Des individus, une communauté

Texte et photo par Nicolas MauryLa pluriculturalité, comme l’explique Thierry Schelling dans l’éclairage du mois, est constitutive de l’Eglise actuelle. Si les papes – du globe-trotter Jean-Paul II à François l’Argentin – passent allègrement par-dessus les frontières, certaines sont encore à faire tomber, même chez nous.

A travers ses nouvelles rubriques, L’Essentiel compte y contribuer.
En s’ouvrant tout d’abord aux jeunes, à travers des jeux et de la réflexion (p. IX) mais aussi en zoomant sur les femmes engagées qui seront les protagonistes privilégiées, une année durant, d’« Une journée avec » (pp. X  et XI). 

A travers « Au fil de l’art religieux » (p. XII) et « En marche vers » (p. XIII), la rédaction romande vous emmènera chaque mois à la découverte de sites ou de destinations de pèlerinage, parfois méconnus, à deux pas de chez nous.

Enfin, à travers « Une communauté, un produit » (p. XV), nous ne vous proposerons pas uniquement un parcours gustatif à travers la production de congrégations religieuses, mais aussi de découvrir comment vivent les chrétiens issus de la migration composant la mosaïque de l’Eglise romande actuelle.

Bonne lecture.

Semaine de prière pour l’unité des chrétiens

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, décanat Sion (VS), janvier 2020

Par l’Abbé David Roduit, délégué à l’œcuménisme pour le décanat | Photo: DR

Depuis plus de 110 ans se déroule chaque année une semaine de prière pour l’unité des chrétiens. Dans notre hémisphère nord, elle est célébrée du 18 au 25 janvier, durant la semaine précédant la fête de la conversion de l’apôtre saint Paul. Cette année, ce sont les chrétiens de Malte qui ont préparé les documents de réflexion et de célébration autour du thème « Ils nous ont témoigné une humanité peu ordinaire » (Actes 28, 2 ; en souvenir du naufrage de saint Paul marquant l’arrivée de la foi chrétienne dans ces îles).

Pour notre décanat, une célébration commune de prière pour l’unité sera célébrée le mardi 21 janvier à 19h30 au Temple protestant de Sion. Elle réunira la paroisse protestante de Sion, les paroisses catholiques du décanat de Sion, l’Eglise évangélique mosaïque (anciennement « Stadtmission »), l’Eglise évangélique apostolique, la paroisse orthodoxe saints Georges et Maurice ainsi que l’Eglise adventiste.

Cette année, la table ronde œcuménique propose une démarche supplémentaire de rencontre avant la célébration de l’unité. Ainsi les différentes communautés ecclésiales se rendront visite durant les rassemblements dominicaux. En ce qui concerne notre décanat, une délégation catholique est invitée au Temple protestant à Sion pour la célébration du dimanche 19 janvier, tandis qu’une délégation de l’Eglise mosaïque sera accueillie avant la messe du même dimanche à l’église de Saint-Léonard. Cette démarche vise à conscientiser chaque fidèle de l’existence d’autres chrétiens à leurs portes ainsi que de la nécessité de prier pour l’unité de ceux pour qui le Christ a donné sa vie et qui se réclament de lui. Il n’y aura pas d’intercommunion sacramentelle vu que celle-ci n’est pas permise, nos conceptions de foi notamment sur l’eucharistie étant malheureusement encore différentes, mais gageons que grandisse ce jour-là une vraie communion fraternelle en Christ !

Les personnes intéressées à faire partie de la délégation catholique en visite à la paroisse protestante peuvent s’inscrire en téléphonant à la cure de Saint-Léonard au 027 203 22 05.

Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, 18-25 janvier 2020

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Haut-Lac (FR), janvier-février 2020

Texte par la Pasteure E. Zbinden | Photo: DR

« Voir au-delà »

Voici l’histoire d’êtres humains qui affrontent la force d’une tempête sur le chemin maritime les emmenant vers leur destin. Ils se battent contre les éléments, endurent la clémence surprenante de soldats et finissent exilés sur une île éloignée de tout. Ce périple, qui nous semble étrangement familier et actuel, se déroule il y a plus de deux mille ans, lorsque Paul, à sa propre demande, est conduit à Rome pour comparaître devant l’empereur. 

Durant son voyage, Paul et ses suivants s’échouent sur l’île de Malte, devenant ainsi des réfugiés. L’accueil qu’ils y reçoivent est loin de ce que les réfugiés modernes peuvent expérimenter de nos jours. Dans le livre des Actes (28, 2), Paul nous relate, « ses habitants nous traitèrent avec une très grande bienveillance : comme la pluie s’était mise à tomber et qu’il faisait froid, ils allumèrent un grand feu autour duquel ils nous accueillirent tous. » Ils trouvent face à eux un formidable élan d’humanité et d’hospitalité avant même qu’il puisse y avoir une considération de leurs différences d’origine et de culture. 

Quel rappel incroyable nous est offert cette année encore par la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens : voir au-delà de ce qui marque notre différence, pour plutôt voir ce qui nous rapproche avant tout : notre humanité ! Le naufrage de Paul nous invite à réajuster notre regard, à rester ouvert à l’autre et ainsi vivre au plus près le salut de Jésus offert pour tous. Que cette semaine de prière puisse continuer à marquer notre ouverture et notre accueil à celui qui vient à nous, dans la paix et l’amour de Dieu. 

Dans notre secteur

Dimanche 26 janvier 2020, à 19h, à l’église de Courtepin, la prière œcuménique mensuelle du 4e dimanche, s’inscrira dans le cadre élargi de la prière universelle pour l’unité des chrétiens. Quelle que soit votre confession, venez nous rejoindre pour partager la paix et l’amour de Dieu.

Commencer et recommencer

«Nous voilà au commencement… Regardons donc ce qui se passe dans l’année liturgique au commencement de l’année civile.»Par Françoise Besson
Photo: media.fromthegrapevine.com

Nous voilà au commencement d’une nouvelle année, appelés à reprendre nos tâches après la pause des fêtes, appelés donc à REcommencer une année dans nos chemins quotidiens. L’année liturgique vient elle aussi de commencer, ou presque, et « Dieu sait » si nous sommes habitués à ses rythmes, ses fêtes, ses rituels, nous y avançons sans surprises…

Regardons donc ce qui se passe dans l’année liturgique au commencement de l’année civile. L’événement marquant, c’est le baptême de Jésus, épisode tellement important qu’il nous est présenté deux fois, dans l’évangile de Matthieu et dans celui de Jean. En ce début d’année, on parle donc avec insistance d’un autre début : le commencement de la partie visible de l’engagement de Jésus, ce que l’on nomme souvent sa vie publique. C’est le commencement de ce que l’on sait de lui de façon assez sûre. * Jésus est venu auprès de Jean, personnage très connu de son temps, puisqu’on dit que les foules le suivaient. Jean dont la voix porte loin, lui qui ira jusqu’à déranger le pouvoir en place… 

Jésus connaît Jean et, comme d’autres, il vient pour entendre cet appel à un changement de vie. Comme d’autres, il vient recevoir le baptême. Ce qui se passe à ce moment-là est un mystère, nous ne pouvons en avoir que l’image d’un bouleversement, d’une force immense : les cieux s’ouvrent nous dit-on… Une colombe paraît… On ne sait pas ce que Jésus a vécu mais on sait que ce moment-là change tout ! Nous assistons, dans les récits de l’évangile, à un commencement : le Nazaréen, désigné par son lieu d’origine, son lieu de vie, devient l’homme des routes et des villages, des discours et des rencontres, l’homme des guérisons. 

