Saint Thomas More, martyr

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Vallée d’Illiez (VS), juillet-août 2020

Par Denyse Gex-Collet | Photo: DR

Homme de loi, homme de lettres, homme d’Etat, mais avant tout homme de Dieu

En lien avec le thème du mois: «L’humour»

On me reproche de mêler boutades, facéties et joyeux propos aux sujets les plus graves. Avec Horace, j’estime qu’on peut dire la vérité en riant. Sans doute aussi convient-il mieux au laïc que je suis de transmettre sa pensée sur un mode allègre et enjoué, plutôt que sur le mode sérieux et solennel, à la façon des prédicateurs.(Saint Thomas More – L’utopie)Fils de l’homme de loi John More et petit-fils de boulanger, Thomas More naît le 7 février 1478 à Londres. Son père, nourrissant de grandes ambitions pour lui, veille à ce qu’il reçoive une instruction irréprochable. Grâce à ses connaissances, il devient page du cardinal Morton, archevêque de Cantorbéry. Puis il part pour l’Université d’Oxford afin de compléter ses études. 

Quelle voie choisir ?
Il est très attiré par la prêtrise mais son père décidant d’en faire un avocat, il entreprend des études de droit durant lesquelles il a comme maîtres John Colet et Erasme avec lequel il se lie d’une profonde amitié. Grâce à cet ami, il participe pleinement au renouveau de la pensée qui caractérise cette époque, ainsi qu’à l’humanisme dont il est le plus illustre représentant anglais. 

Thomas More mène alors l’existence intéressante d’un honnête homme aux multiples talents. Il enseigne le droit et a à cœur de défendre les habitants de Londres qui le nomment juge. Se battant sur plusieurs fronts avec toujours un fort idéal éthique, il défend la justice plus que les juristes, prône les arrangements à l’amiable et prend la plume pour convaincre l’humanité de s’améliorer. Il est également historien, poète et théologien.

A la bifurcation des chemins
Ayant envisagé d’entrer dans les ordres, il reste plusieurs années durant à la Chartreuse de Londres. Constatant que le célibat n’est pas pour lui, il se marie avec Jane Colt dont il a trois filles et un fils, puis devenu veuf il prend pour épouse Alice Middleton, veuve et mère de deux enfants. 

Nommé « ambassadeur extraordinaire », puis « chancelier du roi » par Henri VIII, Thomas More devient membre du Parlement. Il refuse alors une pension du roi pour rester libre de ses opinions. Il démissionne de sa charge en refusant de prêter serment à Henri VIII, lorsque le roi rompt ses relations avec Rome et se proclame chef de l’Eglise d’Angleterre afin de pouvoir divorcer et épouser Anne Boleyn.

La voix de la conscience
Il a réfléchi et prié avant de prendre sa décision. « A présent, constate-t-il, ma conscience est si claire que j’en tressaille de joie… Je ne fais rien de mal. Je ne dis rien de mal. Je ne pense rien de mal. Et si cela ne suffit pas pour qu’un homme ait le droit de vivre, ma foi, je ne tiens pas à vivre. » Car jamais Thomas More n’a renié sa liberté de conscience, et devant la persistance de son attitude, il est emprisonné  à la Tour de Londres. Henri VIII le condamne à mort comme « traître » pour n’avoir pas reconnu la suprématie du roi sur l’Eglise d’Angleterre.

Homme de lettres
Dans toute son œuvre littéraire, on apprécie la simplicité, la profondeur de la spiritualité, la connaissance des Ecritures et bien sûr une dose d’humour. Durant son emprisonnement, il rédige le magnifique ouvrage « La tristesse du Christ ». Méditant et contemplant la Passion de Jésus, il offre un témoignage sur les démarches entreprises durant sa vie  inspirées des Ecritures et sur les derniers instants de sa vie. Cet ouvrage inachevé restera le testament spirituel d’un des plus grands humanistes chrétiens confronté à sa conscience, à son obéissance et à sa foi.

Son humour
Thomas More, doté d’un esprit délicat, utilise l’ironie avec brio. Quelques-unes de ses réparties nous sont parvenues par le biais de ses écrits ou de ceux que nous ont transmis ses contemporains. 

• Durant son emprisonnement à la tour de Londres, dans l’attente de son jugement, Thomas More s’adressa un jour en ces termes au Lieutenant de la Tour:

« Maître Lieutenant, en toute sincérité, je crois que vous êtes pour moi un excellent ami, et que vous me traiteriez du mieux que vous pourriez comme vous le dites ; je vous en remercie de tout cœur. Mais soyez assuré, Maître Lieutenant, que ma nourriture ne me déplaît point, et que si pareille chose devait m’arriver un jour, je vous autorise à me jeter dehors sur le champ ! »

• Un jour que le gouverneur de la Tour s’excuse avec politesse sur la frugalité de son ordinaire, il lui répond : « Si quelqu’un d’entre eux n’est pas content du régime, qu’il aille chercher un gîte ailleurs ! »

• Il est condamné à être pendu, éviscéré et écartelé mais le roi commue cette sentence en décapitation, par « faveur », ce qui aurait, dit-on, inspiré à Thomas More cette boutade : « Dieu préserve mes amis de la même faveur. » 

• Dans la lettre d’adieu à sa fille Margareth, il écrit : « … Mais ce sera bientôt fini. Je trouverai dur s’il me fallait attendre à plus tard que demain, car c’est la vigile de saint Thomas et l’octave de saint Pierre. Voilà pourquoi je brûle d’aller à Dieu demain… » 

• Avant de monter sur l’échafaud, il dit à son bourreau : « Merci de m’aider à monter. Pour la descente, je me débrouillerai tout seul. » 

En ces ultimes instants, il conserve son humour et conseille au bourreau de bien viser car « il a le cou un peu court ». La tête sur le billot, il trouve encore l’esprit d’épargner la barbe qui lui était poussée pendant sa captivité : « Celle-ci n’est pas à couper ; elle n’a pas commis de trahison. » 

Pour le peuple de Londres venu assister à sa décapitation, il prononce ces paroles qui résonnent comme un testament et un acte de foi : « Je meurs, bon serviteur du roi, et de Dieu premièrement. »

Béatifié par Léon XIII en 1886, canonisé par Pie XI en 1935, Thomas More est fêté le 22 juin. En 2000, Jean-Paul II le proclame patron céleste des responsables de gouvernement et des hommes politiques, en raison notamment de sa « cohérence morale ».

Prière de saint Thomas More, dans sa cellule de condamné à mort

Dieu tout-puissant, écarte de moi
toute préoccupation de vanité,
tout désir d’être loué,
tout sentiment d’envie,
de gourmandise,
de paresse et de luxure,
tout mouvement de colère,
tout appétit de vengeance,
tout penchant à souhaiter du mal à autrui
ou à m’en réjouir,
tout plaisir à provoquer la colère,
toute satisfaction que je pourrais éprouver
à admonester qui que ce soit
dans son affliction et son malheur,
Rends-moi, Seigneur, bon, humble et effacé,
calme et paisible, charitable et bienveillant,
tendre et compatissant.
Qu’il y ait dans toutes mes actions,
dans toutes mes paroles
et dans toutes mes pensées,
un goût de ton Esprit saint et béni.

La mosaïque de l’Assomption

De Mario Rupnik à Bernex (GE)

Par Amandine Beffa
Photo: Jean-Claude GadmerFêter l’Assomption, c’est avant tout fêter la résurrection. En effet, selon une belle tradition populaire orthodoxe, la fête de la Pentecôte est comme la « Pâque de l’été ». 

En contemplant cette mosaïque, à l’église Saint-Maurice à Bernex, nos regards sont attirés par le Christ, personnage central de l’œuvre. Comme l’explique Georges Lemopoulos, nous sommes face à un thème inverse : « D’habitude, nous avons l’icône de la Mère de Dieu tenant tendrement dans ses bras son enfant, l’Homme-Dieu. Celui qui « a pris chair pour nous et pour notre salut ». » Ici, le Christ présente sa Mère au monde. Le poupon entre ses mains représente l’âme de Marie. Elle est la première à avoir bénéficié de la résurrection. Elle nous précède même dans la résurrection pour nous montrer la voie jusqu’au bout.

Le personnage imberbe est saint Jean (il est traditionnellement représenté sans barbe parce que considéré plus jeune que les autres). Il est celui à qui Jésus avait confié sa mère (Jean 19, 27). D’une certaine manière, il nous représente, nous tous enfants à qui Dieu a choisi de donner une mère. Sur la mosaïque, il nous indique le Christ, à la fois pour nous rappeler vers quelle direction doit être dirigée notre foi et pour nous montrer l’âme de Marie que le Christ est venu chercher. Certes, la vie terrestre de Marie est terminée, mais ce n’est pas une fin définitive.

