Fontaine de la Miséricorde: école d’oraison 2020-2021

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP La Seymaz et UP Champel / Eaux-Vives, Saint-Paul / Saint-Dominique (GE), septembre 2020
Autour de la prière

Rencontrer Dieu dans l’oraison… l’oraison est une intimité avec Dieu, un dialogue spirituel avec le Seigneur, un rendez-vous d’amour, c’est vivre l’union à Dieu dans le silence. 

La Communauté Fontaine de la Miséricorde à Genève propose un parcours d’initiation à l’oraison, une « rencontre et union à Dieu dans le silence », dès la rentrée, avec des rencontres mensuelles, un jeudi en soirée. Le parcours d’initiation se fait sur deux ans. Les séances d’une heure et demie permettent un approfondissement de la prière, personnelle et silencieuse. Chaque rencontre se vit en quatre temps : accueil, enseignement, temps d’oraison ensemble et partage.
La première rencontre aura lieu le 17 septembre à 19h au Cénacle, Promenade Charles-Martin 17, 1208 Genève.
Accueil par l’équipe, eucharistie et buffet canadien, informations concernant le parcours, partage avec les participants des sessions précédentes.
Des feuillets seront à disposition dans les églises du secteur.
Envoi par mail à ceux qui le demandent.

Renseignements :
Rosemarie Grant, +41 79 554 08 36, romygrant@hotmail.com
Dominique Reymond, +33 450 840 447, domiefata@hotmail.com

«Black Lives Matter»: une insurrection éthique

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP La Seymaz et UP Champel / Eaux-Vives, Saint-Paul / Saint-Dominique (GE), septembre 2020

Photos : L. Horgan, Jr. Wikimedia Commons, DR

Alabama, 1889 : « Les arbres du Sud portent un fruit étrange ».

Que faire après la vague ? Voici un bref extrait de ses propos :

« A condition bien sûr que nous soyons déjà entrés dans une phase nous permettant de prendre un peu de recul par rapport à cette vague qui nous a submergés, je me suis appliqué à répondre à cette question de la manière suivante. Que nous révèle aujourd’hui cette pandémie ? Et qu’aurons-nous à faire après celle-ci ? Il m’a semblé que parmi les mille et une leçons que l’on peut tirer de cette expérience inouïe, il y a l’urgence de la question des inégalités. Nous étions bien sûr pleinement conscients avant cette période Covid-19 de cette problématique, mais je crois que la pandémie a jeté une lumière extrêmement crue sur ce thème, une lumière nouvelle. Ce que cette pandémie met en évidence c’est le côté existentiel de ces inégalités. Ce ne sont pas seulement des inégalités économiques, mais surtout l’évidence d’une inégalité devant la maladie et devant la mort, devant ce qui fait notre existence humaine. Bien sûr le virus peut frapper le premier ministre de Grande-Bretagne comme l’éboueur du coin, mais dès lors que l’on regarde ce qu’on appelle le «  big picture  », le tableau général, on se rend compte qu’il y a une inégalité profonde entre les nations d’une part et, d’autre part, au sein des nations.

En ce qui concerne l’inégalité au sein des nations, la pandémie nous force à jeter un regard très sévère sur la situation. Ici, à New York, dès les premiers jours après le confinement, on a commencé à analyser les chiffres et il est très vite apparu que la pandémie avait frappé de manière totalement disproportionnée les plus pauvres qui, comme on pouvait s’y attendre, sont les Noirs et les Latino-Américains. Cela signifie très concrètement une inégalité devant la maladie et devant la mort.

Ce n’est pas forcer la comparaison que de lier ce qui est arrivé à la suite du «  meurtre  » de George Floyd le 25 mai dernier, à Minneapolis, à la pandémie de Covid-19. On peut se poser la question suivante : pourquoi la mort de Georges Floyd a-t-elle déclenché les manifestations universelles auxquelles nous assistons ? Cela aurait parfaitement pu avoir lieu bien avant, à la mort d’Eric Garner, en 2014, qui avait prononcé les mêmes paroles – 11 fois – que George Floyd : «  je ne peux pas respirer  ». Cela aurait également pu arriver après la mort de Tamir Rice, ce gamin de 12 ans tué par des policiers, à Cleveland en 2014, qui, dès qu’ils sont arrivés sur le lieu où on leur avait signalé la présence d’un Noir soi-disant armé d’un revolver, ont abattu le gosse qui tenait en main un simple jouet. Mais il a fallu le cas George Floyd. Une raison émerge : la pandémie et l’inégalité que celle-ci a révélée, cette inégalité devant la maladie et la mort, ont servi de cadre dans lequel la fin tragique de Georges Floyd a revêtu un puissant aspect symbolique. Cette fin a provoqué ce que j’appellerais une «  insurrection éthique  ». 

C’est ainsi que l’on peut comprendre qu’un slogan comme «  Black lives matter  », «  les vies noires comptent  », soit devenu un cri de ralliement pour une majorité d’humains dans le monde, s’insurgeant contre une inhumanité intolérable. Cela explique que même des Blancs ont manifesté sous la bannière de «  Black Lives Matter  ». Ce qui tenait du particulier est devenu universel. Dire que les vies noires comptent, c’est simplement dire que la vie humaine en général n’a pas de prix. 

Alors, que faire après la vague ? Transformer cette insurrection éthique en une politique d’humanité. Nous comporter comme si nous étions tous d’un seul pays, avec un sentiment politique commun d’humanité, de solidarité, avec une volonté de redéfinir ce que nous appelons le développement, en mettant l’humanité au cœur de celui-ci. Une politique d’humanisation de la Terre, un peu à la manière de Teilhard de Chardin. »

Si vous aimez le jazz, vous craquerez immanquablement pour la voix lente et légèrement éraillée de Billie Holiday, surtout quand elle murmure Strange fruit : « Southern trees bear a strange fruit / Blood on the leaves and blood at the root / Black bodies swinging in the southern breeze / Strange fruit hanging from the poplar trees… » (Les arbres du Sud portent un fruit étrange / Du sang sur leurs feuilles et du sang sur leurs racines / Des corps noirs qui se balancent dans la brise du Sud / Un fruit étrange suspendu aux peupliers). 

Cette complainte a eu un immense succès à sa sortie en 1939, aux Etats-Unis. Il n’y a encore pas très longtemps, ce n’était pas la chanson de Billie Holiday que l’on entendait le plus fréquemment sur les radios « jazzy ». 

« Black Lives Matter » :  écoutez ou ré-écoutez Strange fruit sur Youtube.

La soupe de la Maison de la Diaconie et de la Solidarité à Sion

 

Par Pascal Ortelli

A Sion, il est un bistrot pas comme les autres abritant la Maison de la Diaconie et de la Solidarité. Sise à la rue de Lausanne 69, c’est un lieu d’accueil communautaire où chacun est le bienvenu, avec ses forces et ses richesses, mais aussi avec sa fragilité. En semaine, la soupe avec d’autres accompagnements y est servie avec beaucoup de chaleur humaine.

Des services offerts aux plus fragiles
Ici on mange mieux qu’au restaurant», confie un hôte régulier. Aujourd’hui au menu : la traditionnelle soupe aux légumes, du riz avec un émincé de bœuf et un gratin de choux-fleurs, sans oublier les pâtisseries offertes par les boulangeries de la région. Le tout est concocté et servi par une équipe de bénévoles de l’association Accueil Hôtel-Dieu.

Fondée en 2014 pour poursuivre le travail des Sœurs hospitalières, l’association regroupe entre autres les pôles solidarités des paroisses catholiques et réformées de Sion. Elle bénéficie du soutien de nombreux partenaires et fournisseurs locaux. L’Accueil Hôtel-Dieu, c’est 7500 repas de midi servis en 2019, 1700 petits-déjeuners et plus de 8000 heures de bénévolat ! Du lundi au vendredi, un accompagnement multiforme est offert, de 9h30 à 16h au sein de la Maison de la Diaconie et de la Solidarité.

La Maison occupe les locaux du restaurant Verso l’Alto. Elle a pour vocation de fédérer les synergies entre les différents acteurs ecclésiaux et de porter ensemble l’appui aux migrants, la pastorale des prisons et le soutien des personnes en précarité ou en fragilité psychique.

Atelier et convivialité
Les après-midi, un café est ouvert sur le quartier. Georges, un bénévole, propose également des ateliers de couture, de pyrogravure et de peinture sur pierre pour que «les gens qui s’ennuient trop ne traînent pas dans la rue».

