Les Eglises unies au front

Le téléphone ne cesse de sonner. Depuis que la guerre a éclaté dans son pays, Sviatoslav Horetskyi reçoit au minimum cinquante appels par jour. Ce prêtre ukrainien gréco-catholique, officiant à Genève et Lausanne, a malgré tout trouvé le temps de nous accorder un entretien.

PAR MYRIAM BETTENS | PHOTOS : JEAN-CLAUDE GADMER

Comment vivez-vous le conflit qui agite votre pays ?

J’aimerais préciser que ce n’est pas un conflit, mais une guerre. C’est d’ailleurs même pire que la guerre, on évoque dans les médias un génocide. Personnellement, c’est difficile de voir les images de mon pays, car elles sont loin de la réalité.

L’Ukraine compte un tiers de fidèles du Patriarcat de Moscou. Comment se passe la cohabitation avec les autres croyants ?

Le Patriarcat de Moscou nous trompe sur le nombre réel de fidèles. Beaucoup de paroisses qui étaient rattachées à Moscou se sont regroupées avec l’Eglise orthodoxe d’Ukraine. Certains fidèles de paroisses russes réfléchissent et se demandent si leurs autorités montrent le bon exemple. Il en résulte que beaucoup de ces croyants ont aujourd’hui une vision plus globale de la réalité et quittent l’Eglise russe.

En quoi la religion contribue-t-elle à la guerre en Ukraine ?

Honnêtement, je ne pense pas qu’on puisse dire que le déclencheur de la guerre en Ukraine soit la religion. Aujourd’hui, beaucoup d’églises à l’ouest de l’Ukraine accueillent des réfugiés et essayent de s’organiser pour être présentes pour tous ceux qui ont besoin d’aide et pas seulement pour leurs propres fidèles.

Dans quelle mesure l’Eglise orthodoxe russe craint d’être dépossédée de son pouvoir en Ukraine ?

Elle perd déjà de son pouvoir ! Et si l’Eglise orthodoxe russe ne se positionne pas pour arrêter ce massacre, elle perdra encore plus.

Quelle influence possède le Patriarcat de Moscou au plan politique ?

On constate cette influence rien que dans la réaction du patriarche Kiril, en tant que chef de l’Eglise russe, il use de cette même propagande, de ce mensonge permanent à l’attention des Russes en Russie. Le fait que l’Eglise ne réagisse pas à ce qu’il se passe est déjà pour moi une réponse à cette question.

Certains croyants ont peur d’un retour des persécutions de l’ère communiste ?

Si l’Ukraine arrive à repousser les soldats russes hors de son territoire, alors la liberté religieuse sera garantie pour toutes les communautés. Depuis la chute de l’URSS, la liberté religieuse n’est pas un vain mot en Ukraine et doit le rester.

Une foi illégale

Selon Portes Ouvertes, une ONG internationale qui soutient les chrétiens persécutés, les Eglises de la région du Donbass, non affiliées au patriarcat de Moscou, subissent une pression croissante depuis 2014. Les autorités des deux Républiques autoproclamées (Donetsk et Louhansk) ont édicté des directives qui obligent les organisations religieuses à se faire enregistrer. Une liste de 195 organisations religieuses enregistrées, établie en décembre 2019 par les autorités de Louhansk, a montré qu’aucune communauté protestante n’avait obtenu d’autorisation. Ne pas être enregistré signifie ne pas avoir accès au gaz, à l’électricité ou à l’eau. Cela rend, de fait, toute activité religieuse impossible.

Les Eglises d’Ukraine

Il est utile de préciser que, outre les communautés protestantes dont parle le communiqué de Portes Ouvertes, il existe dans le pays quatre Eglises : l’Eglise orthodoxe du Patriarcat de Moscou (EOU-PM), l’Eglise orthodoxe du Patriarcat de Kiev (Kyïv) (EOU-PK), l’Eglise autocéphale et l’Eglise gréco-catholique (EGCU).

Biographie express

Né en Ukraine centrale dans la ville de Zhytomyr, Sviatoslav Horetskyi est prêtre au sein de l’Eglise gréco-catholique ukrainienne (de rite byzantin).
Marié et père de trois enfants, il appartient à l’éparchie (diocèse) de Saint-Volodymyr le Grand de Paris et a été nommé l’an dernier administrateur des centres pastoraux des villes de Genève et Lausanne. Stagiaire dans l’UP de La Seymaz (GE) pour l’année pastorale 2022, il se forme pour célébrer dans le rite romain.

Il est né dans la ville ukrainienne de Zhytomyr.

Que vive le patrimoine bâti

PAR DAVID BAGNOUD, PRÉSIDENT DE LA COMMUNE DE LENS
PHOTO : DR

«Son clocher abrite l’un des plus exceptionnels carillons de Suisse.» David Bagnoud

Autrefois propriété de l’évêque de Sion, Lens devient une commune à part entière au XIVe siècle. Elle tire son charme en grande partie de la richesse du patrimoine bâti de son cœur historique, répertorié dans l’ISOS (Inventaire fédéral des sites construits d’importance nationale à protéger en Suisse) et dont l’église constitue un précieux élément.

Dédiée à Saint-Pierre-aux-Liens, l’actuelle église paroissiale de Lens est érigée en 1843 sur le site des trois édifices précédents. De style piémontais, son plan d’un seul rectangle rappelle les lieux de culte postérieurs au Concile de Trente. Elle possède des orgues de 1903 manufacturés par la maison Kuhn de Männedorf (ZH) dont les origines remontent à 1864. Son clocher abrite l’un des plus exceptionnels carillons de Suisse. Comportant vingt-quatre cloches, il se distingue par le fait qu’il est équipé d’un clavier mécanique de type flamand tout en ayant conservé un actionnement valaisan fait de cordes, poulies et chaînes. Cloches et carillons rythment les événements de notre communauté, les jours de fête et l’année liturgique des paroissiens.