Guide dans la confiance
A l’Annonciation, Marie nous invitait à oser le oui qui donne la vie. A l’Assomption, elle nous guide dans la confiance qui va jusqu’au bout. Oui, nous ne comprenons pas tout à la résurrection – bien orgueilleux qui affirmerait le contraire – mais nous pouvons faire confiance au Seigneur. Car, comme le dit Job : « Je sais que mon rédempteur est vivant, et qu’il se lèvera le dernier sur la terre. Quand ma peau sera détruite, il se lèvera ; Quand je n’aurai plus de chair, je verrai Dieu. » (Job 19, 25-27)

Source: https://chemindejoie.ch/dormition/

L’humour, chemin vers Dieu

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Vallée d’Illiez (VS), juillet-août 2020

Par l’abbé Gérald Voide | Photo: DR

Quel beau thème ! Surprenant, mais aussi très vrai. Si l’humour peut être grinçant, caustique, blessant, voire noir, il peut aussi être léger, candide, jovial. « Humour » rime avec « amour ». Il y a parfois de l’humour très tendre, profond d’humanité et même de spiritualité : pensons, par exemple, à de nombreuses scènes de Fernandel dans Don Camillo. Elles vous touchent droit au cœur. 

L’humour peut attirer l’attention des fidèles dans la prédication. Il peut aussi susciter la réflexion. Petite illustration à travers le dessin ci-dessous qui a couru sur les réseaux sociaux durant la pandémie. 

La Bible
La Bible, pourtant, ne parle guère d’humour. Elle évoque le rire. Il y a le rire célèbre de Sara, l’épouse d’Abraham, lorsque les trois mystérieux visiteurs divins annonceront qu’elle va avoir un fils, elle qui était très avancée en âge et qui « avait cessé d’avoir ce qui arrive aux femmes », comme le dit pudiquement le livre de la Genèse au chapitre 18. 

Mais l’Ecriture Sainte vise surtout la joie. Jésus, dans le long discours d’adieu lors de son dernier repas avec ses disciples, leur dira : « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. » (Jean 15, 11) Cette joie donnée par le Christ est très profonde, et nul ne pourra nous la ravir : « … maintenant (que je vais m’en aller, que je vais mourir), vous êtes dans la peine, mais je vous reverrai, et votre cœur se réjouira ; et votre joie, personne ne vous l’enlèvera. » (Jean 16, 22) Pas surprenant que saint Paul puisse dire : « Soyez toujours dans la joie du Seigneur ; je le redis : soyez dans la joie. Que votre bienveillance soit connue de tous les hommes. Le Seigneur est proche » (Philippiens 3, 4-5). « Soyez toujours dans la joie », toujours, même dans les épreuves et les difficultés, parce que nous croyons à la proximité et à la présence aimante du Seigneur en toute circonstance.

Le pape François et l’humour
Dans son livre-entretien Dieu est jeune, le pape François nous dit que « si l’on n’a pas le sens de l’humour, il est très difficile d’être heureux ». Et le Pape de confier qu’il récite quotidiennement, depuis presque 40 ans, la « Prière de la bonne humeur » de saint Thomas More, un britannique mort en martyr en 1535 : Donne-moi une bonne digestion, Seigneur, et aussi quelque chose à digérer.

Donne-moi la santé du corps, avec la bonne humeur pour la garder au mieux.

Donne-moi une âme sainte, Seigneur, qui ait les yeux sur la beauté et la pureté, afin qu’elle ne s’épouvante pas en voyant le péché, mais qu’elle trouve dans Ta présence la voie pour redresser la situation.

Donne-moi une âme qui ignore l’ennui, le gémissement et le soupir, et ne permets pas que je me fasse trop de souci pour cette chose encombrante que j’appelle « moi ». 

Seigneur, donne-moi l’humour. Concède-moi la grâce de comprendre la plaisanterie, pour que je tire quelque bonheur de cette vie et que j’en fasse profiter les autres. Amen. 

Puissante tendresse

Les familles chrétiennes sont appelées à s’aimer avec tendresse, elle est le reflet de l’amour du Père.

Par Bénédicte Jollès
Photo: flickr« Vivez-vous avec un avare affectif ? » Articles et tests sur internet abordent la question de la tendresse dans le couple, aussi délicate à recevoir pour les femmes que pour les hommes. Chacun peut souffrir d’échanges inexistants ou de relations décevantes. Le couple a pourtant un besoin vital de tendresse, faute de quoi la vie commune devient pesante et toute la famille en pâtit. 

Tous ont besoin d’attentions, de regards, de gestes ou de signes qui disent « je t’aime », « je te pardonne »… Ils donnent joie et confiance pour avancer. « Ma mère manquait de tendresse, j’en souffre encore à l’âge adulte », reconnaît Claire, consciente qu’elle cherche de l’affection de façon maladroite. 

Chacun a sa manière unique d’exprimer son amour : celle des enfants n’est pas celle des grands-parents, celle de la mère n’est pas celle du père. Mais toutes sont réconfortantes. La tendresse ne se décrète pas, elle jaillit du plus profond d’un cœur qui se laisse toucher. Contagieuse, créative, transformante, elle permet de passer de la méfiance à la confiance, de la rigidité à la douceur. Pour sonner juste, nos marques d’affection nécessitent écoute et respect en même temps que maîtrise de soi. Aux antipodes de la mièvrerie, de la fusion ou de la nonchalance, la tendresse amène à trouver la juste distance.

Théologie de la tendresse
« Revêtez votre cœur de tendresse, d’humilité et de bonté », dit saint Paul (Colossiens 3, 12-17). Voilà le secret de la paix et de la foi dans nos familles. Impossible de transmettre la foi sans exprimer son affection. « Je dois ma foi à ma marraine, elle était pratiquante, drôle et affectueuse, j’avais envie de l’imiter », reconnaît Aurore. Avons-nous réalisé que la Bible répète que « Dieu est tendresse et pitié ? » (psaume 102) « Nous sommes appelés à découvrir cette fidélité aimante de Dieu, y compris au cœur de l’épreuve, ensuite nous pourrons être ses mains, son oreille, son cœur… C’est pourquoi, depuis le début de son pontificat, le pape François ne cesse de développer une « théologie de la tendresse ».

Humour biblique…

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte Marguerite Bays (FR), juillet-août 2020

Par Marius Stulz | Photo: dr

La Bible a-t-elle de l’humour, y a-t-il de l’humour dans la Bible ? Qu’en pensez-vous ?

Pour moi, l’humour n’existe pas en soi, il surgit de la rencontre entre un événement, une situation, un texte, une parole et la culture d’un groupe ou d’une personne qui en fait une lecture dans une attitude de détachement. De fait, l’humour est moins accessible, par exemple, à une personne qui s’attache à un comportement de type légaliste. Oui, l’humour est une perception railleuse qui s’attache à souligner le caractère comique, surréaliste, tendre, ridicule, absurde, paradoxal ou insolite de certains aspects de la réalité.

Dans le cadre de mes études, je ne me souviens pas avoir profité d’un cours sur l’humour dans la Bible. C’est dommage, car l’humour, comme la poésie, est souvent une belle porte ouverte sur l’au-delà de soi. Elle permet souvent de plonger de tout son être dans la méditation d’un texte inspiré. Quelques exemples qui m’ont interpellé :

Language poétique

Dans le premier récit de la création (Gn 1, 1-5), lire le langage poétique avec un esprit critique m’a fait découvrir qu’au début il n’y avait rien et que ce rien était appelé ténèbres. Puis, Dieu sépare le rien d’un côté et la lumière de l’autre ; et tout d’un coup ce rien, devient quelque chose, ce n’est pas rien tout ça. Cette opposition entre ténèbres et lumière, entre rien et quelque chose, est une forme d’humour qui a nourri ma méditation. En effet, le rien au-dessus duquel planait le souffle de Dieu c’est quelque chose, qui était absence de Dieu ou ténèbres. Ces ténèbres, espace de mon être laissé en jachère de Dieu, font partie de ma vie quotidienne, au-dessus desquelles plane et agit aujourd’hui le logos, la force de création de Dieu.