Et voilà qu’il met à son tour les autres dans un commencement, d’abord en les appelant. Et c’est un changement immédiat : ces hommes quittent le connu, le quotidien, pour suivre celui qui les a choisis pour disciples. Mais il enseigne aussi. Et on sait qu’il le faisait avec autorité, en annonçant quelque chose de nouveau ici et maintenant, employant un présent qui surprend : le royaume est là… 

Par ses guérisons, Jésus met aussi ces hommes et ces femmes dans un commencement, un surcroît de vie qui leur est donné, une dignité retrouvée, un chemin à tracer…

Ce qui me frappe en lisant ces textes, c’est qu’après son baptême, Jésus n’est pas parti pour un ailleurs lointain, le changement radical s’est fait dans son quotidien, sur les chemin de Galilée qu’il devait très bien connaître. Jésus est en route d’une manière toute nouvelle, engagé de toute sa personne dans l’annonce du Royaume…

Et nous, saurons-nous à notre tour, entendre que nous sommes les bien-aimés de Dieu ? Saurons-nous entendre l’appel et faire confiance ? Saurons-nous faire d’autres rencontres sur les mêmes chemins ? Offrir une autre écoute, d’autres paroles dans les rencontres familières ? Saurons-nous en ce début d’année, accueillir la présence toujours nouvelle du Royaume ? C’est mon « meilleur  vœu » pour chacun de nous ! 

* José Antonio Pagola, Jésus : approche historique, Editions du Cerf, 2019, p. 86

Etre parents d’ados, ça s’apprend ! – Jusqu’au 7 février – Euseigne (VS)

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Val d’Hérens (VS), janvier 2020

Par alpha | Photos: DR

L’adolescence est un passage délicat où l’incompréhension et les conflits prennent souvent beaucoup de place dans le quotidien familial. Cette étape met les parents face à des défis parfois très déconcertants !

Que vous soyez seul ou en couple, que l’éducation de vos enfants se passe bien ou que vous soyez en difficulté, ce parcours est au service de tous les parents. 

Chaque rencontre s’organise autour de différents temps : prise de conscience de notre façon de faire, découverte d’outils concrets, enseignements, témoignages et discussions. 

Les discussions en petits groupes de parents, dans la confidentialité et la bienveillance, permettent de partager les expériences et de se soutenir mutuellement.

Avec le parcours Alpha parents d’ados, les parents prennent conscience avec soulagement qu’ils ne sont pas les seuls à vivre ces moments parfois épuisants. Ce parcours leur donne les repères et les outils nécessaires pour adapter leur communication et leur style d’éducation. Ils peuvent ainsi garder un précieux lien de confiance avec leur ado durant son passage vers l’âge adulte.

Parcours ALPHA PARENTS D’ADOS

Dates : les vendredis 10, 17, 24, 31 janvier et 7 février 2020 de 20h à 22h
Lieu : Euseigne, Salle villageoise
Prix : Fr. 70.– par personne pour les 5 soirées
Fr. 120.– par couple. Matériel et collations compris.
Inscriptions : Rosita Moix au 079 692 15 67 / rosita.moix@bluewin.ch
Renseignements : Rosita Moix ou Fondation Maison de la Famille : www.fondation-maisondelafamille.ch
E-mail : fondationmdlf@gmail.com / 078 705 90 18

Quel sens a la vie ? – Jusqu’au 3 février – Sion

[thb_image image= »21581″]

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, décanat Sion (VS), janvier 2020

Par Jean-Hugues Seppey

Alliance VITA invite chacun, pour la troisième fois à Sion, à participer à une session de l’Université de la vie, son cycle de formation bioéthique, sur le thème «Quel sens a la vie?»En plein débat bioéthique, est-il possible de faire l’impasse sur la question du sens de la vie ? Autour d’experts et de grands témoins, prendre le temps de réfléchir à la société humaine qui reste à bâtir.

L’Université de la vie donne la parole à de grands témoins et allie exposés, témoignages, vidéos, exercices et tables rondes…

Lundi 13 janvier : Se situer
L’époque nous est donnée. C’est à chacun de relever les défis de la complexité croissante du monde, de l’explosion des (bio)technologies, de l’accélération des mutations sociétales, des incertitudes géostratégiques, de la crise environnementale et anthropologique… Pour ne plus avoir l’impression que l’Histoire peut se faire sans nous et malgré nous, commençons donc par nous situer.

Lundi 20 janvier : Endurer
Dans notre légitime quête du bonheur, osons pointer une impasse : l’illusion d’un monde sans souffrance. Elle explique la tentation de faire disparaître les souffrants, aux deux bouts de la vie et de ne pas voir la misère. Apaiser les douleurs du monde est une belle ambition humaine qui mobilise notre énergie. Pour être heureux, il nous faut apprendre, ensemble, à endurer.

Lundi 27 janvier : Progresser
Chaque être humain est un transformateur du monde. Les générations se suivent donc sans se ressembler. Mais tout changement est-il progression ? Les promesses de la société digitale qui révolutionnent notre relation au vivant et à notre propre espèce, nous appellent à distinguer ce qui fait régresser l’humanité de ce qui la fait progresser.

Lundi 3 février : Prendre sa place
Et maintenant, que vais-je faire ? La « famille humaine » est face à un défi inédit : reconnaître son identité spécifique, qui la distingue des animaux et des robots, et en déduire sa mission. Face à la complexité et à la multiplicité des enjeux, en particulier quand il s’agit de préserver la dignité humaine et de respecter la vie, toute personne a besoin de trouver comment, où et avec qui prendre sa place.

Ouverte à tous, cette formation se passe en direct et en visioconférence depuis Paris dans plus de 100 villes en Europe et à l’International. A Sion, elle aura lieu au Lycée-Collège des Creusets, les quatre lundis à 20h15.

Infos

Anne-Laure Kaufmann (Bramois)
udv.sion@gmail.com
www.universitedelavie.fr

Bonne année!

Formule magique, passe-partout! Elle circule à grande vitesse au milieu des centaines de bises qui atterrissent sur nos joues ridées, ou roses, ou qui piquent.Par Valérie Pianta
Photo: tolksnov.ru

Ce sont des mots qui volent comme des confettis colorés que l’on jette au vent… espérons qu’ils se prennent dans nos cheveux, dans les recoins de nos maisons, de nos vestes d’hiver et que nous les retrouvions au fil de ladite année. 

