, l’Europe, le Valais ne sont plus chrétiens? Ne pensons-nous pas que les reliquats culturels du christianisme font encore de notre société «un monde chrétien»?

En décembre, j’ai commis un sermon qui abordait justement cette question et dont le refrain était : « Le christianisme est mort, mais il ne le sait pas encore. » Le christianisme non pas comme foi et conviction personnelle, mais comme phénomène social. Mort, comme l’était le communisme du début des années 80, alors que l’URSS avançait par la force de l’inertie avant de s’écrouler complètement. Une inertie qui est certainement le « moteur » du catholicisme d’aujourd’hui.

Chantal Delsol, Professeure de Philosophie, a publié un livre intitulé : « La fin de la chrétienté » (Le Cerf 2021), qui dresse un tableau douloureux du fait religieux dans nos sociétés. Guillaume Cuchet, dans une interview qui traite du même sujet, a cette phrase terrible : « Les petits-enfants dans la nef, en enterrant leurs grands-parents, enterrent les derniers chrétiens de la famille. » N’oublions pas qu’il est inutile de s’en prendre à l’infirmière et de casser le thermomètre, sous prétexte que l’on refuse de reconnaître que l’on a de la fièvre !

Pour notre diocèse, la lettre pastorale de Mgr Brunner : « Rencontrer le Christ aujourd’hui », publiée en 2003, nous interpellait sur le même sujet. Comment avons-nous répondu aux réflexions de l’ancien évêque de Sion ? Vingt ans plus tard, force est de constater que la fièvre n’a pas baissé et que le malade attend toujours un remède…

N.B. : Pour aller plus loin dans la réflexion, on trouvera sur le site des paroisses de Sion (https://paroisses-sion.ch), à la page Cathédrale :

– La lettre pastorale de Mgr Brunner.

– Une brève vidéo qui est une interview de Mme Chantal Delsol.

– Une interview de Guillaume Cuchet intitulée : « Quel avenir pour le catholicisme ».

Et alors ?

PAR THIERRY SCHELLING | PHOTOS : CATH.CH / GRÉGORY ROTH, DR

«Un changement d’époque», plutôt qu’«une époque de changement», voilà le constat du pape François. L’écroulement – accéléré par le tsunami de la révélation (enfin !) des abus par le clergé – de l’institution Eglise et de ses codes est bien visible dans notre hémisphère: logiquement, moins de prêtres (même en Pologne qui s’en lamente !).

Alors soit on rafistole à coup d’«Année du prêtre», de veillées de prière pour des vocations sacerdotales et religieuses, de cybercurés (à la gamme de pertinence fort discutable d’ailleurs…), soit on change de lunettes, voire de «logiciel intérieur», et on relit: alentour (par les périphéries d’abord), le monde entier (et pas juste notre nombril centre-européen), et… l’Evangile. Et c’est plus que réjouissant!

«Le monde nouveau» promis par l’Apocalypse est déjà en route, avec le timonier François: ces milliers de jeunes engagés pour la défense des humains, des migrants, des bannis de la société, de la nature, des animaux, de la mer… ; ces milliers de femmes qui gouvernent, décident, commandent, rassemblent, bénissent, prêchent au sein de maintes communautés spirituelles et pas que chrétiennes ; etc. Ces fameux « signes des temps » invoqués déjà par Jean XXIII en 1958: ils sont là, bien visibles, inexorables! L’Eglise, c’est le «laios tou theou», le Peuple de Dieu – les laïcs! – au service du monde.

Dans quel monde vivons-nous ?

PAR L’ABBÉ JEAN-MICHEL MOIX
PHOTO : EXTRAIT DE LA REVUE CATÉCHÉTIQUE

«À LA RENCONTRE DE DIEU», TRANSMETTRE, ANNÉE 3, 2016, PP. 8-9

Nous vivons dans une société en pleine mutation, où les progrès technologiques changent notre mode de vie et promettent un avenir enchanteur… où l’homme est défini désormais comme un «objet interconnecté», où l’on parle de l’homme «augmenté».

Mais reprenons. «Hier» une révolution industrielle s’est opérée lorsque l’on a réussi à convertir de la vapeur d’eau bouillante en énergie pour faire fonctionner des trains ou des bateaux à vapeur… Par la suite, une seconde révolution industrielle s’est opérée lorsque l’on a produit une nouvelle source d’énergie : l’électricité, à partir d’une chute d’eau ou d’un moteur à explosion (pour les voitures). Puis, vint la 3e révolution industrielle avec le développement de l’informatique, des ordinateurs. A présent, nous sommes entrés dans une 4e révolution industrielle : celle de l’intelligence artificielle, celle de la numérisation, celle de la nanotechnologie (avec le développement notamment de nouveaux « vaccins »…).