L’église de Lens a été restaurée entre 1968 et 1974. Des travaux de conservation ont encore été réalisés en 2010 lorsque la commune a entrepris de revitaliser son centre historique en parallèle du remplacement de ses conduites d’eaux souterraines. A cette occasion, le parvis a été réaménagé en une véritable place du village, conférant à ce dernier une nouvelle dynamique.

Ne représentant pas seulement notre histoire, les sites construits illustrent notre espace de vie actuel. Ils nous permettent de nous identifier à l’endroit où nous vivons. Leur valorisation et leur développement harmonieux bénéficient à la qualité de notre environnement. En laissant une empreinte durable, le patrimoine bâti participe ainsi pleinement à notre bien-être.

Synode, porte ouverte

Dans cette rubrique, L’Essentiel propose aux Evêques des diocèses de Sion et de Lausanne-Genève-Fribourg, à l’Abbé territorial de Saint-Maurice et à leurs représentants de s’exprimer sur le sujet de leur choix. Ce mois, c’est Mgr Jean-Marie Lovey qui prend la plume.

PAR MGR JEAN-MARIE LOVEY, ÉVÊQUE DU DIOCÈSE DE SION
PHOTO : CATH.CH / BERNARD HALLET

On ne peut pas ne pas tenir compte de ce qui se passe devant notre porte. Le monde étant devenu un village, ce qui se vit au bout de ce monde se vit en immédiateté devant notre porte. Depuis la semaine après Pâques, la porte semble contenir une double signification. Huit jours plus tard, dit saint Jean, Jésus vient au milieu de ses disciples : ils sont là réunis, Thomas y compris, lui qui avait manqué la semaine précédente au même rendez-vous. Tous les disciples in corpore, dans le même lieu, dans la même peur, dans le même enfermement ! Les portes du lieu où ils se tenaient sont soigneusement verrouillées. Il y a trop de risques à sortir voir ce qui s’y passe, trop de risques à laisser l’inconnu entrer. Cependant il vient. Et c’est une autre porte qu’il ouvre. Une ouverture qui est désormais littéralement à portée de main. Mets ta main dans mon côté. (Jn 20, 26)

L’Eglise, c’est-à-dire nous tous en tant que communauté de foi, se situe, au long des âges et aujourd’hui encore, devant ces deux types de portes. D’un côté, les portes que l’on ferme par peur des autres, une peur qui nous garde prisonniers de nos propres fabrications. De l’autre, une béance, une blessure, porte ouverte au côté de celui qui aime et appelle à se laisser rejoindre « ma main sur son cœur ».

La première phase de la démarche synodale s’est déroulée dans chaque diocèse du monde. Notre Eglise diocésaine s’y est mise, modestement peut-être, mais avec bonheur. Jusqu’ici, des portes se sont-elles ouvertes ? Des peurs et des paralysies en ont-elles fermé d’autres ? Le processus se poursuit, au niveau des pays, des continents puis de l’Eglise universelle, tant il est vrai que le but de ce synode est précisément le chemin qui se vit sans cesse. Autrement dit, ce qui importe est de faire chemin ensemble ; d’oser avancer malgré tout ce que l’Eglise subit de revers, malgré nos infidélités, malgré nos courtes vues étriquées ou partisanes ; d’oser maintenir notre attention prioritaire sur l’abîme du côté ouvert du Christ. A l’écoute commune des battements de son cœur, dans la vie diocésaine, nous resterons des marcheurs en chemin (synode). Le synode ne s’achèvera pas en 2023, mais bien au seuil de l’ultime porte, celle du Paradis.

Rénovation de l’église paroissiale de Saint-Maurice de Laques et de La Chapelle d’Ollon

Les conseils de gestion portent le souci du patrimoine bâti des paroisses. Ainsi, l’église paroissiale de Saint-Maurice de Laques est en cours de rénovation; la chapelle d’Ollon aura des travaux début 2023. Présentation.

Rénovation de l’église paroissiale de Saint-Maurice de Laques

PAR STÉPHANE PONT, PRÉSIDENT DE LA COMMISSION COMMUNICATION ET RECHERCHE DE FONDS
PHOTO : DR

L’église paroissiale de Saint-Maurice de Laques figure au patrimoine architectural du canton, témoin sacré du début du XVIe et de la fin du XIXe siècle.

Afin de la préserver, il a été décidé d’effectuer d’importants travaux de rénovation qui ont débutés voilà quelques semaines et qui vont se poursuivre au moins jusqu’en décembre prochain.

Grâce au soutien de la commune de Crans-Montana, de l’Etat du Valais et de la Loterie Romande deux tiers du budget de 850’000 francs est déjà couvert. UN GRAND MERCI A EUX !

Il nous reste donc à trouver le solde et nous comptons sur de nombreuses contributions.

Un appel au don est lancé et vous pouvez d’ores et déjà y contribuer en effectuant un virement sur les coordonnées bancaires suivantes: IBAN : CH14 8080 8008 4018 9075 6 – Intitulé du compte « Dons restauration SML »

Rénovation de la chapelle d’Ollon

PAR CÉDRIC VOCAT, PRÉSIDENT DU CONSEIL DE GESTION (COGEST)
PHOTO : DR

La chapelle d’Ollon, dont l’existence est attestée dès 1711, a été agrandie en 1861, puis de 1916 à 1920 par Louis Gard, architecte de la statue du Christ-Roi. De style baroque, cette chapelle est dédiée à la Présentation de Marie au temple.

Les paroissiens ont pu constater que ce bâtiment nécessite un grand entretien. En effet, des fissures sont apparues sur la voûte, la peinture s’étiole, l’éclairage n’est plus à jour, les rambardes des esca-liers ainsi que celles de la tribune ne sont plus aux normes, … Le CoGest a donc décidé de mettre cette rénovation à l’ordre du jour.