Bonne… à manger comme un morceau de chocolat ?
Bonne… comme la chance à un examen ?
Bonne… comme une parole de politesse ?
Bonne… comme un vœu pieux pour nous rassurer ?
Bonne… comme la route à prendre, sans pneu crevé, si possible ?

On dirait une clé qui ouvre la porte de la nouvelle année !
On se la passe de main en main, de lèvres en lèvres sans trop y croire parfois.
Mais souvent avec beaucoup de sincérité, tout de même.

Bonne… comme une bénédiction donnée dans notre vie, sur le tracé de notre chemin qui monte et qui descend par monts et par vaux des événements. 

Une bénédiction, c’est une parole prononcée qui transmet un vrai désir de bien pour soi, pour l’autre.
Et ce n’est pas que Dieu qui nous bénit !
Chacun de nous est appelé à semer, à dire une parole qui est un vrai désir de vie, de bien.

Ce n’est pas forcément facile, mais devant cette porte qui s’ouvre grâce à la clé magique, on devrait s’exercer à voir du bon en toute petite et grande chose de la vie, et aussi dans les rudes moments qui vont forcément nous faire nous encoubler sur le chemin de l’année à venir. 

Bonne année ! Pensons plutôt Année bénie !

L’église Saint-Pierre à Beauregard, un bijou de l’art déco

Par Natalie Hervieux et Danièle Moulin
Photo: Stéphane Longchamp

Lorsqu’on arpente la rue Saint-Pierre aujourd’hui, on a du mal à s’imaginer que s’érigeait là la chapelle d’un hospice fondé par des chanoines réguliers du Grand-Saint-Bernard dont il est déjà fait mention en 1228. Cet hospice, appelé hospice de Saint-Pierre sur les Places, servait sans doute de refuge aux voyageurs pauvres et aux malades. Lorsque les chanoines se retirent du lieu au début du XVIIe siècle, il deviendra un couvent abritant provisoirement des frères capucins. La petite chapelle de Saint-Pierre sur les Places est démolie au XIXe siècle, la ville de Fribourg subissant de grandes évolutions démographiques et architecturales. À cette époque, Fribourg constitue une seule et même paroisse. Trois rectorats sont institués dans la ville en 1872, dont celui de Saint-Pierre, appelé ainsi en souvenir de l’hospice situé sur les Places. Si le rectorat de Saint-Pierre existe sur le papier, on doit à vrai dire encore trouver un endroit approprié pour son église et sa cure. L’église Saint-Michel devient le lieu de culte provisoire de la paroisse Saint-Pierre. Après de nombreux tâtonnements, un lieu est enfin trouvé en 1928. C’est Fernand Dumas qui remportera le concours pour l’architecture de l’édifice, puis le peintre Gino Severini pour la décoration.

La Remise des clefs de Severini, 1950-1951, 10.5 x 7 m, mosaïque d’émaux-ors-pierres (image 1).

L’actuelle église Saint-Pierre

En face de l’intersection où débouchent l’avenue du Moléson, l’avenue Jean Gambach et le Chemin de Jolimont – artères fréquentées le matin par les nombreux écoliers scolarisés dans les environs – s’élève l’actuelle église Saint-Pierre. Le soir, peu après le passage de ces mêmes écoliers dans l’autre sens, la rosace s’illumine dans le crépuscule hivernal. Si le sanctuaire fait désormais partie du paysage, s’il est même familier pour les paroissiens du quartier, l’on ignore souvent que cette église constitue, en fait, un réel bijou de l’art déco 1, inspiré du futurisme et du cubisme. De fait, Severini a fréquenté durant ses années parisiennes des géants comme Picasso, Modigliani, Braque et Matisse. L’intérieur est également très marqué par le groupe de Saint-Luc. 

Une fois passé le narthex – où les visiteurs curieux peuvent trouver un panneau explicatif et d’excellents fascicules leur permettant de découvrir l’édifice – on débouche dans la vaste et haute nef. Les longs vitraux de Jean-Edward de Castella s’élèvent au-dessus des arcades des collatéraux, ce qui confère à l’intérieur une luminosité plutôt diffuse. En face, l’imposante mosaïque du chœur (cf. image 1). Cette œuvre majeure de Severini représente la Remise des clés au saint patron par le Christ. Scène célèbre de l’iconographie chrétienne, elle se réfère au passage de l’évangile dans Matthieu 16, 18-19 : « Et moi, je te dis que tu es Pierre et que, sur cette pierre, je bâtirai mon Église et que les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elles. Je te donnerai les clés du royaume des cieux : ce que tu lieras sur terre sera lié dans les cieux, et ce que tu délieras sur terre sera délié dans les cieux. »

Entourant l’apôtre et le Seigneur, le symbole des évangélistes 2 et à leurs pieds, deux scènes bibliques : à gauche, l’eau jaillie du rocher et à droite l’appel des disciples (Mt 4, 19. Il leur dit : « Suivez-moi, et je vous ferai pêcheurs d’hommes. ») Le tout, dans un assemblage de tonalités chères à l’artiste où prédominent le vert pâle, l’ocre et le jaune, rehaussés d’autres couleurs vives. En jetant un regard circulaire à l’église, on s’aperçoit que des dalles au plafond en passant par les fresques et les murs, l’ensemble est pensé à travers l’harmonie de ces couleurs audacieuses. 

À côté de cette œuvre monumentale, de nombreux autres bijoux artistiques honorent de leur beauté le sanctuaire, à tel point qu’il est difficile de choisir où poser son regard. On mentionnera cependant de manière privilégiée le chemin de croix (cf. image 2), dessiné également par Severini. Son art de la mosaïque s’y révèle plus directement à la hauteur du regard du spectateur, même si malheureusement l’éclairage fait un peu défaut. La finesse de chaque station invite à la contemplation, convaincante invitation à redécouvrir la pratique du chemin de croix itinérant. 

1 Issu des mouvements artistiques de la Belle Époque, l’Art déco s’inscrit dans le contexte des Années folles. Il exprime souvent une certaine modernité par des formes géométriques et pures. À ses débuts, l’Art déco, est purement ornemental, puis il est gagné par les ruptures esthétiques irréversibles apportées par le cubisme. (Le Larousse)

2 Le lion pour saint Marc, le bœuf pour saint Luc, l’ange pour saint Matthieu et l’aigle pour saint Jean.

Les œuvres des artistes locaux

Si la patte de Severini prédomine dans l’équilibre d’ensemble, il n’en demeure pas moins que de nombreux autres artistes – notamment locaux et choisis par l’artiste italien – ont collaboré à la décoration de l’intérieur de l’édifice. On relèvera la deuxième chapelle qui est l’œuvre de plusieurs artistes (Emilio Baretta, Cingria, Marguerite Naville, Feuillat). La mosaïque du Sacré-Cœur, chef-d’œuvre important de l’art déco, vaut particulièrement le coup d’œil : elle impressionne tant, nous conte notre guide Monique Pichonnaz, que les enfants qui la visitent en demeurent souvent à distance, fascinés.