La maison dispose également d’un appartement au premier étage. Joëlle Carron, la responsable des lieux, explique qu’«un accès aux soins de base pour les populations qui ne peuvent pas payer les primes d’assurance maladie ainsi qu’un réseau juridique solidaire y sont offerts». Pas besoin de s’inscrire pour passer et partager un moment de convivialité.

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Point de vente

Plus d’infos:

Maison de la Diaconie et de la Solidarité, Rue de Lausanne 69 à Sion, maisondiaconie@gmail.com, 079 891 67 07

Colonie de vacances « La Joie de Vivre » – Jusqu’au 21 août 2020 – Genève et La Côte-aux-Fées (NE)

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP des Boucles du Rhône (GE), janvier 2020

Photo: DR

Découvrez l’historique de cette colonie, créée en 1959 par des paroissiens de Sainte-Marie du peuple, et ses activités sur le site www.lajoiedevivre.net, ainsi que sur sa page Facebook.Les inscriptions pour les séjours 2020 de la colonie « La Joie de Vivre » à La Côte-aux-Fées (canton de Neuchâtel) sont ouvertes. Voici toutes les informations et conditions générales nécessaires concernant nos camps.

Dates, âges et responsables
Séjour B : du dimanche 26 juillet au vendredi 7 août 2020
• pour les enfants de 7 à 14 ans.
• direction assurée par Anne-Laure Magnin & Grégoire Gretsch

Séjour C : du dimanche 9 août au vendredi 21 août 2020
• pour les enfants de 7 à 14 ans.
• direction assurée par Sabrina Chirenti et Lucien Camacho

Prix des séjours
Le prix des pensions tient compte des subventions accordées par l’Etat de Genève, des communes genevoises, la Loterie romande et la Fédération catholique des colonies de vacances.

– Enfant résidant dans le canton de Genève : Fr. 490.–
– Enfant résidant en France et dont l’un des parents travaille sur le canton de Genève : Fr. 490.–
– Autre : Fr. 600.–

Le prix des séjours comprend : le logement, la nourriture, les activités diverses ainsi que le retour en car à Saint-Pie X (au Bouchet, Genève). Les parents amènent les enfants à la colonie, c’est la coutume !
Conditions spéciales familles (enfants vivant dans le même ménage) : rabais accordé : Fr. 50.– sur la 2e inscription, Fr. 100.– sur la 3e, etc.
Le prix du séjour ne doit pas empêcher un enfant de participer, des réductions sont possibles. Veuillez adresser une demande écrite à la responsable des inscriptions.

Inscriptions et enseignements

Colonie La Joie de Vivre – Rte de Saconnex-d’Arve 100 – 1228 Plan-les-Ouates
Tél. 022 771 45 57 ou camps@lajoiedevivre.net

Camps Voc’ Marguerite Bays – Jusqu’au 21 août 2020

Les Camps Voc’ ont malheureusement dus être annulés. Une nouvelle formule t’est proposée cette année pour réfléchir aux grandes orientations de ta vie !

En collaboration étroite avec les Camps Voc’ initialement prévus, tu pourras vivre « un peu » la vie d’un camp depuis chez toi et mettre tes pas dans les pas de sainte Marguerite Bays, pour mieux les mettre dans ceux de Jésus.

C’est ouvert à tout le monde ! 🥳
Tous les fichiers seront disponibles sur le site

🎬 Les infos en vidéo ici :
➡️ https://youtu.be/cSMpm-pc15A

💻 Les infos pratiques ici :
➡️ www.vocations.ch/camps-voc

Viens louer et célébrer Celui qui t’appelle; viens réfléchir à ce qui peut te rendre heureux et combler ton coeur; viens partager avec des jeunes de ton âge. Tu as entre 8 et 20 ans ? Cet été, toute une équipe t’attend: laïcs en couple ou célibataires, prêtres, religieux et religieuses, jeunes, séminaristes, etc.

Le bonheur au bord de l’eau

Situé au bord du lac de Neuchâtel, le camp biblique œcuménique de Vaumarcus fait figure d’institution. Depuis plus de 70 ans, le lieu accueille des hôtes venant se ressourcer et découvrir l’univers fascinant de la Bible. Rencontre avec Noémie Moulin, une participante devenue coordinatrice, qui goûte aux joies du camp depuis ses… 9 mois.

Par Myriam Bettens
Photos: Andrea Bastian
« Pas moins de 24 éditions », raconte fièrement Noémie Moulin, lorsqu’on lui demande depuis combien de temps elle participe au camp biblique œcuménique de Vaumarcus (CBOV). Ses parents lui ont transmis le virus alors qu’elle avait tout juste 9 mois. Elle prend part chaque année à la semaine organisée au mois de juillet en tant que participante et plus récemment, à titre de coordinatrice. Or, depuis mars dernier, l’incertitude face à l’évolution de la pandémie de Coronavirus laisse craindre une suppression du séjour de cette année. « Personne n’avait envie de penser à cette éventualité », avance la coordinatrice, mais la nouvelle a fini par tomber fin avril. Le cœur gros, le comité du CBOV décide de reporter le camp à l’année suivante tout en conservant la même thématique : les apparitions de Jésus ressuscité. Malgré l’annulation, la semaine au bord du lac de Neuchâtel demande une organisation de longue haleine. L’animatrice socioculturelle de profession nous donne un petit aperçu du travail nécessaire pour la préparer.

Une préparation marathon

L’équipe de préparation constituée d’un groupe « théo-liturgique » et d’un autre d’animation offre son temps bénévolement durant le camp, mais aussi lors de week-ends de préparation. Lors de ces moments, la mission de Noémie Moulin prend tout son sens. « Mon rôle consiste essentiellement à ce que les choses se passent bien, mais surtout selon l’horaire défini », précise-t-elle. « Certains points nécessitent plus de discussions, il me faut donc aménager le temps en conséquence », selon la coordinatrice. Entre étude de la thématique théologique, décision des futurs ateliers ou débat de fond sur la structure du camp, les séances d’organisation s’apparentent le plus souvent à un marathon. Planifiée sur deux jours, la rencontre ayant eu lieu peu avant la pandémie s’engage à 9h par un temps convivial autour d’un café, suivi à 9h30 par une méditation sur le thème du camp. La suite de la journée s’annonce chargée, les participants devront faire preuve d’endurance !

La spiritualité en priorité

Lors de la traditionnelle semaine de juillet, les textes bibliques choisis sont « mis en résonance » au travers de techniques manuelles, artistiques, sportives ou théologiques. Ces ateliers changeant d’une année à l’autre. La phase « de travail » débute donc à 9h40 par une discussion sur les souhaits des animateurs quant aux activités du camp à venir. Puis à 10h45, l’animation proposée par l’équipe théo-liturgique se concentre sur les croyances et questionnements des bénévoles vis-à-vis de la fin de vie. De quoi soulever un certain nombre d’interrogations qui ont tôt fait de creuser les méninges et l’appétit du groupe. Une pause repas bien méritée scinde la journée et permet ainsi aux animateurs de se ressourcer avant d’entamer la suite, à 14h, par une nouvelle discussion théologique. Cette fois-ci, le débat s’oriente sur la manière dont chaque personne vit la spiritualité et la liturgie offerte au camp. L’après-midi se poursuit par plus d’une heure d’étude des textes bibliques liés au thème du séjour à Vaumarcus. A 16h15, « nous prenons trente minutes de vraie pause pour souffler un peu, car la journée est intense. A la fois dans le rythme et les discussions », indique Noémie Moulin. La poignée d’heures précédant le souper constitue l’occasion de s’exprimer concernant la structure générale du camp ou encore la charte que chaque bénévole doit signer. Le reste de la soirée est consacré à la mise sous plis de la correspondance, avant de clore la journée. L’équipe se couche bien souvent éreintée, mais heureuse à la perspective du bonheur manifeste des familles durant leur séjour à Vaumarcus.

L’animation fait partie de ses tâches.

Une journée de préparation

9h Arrivée du comité d’organisation du camp
9h30 Méditation en lien avec le thème du camp
9h40-10h30 Préparation des futurs ateliers du camp
10h45-12h Animation théo-liturgique en lien avec la thématique spirituelle du camp
12h Repas en commun
14h Discussion théologique
15h-16h15 Echange sur le texte biblique du thème
16h45 Débat en lien avec la charte du camp et l’organisation générale
18h30 Souper avec toute l’équipe
20h Mise sous plis de la correspondance du camp
21h Soirée libre

Lettre à une maman confinée

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Nyon-Founex (VD), juillet-août 2020

Texte et photo par Sylvie Humbert

D’après un tableau d’Elaine Massy, la mère.