Pour ce faire, nous nous sommes réparti le travail. Tout d’abord nous avons demandé des conseils auprès de spécialistes puis nous avons sollicité plusieurs entreprises afin d’obtenir des devis. Ayant reçu ces documents, nous avons pu établir le montant brut de la rénovation. Et, nous fûmes surpris par le montant qui est, tout de même, de 120’000 francs !

Afin de mener à bien cette rénovation, le CoGest s’est mis à la recherche de mécènes et généreux donateurs. Nous avons sollicité plusieurs fondations et, actuellement, nous sommes dans l’at-tente de leur réponse.

Les travaux débuteront, normalement, au début 2023 et devraient être terminés à la fin du printemps 2023.

Si le cœur vous en dit, nous recueillons volontiers tout don pécunier. Un grand merci pour votre précieux soutien.
IBAN : CH82 8080 8002 4644 1292 9 avec la mention « Rénovation chapelle d’Ollon » – Paroisse Saint-Georges Chermignon

Un édifice vivant

PAR FRANÇOIS-XAVIER AMHERDT | PHOTO : DR

La preuve que l’Eglise tient aux bâtiments de son patrimoine, c’est que le terme est le même pour désigner le contenant (le bâtiment matériel) et le contenu (l’Eglise peuple de Dieu). C’est ensuite que nous fêtons le 9 novembre la Basilique du Latran, la cathédrale du pape et la mère de toutes les églises du monde. C’est enfin qu’en principe, un baptême, un mariage, voire des funérailles ne peuvent avoir lieu en plein air, même si le Seigneur habite partout.

Reste que l’édifice de pierre ne sert qu’à permettre à chacun-e de se prêter « comme une pierre vivante à la construction de l’édifice spirituel » en Jésus-Christ (1 Pierre 2, 5). Le bien nommé disciple de l’apôtre Pierre livre dans sa première épître une splendide méditation sur la dignité de chaque croyant et Vatican II a retenu ce texte pour désigner le sacerdoce commun de tous les fidèles.

C’est le Christ qui constitue la pierre vivante fondamentale, choisie par le Père, mais rejetée par les hommes (2, 4). Cette pierre qu’ont repoussée les constructeurs est cependant devenue la tête d’angle (Psaume 118, 22), précieuse pour ceux qui se confient à elle et ne seront pas déçus (Isaïe 28, 16 ; cité en 1 Pierre 2, 6) : ceux qui pourtant étaient chargés de bâtir le peuple de l’Alliance d’Israël ont décidé quant à eux de s’en distancer, si bien qu’elle est désormais pour eux un rocher qui fait tomber (Isaïe 8, 14-15). C’est le drame de la coupure entre les représentants de l’Alliance ancienne, supplantés par les disciples du Fils de l’Homme (1 P 2, 8).

Noms prestigieux

Car tous ceux qui adhèrent au Christ sont maintenant considérés comme aptes à offrir des sacrifices spirituels que le Père agrée pleinement (2, 5b). C’est ainsi qu’ils reçoivent des noms prestigieux, en devenant comme Jésus, prêtres, rois et prophètes : ils bénéficient d’un « sacerdoce royal » ; ils forment une « race élue », jouissant de la miséricorde céleste ; une « nation sainte », participant de la nature divine (2 Pierre 1, 4) ; un « peuple de prophètes, acquis » pour proclamer les louanges du Créateur et Rédempteur de l’univers (Isaïe 43, 20-21) et appelé à rayonner de sa lumière. S’il y a besoin de sauvegarder les bâtisses et chefs-d’œuvre architecturaux hérités de l’histoire, c’est pour que chaque membre du peuple élu s’y trouve « à demeure » et y fasse monter son action de grâce.

Familles et enfants

  PAR MARYLINE HOHENAUERPHOTO : BERNARD HALLET Quelle joie de vous présenter ce mois-ci un journal plus « jeune » ! L’équipe de rédaction a la volonté de toucher plus large que nos précieux et traditionnels lecteurs, en ciblant davantage les enfants et leurs familles, qui font partie intégrante de l’Eglise d’aujourd’hui et de demain. […]
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Une parcelle de Vie

PAR MYRIAM BETTENS | PHOTOS : DR

Faire cohabiter les générations, offrir un toit à ceux qui recherchent chaleur et protection tout en redonnant vie et sens aux édifices religieux ? Les initiatives qui vont dans cette direction existent déjà en Suisse romande.

A l’heure où les agglomérations manquent de crèches et de places d’accueil pour les sans-abris ou les réfugiés, n’existerait-il pas là un moyen de redonner vie au patrimoine immobilier de l’Eglise sans passer par la vente ou la désacralisation ? Ces deux options impliquent nécessairement une période de séparation et de deuil, alors que Dieu incarne la Vie par excellence ! C’est vrai qu’il a opté pour des « lieux » comme un buisson ou une nuée pour se rendre visible aux humains, mais il a aussi choisi… Jésus.

A-t-Il donc besoin d’un lieu saint particulier pour se déployer ? Je ne crois pas. Il habite déjà chaque are de notre humanité, personnes en recherche de
protection et enfants compris.

Vitraux d’Ernest Biéler…

… église de Savièse (Valais)

Trois questions ont guidé l’artiste : la technique particulière du verre, l’unité de l’édifice et le défi du sujet religieux.

PAR AMANDINE BEFFA | PHOTO : JEAN-CLAUDE GADMER

Ernest Biéler est un peintre suisse né à Rolle en 1863. Il s’installe à Paris après ses études, mais au cours d’un voyage à travers son pays natal, il découvre Savièse. Il décide de s’y installer et d’y faire construire un atelier d’artiste. A la même époque, beaucoup de peintres choisissent de fuir l’industrialisation croissante pour se réfugier dans des régions plus proches de la nature et des traditions. Biéler est passionné par le pays, les habitants, leurs coutumes… Il est poussé par une volonté d’apprendre à les connaître. Il participe aux fêtes, aux vendanges, aux mariages, aux funérailles, aux montées au mayen… En attestent ses œuvres ainsi que des photos d’époque. Il est très inséré dans la communauté et il peint des scènes de vie quotidienne.