Et que dire de Moïse devant le buisson ardent, en plein débat avec Dieu. Moïse s’oppose à Dieu, sous prétexte qu’il ne savait pas parler ; c’est vraiment un peu cocasse et surréaliste (surréaliste, c’est normal Dieu est le tout Autre). Voilà un bonhomme qui n’a pas peur de s’opposer à Dieu, de le reprendre pour lui dire qu’il se trompe de le choisir lui, Moïse, mais qui est effrayé à l’idée d’aller tailler une bavette avec son frère qu’il connaît depuis tout petit, depuis son adoption par la famille de pharaon. Parler et débattre avec un buisson en flamme ou à son frère, c’est quoi le plus insolite, voire effrayant ? Cette scène particulière m’a permis de méditer sur quelle image Moïse a de son frère et de son Dieu ; mais aussi, quelle image je me fais de Dieu et de mon frère. Cela me paraît être une bonne question à se poser pour grandir…

Comique et cynique

Et Jonas, n’est-il pas comique et cynique ce prophète qui prend le chemin opposé de Ninive où Dieu l’envoie pour qu’il demande le repentir de la ville. Et pourquoi Jonas refuse-t-il d’obéir à Dieu ? Il en a marre de la bonté de Dieu qui pardonne toujours aux gens qui font l’inverse de ses commandements. N’est-il pas comique ce prophète frustré de devoir trimer pour suivre les commandements, alors que les autres vivent n’importe comment, font ce qu’ils veulent et peuvent se repentir en faisant un jeûne de trois jours pour être pardonnés et on n’en parle plus ; non mais des fois, c’est quoi ces commandements que l’on peut ne pas suivre, ce n’est pas sérieux… Du coup cette histoire m’interroge, pour Jonas ou pour moi, ces commandements sont-ils un cadeau ou un poison, une chance d’épanouissement ou une limite, un carcan ?

Fournisseurs de vin

Jésus lui-même me fait sourire… A Cana (Jn 2, 1-12), Marie lui demande de l’aide, car la noce manque de vin et il lui répond : « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue. » Et que fait-il juste après il dit : « Remplissez d’eau les jarres. » et « Maintenant, puisez, et portez-en au maître du repas. » Jésus se contredit en devenant, par un agir surnaturel, l’un des plus gros fournisseurs d’excellent vin (plus de 500 litres, excusez-moi du peu). Pour quelqu’un qui ne va pas agir, c’est un record… surtout que ce signe devient pour nous le premier de son engagement missionnaire public. Cette situation à mes yeux un peu cocasse m’a interpellé ; pourquoi ce changement d’attitude, une faiblesse, une incertitude ? Ou alors les signes (miracles) ne manifestent pas en soi la Révélation (son heure) qu’il est venue apporter au genre humain ? Dès lors, il faudrait s’interroger quelle est-elle son heure, comment se manifeste-t-elle ?

Surtout, il récidive, lorsque devant une foule affamée, il ordonne aux apôtres « donnez-leur vous-mêmes à manger » (Mt 14, 16b), pour juste après, nourrir lui-même les cinq mille personnes à partir de cinq pains et deux poissons. C’est quoi cette affirmation, allez-y faites-le, vous êtes capables de nourrir vous-mêmes tous ces gens et, juste après, c’est lui qui agit et qui fait l’essentiel du travail… Je me suis interrogé, c’est quoi ces encouragements à l’action ? Des paroles en l’air, juste pour la forme ? Ou alors, manifestent-elles vraiment la capacité d’action, des apôtres ou de moi-même ? Cette capacité n’aurait rien à voir avec un pouvoir personnel et solitaire, mais serait plutôt le résultat d’une action collective. Les apôtres, vous, moi, nous serions capables de déplacer les montagnes pour autant que nous vivions cette action en tandem avec quelqu’un, avec lui… Ce n’est pas moi qui prie, c’est lui qui prie en moi ; ce n’est pas moi qui agis, c’est lui qui agit par et avec moi… Cela ouvre des perspectives, ne trouvez-vous pas ?

Humour et Révélation

Je trouve que Jésus a aussi beaucoup d’humour dans le sérieux de son annonce de la Bonne Nouvelle à la samaritaine. En lui demandant « Donne-moi à boire », Jésus transgresse trois tabous juifs, trois règles ecclésiales de l’époque : l’interdit de parler à une femme en public, l’interdit de parler à une samaritaine, l’interdit de pactiser avec les samaritains qui sont considérés comme des hérétiques de la foi juive. L’ironie est que cette parole « donne-moi à boire » est un acte subversif, qui s’ouvre sur une rencontre, un échange et des jeux de mots équivoques. La samaritaine souligne ce qui les sépare, Jésus utilise ce qui les unit. L’une parle de l’eau qui désaltère le corps et l’autre lui répond par de l’eau vive qui fait jaillir la vie éternelle. L’une lui demande de ne plus avoir soif et l’autre lui demande d’aller chercher son mari. Par cette question, Jésus reconnaît la souffrance et la situation d’exclusion que vit cette femme qui n’a plus de considération pour elle-même puisqu’elle vient à midi puiser de l’eau, le soleil tape si fort que personne ne viendra en même temps qu’elle. Elle n’ose pas reconnaître sa propre souffrance d’être une paria, puisqu’elle répond « Je n’ai pas de mari ». Paradoxalement, au moment où Jésus souligne qu’elle en a eu cinq de maris et qu’il souligne sa situation actuelle transgressive qui est hors mariage, elle se sent vivre et accueillie. Et un nouveau glissement s’opère dans la discussion, elle se sent accueillie par ce prophète et l’interroge du comment voir une relation à Dieu, sur la montagne ou au temple de Jérusalem ; et la réponse opère un nouveau déplacement : en Esprit et en vérité (l’eau vive). Puis elle questionne sur la venue du Messie et lui, répond, « Je le suis ».

Dès lors, la solitaire, la paria, laisse sa cruche, l’objet de son attention première, et retourne vers ces gens dont elle se sentait rejetée pour annoncer le Messie. Les samaritains accourent vers Jésus, l’invite et après deux jours beaucoup posent un acte de foi incroyable « nous savons que c’est vraiment lui, le sauveur du monde ».

L’humour de Jésus permet à la samaritaine de prendre une certaine distance de la réalité dans laquelle elle est enfermée, et devient le lieu de sa croissance et de la révélation.

Mais la Révélation elle-même, je la considère comme étant le sommet de l’humour de Dieu. En effet, pour révéler sa divinité, Dieu choisit un homme, Jésus, pour se dévoiler, se laisser découvrir et ouvrir le chemin du salut, cette route qui conduit à lui.

Dès lors, je nous souhaite de toujours pouvoir davantage accueillir l’humour de Dieu dans nos vies, pour qu’il nous guide et ouvre notre cœur à sa réalité. Je vous souhaite de bonnes vacances, un bon repos et un bel épanouissement par l’humour divin.

As-tu déjà souri aujourd’hui?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Aigle (VD), juillet-août 2020

Par Sylvie Blumenthal | Photo: Lydia Blumenthal

En voyant le thème de ce numéro « L’humour, chemin vers Dieu », je me suis demandé s’il était approprié de parler de l’humour, alors que « l’ouragan coronavirus » était encore en train de sévir ?
Je me suis donc plongée dans l’actualité pour voir si le confinement avait eu raison du sourire. Eh bien, non ! En plus de la solidarité, les gens ont rivalisé d’initiatives pour rendre vivable ce moment inédit. Beaucoup ont compris que, aussi terrible que puisse être ce que nous traversons, laisser mourir le sourire aurait été encore pire. 

Dès lors, qu’en est-il des chrétiens ? Serait-il inconvenant d’avoir un visage de « ressuscité » ? Quand il n’est pas méchant ou moqueur et qu’il respecte la sensibilité de l’autre et ses convictions, l’humour est un bon moyen de dédramatiser, se décentrer, alléger les situations lourdes, dénoncer ou dévoiler ce qui est caché, créer une ouverture à l’autre.
L’humour, par le rire qu’il provoque, suscite une décontraction intérieure qui permet de se libérer, de créer du lien et de faire un espace à l’autre et au Tout Autre. J’y vois alors un lien très étroit avec la foi, qui génère chez les fidèles : liberté, désappropriation de soi, altruisme, confiance, miséricorde, joie, bienveillance, ouverture à l’autre, et au Tout Autre, et vie en abondance.

Une foi déconnectée du quotidien de l’homme ou mieux encore, une foi décontextualisée n’est rien d’autre qu’une foi morte. Elle devient fade et sombre. Or un chrétien n’est ni fade ni triste. Le pape François, dans son exhortation apostolique La Joie de l’Evangile, dénonce avec force ces chrétiens « qui semblent avoir un air de Carême sans Pâques ». D’ailleurs au Moyen Age, le prêtre devait faire rire les fidèles le jour de Pâques. On appelait cela le « rire de Pâques ». Et saint Paul, dans sa première épître aux Thessaloniciens (5, 16-18), nous invite à être toujours joyeux et à rendre grâce en toute chose.

Cette joie n’est pas une joie simple. C’est celle que donne le Christ qui nous veut parfaitement heureux. Le Pape ajoute « La joie de l’Evangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus. Ceux qui se laissent sauver par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide intérieur, de l’isolement.  Avec Jésus Christ la joie naît et renaît toujours ».
Ayons donc à partir de maintenant des visages de « ressuscités ». Un visage souriant dit Dieu, car Dieu est allégresse. 

Alors, as-tu déjà souri aujourd’hui ?