C’était déjà difficile avant, quand tu ne t’étais pas cassé le fémur et que tu marchais inlassablement parmi les pensionnaires de ton Ehpad (EMS). C’était difficile de te savoir si loin : loin de moi, loin de la femme que tu as été, peintre, sculptrice, entourée d’amis. Nous parlions de nos lectures, de poésie. Je t’admirais, j’admirais ta liberté…

Aujourd’hui, tu es enfermée dans une chambre exiguë avec une dame qui en a marre que tu répètes sans cesse les mêmes choses, attachée à ton fauteuil ou enfermée dans ton lit à barreaux parce que tu oublies que tu as la jambe cassée. C’est pire qu’en prison : il n’y a pas de visites ni d’heure de promenade.

Douloureuse impuissance
Je pleure d’être impuissante et de ne pouvoir t’entourer, car il m’est interdit de te tenir la main, interdit de te serrer dans mes bras, interdit de t’amener au restaurant alors que c’est ce qui te reste de joie : bien manger.

Au téléphone, tu ne comprends plus ce que je te dis. Alors je te dis « au revoir, maman » et tu me réponds « au revoir, ma fille » parce que ça, tu ne l’as pas encore oublié. Et je n’arrive pas à comprendre que pour vous préserver d’un virus on vous laisse crever de solitude. En raccrochant ce matin, je me disais que je ne te reverrais sans doute pas, que je ne pourrais pas t’accompagner sur le dernier bout du chemin et que tu n’avais certainement pas mérité cette fin, ni moi !

La mort est devant, toujours,
A deux pas ou à cent,
Point d’orgue qui fera résonner
La vacuité de la vie
Ou sa richesse.
Parfois les dernières mesures
Sont lentes et dépouillées.
Les silences et les rondes,
Nuages suspendus au bord des cils.
Pour ces dernières mesures te bercer doucement,
Sans un bruit.
Musique qui s’achève à six cents kilomètres dans un lit à barrières.

Je t’aime tant, maman !

Sous le souffle de l’Esprit!

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Aigle (VD), juillet-août 2020

Par Florence Cherubini | Photo de groupe : Studio Massy

Le parcours de confirmation proposé par notre secteur, suit depuis quelques années un même rythme, une même organisation, des mêmes thématiques, une quasi même équipe d’animation fidèle au poste.
Pourtant, chacun de ces parcours est unique. Bien sûr, me direz-vous, puisque, dans chaque volée, chacun est unique ! Bien sûr puisque, à chaque fois, « le vent souffle où il veut… »  (Jn 3, 8)
Et le vent a été chahuteur pour cette volée ! 

Au départ, en novembre dernier, un souffle réjouissant a permis un passage de témoin en douceur entre l’ancien et le nouveau groupe. C’est un moment toujours émouvant de voir les confirmés « tout frais » transmettre la flamme, symbolisée par une bougie personnalisée, à chaque nouveau confirmand, appelé ainsi personnellement par son nom, à rejoindre, de manière volontaire, la grande famille des baptisés. A partir de là, le groupe s’est formé ; la joie de nouvelles rencontres, de nouveaux liens entre jeunes des différentes paroisses a pu se manifester pleinement.
Et dans le vent tempéré de cet hiver doux, le Souffle rassurant de l’Esprit leur a murmuré à l’oreille que chacun est aimé de Dieu-Père. Que ce Père-Créateur se donne pleinement à chacun d’eux par Jésus, le premier des Frères, manifestant ainsi à chacun la place qu’il a à prendre dans le Corps du Christ, en développant ses propres talents en signe d’action de grâce. Mais aussi, comme témoignage, en les mettant au service de ses frères en humanité.

Et puis un vent peu printanier s’est mis à vraiment souffler, nous emportant dans un tourbillon déstabilisant : on a tous entendu sa voix, mais on ne savait ni d’où il venait, ni où il voulait aller. Alors, bien que la nature se déployait de manière somptueuse, chacun s’est mis à l’abri chez soi. Le temps du confinement était là ! Un temps pascal ponctué de retrouvailles familiales bienfaisantes, de temps d’incertitude, de solitude aussi pour certains de ces ados pleins de vie, privés de leurs amis et de leurs activités. Mais surtout, temps de découvertes et de maturation bienvenu pour développer, chacun, sa propre créativité, et aussi pour apprendre à se laisser porter par le vent et à faire confiance à son murmure…

Durant cette période, bien que confinés, nous nous sommes quand même retrouvés. Une rencontre, réalisée de manière inédite puisqu’elle a pu avoir lieu à travers un écran. Un beau moment où chacun a pu raconter son expérience et comprendre un peu mieux comment ce vent créateur, porté par l’Esprit, communique le souffle nécessaire pour poursuivre son chemin.

Aujourd’hui, au seuil de l’été, au lendemain de cette belle fête de Pentecôte, dans nos maisons qui commencent à s’ouvrir, le vent souffle toujours. Mais c’est le souffle divin et libérateur promis par Jésus à ses disciples ! Pour ouvrir le cœur de chacun des 21 jeunes de cette belle volée, leur permettre d’entendre et d’accueillir encore mieux l’Evangile du Christ… Et poursuivre ce parcours (dont le programme sera peut-être encore un peu chamboulé) jusqu’au 8 novembre, date de leur confirmation.
Bon vent à eux tous !

Fontaine de la Miséricorde école d’oraison

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Unités pastorales du Grand-Fribourg (FR), juillet-août 2020

L’oraison est une intimité avec Dieu, un dialogue spirituel avec le Seigneur, un rendez-vous d’amour, c’est vivre l’union à Dieu dans le silence.L’Association Fontaine de la Miséricorde propose à Fribourg, un parcours d’initiation à l’oraison, une « rencontre et union à Dieu dans le silence ». Dès la rentrée 2020, des rencontres mensuelles sont organisées le lundi à 16h. Les séances d’une heure et demie permettent un approfondissement de la prière personnelle et silencieuse. Chaque rencontre se vit en quatre temps : accueil, enseignement, temps d’oraison ensemble et partage.

La première rencontre aura lieu le lundi 7 septembre 2020 à 18h au Centre Sainte-
Ursule, Rue des Alpes 2 à Fribourg
. (Accueil par l’équipe, eucharistie et buffet canadien, information concernant le parcours.) 

Les dates des rencontres suivantes sont: 28 septembre, 9 novembre, 7 décembre 2020, 11 janvier, 8 février, 1er mars, 19 avril, 10 mai et 7 juin 2021.
Prix : Fr. 120.– pour l’année complète.

Renseignements :
Association Fontaine de la Miséricorde, www.misericorde.ch, Anne Collaud : 079 422 55 73
Centre Sainte-Ursule : 026 347 14 00, www.centre-ursule.ch 

Samedi-désert

L’Association Fontaine de la Miséricorde invite aussi toute personne à participer à un « samedi-désert » le 27 février 2021, de 9h à 16h, au Centre Ste-Ursule.
Cette journée se vit au rythme de l’office du matin, de temps d’oraison et d’adoration, d’une exhortation sur le texte du jour, de démarches et d’un repas partagé (apporter son pique-nique). La messe clôture la journée. Le samedi-désert est ouvert à tous, la seule condition est d’accepter de vivre ces journées dans le silence.

L’humour, chemin vers Dieu

Le besoin de rire universel, inscrit dans le cœur de toute personne humaine, ne pourrait-il pas nous dire quelque chose de celui qui nous a créés? Dieu est-il l’ancêtre des humoristes de tous bords?

Par Calixte Dubosson
Photos: flickr, pxhere, drIl suffit de zapper sur nos postes de TV, de parcourir l’Internet pour constater que notre époque, très ou trop sérieuse, accouche d’un besoin irrésistible de faire baisser la tension. On voit aussi se multiplier les émissions au caractère décontracté et bon enfant auxquelles participent des humoristes et imitateurs de talent tels que Nicolas Canteloup, Anne Roumanoff, Yann Lambiel ou Emil. Ce besoin de rire qui est universel, inscrit dans le cœur de toute personne humaine, ne pourrait-il pas nous dire quelque chose de celui qui nous a créés ? Dieu est-il l’ancêtre des humoristes de tous bords ? La Bible est plutôt avare de citations qui pourraient le définir ainsi.