Lors de la restauration de l’église Saint-Germain, le curé Pierre Jean demande à Biéler de réaliser des vitraux. Dans une démarche d’art total, l’artiste suggère la possibilité de s’atteler plus largement au décor de l’édifice. Trois questions le guident dans la réalisation de son travail : la technique particulière du verre, l’unité de l’édifice et le défi du sujet religieux. S’ensuit une collaboration entre le peintre et le curé, dans un véritable climat de confiance. Pour Pierre Jean, « les vitraux d’une église doivent être le reflet de la vie religieuse d’une paroisse »1. C’est ce que propose Biéler, à travers notamment le vitrail de la Fête-Dieu. Représenter un événement si éminemment catholique ne va pas nécessairement de soi pour un protestant. Mais le catholicisme façonne les traditions, les costumes, la dynamique sociale et l’artiste y est sensible.

Au premier registre du vitrail, les femmes en costume traditionnel porte les bannières. Au deuxième registre, les grenadiers précèdent les enfants, les tsanbrides. La croix de procession occupe une place centrale dans l’œuvre. Au dernier registre, l’ostensoir est abrité sous le baldaquin.

Visites guidées possibles : cure.saviese@netplus.ch / 027 396 10 22

1 Curé Pierre Jean, Bulletin paroissial, mai 1934.

Et si tout le monde avait tout juste ?

PAR PIERRE MOSER | PHOTO : KAROL GARBIEC

La conférence de Frère Philippe Lefebvre, dominicain, donnée à Saint-Paul le 8 avril dernier a apporté des pistes de réflexion intéressantes. Je les résumerais en trois points :

La notion de famille d’abord. Cette notion, dans l’Ancien Testament, est un peu plus large que le couple avec un enfant que nous imaginons aujourd’hui. Frère Philippe le souligne, il s’agit plutôt de clan. « Fils de » prend une dimension temporelle : Joseph est fils de David, mais plus de mille ans les séparent. Il y a pourtant d’autres éléments qui les rapprochent.

La notion de pardon ensuite. Il s’agit en fait d’un terme financier qui nous amènent à une autre dimension que celles des pleurs et de la réconciliation que nous nous représentons aujourd’hui. A l’origine, il s’agit de remettre la dette impossible à honorer dans certaines circonstances comme une inondation par exemple.

Les notions de vocabulaires pour terminer. Et c’est là que mon titre prend toute sa signification. Les mots ou plutôt les concepts évoqués dans l’Ancien Testament sont vivants. Le terme d’étranger représente aussi bien l’ennemi que le frère qui s’est détourné de Dieu. Pendant toute la vie de transmission de cette parole, ces termes ont grandi, ils nous ont parlé de manière vivante.

Mais pour autant peut-on faire dire n’importe quoi à n’importe quelle parole ? Pas du tout, elles représentent un concept, souvent novateur d’ailleurs, appelé à nous parler, hier comme aujourd’hui. L’Ancien Testament n’est pas un livre qui se sert de mots précis et cadrés, mais il utilise des logiques humaines pour exprimer des vérités qui dépassent cette dimension terrestre. A nous d’en faire des aides ou des poids.

«Femme, je vous aime !»

PAR THIERRY SCHELLING | PHOTO : VATICAN NEWS

Le pape François a donné la place à des femmes dans la curie comme aucun de ses prédécesseurs : directrice des Musées du Vatican, secrétaire du Gouvernorat du Vatican (l’organisme qui gère la Cité du Vatican), sous-secrétaire du Synode…

Il a également institué lectorat et acolytat pour les deux sexes ; chez nous, cela passe presque inaperçu, mais dans des milliers de diocèses dans le monde, c’est une occasion bénie d’institutionnaliser la place des femmes en Eglise de manière non plus exceptionnelle, circonstanciée ou opportuniste, mais réellement habituelle.

« L’Eglise est femme »

A la messe du 1er janvier 2022, le Pape s’est écrié : « Que de violence il y a à l’égard des femmes ! Assez ! Blesser une femme, c’est outrager Dieu qui a pris l’humanité d’une femme… » Et de rappeler qu’il faut les protéger comme devoir premier de la société et de l’Eglise, car « l’Eglise est femme ». Dans le contexte de la révélation des abus psychosexuels, c’est sûr que cela sonne… pour le moins rassurant de le souligner. Mais avec modestie…

« Experte en humanité », vraiment ?

Paul VI parlait de l’Eglise comme « experte en humanité »… Le cataclysme des rapports Sauvé de divers pays (France, Allemagne…), ainsi que les enquêtes en cours (Espagne, Suisse…), a fait sauter en éclats cette présomptueuse appellation de soi pour l’Eglise, « experte en humanité »… Désormais, l’Eglise doit incarner le service concret de cette même humanité, comme savent le faire, depuis des millénaires, les femmes, les filles, les mères… Et malgré les adversités, les cruautés, les crimes dont elles sont victimes depuis des siècles dans les sociétés patriarcales sur tous les continents, elles tiennent encore debout, comme Marie au pied de la croix ; elles accueillent et offrent le meilleur, comme Marie dans la crèche ; elles repèrent et encouragent le service d’autrui comme Marie à Cana… Et le Pape de conclure : « Au début de la nouvelle année, mettons-nous sous la protection de cette femme… » ; mettons-nous sous la protection de toutes les femmes, oui !