En librairie – juillet-août 2020

Par Calixte Dubosson et la librairie Saint-Augustin

Des livres

Dieu est humour – Tome 2
Bernard Peyrous / Marie-Ange Pompignoli

Pensez-vous que Dieu nous ait mis sur Terre pour nous ennuyer pendant toute notre vie ? Non, car Dieu est bon et il se réjouit de voir les hommes mener une existence positive et joyeuse. En effet, l’être humain est aussi fait pour la joie. Certes, il y a des difficultés dans la vie, mais grâce à la joie nous pouvons les dépasser, ainsi elle peut nous conduire plus loin et plus haut, nous aider à respirer plus large. Penser Dieu, c’est donc penser Joie. Peut-être n’y sommes-nous pas habitués ? Eh bien, justement, ce livre peut nous aider. C’est un simple recueil d’histoires, certaines vraies, d’autres inventées par des esprits imaginatifs, qui veulent marier Dieu et l’humour.

Emmanuel

Acheter pour 21.00 CHFLes perles du curé
Bruno Delaroche

La foi et le rire, la foi et l’humour… Une histoire compliquée, difficile. La foi est communément identifiée au sérieux parce que c’est une matière on ne peut plus sérieuse. Et d’ailleurs Jésus a-t-il ri ? On n’en a aucune trace dans les Evangiles. Pourtant, l’auteur en est convaincu, si le rire est bien le propre de l’homme, et que le Christ a réellement été homme, il ne peut pas, sauf à s’être dénaturé, ne pas avoir expérimenté sans malice le rire et l’humour, riant d’un bon rire pétri de bonne humeur. Sans jamais chercher la provocation, les 550 histoires rassemblées ici par le Père Bruno Delaroche nous donnent l’occasion de rire un bon coup d’anecdotes qui sont nées dans l’univers religieux. 

Artège

Acheter pour 18.30 CHFHistoire de celui qui dépensa tout et ne perdit rien
Jacqueline Kelen

La parabole de l’enfant prodigue est si connue et si commentée qu’un livre de plus peut-il apporter des éléments nouveaux ? Eh bien, oui ! Jacqueline Kelen apporte une touche féminine à cette parabole exclusivement masculine. Dans ce conte magnifique, elle fait s’immiscer trois autres personnages : la mère tout aussi soucieuse que le père, l’ange gardien dont l’action discrète et invisible concourt au retour du fils et l’employé de maison, témoin solidaire des angoisses du père et de la mère. C’est un livre qui nous redit que l’Evangile est toujours neuf et qu’il développe des sources intarissables pour notre compréhension de Dieu.

Cerf

Acheter pour 25.50 CHFAvec Thomas More, apôtre de la conscience
Dominique Bar / Gaëtan Evrard

Sir Thomas More connaît une prodigieuse carrière politique jusqu’à accéder aux plus hautes charges de l’Etat d’Angleterre. Cependant sa foi profonde éclairant son engagement politique l’entraîne à désavouer le divorce du souverain. La fureur d’Henry VIII se déchaîne alors ! Thomas More est décapité le 6 juillet 1535 après avoir été accusé de trahison… Cependant, plus que jamais dans sa vie, il n’aura été à ce moment même en accord avec sa conscience. Sa paix se manifestant par son humour joyeux jusque dans les dernières minutes de sa vie. Cette BD retrace de manière heureuse la vie d’un saint qui a mis la conscience personnelle comme valeur à transmettre et à respecter.

Triomphe

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La chapelle de la Maladière à Vidy (VD)

Texte et photos par Pascal OrtelliA deux pas du giratoire d’autoroute Maladière-Vidy à Lausanne, la quiétude de cette petite chapelle contraste avec le bruit de la circulation. Construite vers 1460 et consacrée à saint Lazare, elle est le dernier vestige des léproseries du Pays de Vaud. La chapelle faisait face à la maladrerie, l’édifice où les lépreux furent accueillis jusqu’en 1638 et qui donna son nom à la Maladière.

Proche du gibet de la Chambreronne, l’édifice servit de dépôt pour les instruments de torture. Le 24 avril 1723, le major Davel y fit sa dernière halte avant d’être décapité un peu plus loin.

Aujourd’hui, elle a trouvé une nouvelle vocation en devenant la chapelle des gens de la rue.

Informations
3,6 kilomètres à plat, 55 minutes.

Pour en savoir plus
E. Tagnard, Via Jacobi. Sur le chemin suisse de Compostelle (Saint-Augustin, 2020), p. 110.

La visite

1. Depuis la gare CFF, prenez le bus 1 en direction de la Maladière (10 min.)

2. Empruntez le pont sur la route en direction du cimetière, puis tournez à gauche en prenant le passage sous voie. La chapelle se trouve légèrement sur la droite (5 min.) 

3. Traversez le parc archéologique et longez le camping. Au coin du siège du CIO, dirigez-vous vers la plage. Là vous découvrirez un panneau indicateur marquant le croisement de la Via Jacobi et de la Via Francigena (10 min.).

4. Continuez au bord du lac puis remontez le canal de la Chamberonne. Peut-être verrez-vous le castor… (20 min.)

5. Regagnez le camping en traversant le parc ornithologique du Bourget (20 min.).

L’humour façon saint Bernard

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Aigle (VD), juillet-août 2020

Par Vincent Lafargue | Photo : DR

Cette rubrique nous présente tout au long de l’année, à nous Vaudois mais paroissiens du diocèse de Sion, quelques figures engagées dans notre diocèse. Pour ce numéro estival consacré à l’humour, je suis allé rencontrer les chanoines du Grand-Saint-Bernard qui ont réalisé plusieurs petites vidéos décalées pendant le temps du confinement.« Il n’y a pas eu de plan préconçu… déclare d’emblée le chanoine Joseph Voutaz, curé d’Orsières. Mais je me suis demandé comment rejoindre les gens confinés chez eux. La vidéo s’est imposée. Ce confinement a été brutal pour tous ! Et puis, il fallait aussi que le message les rejoigne dans ce que je suis. Or, j’aime dire les choses en riant – ce que disait d’ailleurs le bienheureux Maurice Tornay : «  J’aime dire la vérité en riant. » »

La recette de cuisine pascale (voir photo ci-contre) a occasionné des remerciements de gens qui ont surpris le chanoine Voutaz : « Ces vidéos ont beaucoup touché les gens qui ne sont pas forcément des pratiquants réguliers… je suis tombé des nues en voyant certains remerciements ! Ce fut une prise de conscience plus profonde de ce que je savais déjà : je ne suis pas le curé uniquement des pratiquants. »

Quant aux inévitables grincheux – fort minoritaires – ils ont plutôt fait rire les chanoines. Y compris la violente lettre anonyme reçue après l’une des vidéos.

10’000 vues en 24 heures
La vidéo de déconfinement du chanoine Jean-Pascal Genoud, curé de Martigny, l’a complètement dépassé. « L’idée était de faire un petit sketch pour détendre. Je pense que les gens attendaient une approche un peu plus légère de ces pages A4 de directives hyper précises et rigoureuses. Du coup, ils se sont marrés et ont partagé généreusement cette vidéo. Il faut croire que, parfois, ça vaut la peine de délirer un moment ! Mais quelle surprise quand la secrétaire paroissiale m’a annoncé qu’on dépassait les 10’000 vues en une journée ! »

Le chanoine Genoud tempère tout de même : « Dans les contextes que nous traversons souvent auprès des gens – deuil, souffrance, difficultés de toutes sortes – l’humour n’est pas forcément le bienvenu. Mais il me semble qu’il y a une telle crise face à une Eglise qui ne peut plus se poser en enseignante voyant tout de haut que, quand on prend les choses avec légèreté, on rejoint mieux les personnes, cela donne une certaine liberté. A condition d’utiliser l’humour à bon escient, évidemment. L’autodérision plutôt que la prise de tête, en somme. »

Le défunt humoriste Jean Yanne disait : « Heureux ceux qui savent rire d’eux-mêmes… ils n’ont pas fini de se marrer ! »

Humour, joie et foi

Par Bénédicte Jollès
Photo: DR« Je croirai le jour où les chrétiens auront une gueule de ressuscités », écrivait Nietzsche. Honnêtement, nos raideurs ou nos crispations peuvent être des repoussoirs.

Et pourtant, la vie des saints est émaillée de fantaisies, ils font preuve d’une liberté intérieure souvent ignorée. Il est arrivé à saint Philippe Néri de tirer sur la barbe d’un garde suisse ou de mettre un chat sur l’autel pour éviter de léviter. Thérèse d’Avila interpelle le Seigneur : « Si c’est ainsi que vous traitez vos amis, je comprends que vous en ayez si peu. » Don Bosco présentait régulièrement des spectacles de magie aux jeunes et les attirait en nombre. Un jour, saint Vincent de Paul croise une religieuse nettoyant un couloir : « Ma Sœur, balayez-vous pour la gloire de Dieu ? – Oui, répond celle-ci, toute fière.
– C’est bien ce que je me disais, parce que, si c’était pour balayer le couloir, vous vous y prendriez autrement ! » L’humour recadre, dédramatise, et quand il sonne juste, il permet à une joie contagieuse de s’exprimer.