Il y a bien sûr le rire de Sara et d’Abraham à l’annonce de la prochaine maternité de Sara, déjà très avancée en âge. Dieu n’a pas trouvé très drôle cette réaction spontanée et, malgré les protestations de Sara, il tranche en disant : « Si, tu as ri ! » (Gn 18, 15) Il y a aussi le rire moqueur du prophète Elie qui ridiculise les prêtres de Baal dont le dieu est resté sourd à leurs prières et supplications. « Criez plus fort. Puisque que c’est un dieu, il a des soucis ou des affaires ; ou bien, il est en voyage ; il dort peut-être mais il va se réveiller. » (1 R 18, 27) Le psaume 125 est un chant d’allégresse qui fait du retour des captifs à Jérusalem un symbole du retour de l’humanité dans le royaume des cieux : « Alors notre bouche était pleine de rires, nous poussions des cris de joie… nous étions en grande fête. »

Le clown Gabidou, figure de l’humour en Eglise.

Humour humain

Si la Bible n’est de loin pas un recueil de passages humoristiques, les humoristes s’en sont largement inspirés pour en faire des dessins, des blagues et des plaisanteries parfois pleines de finesse mais d’autres fois de très mauvais goût. Cela nous révèle que tout humour n’est pas forcément spirituel mais qu’il peut contribuer à faire rire de bon cœur. Des hommes politiques s’en sont servis pour détendre l’atmosphère alors que la tension était tangible. Winston Churchill se fait apostropher par une femme dans la foule : « Si j’étais votre femme, je vous préparerais une tasse de thé et j’y mettrais du cyanure. » Réponse du premier ministre britannique : « Si vous étiez ma femme, je le boirais ! » Le général de Gaulle s’entend dire par un opposant virulent : « Mort aux cons ! » Réponse du grand homme : « Lourde tâche, vaste programme ! » provoquant l’hilarité générale.

Plus proche de nous, M. Adolf Ogi raconte la scène vécue lors de visite officielle du président chinois Jiang Zemin, en 1999, qui était arrivé au Palais fédéral conspué par des manifestants. Durant la réception officielle, il s’était emporté contre Mme Ruth Dreyfuss et, hors de lui, avait menacé de s’en aller. On frisait l’incident diplomatique. « Je l’ai alors pris par le bras, nous dit l’ancien président de la Confédération, et lui ai dit : « You are not leaving ! – Vous ne partez pas ! » Peu après, je lui ai offert un morceau de cristal de Kandersteg que j’avais dans la poche en lui expliquant sa force symbolique. Il s’est détendu et le reste de la soirée s’est bien déroulé. Les relations entre la Suisse et la Chine étaient sauves ! »

Humour = Humilité

Il est bon ici de se souvenir que dans le mot humour, il y a un autre mot qui correspond mieux à une définition que l’on pourrait attribuer à Dieu. Il s’agit du terme humilité. La révélation de Dieu est truffée de gestes et d’actions qui montrent que Dieu n’est pas dans l’ouragan ou la tempête mais qu’il se devine dans le « murmure d’une brise légère » (1 R 19, 12). Le père envoie son fils comme un bébé confié à Marie et Joseph dans « une étable obscure ». Ce même Jésus, devenu adulte, choisit 12 apôtres pas tous très recommandables pour annoncer la bonne nouvelle de la Résurrection. Et lui-même meurt délaissé de tous sur la croix d’infamie. Notre Dieu aime ce qui est petit, ce qui est humble parce que c’est la seule façon de parler au cœur de l’homme. On sait ce qu’a provoqué la soif de puissance des grands de ce monde. Les rassemblements hitlériens, staliniens et maoïstes étaient vécus comme de grandioses liturgies. Résultat : des millions de morts et des handicapés physiques et psychiques. C’est la rançon du pouvoir et de la haine, ennemis héréditaires de notre créateur.

Humilité des disciples

Saint Macaire, ou quand l’humilité conduit à l’humour.

« Est véritablement humble, affirme Isaac le Syrien, celui qui a, dans le secret de son âme, de quoi s’enorgueillir et ne s’enorgueillit pas. » Cette force habitait saint Macaire, moine du désert qui, un jour, rencontra le diable. Celui-ci lui dit : « J’ai beaucoup à souffrir de ton fait, Macaire, et cela parce que je ne parviens pas à te vaincre. Je fais pourtant tout ce que tu fais ; tu jeûnes et moi je ne mange pas, tu veilles et moi je ne dors pas ; et il n’y a qu’une seule chose où tu me dépasses. » Et l’abbé dit : « Quelle est donc cette chose ? » Et le diable : « C’est ton humilité, en raison de laquelle je suis sans force contre toi ! »

Humour, humilité, il y a une troisième signification de ce mot, c’est le vocable « humus » autrement dit de l’engrais ou du fumier qui pénètre petit à petit la terre pour qu’elle donne plus vite de l’herbe, des légumes, des fruits. Le chanoine de Saint-Maurice, Michel-Ambroise Rey, ancien missionnaire au Pérou, raconte qu’au moment où lui et son confrère retournaient définitivement en Suisse, un Péruvien dans l’assemblée a pris la parole et, s’adressant à eux, leur dit : « Vous avez été pour nous des fumiers ! » Silence gêné et pesant, émotion sensible chez les chanoines avant que l’interlocuteur poursuive son discours en ces termes : « Vous avez été pour nous des fumiers parce que vous avez jeté sur notre terre péruvienne les semences de la Parole de Dieu qui a fait lever les magnifiques fruits du christianisme tels que la foi, l’espérance et la charité. »

Signes de bonheur

« Pleurez avec ceux qui pleurent, riez avec ceux qui rient », nous dit saint Paul. (Rm 12, 15)

Rire de bon cœur, être victimes de fous rires contagieux, non seulement ne sont pas des manques de compassion envers les malheurs de notre monde mais sont plutôt le signe de ce bonheur sans fin que Notre Père des cieux nous prépare dans son paradis où il n’y a « plus de larmes, ni de douleur ». (Ap 21, 4)

L’humour entraîne-t-il… l’amour ?

Par Rose-Marie Charest, psychologue et conférencière

« Absolument, car il rend les gens plus aimables. Dans une rencontre amoureuse, c’est un élément de séduction fondamental, puisque la plupart des gens recherchent la compagnie des personnes qui ont de l’humour. On constate aussi que les personnes qui ont un défaut physique et veulent prendre leur place dans un groupe vont utiliser l’humour pour se faire aimer. »

«La prière du tapis», ou l’humour du Seigneur pour élargir mon coeur!

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Clins Dieu sur les Contrées (VS), juillet-août 2020

Par Marie-Blanche Cordonier | Photo: DR

Marie-Blanche Cordonier, Montana-Village

Ce numéro de L’Essentiel a pour thème central « L’humour, chemin vers Dieu ».

Il y a deux ans environ, je croisais sur mon chemin, le président du Conseil de gestion de notre paroisse. Tout souriant, il me demande : « Es-tu passée à l’église aujourd’hui ? » « Oui, ce matin, pour relever les lumignons. » « Alors, tu n’as pas encore vu le nouveau tapis d’entrée. Il est beau, brun foncé, très chic. »

Curieuse, je n’ai eu de cesse d’aller admirer la merveille. Horreur ! Une personne aux chaussures boueuses avait dû passer par là. Plus très chic le tapis ! Je m’empresse de le nettoyer et c’est ainsi que depuis ce jour, chaque matin, l’aspirateur est en action.

Je dois bien l’avouer, les premiers temps, j’ai régulièrement maugréé quant au choix de la couleur. Et puis, un jour, l’idée m’est venue de faire de cette corvée un temps de prière pour les personnes qui me sont confiées sans que je les connaisse particulièrement, pour celles dont j’apprends la maladie, les souffrances, les soucis. Quand une personne me demande de prier pour elle, je lui parle de « la prière du tapis » gage de ma prière fidèle.

Ces traces que je découvre en arrivant, le matin, sont aussi le signe des visites faites au Seigneur dans sa maison et j’en viens même à regretter lorsque le tapis est tout propre ! On peut dire que Dieu n’a vraiment pas manqué d’humour pour élargir mon coeur aux autres, car je suis loin d’être une « fan » d’aspirateur !

Alors je vous invite à profiter des beaux jours qui viennent, pluvieux ou ensoleillés, pour rencontrer le Seigneur dans sa maison, peu importe si vous laisserez des traces sur le tapis.

Humour: chemin vers Dieu

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte-Claire (FR), juillet-août-septembre 2020

Par l’Abbé Robert Niêm | Photo: Chantal Sciboz

On lit souvent sur internet et dans les journaux de petits articles sur l’humour religieux : Sœur Sourire Dominique – Abbé Sourire Pierre – Bière de l’évêque Morerod – Plaisanterie du pape François… Pourquoi ? Parce que la joie et le sourire qui en découlent, sont les véritables signes qui permettent de reconnaître un chrétien heureux. Car, « vec une tête d’enterrement, vous ne pouvez pas annoncer Jésus . La provocation du pape François n’est pas une plaisanterie lancée au hasard, et l’idée que les chrétiens ne doivent pas avoir l’air triste n’est pas nouvelle : « Il faudrait qu’ils me chantent de meilleurs chants, pour que j’apprenne à croire en leur Sauveur », disait Nietzsche !