La consolation d’une mère

PAR FRANÇOIS-XAVIER AMHERDT | PHOTO : PXHERE

Au-delà de la réflexion assez étonnante lancée par la compagnie des pasteurs et des diacres de l’Eglise réformée évangélique de Genève à propos du «genre de Dieu» (voir le dossier), nous pouvons constater que la Bible affirme clairement la part féminine de notre Seigneur.

Dès les premiers versets de la Genèse (1, 2), la Ruah Yahweh, son Esprit, au féminin en hébreu, est dit planer sur les eaux. De plus, l’un des attributs principaux du Seigneur, sa miséricorde, s’engendre dans ses entrailles matricielles, comme il l’affirme lui-même à Moïse en Exode 34, 6, lorsqu’il remet à son prophète sa « carte de visite » : « Le Seigneur passa devant Moïse sur le mont Sinaï et il cria : « Yahweh, Yahweh, Dieu de tendresse et de pitié, lent à la colère, riche en grâce et en fidélité » ». La bienveillance divine s’exprime dans la langue de l’Ancien Testament par le mot féminin pluriel rahamin, la matrice de la femme qui porte la vie. Le terme est repris en grec à propos du Christ, lorsque l’Evangile dit qu’il est « pris aux tripes » en présence des foules qui étaient comme des brebis sans berger (Matthieu 9, 36).

En outre, le troisième Isaïe (chapitre 56-66) nous promet d’être allaités, portés sur la hanche, caressés sur les genoux et consolés par le Seigneur lui-même, comme une maman le fait pour son nourrisson (Isaïe 66, 12-13). Quand la paix coulera vers Jérusalem et que la gloire des nations se portera au-devant d’elle, tel un torrent débordant, ainsi notre cœur sera dans la joie et nos membres reprendront vigueur comme l’herbe, grâce à la tendresse maternelle de Dieu envers ses serviteurs.

Pas besoin donc de transiger sur les pronoms à attribuer au Seigneur. Ils peuvent être sans autres féminins et Dieu peut être invoqué comme « notre mère qui est aux cieux », afin que sa volonté d’aimer soit réalisée sur la terre comme au ciel, que son règne de bonté et de justice advienne, que son pardon se répande en nous en abondance, de sorte que nous le transmettions autour de nous et que le mal soit ainsi vaincu. En Ukraine comme en Romandie.

Dieu au féminin ou au masculin

«Nous pouvons bien imaginer, sans nous tromper, qu’il y a bel et bien du masculin et du féminin en Dieu.»
Abbé Michel Ammann

PAR L’ABBÉ MICHEL AMMANN
PHOTO : DR

Ce qui est certain pour notre foi chrétienne, c’est que Dieu est amour et qu’il n’est qu’amour. Et, de ce fait, comment ne pas penser qu’il nous aime à la manière, non seulement d’un père mais aussi à la manière d’une mère ? Ne nous a-t-il pas créé à son image ? Nous pouvons bien imaginer, sans nous tromper, qu’il y a bel et bien du masculin et du féminin en Dieu.

La Bible contient de si belles images qui font référence à la tendresse de l’amour de Dieu pour ses enfants. Par exemple, dans le livre d’Isaïe : « Une femme peut-elle oublier son nourrisson, ne plus avoir de tendresse pour le fils de ses entrailles ? Même si elle l’oubliait, moi, je ne t’oublierai pas. » Et, dans le livre d’Osée : « Je le traitais comme un nourrisson qu’on soulève tout contre sa joue; je me penchais vers lui pour le faire manger. »

L’encyclique du pape saint Jean-Paul II ajoute un petit vocabulaire hébreu sur le mot que nous traduisons par « miséricorde ». Citons par exemple les deux principaux : « Rahamim » entrailles de mère. Dieu nous aime comme une mère. Et « Resed » qui exprime la bonté de Dieu. La bonté serait d’avantage un attribut masculin.

Dans les pages de notre journal, en complément du dossier sur le thème de ce mois « Dieu au féminin ou au masculin », nous découvrirons à nouveau, avec intérêt, la série de commentaires bibliques de l’abbé François-Xavier Amherdt si éclairants.

En outre, nous avons glanés çà et là, les avis de quelques personnes par un micro-trottoir. Nous vous les offrons avec plaisir : des perles à découvrir !

Bonne lecture !

Il y a de l’Esprit Saint là-dessous !

LE BILLET DE PASCAL DESTHIEUX, VICAIRE ÉPISCOPAL | PHOTOS : DR, CATH.CH / BERNARD HALLET

A l’invitation de nos sœurs et frères protestants, de nombreux catholiques genevois se sont rassemblés en la cathédrale Saint-Pierre, ce 5 mars, pour vivre une première messe historique depuis la Réforme. J’ai été profondément touché par la joie et l’émotion que l’on pouvait ressentir dans cette cathédrale archicomble. Parmi les nombreux témoignages reçus après cette messe, j’aimerais vous partager ces messages de deux participantes, une protestante et une catholique. Une paroissienne de la cathédrale a écrit à son pasteur : « Cet événement religieux est à jamais gravé dans ma mémoire. Notre cathédrale était belle, hier soir. Nous étions toutes et tous dans la même ferveur, dans le même Amour du Christ. Cette Foi, nous en avons tellement besoin dans ces tragiques moments que notre monde traverse. Genève a montré au monde chrétien que l’Œcuménisme existe et ce dernier a fait un grand pas en avant. Je suis contente d’avoir vécu ce moment. En rentrant, tous les passagers du tram parlaient de la messe et tous m’ont dit : merci à votre paroisse de nous avoir accueillis. Une religieuse de la Servette m’a dit qu’elle n’aurait jamais imaginé vivre ce moment. Si nous n’avions pas encore quelques restrictions sanitaires, elle m’aurait embrassée. » Et voici le témoignage d’une paroissienne catholique : « Comment décrire à la fois l’émotion, la joie, la simplicité, l’unité dans cette cérémonie historique empreinte d’œcuménisme, de ferveur, de prière, de respect et de délicatesse ? Tout respirait la beauté presque divine et cela portera ses fruits, j’en suis sûre ! Et si Dieu est avec nous au quotidien, cette démarche de l’Eglise protestante a permis de resserrer les liens entre nos deux communautés. A mon avis, bien humbles soient-elles, les prières pour l’unité des chrétiens servent à quelque chose et l’Esprit Saint travaille dans ce sens. »