Un chrétien qui ne rit pas est en danger, un saint triste est un triste saint. Alors, même et surtout en temps de pandémie, célébrons, fêtons et blaguons, d’abord de nous-même et de nos limites, une belle façon d’éviter de se prendre au sérieux. Et si nous n’avons pas tous le talent du bon mot qui fait rire, nous pouvons au moins sourire.

Un humour très anglais, celui de saint Thomas More

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte-Claire (FR), juillet-août-septembre 2020

Par le Père Jean-Blaise Fellay sj | Photo: LDD

Sir Thomas More est un personnage exceptionnel. Grand érudit, un des meilleurs juristes de son temps, croyant sans faiblesse, d’une modestie charmante, bon père de famille, chancelier d’Angleterre, il est devenu un martyr de l’Eglise catholique. 

Né le 7 février 1478 à Londres, il étudie le droit à l’université d’Oxford. Il se lie à John Colet, chanoine de Salisbury, grand ami d’Erasme de Rotterdam. Ils forment le noyau de l’humanisme anglais, fondé sur l’étude des Lettres, de la Bible et des Pères de l’Eglise. Tenté par une vie de chartreux, More préfère se marier en 1505 et devient père de trois filles et d’un fils. Au service du cardinal Wolsey, Chancelier d’Angleterre, il est engagé ensuite au Conseil privé du roi Henry VIII, devient trésorier de la Couronne, speaker du Parlement, puis Chancelier d’Angleterre en 1529. C’est la première fois qu’un laïc accède à ce poste. 

Le roi Henry VIII veut à tout prix un héritier mâle et donc obtenir du pape Clément VII l’autorisation de divorcer. Il attend beaucoup des capacités diplomatiques et juridiques de son chancelier. Mais More est également versé en théologie, et c’est un catholique convaincu. Il s’estime fidèle serviteur du roi mais plus encore fidèle disciple du Christ. Il ne peut approuver la décision royale de prendre la tête de l’Eglise d’Angleterre et de briser avec Rome. Il n’assiste pas au mariage du roi avec Anne Boleyn. C’est la rupture.

More est dégradé. Mis en jugement le 1er juillet 1535, il est condamné à être « pendu, éviscéré et écartelé » pour trahison. Le roi concède une faveur à son ancien chancelier en commuant la peine en une simple décapitation. More commente : « Dieu préserve mes amis de la même faveur ! »

Lors de l’exécution, More, affaibli par les rigueurs de la détention, peine à monter les marches de l’échafaud. Avec sa politesse coutumière, il s’adresse à l’officier qui l’accompagne : « Je vous en prie, Monsieur le lieutenant, aidez-moi à monter. Pour la descente, je me débrouillerai… » Face à la foule, il se déclare « Bon serviteur du Roi, et de Dieu en premier ». Au bourreau, il affirme que « sa barbe est innocente de tout crime et ne mérite pas la hache ». Il la positionne de manière à ce qu’elle ne soit pas tranchée. Elle ne le sera pas. 

Il faut regarder le beau portrait que le peintre Hans Holbein a fait de Thomas More. On perçoit dans ce visage la source de son humour. C’est un homme de conviction : grand croyant, ami fidèle, bon époux, excellent père, ministre loyal. Son intelligence lucide, un sens moral sans faille ont vite perçu les faiblesses des hauts personnages de son temps et la veulerie de leur entourage. Sa droiture contraste avec leur hypocrisie et leurs mensonges. Par son humour, il dénonce leurs crimes sans entrer dans l’insulte et la violence.

Moins d’une année plus tard, la tête de la malheureuse Anne Boleyn tombait également sous la hache du bourreau, au titre d’accusations aussi fallacieuses que celles qui avaient coûté celle de Thomas More. C’est le 19 mai 1935, quatre cents ans plus tard, que le pape Pie XI canonise le courageux martyr.

Jeux, jeunes et humour – juillet-août 2020

Par Marie-Claude Follonier[thb_image image= »4979″ img_link= »url:/wp-content/uploads/2020/06/Jeux_ete_2020. »]

Question d’enfant

Pourquoi ne travaille-t-on pas le dimanche ?

La Bible s’ouvre avec le récit de la création du monde où il est dit que « Dieu se reposa le septième jour ». Pour les juifs, aujourd’hui encore, le samedi (septième jour de la semaine) est réservé à Dieu et au repos : c’est le shabbat. Pour les chrétiens, le jour sacré est le dimanche, jour de la Résurrection du Christ et premier jour de la semaine chrétienne. Les grandes fêtent tombent un dimanche. On s’abstient si possible de travailler pour offrir plus de temps à Dieu et à sa famille.

Par Pascal Ortelli

Humour

– « Où j’étais quand j’étais pas né ? »  demande Paul, 4 ans, à sa maman.
– « Tu étais dans mon ventre. »
– « Et où j’étais avant d’être dans ton ventre ? »
– « Eh bien, tu étais dans ma tête. »
– « Et tu pouvais réfléchir quand même ? »

Par Calixte Dubosson

Lapin bleu: un site du feu de Dieu!

Par Chantal Salamin
Photos: DR
Humour, humilité, même racine, même chemin… Jean-Baptiste, alias Coolus de son nom d’artiste, est un religieux de la communauté de la Croix Glorieuse à Perpignan. De naissance, un handicap de la vue l’oblige à regarder les choses de très très près et en noir et blanc, handicap qui le pousse à observer beaucoup et parler peu. Et puis, Dieu est entré dans sa vie comme un feu, un feu qu’il transforme en dessin grâce à un personnage de BD, un lapin bleu, zélé et évangélisateur…

… qui invite à se regarder en vérité
Avec le lapin bleu, Coolus peut dire des choses sérieuses sans se prendre au sérieux comme révéler les comportements de ses frères religieux, plus facile avec des dessins qu’avec des mots qui risquent de blesser. Il n’était pas rare que ses dessins affichés dans la chapelle du couvent soulèvent les rires. Une invitation à tous à se regarder en vérité. De ces dessins sont nés les albums « Quel paroissien es-tu ? ».

… qui fait découvrir en profondeur la Parole de Dieu
Chaque semaine, la parole de Dieu pénètre Coolus, qui laisse émerger une mise en situation cocasse du lapin bleu. Derrière ses dessins, le religieux souhaite faire émerger la profondeur de la Parole, et pour aider les admirateurs de ses dessins à voir ce message divin, il les commente – couleur, symbole, composition – sur le site du lapin bleu (lapin-bleu.croixglorieuse.org). 

… et qui catéchise en BD
Un triptyque de trois tomes fait connaître Jésus de façon amusante et humoristique avec plein de trésors cachés, là aussi des commentaires sur son site internet : « Nuit blanche à Bethléem », « Galilée, une affaire qui tourne » et le dernier, qui a obtenu le Prix de la bande dessinée chrétienne d’Angoulême en 2019 : « Scandale à Jérusalem ».

Le site: lapin-bleu.croixglorieuse.org

BD Lapin Bleu sur le shop

KidsGames 2020: Relève le défi ! Du 9 au 14 août – Lonay

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Morges (VD), avril 2020

Photo: DR

Les KidsGames, une semaine d’olympiades pour les enfants de 7 à 14 ans avec un programme sportif, ludique et créatif, couplé à une découverte biblique. L’accent est mis sur la solidarité, le respect et le vivre ensemble.

Le défi des KidsGames est de réussir à « FAIRE ÉQUIPE » avec nos différences ! Notre slogan 2020, « RELÈVE LE DÉFI », encouragera chaque enfant à se défier !

Les KidsGames réunissent plus de 2400 participants répartis dans 18 sites régionaux.

Par des tournois sportifs et les découvertes bibliques, nous travaillons la valeur et le potentiel de chaque enfant. Dans une équipe, tous les individus ont un rôle à jouer et une place à prendre. C’est ce que nous voulons expérimenter lors de ces olympiades.

Public : 7 à 14 ans
Dates : 9-14 août
Lieu des joutes : Lonay, Pampigny, Rolle (nouveau !)
Prix de la semaine : Fr. 90.–

Informations et inscriptions : www.kidsgames.ch (Attention, places limitées !)