On relèvera aussi l’Assomption aux pigeons (cf. image 3), à droite du chœur, qui se distingue notamment par le regard des anges tourné, non pas vers Marie, mais vers les fidèles – détail si typique de l’amour de l’artiste pour « les gens ». Autre caractéristique propre à Severini qui n’est pas sans lien avec cette dernière : son attachement simple aux lieux dans lesquels il a vécu. Cette particularité se lit dans la mosaïque de la sainte Famille, à gauche du chœur, où le visiteur attentif saura reconnaître la cathédrale. 

Pour finir, au fond de la première chapelle, une statue plus récente qui se démarque totalement de l’unité d’ensemble du lieu : Notre Dame de Fatima, offerte par la communauté portugaise fréquentant les lieux. Dressée sur un sobre présentoir moderne, la représentation de la Vierge émeut par les nombreux bouquets de fleurs fraîches dont elle est entourée en permanence, témoignages des gestes tendres qui lui sont accordés.

Remerciements
Natalie Hervieux remercie Monique Pichonnaz Oggier pour ses généreuses et enthousiastes explications. La visite guidée dont elle a pu profiter est également ouverte au public. À bon entendeur ! Pour plus d’informations, contacter directement la spécialiste : 079 686 20 04, monique.po@pwnet.ch

Sources
LAUPER Aloys, De Saint-Pierre à Gambach, les tribulations d’un saint patron, in : Patrimoine fribourgeois no 18, L’église Saint-Pierre à Fribourg, octobre 2008, pp. 4-9.
STRUB Marcel, Les monuments d’art et d’histoire du canton de Fribourg, Tomme III, Éd. Birkäuser, Bâle, 1959. 
Samedi 22 février à 18h à l’église Saint-Pierre, office des vêpres chantées.

Dimanche 23 février à 10h, fête patronale de la chaire de saint Pierre, église Saint-Pierre, Fribourg. La messe sera suivie d’un apéritif.

Les bières de l’Abbaye de Saint-Maurice

Par Pascal Ortelli

Photo: cath.ch

Si fraîche et déjà chargée d’histoire ! Après 1500 ans de tradition vinicole, l’Abbaye de Saint-Maurice lance sa propre gamme de bières, les seules produites en Suisse qui soient vraiment… d’Abbaye !

Des bières de haute inspiration
Les trois bières produites dans une ancienne cave à vin datant de 1244 évoquent chacune un moment clé de l’histoire du lieu : 

• une amitié sincère avec la Candide (du nom du compagnon de Maurice, signifiant « pur » en latin), une bière blanche dont la levure a été prélevée sur un parchemin de 1319 ;

• la fondation du monastère avec la DXV (515 en chiffres romains), une bière d’abbaye triple, riche et fruitée ; 

• l’incendie de 1693 avec la Febris, une bière ambrée aux arômes de noisette et de malt grillé, qui insiste sur la ferveur du lieu où la foi, malgré les obstacles, ne s’éteint jamais. 

La marque, en véritable ambassadrice de l’Abbaye, transmet un véritable esprit de partage et de fraternité, nous invitant à suspendre la course du temps pour s’ouvrir à soi et aux autres.

Une brasserie dotée de valeurs
Grâce à l’impulsion d’un confrère bavarois, les chanoines se lancent dans l’aventure en créant en mars 2019 une société anonyme, dirigée par Céline Darbellay. La production qui table sur 600’000 bouteilles par an est confiée à Benjamin Levaux, un maître brasseur belge, passionné et rigoureux.
Les revenus dégagés par l’entreprise détenue à 100 % par l’Abbaye contribueront à consolider une situation financière délicate,
à soutenir les missions ainsi
que des projets à caractère social, environnemental, culturel et cultuel.

Point de vente

Boutique de l’Abbaye de Saint-Maurice, commerces locaux et régionaux dans un premier temps puis nationaux.

Infos :
www.biere-stmaurice.ch

Vous avez dit «apocryphe»?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur d’Aigle (VS), décembre 2019

Par Vincent Lafargue
Photos: Daniel Lehnerr, Pixabay
Pas facile pour nous de di érencier deux sortes de livres: les apocryphes, qui sont des livres non contenus dans nos Bibles (par exemple l’Evangile de Thomas, ou celui de Marie), et les livres deutérocanoniques qui sont ces six livres de nos Bibles catholiques que ne possèdent pas les Bibles protestantes (Judith, Tobie, 1 et 2 Macchabées, Sagesse, Ben Sira le Sage et quelques passages du livre d’Esther et du livre de Daniel).

Dans le dialogue œcuménique, ça se complique. Car nos frères et sœurs protestants appellent eux-mêmes «apocryphes» ces livres que nous appelons «deutérocanoniques»!

«Apocryphe» signifie, en grec, « au sujet de quelque chose qui était caché». On nomme ainsi les livres qui n’ont pas été retenus, et ce dans aucune de nos Bibles. Le fait même d’utiliser le mot «caché» dans leur nom a suscité bon nombre de fantasmes dont le «Da Vinci Code» de Dan Brown est probablement le plus célèbre.

Les deux volumes de La Pléiade qui recensent tous les textes apocryphes connus à ce jour ont connu un immense succès à leur sortie, il y a une dizaine d’années, mais le soufflé est très vite retombé: point de révélation sulfureuse dans ces pages, point d’amour caché de Jésus pour Marie-Madeleine, point de Graal qui serait caché aujourd’hui encore. Simplement l’histoire de Jésus, telle que nous la connaissons, avec quelques détails que nos Bibles ne donnent pas: les prénoms des parents de Marie, par exemple, Anne et Joachim, ou encore la présence du bœuf et de l’âne auprès de la mangeoire de la nativité.

La simple et belle histoire d’amour de Dieu pour nous, son peuple. Et ce n’est déjà pas si mal !

Origine de la crèche de la Nativité

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Sacré-Coeur, Ouchy-Lausanne (VD), décembre 2019

Par Alice Jossi-Zamora
Dans les premiers siècles de notre ère, alors que judaïsme et christianisme n’étaient pas encore deux religions bien distinctes, la Nativité du Christ n’était pas célébrée. En effet, dans la tradition juive, célébrer les anniversaires est considéré comme un rite païen.

Au IVe siècle, sainte Hélène, mère de l’empereur Constantin, ramena de son voyage en Terre Sainte, parmi de nombreuses reliques, des restes de la crèche de Bethléem. Pour les abriter, elle fonda à Rome la basilique de Sainte Marie Majeure. Comme on ne connaissait pas exactement la date de la naissance de notre Seigneur, «Soleil de Justice», on fixa la fête de sa naissance, au solstice d’hiver moment de la fête du «Soleil invaincu» qu’elle remplaça. Dès ce moment, les premières célébrations de Noël eurent lieu dans cette basilique romaine.

Le jour de Noël 1223, saint François d’Assise en visite à Greccio, petit village de la région du Latium italien, voulut partager avec tous le souvenir de son voyage à Bethléem. Il décida de célébrer la messe dans une grotte, avec une mangeoire pour autel, en présence d’un bœuf et d’un âne vivants. L’Enfant Jésus n’était pas représenté puisqu’Il était incarné dans le pain et le vin consacrés. Une grande foule accourut, chantant les louanges à Dieu Vivant. Depuis lors, par l’intermédiaire des franciscains, la tradition de la crèche se répandit dans tout l’Occident.