J’ajoute encore ce message reçu de Fribourg : « C’est le Genevois en moi qui est venu à Genève. Je tenais à être présent (comme je l’aurais été il y a 2 ans). Toutefois, je dois avouer que je suis monté à la cathédrale un peu sceptique. Je m’attendais à tout… sauf à cette joie-là ! Il y a de l’Esprit Saint là-dessous ! »

Dieu au féminin

PAR FLORENCE CHERUBINI | PHOTOS : LDD

Dieu au féminin ! Voilà un sujet complexe, bien que pouvant sembler futile à plus d’un. Dans ces quelques lignes, je propose de vous partager ces quelques réflexions issues de quelques belles (re)-découvertes que j’ai faites en m’attaquant à ce texte. Non pour résoudre la question, ni pour la trancher de manière binaire et rassurante, mais pour essayer d’approfondir et surtout de mettre en pratique ce pour quoi la vie vaut la peine d’être vécue : notre mission de femmes et d’hommes appelés par Dieu à être les jardinières et jardiniers de sa création dans le respect mutuel de notre altérité !

La question du « genre » de Dieu n’est donc pas une question farfelue ou futile propre à notre troisième millénaire et portée par quelques théologiennes éco-féministes. Dans les années 1970, une théologie féministe chrétienne (la plupart de ces théologiennes sont catholiques 1) revendiquait déjà l’utilisation d’un langage épicène pour parler de Dieu, parce que ce langage permettait peut-être d’aller au-delà de nos représentations visuelles du Dieu masculin tout-puissant véhiculées par une pensée ambiante à dominante patriarcale.

Nous pouvons remonter encore beaucoup plus loin au cours des âges pour rencontrer des femmes qui priaient Dieu au féminin ! Au Moyen-Age, des mystiques, comme Hildegarde de Bingen, considérée comme la patronne des écologistes, ou des femmes issues des béguinages ont prié ou invoqué un Dieu-Mère. Ecoutons ce que nous dit l’une d’elle, Mechtilde de Magdebourg (1210-1252) : « Père n’est pas suffisant pour contenir le Dieu de mon être. Profondément en mon être, je sais que Dieu est plus, plus qu’un Père. Je connais maintenant mon Dieu comme Mère. J’ai trouvé un habitat dans son cœur, j’ai appuyé ma tête sur sa poitrine, j’ai touché les traits de son visage, regardé dans ses yeux et connu Dieu comme une Mère. Dieu Mère, Dieu Père, garde-moi dans ton étreinte. » 2

Ces femmes engagées s’appuient sur leurs expériences comme femmes pour se mettre en relation avec le divin ou le sacré. Et les qualités, dites féminines servent alors à parler d’un Dieu bon, plutôt que sévère, et qui agit plutôt comme une mère. 3 Mais d’où vient la spiritualité empreinte de liberté et d’audace de toutes ces femmes ? Quelle voix les a guidées pour découvrir cette image féminine de Dieu ?

Peut-être est-ce celle de la Sagesse présentée dans les livres sapientaux sous les traits d’une sœur, d’une mère, d’une compagne, médiatrice et source de vie, qui recherche en premier lieu le bien de la société et de ses membres?

Alors, avec la vigueur créatrice de Dame Sagesse, entrons à notre tour, telles et tels que nous sommes, dans une participation active qui donne au monde le message d’amour « inclusif » d’un Dieu au-delà du masculin et du féminin, d’un Dieu qui est Celui / Celle qui EST 4

1 Mary Daly, Elisabeth Schüssler Fiorenza, Elizabeth Johnson, Rosemary Radford Ruether,…

2 Malone, « Praying with the Women Mystics », traduit dans « Une Bible des femmes »,
Elisabeth Parmentier, Pierrette Daviau et Lauriane Savoy, Labor et Fides, 2018, p. 28

3 Louise Melançon, « Je crois en DIeue… la théologie féminine et la question du pouvoir »,
https://id.erudit.org/iderudit/005016ar

4 Elisabeth A. Johnson, « Dieu au-delà du masculin et du féminin Celui / Celle qui est », éd. Du cerf, 1999

Un nouveau lecteur à la Colombière souriant et décontracté

Camerounais de 40 ans, Charles-Olivier Ngono a décidé de quitter son pays natal après des années de vie professionnelle à Douala pour faire un master à l’EPFL. Parallèlement à sa vie d’étudiant, il a intégré notre vie paroissiale en tant que lecteur. Nous avons voulu faire plus ample connaissance avec cet homme de foi souriant.

RECUEILLI PAR OLIVIER CAZELLES PHOTOS : CHARLES-OLIVIER NGONO

Charles-Olivier, vous avez longtemps vécu en famille au Cameroun. Comment était ta vie là-bas ?
Charles-Olivier Ngono:
Sixième d’une fratrie de neuf enfants, j’ai bénéficié d’une vie de famille accomplie. Papa était comptable et maman était à la maison. Nous avons tous pu aller à l’école et suivre des études universitaires. J’ai travaillé pendant douze ans dans la maintenance des équipements aéroportuaires à Douala et Yaoundé. Puis j’ai voulu renforcer mes capacités en ingénierie en suivant une formation en logistique à l’EPFL.
C’est une belle aventure, et je n’ai jamais été inquiet pour l’avenir. C’est vrai que j’ai dû démissionner, mais j’ai la chance que Cécile, mon épouse, travaille. Enfin, j’aimerais faire partager cette expérience à ma famille: mon épouse et mes deux filles, Mickaëla, 13 ans, et Manuela, 7 ans.