Contact :
– Lonay-Pampigny : morgespdj@kidsgames.ch, 078 633 42 03
– Rolle : alice.nielsen@cath-vd.ch, 078 709 28 97

Points de vue sur le Covid-19

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Prilly-Prélaz  – Le Chemin (VD), juillet-août 2020

Par David Chappuis, infirmier | Photos: pixabay, DR

Une tempête s’est abattue sur le monde. Chacun a réagi différemment, et surtout comme il a pu. Il y a eu toutes les réactions, tous les extrêmes. Ceux qui rient, ceux qui pleurent, ceux qui sont en colère, ceux qui sont indifférents… Découvrez leurs témoignages.Critique
Dans ce monde de compétition et de comparaison à outrance, cet état d’esprit fort répandu et qui semble de plus en plus normalisé, on est venu mettre un joug supplémentaire sur le quotidien des personnes : la critique. Vite répandue et diffusée par les réseaux, comme si ceux-ci nous aveuglaient à la sagesse et à la raison en nous faisant parler sans filtre…

Confrontation
Je suis infirmier dans une équipe de soins dans un service de long séjour à la Fondation Clémence. Je suis régulièrement confronté à la souffrance. Et pour soigner celle-ci, le soignant aura besoin de comprendre la cause pour pouvoir agir en conséquence. Sans comprendre d’où vient la souffrance, vouloir agir sur celle-ci est comme un soldat aveugle qui part au combat : tous ses coups seront voués à l’échec. Il n’a qu’une faible chance d’avoir un impact… Comprendre la cause, comprendre ce qu’il y a derrière la réaction de la personne, permet dans les limites de ses compétences, d’accompagner, de rejoindre la personne dans son besoin.

Aujourd’hui dans le contexte du Covid-19, tout le monde a été touché. Soignants et soignés, grands et petits, toutes générations confondues.

La souffrance
Que ce soit dans le monde professionnel ou en dehors de celui-ci, il est nécessaire de ne pas sous-estimer les souffrances et les peurs des uns et des autres. La critique de tel ou tel comportement nous empêche de pouvoir donner plus loin, de pouvoir donner un soin. Elle répand le vide et sème le chaos. Nous ne voyons que ce qui frappe les yeux, mais connaissons-nous ce qui se cache dans le cœur des gens ? Quand on souffre, quand on a mal on réagit. Alors prenons le temps de chercher à comprendre, d’écouter.

S’arrêter
Ce temps particulier de confinement, de ralentissement, voire d’arrêt de la société devrait nous pousser à nous arrêter dans cette course effrénée aux obligations, aux impératifs… S’arrêter pour réfléchir à notre condition, à nos fonctionnements, à nos attitudes envers notre prochain. Changer nos fonctionnements face à nos priorités pour ne plus subir notre quotidien. Mais être libre et pouvoir choisir, être intentionnel dans les temps que nous donnons aux diverses activités que nous avons.

Garder son cœur
Tout peut s’écrouler, mais les gens restent. Toutes nos sécurités peuvent tomber, mais les gens continuent à vivre, ils sont là, présents dans notre quotidien, essayant d’avancer tant bien que mal. Sachons garder et prendre soin de ce qui a vraiment du prix et de l’importance : l’humain, nos proches. Je me pose souvent cette question, qu’est-ce que nous voulons leur apporter ?

Je veux apporter une lumière qui apporte réconfort et chaleur. Un sourire, une main sur l’épaule, un temps d’écoute… Chacun, selon ses capacités, peut apporter quelque chose. Cette lumière, elle brille depuis nos cœurs et elle rayonne sur nos actions et nos pensées. Gardons nos pensées, pour que l’ombre de la critique ne vienne pas ternir nos pensées, nos dires et nos actes.

L’impuissance
Dans cette période ou le Covid-19 était présent dans l’EMS, nous avons dû faire face à plusieurs défis, et nous avons été confrontés à l’impuissance. Malgré tout ce qui a été mis en place, la maladie a frappé. Et il y a eu beaucoup d’insécurité et de questions : comment se protéger ? comment contrôler les effets et les conséquences de cette maladie, etc. Il y a tellement d’incertitudes, tant au niveau de la santé que de l’économie… Face à nos limites, nous sommes confrontés à notre petitesse. Nous nous rendons compte que nous ne pouvons pas tout contrôler et tout maîtriser. Nous avons besoin de quelque chose de plus grand. Plus grand que nous, quelque chose qui soit au-dessus de cette réalité, au-dessus de ce qui nous dépasse.

Au-dessus de nous
Une question alors me vient : Comment trouver ce « plus grand », cet « au-dessus de nous » ? 

Un seul a osé dire : « Je suis le chemin, la vérité et la vie. » Il y a un chemin qui conduit dans la vérité, cette vérité qui nous affranchir de toute crainte et nous fait entrer dans la vie libre et abondante. C’est Jésus-Christ lui-même ! Une force au-dessus de cette réalité et qui n’en est pas tributaire. Jésus-Christ n’est pas de bois, ni de pierre mais il est vivant et il parle et agit encore aujourd’hui. Si on s’adresse à lui, alors il répond. Il n’enlève pas la tempête, mais il donne cette paix qui permet d’être stable tel un rocher au milieu de celle-ci. La mer et la tempête sont agitées mais sa paix nous donne d’être calmes et sereins car il parle, il montre, il révèle.

Sécurité révélée
Par son esprit, il révèle premièrement ce qui est en nous, nos sécurités dans lesquelles nous avons mis notre confiance (argent, vaccin, alliance, etc.). Il vient avec douceur, non pas pour juger, mais nous remplir de sa présence et de sa vie. Il pose cette question : si ton cœur est rempli d’un tas de choses, comment celui-ci peut-il être rempli de ma paix, de ma vie ?

Quelle foi ?
Il veut nous remplir de ses pensées. Il appelle nos cœurs à la foi. Est-ce suffisant pour changer une réalité, pour changer nos vies ? Une foi aussi petite qu’une graine de moutarde peut déplacer les montagnes, dit sa parole. Ne crains pas mais
crois seulement, nous dit encore un autre verset. Que croire ? Est-ce juste de la pensée positive, une élucubration de notre esprit lorsque, devant la glace, nous essayons vainement de nous convaincre que ça va aller ? Non, il y a plus. Il parle ! Notre foi vient de ce qu’on entend et ce qu’on entend vient de la parole de Dieu. Ecoutons-le, soit par son esprit soit par les écritures.

En conclusion
Ce temps d’épreuve avec le Covid-19, nous pousse à évaluer nos cœurs. Qu’est-ce qui demeure dans l’épreuve ? De l’amour, de la lumière, de l’encouragement ou de la critique, du désespoir, des ténèbres ? Gardons nos cœurs, car de là viennent les sources de la vie.

Le témoignage d’une famille endeuillée pendant la pandémie

Par Giuseppe Miano

Depuis déjà quelques mois, nous suivions avec mon épouse et mes enfants les informations concernant le Covid-19. Petit à petit, nous avons vu ce virus se rapprocher de notre pays. La Suisse, épargnée pendant un certain temps, n’a pu y échapper.

Mon père était dans son EMS et nous allions régulièrement lui rendre visite. Avec le Covid-19 nous avons assisté à des changements progressifs. Ce fut d’abord l’interdiction des câlins, dont mon père avait tant besoin et la distanciation réglementaire. A chacune de nos visites, nous constations la péjoration de son état de santé, mais nous ne pouvions que subir les restrictions que nous imposait cette pandémie. Faut-il de temps en temps rappeler à l’homme, sourd pendant beaucoup trop longtemps, que la vie est un cadeau de Dieu et qu’il faut la choyer.

Chaque jour nous apportait son lot de restrictions supplémentaires. Le couperet tomba après quelques jours, nous n’avions plus le droit de rendre visite à mon père. Nous avons alors trouvé une parade. Nous avons fait appel à la technologie avec des appels vidéo par smartphone. Ces appels vidéo nous permettaient indirectement d’être près de lui. Le dimanche matin, 15 mars 2020, nous avons vu, sans le savoir, la dernière vidéo de mon père. L’appel de l’EMS, tellement redouté, nous arriva tard dans la nuit, notre nonno avait reçu son visa pour rejoindre le Père. Covid-19 n’y était pour rien, mais l’âge et la maladie avaient œuvré.

Nous étions en plein début de confinement, avec les écoles qui venaient de fermer et les rassemblements limités à 10 personnes. Comment organiser ses funérailles ? Jésus, Marie, étaient avec nous et traçaient notre chemin. Nous avions l’impression qu’ils nous épaulaient et nous ouvraient toutes les portes. Nous avons pu veiller notre nonno sans trop de restriction, lui organiser ses funérailles de façon très sereine, avec comme unique restriction le nombre de personnes limité à 10, assistant à la cérémonie. Son épouse, ses enfants et petits-enfants ont pu l’accompagner jusqu’à sa dernière demeure. Merci Jésus de nous avoir permis de lui offrir cet ultime cadeau. Ce confinement, qui me semblait au départ être une véritable barrière, s’est transformé en un réel bienfait car nous avons pu véritablement vivre notre deuil, sans encombre, dans l’intimité familiale.