L’humour joue un rôle important dans notre vie quotidienne : « Un sourire coûte moins cher que l’électricité, mais donne autant de lumière », dit l’abbé Pierre ! « Un sourire, c’est du repos pour l’être fatigué et de la consolation pour le cœur endeuillé », dit Raoul Follereau ! « Ne soyez jamais tristes, un chrétien ne peut l’être », dit le pape François. L’humour est aussi nécessaire dans une homélie ; il aide à l’attention des fidèles. Faire sourire fait souvent du bien dans la foi des pratiquants : « Il n’y a qu’à regarder les plus petits auxquels il nous faut ressembler pour entrer dans le Royaume. » Leur rire et leur joie sont communicatifs. La joie chrétienne passe donc nécessairement par l’humour, chemin vers Dieu !

L’humour est un remède simple et gratuit à bien des maux ! C’est pourquoi, si vous rencontrez une personne qui ne vous donne pas le sourire que vous méritez, soyez généreux, offrez-lui le vôtre pour le Royaume de Dieu ! A vous tous, bel été plein de joie et de rires, en vous et autour de vous !

L’humour de la Bible

Par François-Xavier Amherdt
Photo: DR« Quand le Seigneur ramena les captifs à Sion, nous étions comme en rêve. Notre bouche était pleine de rires et nos lèvres de chansons ! » (Psaume 126 (125), 1-2) Les Psaumes éclatent d’une allégresse communicative, telle celle des exilés de retour à Jérusalem, leur terre bien-aimée, après leur exil à Babylone.

Etymologie
C’est beau de penser qu’« humilité », « humain » et « humour » ont la même étymologie ! Les trois termes viennent du mot latin humus, le sol. Etre humain, c’est garder les pieds sur terre et cultiver le sens de l’humour. C’est vital.

D’autant plus que Jésus, même si les évangiles ne nous le montrent jamais rire aux éclats, manie l’ironie avec dextérité et tendresse. Il répond sans cesse à côté des questions-traquenards que lui posent ses adversaires, comploteurs et manipulateurs. Lorsque les grands prêtres et les anciens du peuple cherchent à l’accuser, après qu’il a chassé les vendeurs du Temple, en lui demandant : « Par quelle autorité fais-tu cela ? », il leur réplique par une autre question qui les met dans l’embarras : « Le baptême de Jean, était-il du ciel ou des hommes ? » Les accusateurs sont pris à leur propre piège, puisque, quelle que soit leur réponse, ils seront ennuyés (Matthieu 21, 23-27). 

Tel est pris…
Puis, lorsque les pharisiens et les partisans d’Hérode veulent « coincer » le Christ au sujet de l’impôt dû à César, il les renvoie à leurs propres contradictions. Il les presse de lui montrer une pièce à l’effigie de l’empereur, ce qu’ils s’empressent de faire. Or, détenir sur soi une telle monnaie de l’occupant romain détesté et de son chef qui se prenait pour un dieu constituait un délit d’impureté et une grave compromission avec l’envahisseur. « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. » « Nanana », entendons-nous derrière le sourire ironique de Jésus, « tel est pris qui croyait prendre » ! D’ailleurs, précise le texte, « A ces mots, ils furent tout surpris et, le laissant, ils s’en allèrent. » (Matthieu 22, 15-22)

Peut-être est-ce de là que vient la tradition de l’humour des « Compagnons de Jésus » : « Mon père, est-ce vrai que les jésuites répondent toujours à une question par une question ? – Qui vous a dit cela ? »

Humour-humeur

Par Thierry Schelling
Photo: CiricFrançois a le sens de la formule, même « pinçante » parfois. Il est bon de le lire et de l’écouter aussi à ce niveau moins solennel de son magistère. Car si l’on y perçoit évidemment la sagacité de sa formation jésuite, il y a également ce côté presque primesautier du prédicateur qui sait faire le contrepoids aux déclarations graves lorsqu’il admoneste et dénonce tour à tour l’hypocrisie humaine, la cupidité du monde, la culture du déchet, etc.

Les bons mots au bon moment !
Alors, dégustation, car la courte sélection ci-après se passe de commentaire : « L’Eglise ne peut pas être une baby-sitter qui prend soin d’un enfant pour qu’il s’endorme (…) Je préfère mille fois une Eglise accidentée (…) qui a le courage de sortir (…) et non une Eglise malade (…) toujours fermée [sur elle-même] (…). Quand une communauté est fermée, elle [ne donne pas la vie], (…), elle est stérile. »

Pour les agents pastoraux, notamment les prêtres : « Le Seigneur veut que nous soyons des pasteurs, pas des brosseurs de brebis ! » On se rappelle aussi le conseil de « sentir l’odeur des brebis »…

Pour les chrétiens en général, il rappelle : « Ne soyez pas (…) mélancoliques, (avec) davantage le visage de piments au vinaigre ! (…) des chrétiens amidonnés qui parlent de théologie en prenant tranquillement leur thé… (…) » Il met aussi en garde contre les « chrétiens de pâtisseries, (…) de beaux gâteaux, (…) de belles confiseries » s’ils voulaient faire un « christianisme plus humain, sans croix, sans Jésus, sans dépouillement »…

La mosaïque de l’Assomption

De Mario Rupnik à Bernex (GE)

Par Amandine Beffa
Photo: Jean-Claude GadmerFêter l’Assomption, c’est avant tout fêter la résurrection. En effet, selon une belle tradition populaire orthodoxe, la fête de la Pentecôte est comme la « Pâque de l’été ». 

En contemplant cette mosaïque, à l’église Saint-Maurice à Bernex, nos regards sont attirés par le Christ, personnage central de l’œuvre. Comme l’explique Georges Lemopoulos, nous sommes face à un thème inverse : « D’habitude, nous avons l’icône de la Mère de Dieu tenant tendrement dans ses bras son enfant, l’Homme-Dieu. Celui qui « a pris chair pour nous et pour notre salut ». » Ici, le Christ présente sa Mère au monde. Le poupon entre ses mains représente l’âme de Marie. Elle est la première à avoir bénéficié de la résurrection. Elle nous précède même dans la résurrection pour nous montrer la voie jusqu’au bout.

Le personnage imberbe est saint Jean (il est traditionnellement représenté sans barbe parce que considéré plus jeune que les autres). Il est celui à qui Jésus avait confié sa mère (Jean 19, 27). D’une certaine manière, il nous représente, nous tous enfants à qui Dieu a choisi de donner une mère. Sur la mosaïque, il nous indique le Christ, à la fois pour nous rappeler vers quelle direction doit être dirigée notre foi et pour nous montrer l’âme de Marie que le Christ est venu chercher. Certes, la vie terrestre de Marie est terminée, mais ce n’est pas une fin définitive.

Guide dans la confiance
A l’Annonciation, Marie nous invitait à oser le oui qui donne la vie. A l’Assomption, elle nous guide dans la confiance qui va jusqu’au bout. Oui, nous ne comprenons pas tout à la résurrection – bien orgueilleux qui affirmerait le contraire – mais nous pouvons faire confiance au Seigneur. Car, comme le dit Job : « Je sais que mon rédempteur est vivant, et qu’il se lèvera le dernier sur la terre. Quand ma peau sera détruite, il se lèvera ; Quand je n’aurai plus de chair, je verrai Dieu. » (Job 19, 25-27)

Source: https://chemindejoie.ch/dormition/

Saint Thomas More, martyr

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Vallée d’Illiez (VS), juillet-août 2020

Par Denyse Gex-Collet | Photo: DR

Homme de loi, homme de lettres, homme d’Etat, mais avant tout homme de Dieu

En lien avec le thème du mois: «L’humour»

On me reproche de mêler boutades, facéties et joyeux propos aux sujets les plus graves. Avec Horace, j’estime qu’on peut dire la vérité en riant. Sans doute aussi convient-il mieux au laïc que je suis de transmettre sa pensée sur un mode allègre et enjoué, plutôt que sur le mode sérieux et solennel, à la façon des prédicateurs.(Saint Thomas More – L’utopie)Fils de l’homme de loi John More et petit-fils de boulanger, Thomas More naît le 7 février 1478 à Londres. Son père, nourrissant de grandes ambitions pour lui, veille à ce qu’il reçoive une instruction irréprochable. Grâce à ses connaissances, il devient page du cardinal Morton, archevêque de Cantorbéry. Puis il part pour l’Université d’Oxford afin de compléter ses études. 