Vous quittez Douala et votre famille et vous atterrissez seul à Lausanne: quel choc !
Et je suis arrivé en pleine pandémie ! Ainsi, l’intégration sociale a été très difficile du fait de l’observation des gestes barrières qui freinaient tout contact humain. J’ai été cantonné dans ma chambre et à la bibliothèque. Dans ces conditions, je n’ai pas pu visiter la région.

Vous avez vécu le contraste des cultures: au regard des valeurs africaines, com- ment voyez-vous la Suisse?
A mon arrivée, j’ai dû entreprendre des démarches administratives. Quel contraste! Alors qu’au Cameroun il y a toujours des accompagnateurs (appelés «démarcheurs»), ici, les démarches sont impersonnelles, tout le monde est censé savoir ce qu’il faut faire. Les gens sont serviables et compétents, mais c’est un peu distant et moins chaleureux.
J’observe cette même froideur dans les lieux publics tels que les quais de gare: chacun a les yeux fixés sur son téléphone portable et les écouteurs sur les oreilles. On ne se parle pas. Par contre, à la gare de Douala, la conversation est spontanée et habituelle entre les passagers même s’ils ne se connaissent pas.

La vie paroissiale à Nyon est bien diffé- rente de celle du Cameroun. Qu’est-ce qui est important pour vous?
Dans l’ensemble, il y a beaucoup de ressemblances. Mais il vaudrait mieux parler des différences qui constituent des richesses pour chaque culture.
Au Cameroun, la «mise en scène» des célébrations du dimanche est très importante: les enfants de chœur sont particulièrement bien habillés, ils ont répété les déplacements et les gestes pour que ce soit beau; les chanteurs portent la tenue de la chorale; les paroissiens viennent en famille, les jeunes sont très nombreux et les messes durent plus longtemps, jusqu’à deux heures.
A la Colombière, les célébrations sont plus sobres et brèves et les paroissiens plus âgés. J’apprécie la participation des enfants à la procession de communion. Ils accompagnent leurs parents et ceux qui n’ont pas commencé à communier s’avancent bras croisés sur la poitrine pour recevoir la bénédiction du prêtre. Au Cameroun, seuls les enfants qui ont le droit de communier participent à la procession de communion ; les autres restent assis.

Que représente pour vous le fait d’être lecteur à la Colombière ?
A la sortie d’une messe, le curé modérateur, l’abbé Jean-Claude Dunand, m’a proposé de lire à la messe. Cela m’a agréablement surpris puisque je n’avais jamais lu en public. J’ai intégré le groupe des lecteurs et j’ai été rapidement mis en confiance pour pratiquer cet exercice. Progressivement, je découvre les détails du service de la sacristie.
Depuis que je suis lecteur, je reçois des retours favorables des paroissiens. A leurs yeux, je ne suis plus un individu lambda qu’on salue de loin, mais le paroissien Charles-Olivier; et j’aime bien cela. Merci pour cette considération.

Etiez-vous engagé en paroisse au Cameroun?
Depuis mon plus jeune âge, je vais à l’église tous les dimanches en famille. Mais dans mon pays, je n’avais jamais consacré de temps à une activité paroissiale. Une seule fois j’ai fait une tentative, ratée, de devenir servant de messe. Ici à Nyon, c’est la toute première fois que je participe activement à la vie de l’Eglise.

Un passage biblique vous marque-t-il ?
Un passage biblique en particulier me parle: c’est dans l’évangile de Luc, au chapitre 6, où Jésus dit à ses disciples: «Un aveugle peut-il guider un autre aveugle? Ne vont-ils pas tomber tous les deux dans un trou? […] Qu’as-tu à regarder la paille dans l’œil de ton frère alors que la poutre qui est dans ton œil à toi, tu ne la remarques pas ? […] Comment peux-tu dire à ton frère: « Frère, laisse-moi enlever la paille qui est dans ton œil » alors que toi-même ne vois pas la poutre qui est dans le tien?»
Ce message me fait penser au monde actuel. Nous observons des Etats donneurs de leçons qui se proclament libérateurs et disent aux autres comment résoudre leurs problèmes alors qu’ils connaissent les mêmes difficultés chez eux.

En quoi le fait d’être séparé de votre famille pour les études influence-t-il votre foi ?
Le fait d’être séparé de ma famille et de mes amis me donne du temps pour m’impliquer davantage dans la vie de l’Eglise et m’y intéresser. Je prends plus de temps pour prier ; en particulier, je suis fidèle aux neuvaines mensuelles. Au Cameroun, la tradition des neuvaines de prière à l’occasion de certaines fêtes est très vivante. Malgré les difficultés, je garde une foi solide. Je crois que Dieu m’accompagne chaque jour même s’il m’arrive de douter et de me poser des questions.

Dieu au féminin

Le thème de ce mois me laisse perplexe. Dieu au féminin ? En préambule, je voudrais rappeler que Dieu n’a pas de sexe puisqu’Il est Esprit.

PAR L’ABBÉ ALEXANDRE BARRAS
PHOTO : DR

Vitrail «hommage à la Trinité» 2013, chapelle de la Bâtiaz à Martigny. Le Père im En Joong exprime la Foi dans les couleurs et la Lumière.

Déjà, au VIIe siècle avant Jésus-Christ, un philosophe grec disait avec humour : « Les éthiopiens disent que leurs dieux ont la peau sombre et les cheveux crépus ; les Thraces, que leurs dieux ont des yeux pers et des cheveux de feu. » Pour lui, il fallait enlever de notre esprit toutes les représentations mythologiques et imaginatives des dieux.