Il est évident que la perte d’un être cher n’est jamais facile, même si l’on est profondément chrétien. On a beau se dire qu’il demeure parmi nous, ce qui est le plus difficile, c’est cette absence de contact, d’échanges. On ne peut plus le voir, le toucher, parler à notre être cher. On se retrouve en face d’une photo à laquelle on pose les questions oubliées, on entame les discussions qu’on aurait tellement souhaité aborder avant. La situation que l’on vit depuis quelques mois, due au Covid-19, nous a imposé des changements dans nos comportements, dans notre mode de vie. Mais elle nous a aussi permis de nous ressourcer, de nous remettre en question, de constater que la vie en égoïste n’est pas une vie. L’Eglise nous apprend à vivre en Frères et Sœurs. Puissions-nous vivre plus fraternellement chez nous et autour de nous. Sachons de temps en temps écouter et non seulement entendre.

Je profite de ce témoignage pour remercier toutes les personnes qui nous ont apporté paix et réconfort en cette période de deuil, et terminerai par le très court passage de la prière de saint François d’Assise, que je dédie à mon Père : « C’est en mourant qu’on ressuscite à l’éternelle vie. »

La maman de deux enfants raconte…

Par Corinne Menthonnex

Au début du confinement et après avoir vu toutes les infor­mations venant de l’Italie, Brigitte avait très peur de cette maladie, peur de sortir, peur pour sa famille. Son mari, mécanicien, devait aller travailler et faisait les courses. Très en souci pour l’Afrique et particulièrement son pays natal le Togo où résident sa maman, ses frères et sœurs, neveux et nièces, Brigitte en avait perdu le sommeil.

Grâce aux réseaux sociaux : Radio Maria Togo… elle a pu prier, suivre des messes dans la langue de son pays retrouvant ainsi confiance dans cette adversité. Ce temps si particulier fut un temps pour redécouvrir l’importance d’être relié par la prière et de pouvoir prier pour les malades, pour les soignants… pour le monde et ainsi de confier à Dieu cette situation qui nous dépasse car « seul Dieu peut nous sauver et sans prière on n’est rien », relève Brigitte.

Après un petit temps d’adaptation, ses enfants ont aimé rester à la maison. En effet avec leur maman, ils ont pu découvrir avec bonheur de nombreuses activités qu’ils n’avaient pas l’habitude de faire comme : confectionner du pain, des gâteaux, faire des jeux de société, improviser un atelier de danses traditionnelles du pays et, ainsi, bien s’amuser.

Brigitte a apprécié ce beau réseau de solidarité et d’entraide où chacun a pu aider son prochain selon ses possibilités.

Reconnaissante que toute sa famille soit en bonne santé, Brigitte remarque que cette pandémie lui a permis de grandir dans la foi, de se rapprocher de Dieu et ainsi d’augmenter sa confiance en la vie.

Des dames bénévoles de notre paroisse se confient

Propos recueillis par l’abbé Boniface Bucyana

Au début c’était comme un couperet ! On n’était pas préparé et les informations n’étaient pas claires. On était obligé de rester à l’intérieur et on ne pouvait plus voir les enfants, les petits-enfants et arrière-petits-enfants. Par exemple une arrière-petite-fille est née pendant le confinement, je ne l’ai pas encore vue. Mais le téléphone a fonctionné à plein tube. Petit à petit, on s’est organisé. La paroisse nous a envoyé du courrier, des téléphones, des prières. Notre foi, au lieu de la perdre, on l’a plutôt nourrie par la prière et la méditation du chapelet, par les messes de KTO pour celles qui l’ont. Les enfants sont venus nous faire des courses régulièrement. Petit à petit, on sortait pour prendre de l’air. On était à la limite de se sentir stigmatisés, surtout quand on sortait avec un masque. Des regards accusateurs nous transperçaient, comme coupables de notre fragilité. Il y aussi ce syndrome de s’exclure soi-même, nous confinant dans la peur, en plus du confinement à la maison. Confinées à double tour, difficile de s’en sortir.

Enfin, nous sommes contentes de pouvoir sortir et venir à la messe, mais nous sommes prudentes et gardons le masque sans être masquées !

Espérons que cette épreuve a amené les gens, surtout les plus jeunes à réfléchir, à découvrir qu’on ne peut pas tout, qu’on ne domine pas tout, et se remettre à plus grand, plus puissant, plus aimant.

Tout le monde a fait l’expérience de l’impuissance devant le déploiement du mal. Il y en a qui ont été victime du syndrome de la cabane (cf. page 3). C’est-à-dire qui enferme dans l’isolement physique jusqu’à se retrouver dans l’isolement moral et social, et qui entretient une peur paralysante.

Mobilisée contre le virus en EMS

Par Florence, soignante

La nouvelle est arrivée tellement rapidement ! Elle a été sans appel ! Nous étions confinés ! 

Un vent de panique m’a d’abord envahie car, comme tout le monde, j’avais besoin de farine, huile, sucre, pâtes et le fameux papier WC !!! J’étais incrédule et je pensais naïvement que nous passerions à côté de cette pandémie !!!

Je suis ASSC (Assistant en soins et santé communautaire) et faisais partie des soignants que l’on applaudissait sur les balcons à 21 heures.

Lorsque j’ai appris que certaines personnes que je soignais étaient atteintes par ce sale virus, j’ai eu très peur, pour ma famille, mes proches et moi-même! Lorsque le réveil sonnait le matin, c’est en pleurs que je partais au travail, mais il fallait y aller, soigner et se protéger pour protéger les autres !

Un matin, je n’avais plus de forces, je ne pouvais pas faire face sans Dieu ! Enfin, j’ai déposé mes peurs au pied de La Croix de Jésus, j’ai prié, supplié pour que je sois protégée ! J’ai crié mes peurs et Il est venu me donner Sa Paix ! C’est alors que j’ai pu accompagner les personnes que je soignais avec cette même Paix qui nous vient d’en haut, cette Paix qui dépasse tout entendement !

Que Dieu vous bénisse.

Messes de sépulture déconfinées

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur de Saint-Maurice (VS), juillet-août 2020

Par le chanoine Calixte Dubosson | Photo: Samuel Revaz

La pandémie du Coronavirus a profondément impacté la façon de vivre de notre société et aussi celle de l’Eglise. Nous avons été contraints d’aller contre nos réflexes naturels de solidarité avec les familles en deuil en les laissant seules assumer une « double » peine, celle de perdre un être cher et celle de ne pas pouvoir célébrer avec la communauté des amis et des connaissances.

De tous temps, la réaction spontanée des personnes humaines a été de présenter à la famille endeuillée ses condoléances soit par une présence physique, soit par des messages et des offrandes de messes. Au temps de Jésus déjà, les sépultures rassemblaient une affluence considérable comme le souligne saint Luc : « Jésus se rendait dans une ville appelée Naïm. Ses disciples faisaient route avec lui, ainsi qu’une grande foule. Il arriva près de la porte de la ville au moment où l’on transportait un mort pour l’enterrer ; c’était un fils unique, et sa mère était veuve. Une foule considérable accompagnait cette femme. »

Soit en tant que prêtre, soit en tant que famille, lors des célébrations dans l’intimité, jamais nous n’avons autant cruellement ressenti l’absence de nos proches et connaissances ainsi qu’un désir d’être entourés et consolés par des poignées de main ou des accolades sincères.

Il est donc précieux de redire ici le rôle essentiel de la communauté paroissiale dans le processus de deuil. J’ai été plusieurs fois témoin de la surprise heureuse d’une famille lorsque, après avoir renoncé à des funérailles quasi secrètes auxquelles elle avait d’abord songé, cette famille constate le jour de la sépulture : « Jamais nous n’aurions imaginé qu’autant de personnes se sentaient encore liées à notre vieux papa, que nous pensions oublié de tous à cause de son âge… »

Beaucoup se heurtent à ce qu’on appelle les dernières volontés du défunt qui veut s’en aller dans l’intimité. Dans un récent entretien, le sociologue et créateur des « cafés mortels » Bernard Crettaz, affirmait sans détours : « J’ai inventé un rite de désobéissance aux dernières volontés. On dit qu’elles sont sacrées : c’est faux ! Ce n’est pas parce qu’on est mourant qu’on est forcément dans la vérité. »

Rendons grâce à Dieu de pouvoir encore célébrer dans nos villages des cérémonies ouvertes à tous, qui offrent à tous un espace de sens et d’expérience spirituelle, que chacun peut habiter selon ses propres convictions et son degré d’engagement dans la paroisse.

Pandémie et précarité: comment faire face?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte Marguerite Bays (FR), juillet-août 2020

Par Léon Chatagny | Photo: DR

Et le Covid-19 est passé par là, semant les dégâts que nous connaissons : inquiétude, confinement, solitude, maladie, décès… et les conséquences économiques désastreuses provoquant fermeture d’entreprises, chômage, manque de moyens pour vivre… la faim. 