Bref ! La tentation est grande de demander à la technologie ce que la foi nous faisait demander à Dieu : parvenir à l’immortalité, accéder à un bonheur (terrestre) qui rappelle l’Eden de nos premiers parents Adam et Eve…

Mais n’est-ce pas la grande illusion, le grand mensonge de notre temps ? Se passer de Dieu, vivre comme si Dieu n’existait pas, reléguer la foi dans le domaine privé, définir soi-même ce qui est bien et ce qui est mal ? N’est-ce pas une utopie vouée à la ruine, à l’échec ? Sous couvert de société parfaite ou de race supérieure, le nazisme ou le communisme s’y sont essayés et ils ont échoué… Est-ce que l’humanité a appris de ses erreurs ?

Dans la conception chrétienne du Moyen Age, il y avait la conscience que le monde dans lequel nous vivions était issu de Dieu, était Sa création, l’homme y compris. Il y avait la foi que si Dieu avait créé le monde pour l’homme, l’homme devait ensuite rapporter toute chose à Dieu. Aujourd’hui, dans un monde qui a perdu la foi, dans un monde qui se veut être connecté à tout, le drame c’est que l’homme s’est « déconnecté » de Dieu. L’homme renie son état de créature vis-à-vis de Dieu. L’homme nie ainsi sa dépendance à Dieu, oublie qu’il a besoin d’entrer en relation avec Dieu, pour l’aimer, pour le prier, pour l’adorer. L’homme contemporain qui vit comme si Dieu n’existe pas réalise ainsi la parole que Dieu adresse à l’église de Laodicée, dans le livre de l’Apocalypse : « Tu dis : – je suis riche, je me suis enrichi, je ne manque de rien – et tu ne sais pas que tu es malheureux, pitoyable, pauvre, aveugle et nu ! » (Ap 3, 17)

«L’Eglise, c’est l’Evangile qui continue»

Dans cette rubrique, L’Essentiel propose aux Evêques des diocèses de Sion et de Lausanne-Genève-Fribourg,
à l’Abbé territorial de Saint-Maurice et à leurs représentants de s’exprimer sur le sujet de leur choix. Ce mois, c’est Mgr Charles Morerod qui prend la plume.

PAR MGR CHARLES MOREROD OP, ÉVÊQUE DU DIOCÈSE DE LAUSANNE-GENÈVE-FRIBOURG
PHOTOS : JEAN-CLAUDE GADMER, DR

La phrase que j’ai le plus répétée (dans quatre lettres pastorales) est: «L’Eglise, c’est l’Evangile qui continue »1. Si je tiens à le répéter, c’est que ce n’est pas évident, mais que c’est absolument souhaitable. Il me semble qu’on ne peut pas lire l’Evangile sans être très frappé par la personne de Jésus et que ce choc initial pousse à un approfondissement jamais achevé de cette rencontre. C’est Jésus lui-même qui nous répète: «Venez et voyez.» (Jean 1, 39)

Si on demande ce qu’est l’Eglise, peu de monde pense à citer le Christ, ou l’Evangile. On nous répond généralement en termes de morale. Bien sûr qu’il y a une morale dans l’Evangile ! Mais elle commence par cette conversion qu’est la vie avec Jésus, sans laquelle les « valeurs chrétiennes » ne signifient pas grand-chose.

L’Evangile garde toujours une nouveauté, car le Saint-Esprit est source de jeunesse permanente, même là où l’Eglise donne l’impression d’être déjà connue, voire trop connue, voire même nocive. Et certes nous lisons l’Evangile dans l’Eglise, sans avoir à refaire tout le chemin de la foi sur des questions comme « qui est-il, celui-là ? » (Luc 5, 21 ; 7, 49 et 8, 25), « qui est-il, Seigneur, que je croie en lui ? » (Jean 9, 36), « Mais pour vous, […] qui suis-je ? » (Matthieu 16, 15) et « où demeures-tu ? » (Jean 1, 38)… Nous lisons l’Evangile dans l’Eglise, mais ce n’est pas une raison pour vivre dans l’Eglise sans lire l’Evangile.

«Tous les renouveaux dans l’histoire de l’Eglise ont été des renouveaux de sainteté, marqués par un retour à l’Evangile. C’est ce dont nous avons besoin. Lisons l’Evangile, constamment, écoutons-le et que notre vie en soit marquée.»

En cette période de chemin synodal, demandons ensemble au Saint-Esprit, qui a inspiré les auteurs des Evangiles, de nous permettre d’en découvrir les richesses et d’en vivre!

Charles Journet, L’Eglise et la Bible, Editions Saint-Augustin, Saint-Maurice, 1960, p.45.