Quelle voie choisir ?
Il est très attiré par la prêtrise mais son père décidant d’en faire un avocat, il entreprend des études de droit durant lesquelles il a comme maîtres John Colet et Erasme avec lequel il se lie d’une profonde amitié. Grâce à cet ami, il participe pleinement au renouveau de la pensée qui caractérise cette époque, ainsi qu’à l’humanisme dont il est le plus illustre représentant anglais. 

Thomas More mène alors l’existence intéressante d’un honnête homme aux multiples talents. Il enseigne le droit et a à cœur de défendre les habitants de Londres qui le nomment juge. Se battant sur plusieurs fronts avec toujours un fort idéal éthique, il défend la justice plus que les juristes, prône les arrangements à l’amiable et prend la plume pour convaincre l’humanité de s’améliorer. Il est également historien, poète et théologien.

A la bifurcation des chemins
Ayant envisagé d’entrer dans les ordres, il reste plusieurs années durant à la Chartreuse de Londres. Constatant que le célibat n’est pas pour lui, il se marie avec Jane Colt dont il a trois filles et un fils, puis devenu veuf il prend pour épouse Alice Middleton, veuve et mère de deux enfants. 

Nommé « ambassadeur extraordinaire », puis « chancelier du roi » par Henri VIII, Thomas More devient membre du Parlement. Il refuse alors une pension du roi pour rester libre de ses opinions. Il démissionne de sa charge en refusant de prêter serment à Henri VIII, lorsque le roi rompt ses relations avec Rome et se proclame chef de l’Eglise d’Angleterre afin de pouvoir divorcer et épouser Anne Boleyn.

La voix de la conscience
Il a réfléchi et prié avant de prendre sa décision. « A présent, constate-t-il, ma conscience est si claire que j’en tressaille de joie… Je ne fais rien de mal. Je ne dis rien de mal. Je ne pense rien de mal. Et si cela ne suffit pas pour qu’un homme ait le droit de vivre, ma foi, je ne tiens pas à vivre. » Car jamais Thomas More n’a renié sa liberté de conscience, et devant la persistance de son attitude, il est emprisonné  à la Tour de Londres. Henri VIII le condamne à mort comme « traître » pour n’avoir pas reconnu la suprématie du roi sur l’Eglise d’Angleterre.

Homme de lettres
Dans toute son œuvre littéraire, on apprécie la simplicité, la profondeur de la spiritualité, la connaissance des Ecritures et bien sûr une dose d’humour. Durant son emprisonnement, il rédige le magnifique ouvrage « La tristesse du Christ ». Méditant et contemplant la Passion de Jésus, il offre un témoignage sur les démarches entreprises durant sa vie  inspirées des Ecritures et sur les derniers instants de sa vie. Cet ouvrage inachevé restera le testament spirituel d’un des plus grands humanistes chrétiens confronté à sa conscience, à son obéissance et à sa foi.

Son humour
Thomas More, doté d’un esprit délicat, utilise l’ironie avec brio. Quelques-unes de ses réparties nous sont parvenues par le biais de ses écrits ou de ceux que nous ont transmis ses contemporains. 

• Durant son emprisonnement à la tour de Londres, dans l’attente de son jugement, Thomas More s’adressa un jour en ces termes au Lieutenant de la Tour:

« Maître Lieutenant, en toute sincérité, je crois que vous êtes pour moi un excellent ami, et que vous me traiteriez du mieux que vous pourriez comme vous le dites ; je vous en remercie de tout cœur. Mais soyez assuré, Maître Lieutenant, que ma nourriture ne me déplaît point, et que si pareille chose devait m’arriver un jour, je vous autorise à me jeter dehors sur le champ ! »

• Un jour que le gouverneur de la Tour s’excuse avec politesse sur la frugalité de son ordinaire, il lui répond : « Si quelqu’un d’entre eux n’est pas content du régime, qu’il aille chercher un gîte ailleurs ! »

• Il est condamné à être pendu, éviscéré et écartelé mais le roi commue cette sentence en décapitation, par « faveur », ce qui aurait, dit-on, inspiré à Thomas More cette boutade : « Dieu préserve mes amis de la même faveur. » 

• Dans la lettre d’adieu à sa fille Margareth, il écrit : « … Mais ce sera bientôt fini. Je trouverai dur s’il me fallait attendre à plus tard que demain, car c’est la vigile de saint Thomas et l’octave de saint Pierre. Voilà pourquoi je brûle d’aller à Dieu demain… » 

• Avant de monter sur l’échafaud, il dit à son bourreau : « Merci de m’aider à monter. Pour la descente, je me débrouillerai tout seul. » 

En ces ultimes instants, il conserve son humour et conseille au bourreau de bien viser car « il a le cou un peu court ». La tête sur le billot, il trouve encore l’esprit d’épargner la barbe qui lui était poussée pendant sa captivité : « Celle-ci n’est pas à couper ; elle n’a pas commis de trahison. » 

Pour le peuple de Londres venu assister à sa décapitation, il prononce ces paroles qui résonnent comme un testament et un acte de foi : « Je meurs, bon serviteur du roi, et de Dieu premièrement. »

Béatifié par Léon XIII en 1886, canonisé par Pie XI en 1935, Thomas More est fêté le 22 juin. En 2000, Jean-Paul II le proclame patron céleste des responsables de gouvernement et des hommes politiques, en raison notamment de sa « cohérence morale ».

Prière de saint Thomas More, dans sa cellule de condamné à mort

Dieu tout-puissant, écarte de moi
toute préoccupation de vanité,
tout désir d’être loué,
tout sentiment d’envie,
de gourmandise,
de paresse et de luxure,
tout mouvement de colère,
tout appétit de vengeance,
tout penchant à souhaiter du mal à autrui
ou à m’en réjouir,
tout plaisir à provoquer la colère,
toute satisfaction que je pourrais éprouver
à admonester qui que ce soit
dans son affliction et son malheur,
Rends-moi, Seigneur, bon, humble et effacé,
calme et paisible, charitable et bienveillant,
tendre et compatissant.
Qu’il y ait dans toutes mes actions,
dans toutes mes paroles
et dans toutes mes pensées,
un goût de ton Esprit saint et béni.

L’humour, chemin vers Dieu

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur Vallée d’Illiez (VS), juillet-août 2020

Par l’abbé Gérald Voide | Photo: DR

Quel beau thème ! Surprenant, mais aussi très vrai. Si l’humour peut être grinçant, caustique, blessant, voire noir, il peut aussi être léger, candide, jovial. « Humour » rime avec « amour ». Il y a parfois de l’humour très tendre, profond d’humanité et même de spiritualité : pensons, par exemple, à de nombreuses scènes de Fernandel dans Don Camillo. Elles vous touchent droit au cœur. 

L’humour peut attirer l’attention des fidèles dans la prédication. Il peut aussi susciter la réflexion. Petite illustration à travers le dessin ci-dessous qui a couru sur les réseaux sociaux durant la pandémie. 

La Bible
La Bible, pourtant, ne parle guère d’humour. Elle évoque le rire. Il y a le rire célèbre de Sara, l’épouse d’Abraham, lorsque les trois mystérieux visiteurs divins annonceront qu’elle va avoir un fils, elle qui était très avancée en âge et qui « avait cessé d’avoir ce qui arrive aux femmes », comme le dit pudiquement le livre de la Genèse au chapitre 18. 

Mais l’Ecriture Sainte vise surtout la joie. Jésus, dans le long discours d’adieu lors de son dernier repas avec ses disciples, leur dira : « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. » (Jean 15, 11) Cette joie donnée par le Christ est très profonde, et nul ne pourra nous la ravir : « … maintenant (que je vais m’en aller, que je vais mourir), vous êtes dans la peine, mais je vous reverrai, et votre cœur se réjouira ; et votre joie, personne ne vous l’enlèvera. » (Jean 16, 22) Pas surprenant que saint Paul puisse dire : « Soyez toujours dans la joie du Seigneur ; je le redis : soyez dans la joie. Que votre bienveillance soit connue de tous les hommes. Le Seigneur est proche » (Philippiens 3, 4-5). « Soyez toujours dans la joie », toujours, même dans les épreuves et les difficultés, parce que nous croyons à la proximité et à la présence aimante du Seigneur en toute circonstance.