Pour concevoir sa crèche à Greccio, saint François l’a décrite ainsi :
«Je veux évoquer le souvenir de l’Enfant qui naquit à Bethléem et de tous les désagréments qu’il endura dès son enfance; je veux le voir, de mes yeux de chair, tel qu’il était, couché dans une mangeoire et dormant sur le foin, entre un bœuf et un âne.»

Saint François a voulu partager le souvenir de son voyage à Bethléem.

A notre époque, la symbolique de la crèche tend à s’éloigner de ce qu’elle a représenté pendant des siècles. Cette fête, rappelant l’incarnation de Dieu parmi les hommes, né pauvre parmi les pauvres, devrait être célébrée dans la solidarité et l’amour, dans le partage et le don. Or, elle se transforme peu à peu en une célébration de la consommation effrénée et vide de sens. Approchons-nous de la crèche avec les yeux de saint François, avec son humilité, son amour des plus petits et de toute la création, pour chanter avec les anges: «Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux homes qu’Il aime.» Luc 2 : 13-14

Noël

Un scintillement, une lueur dans la nuit,
c’est l’appel de l’amour qui se fait présent.
Il vient combler nos cœurs pour qu’on n’oublie pas que le don de Dieu est fait d’amour.
Meilleurs vœux de Noël
et une Bonne et Heureuse Année 2020 !

L’équipe de rédaction du Sacré-Cœur

La Bible, quel canon…

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP La Seymaz et UP Champel/Eaux-Vives – Saint-Paul/Saint-Dominique (GE), décembre 2019

Par Pierre Moser | Photo: DR
Noël approche, entraînant dans son sillage foultitude de traditions. Le bœuf et l’âne gris doivent leur présence autour de la crèche à l’évangile du pseudo Matthieu (Ch 14). La virginité de Marie doit sa persistance au protévangile de Jacques1. Bref, les exemples de références apocryphes foisonnent aussi bien dans nos traditions que dans certains de nos dogmes. Mais comment se fait-il que dans nos sociétés occidentales, notre éducation nous fait passer à côté de tant d’histoires et pourquoi? Parmi les réponses possibles, j’en vois deux : la nature même de ces documents: «apocryphe» signifie caché, et c’est bien ce que notre Eglise a cherché à faire pendant longtemps. D’autre part, se promener dans des textes tel le Livre d’Adam nécessite une lourde préparation vu la difficulté des textes; c’est déjà un travail d’expert. Pour mémoire, les évangiles canoniques ne nous sont pas disponibles depuis beaucoup plus longtemps: il a fallu Vatican II pour autoriser l’usage de langues vernaculaires dans la liturgie.

Naviguant entre merveilleux, miraculeux, fantastique et vérité historique possible, ces documents, malgré leur abord difficile, sont d’une richesse extraordinaire. Alors que la «canonisation» des écrits que nous tenons aujourd’hui pour officiels en fait une collection fermée, la tradition et les canons de l’Eglise se sont largement inspirés de ces textes dits «cachés». L’Assomption et la fête qui la célèbre en sont deux beaux exemples.

Que certains textes de ces apocryphes soient considérés comme farfelus ne soulève aucune objection pour ma part, n’en déplaise aux contradicteurs. Le tintamarre que la découverte de l’évangile de Judas a provoqué devrait nous convaincre 2. Encore aujourd’hui la polémique fait plus le «buzz» que la science. Et l’historicité du Nouveau Testament n’est pas discutable: les Pères de l’Eglise des trois premiers siècles font référence à la totalité des textes qui le constituent. Trêve de polémique, je vous laisse entre les mains de l’équipe de L’Essentiel pour vous guider dans la «révélation» de ces écrits «cachés».

Joyeux Noël et bonne lecture.

Marie et Jésus dans le Coran

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, décanat de Sion (VS), décembre 2019

Par Philippe D’Andrès | Photo: DR

Marie et Jésus – Miniature perse.

En décembre, nous fêtons l’Immaculée Conception et Noël. Ce numéro de L’Essentiel porte sur les apocryphes.
Ceci n’est pas sans rappeler que certains de ces textes voulaient renseigner la piété populaire sur la naissance et l’enfance de Marie et de Jésus. Extrêmement appréciés, ils ont influencé la liturgie et l’art. Ce qui est moins connu, c’est le rôle qu’ils jouent dans le Coran. Dans les régions désertiques en marge de l’empire romain, les marchands arabes, dont Mahomet, Mohammad en arabe, ont été en contact avec des pèlerins, ermites et des groupuscules judéo-chrétiens. Ceux-ci leur ont raconté ces histoires, tant et si bien que les références ou les allusions à la littérature chrétienne du Coran proviennent pratiquement toutes des textes apocryphes.

Le texte coranique parle de Marie et de Jésus avec un très grand respect. Le nom de la mère de Jésus, Marie, Maryam en arabe, y figure trente-quatre fois, contre dix-neuf dans le Nouveau Testament. Elle est aussi l’unique femme désignée par son nom. Toutes les autres figures féminines du Coran n’y sont mentionnées qu’en relation avec un homme en tant qu’épouse, mère, fille ou sœur.

Les sourates 3 et 19 consacrent à Maryam deux récits continus et relativement longs. Ceux-ci adoptent la ligne du Protévangile de Jacques, un apocryphe de la seconde moitié du IIe siècle. Avant même sa naissance, Maryam est consacrée à Dieu par sa mère. Elle passe son enfance dans le sanctuaire où le vieillard Zacharie s’occupe d’elle. Celui-ci constate que Dieu lui fait apporter chaque jour la nourriture dont elle a besoin. Le récit se poursuit avec l’annonce à Zacharie et la naissance de son fils Jean-Baptiste, Yahyâ en arabe. Finalement, comme Maryam devient femme, elle ne peut rester dans le Temple. Le Protévangile de Jacques raconte alors le tirage au sort chargé de désigner celui qui allait la prendre en charge. Le Coran y fait allusion, mais ne mentionne pas Joseph. Il veut ainsi lever tout doute sur la virginité de Marie qu’il souligne à trois reprises.

Le texte coranique a deux récits de l’An- nonciation, dans deux cadres différents: le Temple et le désert. Maryam accouche ensuite seule, adossée au palmier. Elle en mange les dattes pendant qu’un let d’eau jaillit au pied de l’arbre. Est-ce ici une allusion à l’Evangile de l’enfance du Pseudo-Matthieu? Quoi qu’il en soit, elle rentre ensuite chez elle où cette naissance hors des liens du mariage suscite rejet et calomnies. Couché dans son berceau, l’enfant innocente alors sa mère en disant que Dieu l’a fait prophète. Dans l’apocryphe Evangile arabe de Jésus, il affirme en revanche, depuis son berceau, qu’il est «Jésus, le Fils de Dieu, le Verbe…».