Nous avons été choqués de constater l’ampleur de la précarité à Genève ou Lausanne, le défilé d’un kilomètre et plus, de personnes faisant la queue, pour recevoir un kit de survie.

Appel au secours
Chez nous aussi, à cause du confinement, plusieurs personnes ont perdu leur emploi, sans revenu immédiat.
Beaucoup sont, depuis la mi-mars, dans l’attente de recevoir des indemnités de l’assurance chômage, laquelle est calculée sur la moyenne des salaires et n’en dépassera pas le 80 %. Parfois le couple, épouse et mari, les deux sont touchés par cette pandémie. 

Des appels au secours sont parvenus à la Société Saint Vincent de Paul, la SVP.

Parfois, selon la connaissance que nous avons de notre entourage, nous avons pris les devants, en contactant des familles en situations difficiles. Les rencontres entre nous, les délégués des paroisses, n’étant plus possibles, c’est par message e-mail que nous avons communiqué et pris les décisions. Nous avons pu fournir des bons alimentaires, remettre une réserve de nourriture, soutenir financièrement ou dans les cas extrêmes, payer des factures urgentes.

Membre du groupe, je ne puis que rendre grâce de l’activité des bénévoles de la SVP, aidés par d’autres personnes généreuses, apportant des sacs de nourriture à de nombreuses familles dans le besoin. La solidarité est active dans notre UP ! 

Mais les engagements de la SVP dépendent uniquement des dons qu’elle reçoit. Pourquoi, en cette période difficile, ne pas faire encore appel à votre générosité ? Notre compte est ouvert auprès de la Banque cantonale de Fribourg, Société Saint Vincent de Paul, Romont, IBAN CH70 0076 8300 1322 6150 4.

Sans attendre, la SVP tient à remercier très chaleureusement les personnes, paroisses et communes, y compris le Kiwanis, qui spontanément en cette période, lui ont fait un don, voire apporté de la nourriture.

Tous touchés
Nous connaissons ce chant de Carême : « Au cœur de nos détresses, c’est Toi qui souffres sur nos croix… » et ce mot de Jésus : « J’avais faim et vous m’avez donné à manger. » (Mt 25, 35) « Venir en aide aux affamés » est la première des œuvres de miséricorde, n’y manquons pas ! 

Tous, d’une manière ou d’une autre, nous avons été touchés, meurtris dans cette période de pandémie. Mais c’est tous ensemble, en fraternité solidaire, que nous réussirons à sortir de cette crise.

L’humilité

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP de la Champagne (GE), juillet-août 2020

Pour l’équipe pastorale: Jean Tardieu
Sur la base d’un écrit du philosophe Olivier Abel
Photo: Pixabay

Nous sommes en train de traverser une période bien difficile. Ayant été confinés chez nous, plus ou moins confortablement, nous avons appris à vivre différemment.

Cette période m’a rappelé ou même appris une vertu très chrétienne, l’humilité.

Humilité de comprendre que nous ne comprenons pas cette maladie. Nous devons faire confiance à nos scientifiques ainsi qu’à ceux qui ont la lourde tâche de nous gouverner alors qu’eux-mêmes n’ont que des bribes de réponses à leurs propres questions. Humilité de respecter les règles pour le bien de tous.

La vie confinée à plusieurs nous a aussi appelés à la modestie d’être soi-même tout en respectant ceux dont nous partageons le confinement.

Il y a une vanité qui consiste à vouloir « être plus ». 

L’humilité nous fait accepter l’étroitesse de notre point de vue et elle ouvre à la considération des autres points de vue, des autres formes d’existence et de vie que la nôtre.

Dans un monde où tout exige de nous augmenter, tout le temps, l’humilité nous ouvre à la possibilité de diminuer.

Elle nous autorise à laisser de la place à d’autres.

Demain, espérons-le, tout ceci sera un mauvais souvenir.

Mais nous aurons peut-être appris quelque chose.

COVID-19

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Saint-Barnabé (VD), juillet-août 2020

Par le Père Bernard Ugeux, M.Afr. | Photo: Roger Mburente

Une réflexion chrétienne pour cette époque chahutée! (10 mai 2020)Les valeurs évangéliques ont favorisé la mobilisation de nombreux chrétiens pour venir en aide aux malades, aux personnes âgées et isolées, aux soignants… afin de leur apporter l’espérance que le Christ leur a confiée.

Des paroisses et des communautés se sont mobilisées, entre autres grâce aux médias sociaux, pour lutter contre la solitude et pour maintenir des réseaux de prière. Certains catholiques ont découvert que le Christ est autant présent dans le voisin et le pauvre que dans l’eucharistie dominicale dont l’interruption a été difficile à vivre pour beaucoup.

Se pose aussi pour beaucoup de chrétiens la question de la place ou du rôle de Dieu dans cette pandémie. On l’a dit, certaines Eglise du réveil ont parlé d’une punition de Dieu. Pour nous, il est impossible que Dieu le Père, au cœur de Mère, que nous révèlent la Bible et particulièrement le Christ, soit à l’origine d’une telle souffrance pour son peuple. Mais, alors que plusieurs personnes tombent ou perdent des proches dans une terrible souffrance et dans la tristesse, ils peuvent être tentés de se demander : Qu’est-ce que la volonté de Dieu ? Où est-il ? Que fait-il ? Comment peut-il permettre cela ? Rien qu’en posant ainsi la question, on laisse entendre qu’il aurait pu l’empêcher et qu’il a préféré ne rien faire… Certains vont s’acharner dans des neuvaines et des pèlerinages… pour le faire changer d’avis ? Ou plutôt pour se rapprocher de lui qui a déjà tout assumé sur la croix et a promis qu’il serait avec nous jusqu’à la fin des temps ?

Il est important de bien éduquer cette religiosité populaire, qui a toute sa valeur, en montrant qu’il ne s’agit pas d’une forme de chantage sur Dieu, mais afin de comprendre et de faire l’expérience que, dans notre prière et dans l’aide que nous portons aux plus fragiles, nous rejoignons et accompagnons le Christ qui revit sa passion dans les plus fragiles. Jésus a pleuré sur la mort de Lazare et sur Jérusalem, ainsi que face à la mort à Gethsémani. Ne nous trompons pas sur Dieu ni sur sa « toute-puissance ». Il respecte notre liberté (c’est bien l’humanité qui a permis et diffusé ce virus, et non pas lui), mais il nous rejoint jusqu’au plus profond de notre doute et de notre désespoir. Ici, chacun peut se demander : face à ce drame, quelle est mon image de Dieu ? et ma relation avec Lui ? Quel pourrait être mon engagement personnel aujourd’hui ?

Après l’orage

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP des Boucles du Rhône (GE), juillet-août 2020

Texte et photo par Jean-Marc Lacreuze

Ces lignes sont rédigées à la veille de la Pentecôte, jour de réouverture de nos églises aux célébrations eucharistiques. Après un très, très long Carême qui s’est prolongé jusqu’à la Pentecôte, nos assemblées peuvent à nouveau se rassembler autour de la Table de l’eucharistie. Au début de cette crise douloureuse, j’imaginais un retour festif, plein de chants et de joie. Il a fallu vite déchanter : même nos liturgies sont modifiées par les mesures de sécurité sanitaire (je préfère cette formulation aux termes officiels « distance sociale… ») que nous connaissons désormais. 

L’été est devant nous, temps habituel des vacances. Mais ce temps, pour beaucoup, ne se passera pas comme prévu.

L’été, c’est aussi le temps des orages. Le ciel s’obscurcit, des trombes d’eau, voire de la grêle, s’abattent sur nous, puis le soleil revient, parfois accompagné d’un bel arc-en-ciel. Les oiseaux se remettent à chanter, une odeur de terre mouillée emplit nos sens, et la vie reprend.

Après un trop long temps d’éloignement et de jeûne eucharistique forcé, cet été nous permet de retrouver ce qui est au cœur de la vie de l’Eglise, le rassemblement eucharistique. Non, ce n’est pas encore parfait, avec ces rangées de bancs fermés, les distances à observer, nos églises à capacité réduite. Durant la crise, il a fallu inventer des moyens pour vivre notre foi à distance. Maintenant, nous pouvons progressivement nous rapprocher un peu, comme les familles qui ont pu enfin se retrouver. Il y aura encore un long chemin à parcourir, des formes différentes à inventer. Mais l’essentiel qui nous unit, c’est notre foi et notre confiance. Difficile de prévoir ce qui se passe à moyen terme, encore plus à long terme. Habitués à une so­­ciété (et une Eglise !) où tout est planifié longtemps à l’avance, nous ferons l’apprentissage de la confiance. 

Que l’Esprit Saint nous guide sur ce chemin de Foi.

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