Le pape François et l’humour
Dans son livre-entretien Dieu est jeune, le pape François nous dit que « si l’on n’a pas le sens de l’humour, il est très difficile d’être heureux ». Et le Pape de confier qu’il récite quotidiennement, depuis presque 40 ans, la « Prière de la bonne humeur » de saint Thomas More, un britannique mort en martyr en 1535 : Donne-moi une bonne digestion, Seigneur, et aussi quelque chose à digérer.

Donne-moi la santé du corps, avec la bonne humeur pour la garder au mieux.

Donne-moi une âme sainte, Seigneur, qui ait les yeux sur la beauté et la pureté, afin qu’elle ne s’épouvante pas en voyant le péché, mais qu’elle trouve dans Ta présence la voie pour redresser la situation.

Donne-moi une âme qui ignore l’ennui, le gémissement et le soupir, et ne permets pas que je me fasse trop de souci pour cette chose encombrante que j’appelle « moi ». 

Seigneur, donne-moi l’humour. Concède-moi la grâce de comprendre la plaisanterie, pour que je tire quelque bonheur de cette vie et que j’en fasse profiter les autres. Amen. 

Puissante tendresse

Les familles chrétiennes sont appelées à s’aimer avec tendresse, elle est le reflet de l’amour du Père.

Par Bénédicte Jollès
Photo: flickr« Vivez-vous avec un avare affectif ? » Articles et tests sur internet abordent la question de la tendresse dans le couple, aussi délicate à recevoir pour les femmes que pour les hommes. Chacun peut souffrir d’échanges inexistants ou de relations décevantes. Le couple a pourtant un besoin vital de tendresse, faute de quoi la vie commune devient pesante et toute la famille en pâtit. 

Tous ont besoin d’attentions, de regards, de gestes ou de signes qui disent « je t’aime », « je te pardonne »… Ils donnent joie et confiance pour avancer. « Ma mère manquait de tendresse, j’en souffre encore à l’âge adulte », reconnaît Claire, consciente qu’elle cherche de l’affection de façon maladroite. 

Chacun a sa manière unique d’exprimer son amour : celle des enfants n’est pas celle des grands-parents, celle de la mère n’est pas celle du père. Mais toutes sont réconfortantes. La tendresse ne se décrète pas, elle jaillit du plus profond d’un cœur qui se laisse toucher. Contagieuse, créative, transformante, elle permet de passer de la méfiance à la confiance, de la rigidité à la douceur. Pour sonner juste, nos marques d’affection nécessitent écoute et respect en même temps que maîtrise de soi. Aux antipodes de la mièvrerie, de la fusion ou de la nonchalance, la tendresse amène à trouver la juste distance.

Théologie de la tendresse
« Revêtez votre cœur de tendresse, d’humilité et de bonté », dit saint Paul (Colossiens 3, 12-17). Voilà le secret de la paix et de la foi dans nos familles. Impossible de transmettre la foi sans exprimer son affection. « Je dois ma foi à ma marraine, elle était pratiquante, drôle et affectueuse, j’avais envie de l’imiter », reconnaît Aurore. Avons-nous réalisé que la Bible répète que « Dieu est tendresse et pitié ? » (psaume 102) « Nous sommes appelés à découvrir cette fidélité aimante de Dieu, y compris au cœur de l’épreuve, ensuite nous pourrons être ses mains, son oreille, son cœur… C’est pourquoi, depuis le début de son pontificat, le pape François ne cesse de développer une « théologie de la tendresse ».

Humour biblique…

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte Marguerite Bays (FR), juillet-août 2020

Par Marius Stulz | Photo: dr

La Bible a-t-elle de l’humour, y a-t-il de l’humour dans la Bible ? Qu’en pensez-vous ?

Pour moi, l’humour n’existe pas en soi, il surgit de la rencontre entre un événement, une situation, un texte, une parole et la culture d’un groupe ou d’une personne qui en fait une lecture dans une attitude de détachement. De fait, l’humour est moins accessible, par exemple, à une personne qui s’attache à un comportement de type légaliste. Oui, l’humour est une perception railleuse qui s’attache à souligner le caractère comique, surréaliste, tendre, ridicule, absurde, paradoxal ou insolite de certains aspects de la réalité.

Dans le cadre de mes études, je ne me souviens pas avoir profité d’un cours sur l’humour dans la Bible. C’est dommage, car l’humour, comme la poésie, est souvent une belle porte ouverte sur l’au-delà de soi. Elle permet souvent de plonger de tout son être dans la méditation d’un texte inspiré. Quelques exemples qui m’ont interpellé :

Language poétique

Dans le premier récit de la création (Gn 1, 1-5), lire le langage poétique avec un esprit critique m’a fait découvrir qu’au début il n’y avait rien et que ce rien était appelé ténèbres. Puis, Dieu sépare le rien d’un côté et la lumière de l’autre ; et tout d’un coup ce rien, devient quelque chose, ce n’est pas rien tout ça. Cette opposition entre ténèbres et lumière, entre rien et quelque chose, est une forme d’humour qui a nourri ma méditation. En effet, le rien au-dessus duquel planait le souffle de Dieu c’est quelque chose, qui était absence de Dieu ou ténèbres. Ces ténèbres, espace de mon être laissé en jachère de Dieu, font partie de ma vie quotidienne, au-dessus desquelles plane et agit aujourd’hui le logos, la force de création de Dieu.

Et que dire de Moïse devant le buisson ardent, en plein débat avec Dieu. Moïse s’oppose à Dieu, sous prétexte qu’il ne savait pas parler ; c’est vraiment un peu cocasse et surréaliste (surréaliste, c’est normal Dieu est le tout Autre). Voilà un bonhomme qui n’a pas peur de s’opposer à Dieu, de le reprendre pour lui dire qu’il se trompe de le choisir lui, Moïse, mais qui est effrayé à l’idée d’aller tailler une bavette avec son frère qu’il connaît depuis tout petit, depuis son adoption par la famille de pharaon. Parler et débattre avec un buisson en flamme ou à son frère, c’est quoi le plus insolite, voire effrayant ? Cette scène particulière m’a permis de méditer sur quelle image Moïse a de son frère et de son Dieu ; mais aussi, quelle image je me fais de Dieu et de mon frère. Cela me paraît être une bonne question à se poser pour grandir…

Comique et cynique

Et Jonas, n’est-il pas comique et cynique ce prophète qui prend le chemin opposé de Ninive où Dieu l’envoie pour qu’il demande le repentir de la ville. Et pourquoi Jonas refuse-t-il d’obéir à Dieu ? Il en a marre de la bonté de Dieu qui pardonne toujours aux gens qui font l’inverse de ses commandements. N’est-il pas comique ce prophète frustré de devoir trimer pour suivre les commandements, alors que les autres vivent n’importe comment, font ce qu’ils veulent et peuvent se repentir en faisant un jeûne de trois jours pour être pardonnés et on n’en parle plus ; non mais des fois, c’est quoi ces commandements que l’on peut ne pas suivre, ce n’est pas sérieux… Du coup cette histoire m’interroge, pour Jonas ou pour moi, ces commandements sont-ils un cadeau ou un poison, une chance d’épanouissement ou une limite, un carcan ?

Fournisseurs de vin

Jésus lui-même me fait sourire… A Cana (Jn 2, 1-12), Marie lui demande de l’aide, car la noce manque de vin et il lui répond : « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue. » Et que fait-il juste après il dit : « Remplissez d’eau les jarres. » et « Maintenant, puisez, et portez-en au maître du repas. » Jésus se contredit en devenant, par un agir surnaturel, l’un des plus gros fournisseurs d’excellent vin (plus de 500 litres, excusez-moi du peu). Pour quelqu’un qui ne va pas agir, c’est un record… surtout que ce signe devient pour nous le premier de son engagement missionnaire public. Cette situation à mes yeux un peu cocasse m’a interpellé ; pourquoi ce changement d’attitude, une faiblesse, une incertitude ? Ou alors les signes (miracles) ne manifestent pas en soi la Révélation (son heure) qu’il est venue apporter au genre humain ? Dès lors, il faudrait s’interroger quelle est-elle son heure, comment se manifeste-t-elle ?