Apocryphe

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, décanat de Sion (VS), décembre 2019

Par le chanoine Lionel Girard
Photo: Chanoine Josef Sarbach, archiviste du chapitre de la Cathédrale de Sion
Apocryphe, voici un adjectif rare qui paraît presque inquiétant! Pourtant son étymologie désigne simplement quelque chose de caché. Or à l’ère de la transparence forcenée, tout ce qui est caché revêt une certaine suspicion voire un intérêt notoire, tant il semble chargé d’un trésor mystérieux dont nous serions injustement exclus.

Quand des savants ont voulu publier l’ensemble des textes antiques soigneusement recopiés par les moines durant l’Antiquité tardive et tout le Moyen Age et précieusement conservés pendant des siècles dans leurs bibliothèques, leur surprise fut grande de relever nombre d’évangiles, d’épîtres, d’apocalypses et autres récits semblables à ceux connus dans nos Bibles sans qu’ils y apparaissent.

Comme toujours dans pareil cas, certains lecteurs ont crié au complot, déclarant que l’Eglise avait choisi arbitrairement des textes consensuels, écartant donc tous les autres, même quand ils étaient attribués à certains apôtres bien connus.

Rencontre des saints Anne et Joachim, parents de la Vierge Marie, à la Porte d’Or d’après le protévangile selon saint Jacques (IIe siècle). Illustration : MISSALE SPECIALE SEDUNENSE, 1439, ACS, Ms 19, f. 119v.

Ce corpus d’écrits apocryphes a donc alimenté la défiance des sceptiques qui refusent de recevoir le trésor de la tradition de l’Eglise qui, par prudence vis-à-vis de la vérité qu’elle transmet, a dû exclure du canon biblique ces récits fantaisistes très tardifs et manifestement non authentiques.

En définitive, la question soulevée par ce thème met l’accent sur notre lien ecclésial qui, à travers notre rapport à l’Ecriture indissociable de sa tradition vivante, fait de nous les héritiers du véritable trésor qu’est Jésus-Christ, unique Lumière des peuples et Rédempteur.

Ces «faux» Evangiles si parlants

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Notre-Dame de la Brillaz (FR), décembre 2019

Texte et photo par Jean-Marc SudanEn 1997, la Bibliothèque de La Pléiade publia la première édition française des écrits apocryphes chrétiens.

Pourquoi «apocryphe»? Ce terme vient du grec ἀποκρυφος (apokryphos) qui signifie «caché». Saint Jérôme (IVe siècle) l’utilisa pour désigner tout texte exclu de la règle de foi appelée Canon.

En effet, le Concile de Laodicée en 364 avait établi la liste des livres saints, tels que nous les connaissons aujourd’hui.

Cette distinction ne s’est pas faite brutale- ment. Elle fut plutôt le fruit d’une décantation progressive. Au l du temps, certains textes, lus dans la plupart des communautés, s’imposèrent progressivement, alors que d’autres perdirent lentement de leur crédibilité et plongèrent dans l’oubli ou la semi-clandestinité, tout en nourrissant l’univers culturel chrétien. Que de peintres et sculpteurs y trouvèrent une source d’inspiration!

Les Evangiles sont terminés quand les apocryphes commencent à fleurir. Exprimant les combats et les difficultés de croire des premiers chrétiens, ils nous donnent une meilleure compréhension des premiers siècles du christianisme et de l’extraordinaire vitalité des premières communautés chrétiennes.

Parmi les écrits apocryphes, certains ont façonné l’essentiel de la piété mariale. Sans eux, que saurions-nous de l’enfance de Marie, de sa présentation au Temple, de ses parents Anne et Joachim? Que sau- rions-nous de l’histoire de Joseph le charpentier? En cette avant-veille de Noël, si l’on s’en tenait à l’évangile de Luc, les crèches de nos églises et de nos maisons seraient bien vides. Pas de bœuf, ni d’âne ! Pas de Gaspard, ni de Melchior, ni de Balthazar !

Aujourd’hui, nous devons lire les apocryphes sans oublier qu’ils sont des commentaires de la Bonne Nouvelle. Ce sont des textes qui font référence à des traditions concernant des personnages ou des événements bibliques, des figures du christianisme, et que l’on peut même retrouver dans le Coran.

La discrète réserve canonique aurait-elle libéré l’éloquence apocryphe?

La présentation de Marie au Temple

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Vallée d’Illiez (VS), décembre 2019

Un regard à travers les « apocryphes » sur l’enfance de la femme qui devint la Mère de Dieu et de l’Humanité.Par Denyse Gex-Collet | Photo: DRLes Evangiles ne sont pas en mesure de satisfaire la curiosité de ceux qui voudraient en savoir plus sur l’enfance de Marie ou de Jésus.

1. Pour combler ces lacunes, le protévangile de Jacques, déclaré «apocryphe», écrit au milieu du IIème siècle, probablement en Egypte, raconte dans un style merveilleux la
vie de Marie et de ses parents, Joachim et Anne, parfois sans se soucier de vraisemblance ou d’exactitude.

On apprend dans ce récit que Joachim et Anne avaient demandé au Ciel la grâce de la naissance d’un enfant et qu’Anne avait promis, certainement en accord avec Joachim, de le consacrer au service du Seigneur. Lors de la venue d’une fille, alors qu’ils étaient âgés, le nom de Marie lui fut donné, selon la demande d’un ange. Et, tenant leur promesse, la petite fille fut présentée par eux au Temple de Jérusalem.

… Et l’enfant atteignit l’âge de trois ans et Joachim dit: « Appelez les vierges sans tache des Hébreux et qu’elles prennent des lampes et qu’elles les allument et que l’enfant ne se retourne pas en arrière et que son esprit ne s’éloigne pas de la maison de Dieu.» Et les vierges agirent ainsi et elles entrèrent dans le temple. Et le prince des prêtres reçut l’enfant et il l’embrassa et il dit: «Marie, le Seigneur a donné de la grandeur à ton nom dans toutes les générations, et, à la n des jours, le Seigneur manifestera en toi le prix de la rédemption des ls d’Israël.» Et il la plaça sur le troisième degré de l’autel, et le Seigneur Dieu répandit sa grâce sur elle et elle tressaillit de joie en dansant avec ses pieds et toute la maison d’Israël la chérit.

2. Un autre recueil, le pseudo-évangile de Matthieu, écrit au VII ou au VIIIe siècle, aussi déclaré «apocryphe», dispense des images touchantes de Marie lors de la Présentation.

… Puis quand elle eut été placée devant le temple du Seigneur, elle gravit les quinze marches en courant, sans regarder en arrière, et sans demander à ses parents, ainsi que le font d’ordinaire les enfants. Et ce fait frappa tout le monde d’étonnement, au point que les prêtres du temple eux-mêmes étaient dans l’admiration.