Sur un malentendu…

PAR MYRIAM BETTENS
PHOTOS: DR

Vårfrudagen… à vos souhaits! Mieux vaut ne pas avoir un ch’veu sur la langue pour prononcer le nom de la fête de l’Annonciation en suédois. Chez nous, il est normalement d’usage de manger du poisson ce jour. En Suède, pays de spécialités marines et de surcroît protestant, il est coutume de préparer… des gaufres.

Quittons un peu nos romandes contrées pour nous diriger vers le pays du prinsesstårta, du surströmming et des våfflor suédoises. L’anecdote liée à cette tradition culinaire se base pour ainsi dire… sur un malentendu. La fête de l’Annonciation se traduit par Vårfrudagen, le jour de Notre Dame. La gaufre se dit, quant à elle, våffla, dont la forme våffel n’est utilisée que dans les mots composés. Entre la pronon- ciation de vårfru et våffel, il n’y a qu’un pas… le peuple suédois a fait l’amalgame entre les deux. Le 25 mars, commémorant normalement l’annonce de la mater- nité divine de la Vierge Marie par l’archange Gabriel, s’est donc transformé au fil du temps en Våffeldagen: le jour des gaufres!

Mieux vaut deux fois qu’une!

Une chose tout à fait étonnante concernant la fête de l’Annonciation en Suède: le culte à la Vierge Marie n’y est pas très présent, mais les calendriers comportent pourtant deux jours dédiés à cette célébration. Le Marie bebådelsedag ou Våffeldagen (dont nous avons parlé plus haut) toujours fêté le 25 mars, et le Jungfru Marie bebådelsedag qui, dans l’Eglise de Suède, se célèbre le dimanche qui tombe entre le 22 et le 28 mars, sauf si c’est le dimanche des Rameaux ou celui de Pâques.

Petit vocabulaire culinaire suédois

Prinsesstårta: gâteau suédois traditionnel, composé de couches de génoise, de confiture de framboise, de crème pâtissière vanillée et enveloppé d’une fine couverture de pâte d’amandes verte. Le gâteau «IKEA» par excellence!

Surströmming: hareng fermenté durant plusieurs mois et traditionnellement dégusté à Noël ou à Pâques. L’odeur très prononcée de ce met retient souvent d’y goûter…

Våfflor: pluriel de gaufre.

Recette: Les gaufres de Vårfrudagen / Våffeldagen

Temps de préparationTemps d’attentePortions
30 minutes30 minutes8

Ingrédients pour la pâte à gaufres

  • 3,5 dl de farine de blé – vetemjöl
  • 2 c. à c. de levure chimique – bakpulver
  • 4 dl de lait – mjölk
  • 100g de beurre fondu – smör
Våffeldagen: le jour des gaufres

Préparation des gaufres au gaufrier

  1. Dans un saladier, mélanger la farine et la levure.
  2. Ajoutez le lait, fouettez pour obtenir une pâte homogène. Versez-y le beurre fondu.
  3. Faites chauffer le gaufrier. Badigeonnez d’un peu de beurre pour la première gaufre.
  4. Versez une louche de pâte dans le gaufrier, fermez le battant et patientez quelques minutes.
  5. Servez avec de la crème fouettée et de la confiture de fraise pour manger votre gaufre à la suédoise.

Préparation des gaufres à la poêle

  1. Suivez les étapes 1 à 3 de la préparation « au gaufrier ».
  2. Versez une louche de pâte au milieu d’une poêle de façon à la cuire comme des pancakes.
  3. Dorez la pâte de chaque côté jusqu’à ce qu’elle se soulève un peu de la surface de la poêle.

Préparation à la machine à croque-monsieur

  1. Suivez les étapes 1 à 3 de la préparation « au gaufrier ».
  2. Versez une louche de pâte dans la cavité normalement réservée au sandwich, fermez le battant et patientez quelques minutes.

«Scrutez les horizons de votre vie»

PAR THIERRY SCHELLING
PHOTO : DR

Aux religieuses et religieux (2014), François les exhortait ainsi : « Ne cédez pas à la tentation du nombre et de l’efficacité, moins encore à celle de se fier à ses propres forces. Scrutez les horizons de votre vie et du moment actuel en veille vigilante. » Une façon de centrer ses énergies et objectifs de vie différemment, voire de quitter les Ordres pour plus de cohérence…

Une manière aussi de faire comprendre que le nombre diminuant de vocations religieuses est un signe… positif des temps modernes : on s’engage autrement aujourd’hui, mais toujours au nom de sa foi ! Voyez les jeunes : service humanitaire, ONG, défense de l’environnement, des droits des minorités et autres LGBT+, bénévolat auprès des aînés, des handicapés, des malades… Aux JMJ, il n’a de cesse de leur répéter : engagez-vous sur le terrain social et politique « pour changer le monde » ! Il a eu cette formule à Rio (2013) : « Ne restez pas au balcon de la vie ! Engagez-vous ! »