Surtout, il récidive, lorsque devant une foule affamée, il ordonne aux apôtres « donnez-leur vous-mêmes à manger » (Mt 14, 16b), pour juste après, nourrir lui-même les cinq mille personnes à partir de cinq pains et deux poissons. C’est quoi cette affirmation, allez-y faites-le, vous êtes capables de nourrir vous-mêmes tous ces gens et, juste après, c’est lui qui agit et qui fait l’essentiel du travail… Je me suis interrogé, c’est quoi ces encouragements à l’action ? Des paroles en l’air, juste pour la forme ? Ou alors, manifestent-elles vraiment la capacité d’action, des apôtres ou de moi-même ? Cette capacité n’aurait rien à voir avec un pouvoir personnel et solitaire, mais serait plutôt le résultat d’une action collective. Les apôtres, vous, moi, nous serions capables de déplacer les montagnes pour autant que nous vivions cette action en tandem avec quelqu’un, avec lui… Ce n’est pas moi qui prie, c’est lui qui prie en moi ; ce n’est pas moi qui agis, c’est lui qui agit par et avec moi… Cela ouvre des perspectives, ne trouvez-vous pas ?

Humour et Révélation

Je trouve que Jésus a aussi beaucoup d’humour dans le sérieux de son annonce de la Bonne Nouvelle à la samaritaine. En lui demandant « Donne-moi à boire », Jésus transgresse trois tabous juifs, trois règles ecclésiales de l’époque : l’interdit de parler à une femme en public, l’interdit de parler à une samaritaine, l’interdit de pactiser avec les samaritains qui sont considérés comme des hérétiques de la foi juive. L’ironie est que cette parole « donne-moi à boire » est un acte subversif, qui s’ouvre sur une rencontre, un échange et des jeux de mots équivoques. La samaritaine souligne ce qui les sépare, Jésus utilise ce qui les unit. L’une parle de l’eau qui désaltère le corps et l’autre lui répond par de l’eau vive qui fait jaillir la vie éternelle. L’une lui demande de ne plus avoir soif et l’autre lui demande d’aller chercher son mari. Par cette question, Jésus reconnaît la souffrance et la situation d’exclusion que vit cette femme qui n’a plus de considération pour elle-même puisqu’elle vient à midi puiser de l’eau, le soleil tape si fort que personne ne viendra en même temps qu’elle. Elle n’ose pas reconnaître sa propre souffrance d’être une paria, puisqu’elle répond « Je n’ai pas de mari ». Paradoxalement, au moment où Jésus souligne qu’elle en a eu cinq de maris et qu’il souligne sa situation actuelle transgressive qui est hors mariage, elle se sent vivre et accueillie. Et un nouveau glissement s’opère dans la discussion, elle se sent accueillie par ce prophète et l’interroge du comment voir une relation à Dieu, sur la montagne ou au temple de Jérusalem ; et la réponse opère un nouveau déplacement : en Esprit et en vérité (l’eau vive). Puis elle questionne sur la venue du Messie et lui, répond, « Je le suis ».

Dès lors, la solitaire, la paria, laisse sa cruche, l’objet de son attention première, et retourne vers ces gens dont elle se sentait rejetée pour annoncer le Messie. Les samaritains accourent vers Jésus, l’invite et après deux jours beaucoup posent un acte de foi incroyable « nous savons que c’est vraiment lui, le sauveur du monde ».

L’humour de Jésus permet à la samaritaine de prendre une certaine distance de la réalité dans laquelle elle est enfermée, et devient le lieu de sa croissance et de la révélation.

Mais la Révélation elle-même, je la considère comme étant le sommet de l’humour de Dieu. En effet, pour révéler sa divinité, Dieu choisit un homme, Jésus, pour se dévoiler, se laisser découvrir et ouvrir le chemin du salut, cette route qui conduit à lui.

Dès lors, je nous souhaite de toujours pouvoir davantage accueillir l’humour de Dieu dans nos vies, pour qu’il nous guide et ouvre notre cœur à sa réalité. Je vous souhaite de bonnes vacances, un bon repos et un bel épanouissement par l’humour divin.

Grégory Roth

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Unités pastorales du Grand-Fribourg (FR), juillet-août 2020

Propos recueillis par Véronique Benz | Photos : SCJP, capture d’écran RTS

« Comme pour beaucoup certainement, cette expérience de confinement m’a permis d’être attentif à tous ces signes et gestes de solidarité, d’entraide et de proximité. Lorsque tout tourne au ralenti, on perçoit peut-être davantage ce qui est essentiel dans notre vie, pour nos proches et pour la société. Je souhaite de tout cœur que l’on puisse, lorsque ce temps de crise sera terminé, se rappeler de ces signes et gestes, et de faire notre possible pour qu’ils perdurent. »
Rencontre avec Grégory Roth, journaliste à Cath-Info.
Vous travaillez pour Cath-Info et les émissions religieuses, où vous vous occupez notamment des messes radiodiffusées. Dites-nous en quoi cela consiste ?
La fonction de « producteur » consiste principalement à établir la planification des 56 offices catholiques (dont 2 célébrations œcuméniques et une célébration de la Passion) qu’Espace 2 diffuse par an. En d’autres termes, je dois m’assurer qu’elles aient lieu et qu’elles représentent équitablement l’ensemble de la Suisse romande, sans oublier les périphéries. 

À titre d’exemple, nous avons été ces derniers mois à plusieurs reprises à Cologny (GE) et deux fois à Alle (JU), soit deux extrémités de notre pays. Je veille aussi à ce que les messes soient liturgiquement exemplaires, qu’elles reflètent la réalité du terrain, avec les gens du terrain – ces messes ne sont pas un spectacle –, tout en assurant une certaine qualité esthétique que les auditeurs attendent d’une chaîne musicale de service public.

Durant ce temps de crise sanitaire où les messes ont été supprimées, la plupart des catholiques de Suisse romande ont suivi les messes grâce à la radio et à la télévision. Comment avez-vous fait face à la situation ?
Il a fallu tout organiser à distance, principalement depuis chez moi, dans un cadre que les jeunes familles avec enfants en bas âge peuvent aisément imaginer… [rires]. Chaque semaine, nous faisions face à de nouvelles directives à respecter. Chaque dimanche, une nouvelle messe était à inventer de toutes pièces : avec le minimum de personnes nécessaire, en dessous de l’âge de la retraite, etc. Il a fallu aussi garantir la sécurité sanitaire des personnes impliquées, tant du côté des paroisses que de la RTS. Heureusement, aucun cas de contamination n’a été signalé jusqu’ici.

Plusieurs messes prévues pour la radio ont également été télévisées sur RTS Deux. La mise en place de ces messes a-t-elle été difficile ?
Les attentes et les contraintes liées à la captation d’images complexifient la préparation des messes à tous les niveaux, y compris entre les gens de la TV et la radio qui n’ont pas l’habitude de travailler ensemble. Mais la collaboration a été très fructueuse pour tous, car chacun y a mis du sien. Tout le monde s’est senti investi d’une mission commune, au service des personnes empêchées de se réunir à l’église. Nous avons aussi reçu beaucoup de messages très touchants : d’encouragements, de félicitations, ou tout simplement de personnes qui nous demandaient d’en saluer d’autres qu’elles avaient reconnues à l’écran et dont elles avaient probablement perdu le contact… Bref, beaucoup de solidarité dans cette épreuve commune.

Vous êtes également directeur de chœur dans l’UP Saint-Joseph, comment avez-vous vécu le fait de participer à des messes « minimalistes » ?
Cela m’a permis de me rendre compte personnellement de ce que je faisais vivre aux paroisses qui nous accueillaient pour les messes radio et TV : chanter, tenir sa voix dans le trio, lire les lectures, réciter les répons de l’assemblée et, pendant l’homélie, garder un contact visuel permanent avec le prêtre, qui ne sait pas qui regarder, puisque l’église est vide… C’est ce dernier point qui demande le plus de concentration [rires].

Plus sérieusement, ce fut une belle et riche expérience, mais aussi émotionnellement très prenante.

Votre foi a-t-elle un impact sur votre travail et inversement ?
Alors que beaucoup ont dû attendre la Pentecôte pour pouvoir retourner à la messe, je me sens vraiment privilégié d’avoir pu y participer chaque dimanche sans interruption depuis le début du confinement. Ma foi m’a permis de donner un sens à ce que je faisais, celui de favoriser cette communion de désir, entre tous, à chaque fois, ici et maintenant, malgré l’isolement, la séparation physique, la peur et l’incertitude de ne pas savoir de quoi sera fait demain.

Biographie

Grégory Roth a 32 ans. Marié, il est père de deux enfants. Il a grandi à Moutier. Il est venu à Fribourg en 2009 pour y étudier la théologie.
À la fin de ses études, en 2014, il y est resté. Il a été engagé à Cath-Info, le Centre catholique des médias à Lausanne, tout en pour-suivant une formation de journalisme à Lausanne, de 2015 à 2017.
Il est également directeur de chœur dans l’unité pastorale Saint-Joseph.

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