Voici comment il décrit le déroulement de la journée de la journée de Marie au Temple:

Elle s’ était imposé la règle suivante: depuis le matin jusqu’ à la troisième heure, elle restait en prière ; depuis la troisième heure jusqu’ à la neuvième, elle s’occupait à tisser; mais, à partir de la neuvième heure, elle ne cessait de prier jusqu’au moment où l’ange du Seigneur lui apparaissait, elle recevait sa nourriture de sa main, et elle s’entendait de mieux en mieux à louer Dieu. En n, avec les jeunes filles plus âgées, elle s’instruisait si bien dans les louanges de Dieu, qu’on n’en trouvait aucune qui fût plus exacte aux veilles, plus instruite qu’elle dans la sagesse de la loi de Dieu, plus remplie d’humilité, plus habile à chanter les cantiques de David plus gracieuse dans sa charité, plus pure dans sa chasteté, plus parfaite en toute vertu. Car elle était constante, inébranlable, persévérante et chaque jour elle faisait des progrès dans le bien.

3. Quant au Livre de la nativité de Marie, probablement rédigé au VIe siècle, classé aussi dans les «apocryphes», il a exercé, comme les deux recueils cités précédemment, une grande influence sur la dévotion mariale.

… Et, tandis qu’ils ôtaient leurs vêtements de voyage et qu’ils mettaient des vêtements plus soignés et plus propres selon la coutume, la Vierge du Seigneur monta toutes les marches l’une après l’autre, sans la main de quiconque pour la guider et la soulever, de telle façon que l’on crut que, sur ce point du moins, rien ne manquait à sa maturité. En e et, déjà dans l’enfance de la Vierge, le Seigneur accomplit un grand acte et montra d’avance par le signe de ce miracle quelle grandeur elle atteindrait. Lorsqu’ils eurent donc célébré le sacrifice selon la coutume de la Loi et qu’ils eurent accompli leur vœu, ils laissèrent la Vierge dans l’en- ceinte du Temple avec les autres vierges qui devaient être élevées en ce même lieu, et eux-mêmes retournèrent à la maison.

La piété populaire et la dévotion mariale sont empreintes de ces récits qui, bien qu’apocryphes, renferment des éléments de vérité. On y découvre, en filigrane, la disponibilité de la Vierge Marie à l’égard de la volonté divine. Les Eglises catholique et orthodoxe ont voulu célébrer la Présentation de Marie, qui figure au missel romain depuis 1505, le 21 novembre, a n de manifester la Sainteté de la Vierge Marie dévoilée dès son plus jeune âge.

Explication de la photo

Le vitrail d’Emile Thibaud, dans l’église Sainte-Marie-des-Batignolles à Paris, daté de 1853, est une belle représentation de ce récit. Dans le cercle central, l’artiste montre Marie et Zacharie qui l’accueille les bras grands ouverts. Revêtu des vêtements sacerdotaux, il incline respectueusement la tête vers la petite fille qui lève les yeux vers lui. Dans la main droite, elle tient un cierge, symbole de la Lumière du monde qu’elle enfantera et un bouquet de fleurs en guise d’offrande. Derrière elle, proches mais comme éloignés, Joachim et Anne prennent congé de leur fille.

Prière

« Attirez-moi après Vous,
ô Reine et modèle
des vierges,
à imiter votre ferveur
et votre fidélité à Dieu »

(extraite du livre « Règles et exercices pour les Congrégations de la Très-Sainte Vierge)

Les apocryphes du Nouveau Testament

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Glâne (FR), décembre 2019

Texte et photo par le frère Francis BasaniSi la richesse des évangiles suscite l’admiration de ceux qui les lisent, la découverte des textes «apocryphe: n’est pas sans piquer la curiosité de ceux qui en entendent parler. En effet, que sont ces textes et de quoi parlent-ils? Essayons de poser quelques repères dans ce domaine souvent obscur…

Ces récits de genres divers ont été rédigés entre le IIe et VIe siècle de notre ère. «Apocryphe» vient du grec αποακρηφοσ qui signifie «caché, secret». Ici, je ne parlerai que des textes apocryphes qui se rapportent à ce que nous lisons dans le Nouveau Testament. On y trouve des évangiles, des lettres d’apôtres et d’autres récits concernant des personnages liés à l’histoire de Jésus.

Ces écrits répondent à différents besoins. Ils possèdent fréquemment des accents apologétiques et témoignent de la diversité et de la richesse de la réflexion des croyants sur le message de Jésus. Certains textes cherchent à étoffer des passages

Art et foi

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Val d’Hérens (VS), décembre 2019

Par Monique Gaspoz | Photo: DRComme un vol d’oiseaux dans l’or de la lumière divine, vous les anges, vous plongez sur la mère et l’enfant endormis. Vous êtes les témoins des merveilles de Dieu. Tout admiratifs, vous vous penchez à la fenêtre du ciel.

Toi Joseph, tu protèges le feu de l’Esprit à l’origine de la vie du Sauveur du monde. Tu veilles sur Lui et sur sa mère Marie. Tu restes éveillé, vigilant. Tu gardes la flamme.

Toi Marie, tu dors paisiblement sous l’œil attendri des anges, en protégeant Celui que Dieu a donné au monde.

Toi l’âne, peut-être penses-tu déjà à la mission qui t’attend: porter l’Enfant-Dieu et sa mère pour fuir jusqu’en Egypte la fureur du roi Hérode.

Toi le bœuf, tu prodigues force et chaleur à la sainte famille.

Dieu, tu t’es fait fragile et beau comme un enfant. Tu as choisi les bras de Marie comme berceau. Dans le cœur de chacun tu veux élire ta demeure. Saurons-nous te faire une place et t’accueillir au creux de nos vies?

Joyeux Noël!

Rencontre intergénérationnelle

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteurs de Sierre (VS), décembre 2019

Propos recueillis par Catherine Amos
Photo: Raphaël Delaloye

L’équipe des messes des familles associée à l’Eveil à la foi invite chacun-e à une rencontre intergénérationnelle le 24 décembre à 10h à l’église de Chalais.

«Moi Marie, je me souviens, tout a commencé dans ma maison… »
« Moi Joseph, je suis là debout, car toujours prêt à prendre la route. »

A tout de rôle, Marie, Joseph, les bergers, l’âne et le bœuf, ainsi que les anges se présenteront à nous et nous aideront à prier.
Les chants de Noël traditionnels prépareront nos cœurs pour accueillir le Christ dans nos maisons et nos cœurs. Ce moment n’est pas une messe, mais un temps de prière et de partage.

Partage entre les générations : nous irons chercher les résidents du home qui pourront se joindre à nous, et les enfants prépareront des cartes pour ceux qui ne peuvent pas venir.

Partage de notre foi en Jésus, Lumière pour chacun !
Partage de gâteaux de différents pays, après le temps de prière.

Bienvenue à tous: agendons un moment de calme et de recueillement dans nos préparatifs de Noël !