Il est vrai que les textes bibliques de l’Ancien Testament nous parlent plutôt de Dieu au masculin : un Père qui prend soin de tous, le protecteur, le rocher sur lequel on peut s’appuyer durant la tempête. Il est justice et miséricorde, et a éduqué son peuple en lui donnant la Loi à travers Moïse. Dans le Nouveau Testament, Dieu s’est incarné en Jésus homme et Il nous a parlé de Dieu en l’appelant son Père. Dans notre société contemporaine, certains refusent cette manière de voir et veulent la changer en prétendant que c’est arbitraire et conventionnel. La multiplication des « styles de famille », le partage des tâches dans le couple, les revendications féministes, mettent à mal la figure paternelle. La différence de l’homme et de la femme devient une concurrence de genres au lieu d’être une complémentarité naturelle des personnes en vue d’un enrichissement mutuel.

Il est évident que Dieu agit aussi comme une mère. Un Père de l’Eglise du IIe siècle, Tertullien, dit que « Dieu est comme une mère qui n’abandonne jamais son fardeau ». Il est attentionné, attentif à tout ce qui nous arrive, à nos choix. Il pleure nos refus du bien, du vrai, du saint. Il se désole de nos refus d’alliance, de nos compromissions avec le malin, nos abandons divers et variés. Sa miséricorde est insondable et le cœur de Marie notre Mère, que nous fêtons en ce mois de mai, nous est donné pour nous le faire découvrir et nous aider à en vivre.

Tout comme nous ne pouvons pas être l’égal de Dieu, étant créature face à Lui le Créateur, de même notre rôle propre ne peut être interchangeable, au grand dam d’une certaine vision faussée de l’homme et de la femme. Dans l’Ecriture sainte nous rencontrons beaucoup de femmes qui ont eu des rôles importants. Dans notre Eglise également une grande part des services sont assurés par les femmes. Nombreuses sont celles qui animent et permettent à nos paroisses de vivre, de grandir. Même notre saint Père François a promu plusieurs d’entre elles à des postes importants au sein de la curie romaine. Il est bon de voir tant de dévouement de celles qui s’épanouissent et assument merveilleusement leur état de vie dans notre société. Par l’agir de tant d’entre elles nous voyons Dieu au féminin se manifester dans les périphéries de la pauvreté, de la souffrance et de la faim. Alors merci mesdames de nous montrer Dieu au féminin.

Jeunes en vadrouille !

PAR THIERRY SCHELLING
PHOTO : SABRINA FARAONE

Joie, rire, faim, prières, jeux, découverte de l’histoire de Saint-Jo, d’une autre Eglise, des autres jeunes, qu’ils ne sont pas seuls dans la foi. (WhatsApp des jeunes en retour de la matinée)

Rassembler les jeunes de nos UP pour élargir leur horizon «paroisse», cela fait sens et fait… Eglise. Ce fut l’initiative de Sabrina et Anne-Marie (l’une coordinatrice en catéchèse pour La Seymaz et l’autre agente pastorale pour Eaux-Vives / Champel), avec les deux accompagnants de confirmands – Jean et Denis – qui a été vécue samedi 2 avril.

Entre Chêne et Saint-Joseph aux Eaux-Vives, l’ambiance s’est bien détendue après des jeux « mise en bouche » ; les jeunes ont petit-déjeuné puis dans le tram 12… la neige tombant en giboulées, pour débarquer dans l’église Saint-Joseph.

Ils y ont vécu en groupes le parcours sur « Combien de saint Joseph à Saint-
Joseph ? » – 27 semble être le chiffre clé ! – avant de se grouper dans la crypte dite Salle R. Damon (sous-sol de l’église) pour un temps de relecture et de pique-nique.

MERCI à chacune et chacun : Joie, rire, faim, prières, jeux, découverte de l’histoire de Saint-Jo, d’une autre Eglise, des autres jeunes, qu’ils ne sont pas seuls dans la foi.

Dieu au féminin

TEXTE ET PHOTOS PAR
JUDITH BALET HECKENMEYER

Le Pantocrator d’Arcabas: l’image du Christ avec une main d’homme et une main de femme.

En français, nous n’avons que deux genres : masculin et féminin. Dans les temps anciens, il n’était pas convenable de représenter Dieu, de le nommer même. Mais l’homme a besoin de se raccrocher à quelque chose de connu, à se faire une image pour mieux se représenter ce que Dieu est, mais on oublie souvent que ce ne sera que des facettes, car Il est bien plus que toutes nos représentations, que nos imaginations, que nos sens et notre intelligence ne peuvent percevoir. Alors il a été choisi que la représentation de Dieu soit plutôt masculine.

Dans les dialogues avec l’ange il est dit dans l’avant-propos : les anges n’aiment pas parler de « Dieu » – ce mot que des générations d’êtres humains ont usé, galvaudé, sali ; mais emploient pour Le désigner le pronom Ö – ici traduit par Lui- qui, dans cette langue archaïque qu’est le hongrois n’est ni masculin, ni féminin mais les deux à la fois ; transcendant la masculinité du Divin qui pèse si lourdement dans nos religions révélées. Ö est le masculin et le féminin, le Père et la Mère, force et sagesse, toute-puissance et tendresse ; et point n’est besoin de le compléter par des figures féminines, puisque la féminité fait partie de Son essence même, et nous le rend tellement plus proche…

J’aime cette approche, cette particularité linguistique qui ouvre un champ bien loin des querelles intestines de la dualité homme-femme. Par commodité nous utilisons la forme masculine. Parce que Jésus était homme et parlait de son Père. Mais rien ne nous empêche d’envisager le tout, de réaliser comme dans la nature même, masculin et féminin se complètent, vont de pair.

Le symbole du Tao est représenté par le masculin et le féminin, le noir et le blanc, avec en chacun une part de l’autre, un cercle où tout se rejoint, où tout est un.

Alors Dieu ? Masculin ou féminin ? Ou tout simplement bien au-delà de la dualité ?

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