Pape autrement

Lui-même, comme pontife, fait le pape autrement : premier voyage ? Lampedusa ! Parmi les premières visites romaines, un bidonville ! Il se consacre à mettre les sans-voix, les petits, les victimes de la pédophilie, les femmes battues, les itinérants, les pauvres non pas sur le devant de la scène, mais au cœur de l’Eglise, de sa raison d’être – celle de l’Eglise et celle de son pontificat. Emblématique : la statue du convoi de migrants sur la place Saint-Pierre qui, dépareillant peut-être la vision d’optique voulue par Bernini, focalise le regard non plus sur un triomphe de l’esthétique baroque, mais sur l’essentiel du message évangélique : « J’étais étranger et tu m’as accueilli. » Quitte à froisser un peu…

Laudato si’ !

Extrait, qui résume tout : « La sobriété, qui est vécue avec liberté et de manière consciente, est libératrice. Ce n’est pas moins de vie, ce n’est pas une basse intensité de vie, mais tout le contraire ; car, en réalité ceux qui jouissent plus et vivent mieux chaque moment, sont ceux qui cessent de picorer ici et là en cherchant toujours ce qu’ils n’ont pas et qui font l’expérience de ce qu’est valoriser chaque personne et chaque chose, en apprenant à entrer en contact et en sachant jouir des choses les plus simples. »

Le chemin…

… mystérieux d’un appel

Le Seigneur dit à Abram : « Quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton père, pour le pays que je t’indiquerai sois une bénédiction ! » (Gn 12, 1-2)

PAR ALAIN VIRET, THÉOLOGIEN FORMATEUR | PHOTO : DR

Il y a des détours dans une vie qui manifestent encore plus la fidélité du Seigneur qu’une ligne droite.

En réfléchissant sur mon parcours pour répondre à la demande de cet article, j’ai éprouvé combien le Seigneur nous invite à la confiance et combien il nous accompagne dans les joies comme dans les épreuves. Il nous appelle à entrer en dialogue avec lui dans le concret de l’histoire de son peuple comme de l’histoire singulière de nos vies.

Issu d’une famille modeste de France voisine, j’ai beaucoup reçu à travers l’amour et la foi de mes parents et la riche animation d’une paroisse où je me suis très tôt engagé comme servant d’autel, catéchiste et membre de groupes de jeunes. C’est là qu’a grandi en moi le désir de suivre le Christ de plus près.

Des joies et des charges

Après des études profanes et une expérience de travail en hôpital, j’ai opté pour une longue formation théologique qui m’ouvrit au ministère de prêtre diocésain. Pendant 26 ans, j’ai accompagné la vie de communautés et me suis passionné pour l’intelligence de la foi de mes frères et sœurs baptisé-e-s. Si j’ai éprouvé bien des joies dans ce service, bientôt, le poids de la charge, la sacralisation du prêtre de plus en plus soupçonné à cause des abus, tout comme la difficulté de vivre une fraternité interculturelle et le manque d’une vie affective et le sacrifice d’une descendance m’ont mis en crise.

Sans le justifier, ce climat ouvrit sur une rencontre amoureuse qui me révéla à moi-même et sur la naissance d’une enfant qui trouva dans le nom de Marie et sous la protection de sainte Anne d’Auray, un chemin inédit de promesses ! S’imposa à moi un choix difficile mais vécu dans la confiance et non dans l’hypocrisie d’une double vie pour continuer à vivre mon baptême d’une autre manière. L’opportunité me fut donnée de venir en Suisse et de poursuivre ce travail de formation chrétienne qui m’a toujours finalement habité. J’ai goûté à la joie de collaboration œcuménique et à la possibilité de servir, avec l’expérience accumulée, la diversité des ministères dans une Eglise en pleine mutation.

En relisant ce chemin parcouru, je perçois mieux la fidélité du Seigneur à mon égard et le déploiement de mon baptême dans ce chemin singulier. A l’heure où, sous l’impulsion du pape François, l’Eglise approfondit sa nature synodale, j’entends de nombreuses voix qui demandent une évolution de la discipline de l’Eglise latine concernant le célibat sacerdotal. Sans renier sa valeur quand il est pleinement assumé, la rencontre de pasteurs réformés et de prêtres mariés de rite oriental présents en Suisse romande me fait penser que l’Eglise catholique gagnerait en crédibilité à ouvrir avec discernement, ce choix comme elle l’a fait pour le ministère diaconal. Je ne doute pas qu’elle sera amenée à le faire dans une dynamique œcuménique et pour répondre aux besoins des communautés. Il est temps d’écouter ce que l’Esprit dit aux Eglises dans la fidélité à la Parole de Dieu et la confiance au sensus fidei !

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