Trois jeunes au Togo

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Glâne (FR), décembre 2019

Par Nicole Monney, animatrice pastorale | Photo: Nicole Monney

Chers paroissiens,

Au début du printemps dernier, bien des personnes ont sans trop savoir à qui cela revenait contribué à une belle aventure humaine. J’ai en effet pu partir avec trois jeunes au Togo pour leur faire découvrir l’expérience humanitaire. Nous avions pris contact avec l’association UMUD, qui nous a facilité toutes les démarches pour notre séjour au Togo. Cette association est présidée par un des catéchistes de l’UP. Elle a à cœur de proposer des séjours humanitaires plus ou moins longs dans plusieurs pays d’Afrique. Nous sommes parties le lundi 29 juillet avec toutes les valises bien remplies, un peu vers l’inconnu, ne sachant pas trop ce qui allait se passer.

A 2h du matin du 30 juillet, nous sommes accueillies par les membres de l’association UMUD directement à l’aéroport. Après quelques heures de sommeil, nous découvrions les lieux avec beaucoup de curiosité. Notre logement était plus que confortable (chambre avec lit, matelas…) avec une petite touche exotique ; les sanitaires, bien distincts des chambres s’employaient de manière locale (un seau d’eau et un petit bol pour s’asperger ou chasser nos commissions). Le seau d’eau se remplissait à la pompe dans la cour. Très sympa. 

On s’occupait très bien de nous, la maman du président de l’association veillait au grain. Nos repas étaient succulents, l’entretien des locaux était assuré par le personnel, malheur à nous si nous touchions au balai ou que nous essayions de faire la vaisselle ! 

Tous les matins, nous nous mettions en route pour notre « travail » à l’orphelinat qui s’occupe de 50 enfants et jeunes gens. Jusqu’à 17 ans, ils vivent tous ensemble sous la surveillance de sept collaborateurs et le directeur. Dès 18 ans, ils sont installés dans un appartement un peu plus proche de leur lieu d’étude ou de travail et apprennent à être indépendants.

Des cours de langue

Notre grande tâche était de leur apprendre quelques rudiments d’anglais, de français, de maths… le matin et l’après-midi c’était un moment un peu plus ludique. Inutile de vous dire que nous avons toutes craqué pour la gentillesse de ces enfants, leur bouille parfois si angélique. Cependant, nous avons aussi été très surprises de leur intelligence et leur vision de la vie. 

Le week-end nous avons profité de visiter le pays. Notre première excursion a été pour Ahépé, le village natal de l’abbé Dominique Gagnon, le prêtre togolais, qui quittait à la fin du mois d’août l’UP Saint-Denis. Nous avons pu profiter de sa demeure, une jolie petite ferme perdue au milieu de nulle part, mais surtout une petite oasis à comparer avec les tumultes de Lomé : nettement moins de pollution, de bruit, pas de moustique !… Quelle jolie petite famille que nous avons rencontrée en les personnes de la maman, du frère, de la sœur, des nièces et même petits-neveux. Ils ont quelques poules et un coq qui crie plusieurs fois la nuit, des chèvres dont une petite un peu têtue qui s’amusait à s’échapper de l’enclos pour aller manger les feuilles de buissons aux alentours.

Voyage à Kpalimé

Le week-end suivant, nous sommes parties dans un autre petit coin très paradisiaque, Kpalimé… nous y avons fait des découvertes peu banales comme un château abandonné depuis 1982… des routes dans un état à faire peur. Impressionnant, à quel point les chauffeurs n’ont pas froid aux yeux. Ce n’est pas qu’il y aurait quelques bosses ou trous, mais parfois il manque carrément des bouts de route ! C’est certes une prouesse, mais peut-être aussi un peu de l’inconscience. Je me faisais du mal pour la voiture ou du moins pour le propriétaire qui devrait entreprendre des réparations. En même temps, tant que la voiture roule on ne s’inquiète pas. Le problème se pose que lorsqu’elle est immobilisée… Kpalimé et ses environs est un lieu bien touristique avec ses cascades, ses centres artisanaux, mais pas seulement. C’est aussi la capitale pour la production du café et du cacao. Bien que nous n’ayons pas visité de champs, parce que la plupart sont privés, nous avons pu en trouver sur le marché. C’est à cette occasion aussi que nous avons goûté à un super fruit le corossol ; très juteux et sucré. Hmmm quel régal !

Chaleur humaine

Ce qui est à retenir surtout, c’est le contact facile avec les habitants ! Où que nous étions, le contact était avenant, chaleureux, un peu comme dans tous les pays « démunis ». La phrase typique que tout le monde connaît grâce à Disney « Hakuna matata » est tout à fait applicable. Si l’on se met dans cet état d’esprit, la vie au Togo est plus qu’agréable. Tu as faim, on te donne à manger, tu as soif, on te donne à boire, tu veux aller à gauche, on te laisse aller à gauche, même s’il fallait aller à droite ! Non, je plaisante, quoique… le touriste est quand même quelqu’un d’important qu’il ne faut pas trop contrarier. Ce qui est fort agréable pour son amour propre, par contre cela devient vite compliqué quand tu souhaites aller à un endroit et que l’on ne te dit pas tout ; par exemple une route impraticable, les détours… Du coup, il faudra juste ajouter 1 à 2 heures de plus que prévu. C’est là qu’ils te sortent leur phrase fétiche : « Vous, vous avez les montres et nous le temps. » Quelle philosophie !

C’est encore avec un grand merci que je termine ce petit compte rendu de notre expérience humaine pour un monde uni pour le développement.

Témoignages

Le bilan général : les jeunes ont été très touchés par la vie à Lomé. En voici quelques témoignages :

« Là-bas, les gens vivent en harmonie les uns avec les autres peu importe leur religion, leur couleur de peau. Cela se ressent à la manière dont ils nous accueillent. Ils sont ouverts d’esprit, curieux et nous parlent volontiers de divers sujets. C’est agréable de vivre avec des gens qui vous acceptent tel que vous êtes sans trop de préjugés. Les personnes, la simplicité de vie et la beauté du pays en lui-même ont eu raison de mon cœur et c’est pourquoi j’y retournerai volontiers, même bien plus longtemps. »

« Cette expérience m’a appris beaucoup de choses sur les habitudes de vie et culturelles qui m’étaient totalement inconnues. Toutes les belles rencontres faites au cours du voyage m’ont permis de découvrir une autre vision de la vie où la religion joue un rôle important. En effet, toutes les activités loisirs ou professionnelles sont dédiées à Dieu. Vous y trouverez facilement un restaurant nommé « Par la Grâce de Dieu », le coiffeur « de la volonté de Dieu »… il est difficile de décrire ce que l’on a ressenti, il faut le vivre… »

« Ce rendez-vous avec le Togo, je l’ai vécu comme un tourbillon de rencontres vivifiantes. Tout d’abord, les enfants de l’orphelinat qui nous ont accueillis avec beaucoup de chaleur et curiosité. Contre toute idée reçue, être avec eux c’était comme respirer de l’air frais malgré les manques dus à leur situation particulière. Ce qui pour nous paraissait peu : un nouveau visage, un livre déjà utilisé, un tout nouveau jeu, une nouvelle chanson, pour eux, c’était une réjouissance à pleins poumons. Leur optimisme et leur bonne humeur ont réussi à m’affecter avant même que je me rende compte. »

Wordpress Social Share Plugin powered by Ultimatelysocial
LinkedIn
Share
WhatsApp