La passion de saint Joseph

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Unités pastorales du Grand-Fribourg (FR), mars-avril 2021

PAR L’ABBE ALEXIS MORARD
PHOTO : DR

Au début de son Évangile, saint Matthieu nous raconte l’inextricable dilemme que saint Joseph a dû affronter. Alors qu’il était fraîchement marié, il s’aperçoit que Marie son épouse est enceinte, alors même qu’ils ne vivent pas encore sous le même toit (ce qui était chose fréquente dans le mariage juif). Joseph doit-il suivre la Loi et répudier Marie, ou suivre Marie et répudier la Loi ?

Joseph, en homme juste, ne veut pas manquer à la Loi, mais il ne veut pas non plus condamner celle qu’il aime et qu’il devait, à sa manière, savoir toute pure. Joseph trouve alors une solution pour le moins originale : répudier Marie, mais « en secret », c’est-à-dire sans fournir de raison valable, de sorte que l’opprobre retombe sur lui en raison de la légèreté de son attitude par rapport à sa fiancée. Ainsi, pas d’infidélité à la Loi, et la lapidation est
évitée. Cependant, voici que la Providence va pousser Joseph bien au-delà de la solution qu’il avait imaginée :

« Comme il avait formé ce projet, voici que l’ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit saint ; elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus, c’est-à-dire : Le-Seigneur-sauve, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés ». » (Mt 1, 19-20)

Joseph prit chez lui Marie

La réponse de Joseph et immédiate : « Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit. » (Mt 1, 24) On pourrait véritablement parler ici de la « passion » de Joseph : son amour pour Marie n’est pas diminué par son doute, au contraire, il s’en trouve assumé un étage plus haut !

Et le pape François de commenter dans sa lettre apostolique Patris Corde (n. 4) :

« Bien des fois, des évènements dont nous ne comprenons pas la signification surviennent dans notre vie. Notre première réaction est très souvent celle de la déception et de la révolte. Joseph laisse de côté ses raisonnements pour faire place à ce qui arrive et, aussi mystérieux que cela puisse paraître à ses yeux, il l’accueille, en assume la responsabilité et se réconcilie avec sa propre histoire. »

Puisse ce temps de carême, au travers des situations inextricables qui se présentent à nous en ce temps de pandémie, nous révéler plus que jamais la folle passion de Jésus pour chacune et chacun de nous, et nous encourager à le suivre jusque dans sa Pâque où il fait « toutes choses nouvelles » (cf. Ap 21, 5).

 

Quelle place pour la souffrance ?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte Marguerite Bays (FR), mars-avril 2021

PAR L’ABBÉ VINCENT LATHION
PHOTOS : ABBÉ MARTIAL PYTHON, DR (LA RÉSURRECTION D’ANDREA MANTEGNA)

L’Essentiel Unité pastorale Sainte Marguerite Bays

« A travers les écueils, plongés dans la détresse,
Les saints ont constamment marché vers la sagesse. »

Imitation de Jésus Christ, L1, chap. 13

La vie semble ainsi faite qu’on ne peut la traverser sans connaître, à côté des heures de bonheur, des heures plus sombres et douloureuses ; ces épreuves dans nos vies sont-elles des voies sans issue ou peuvent-elles trouver une place dans notre cheminement ? Essayons, dans une perspective de foi, de dégager quelques pistes de réflexion.

Tout d’abord, qu’est-ce que la souffrance ? Elle est une réaction naturelle d’aversion et de tristesse en présence d’un mal qui nous touche ou qui touche l’un de nos proches.

En tant qu’être humain, le mal auquel nous pouvons être confrontés est de deux types. Le premier est un mal que nous pourrions dire « naturel », qui se retrouve dans le règne animal et végétal : nous pensons ici aux maladies et aux accidents de toute sorte qui privent un être vivant, au moins en partie, des capacités qu’il devrait posséder. Le second type de mal est un mal qui concerne les créatures capables d’agir librement. Ici, il est question des peines et des blessures causées par tous les actes humains qui ont manqué le bien qu’ils devaient viser.

Si, dans le second cas, l’origine du mal est facilement identifiable, il n’en va pas de même dans le premier où l’individu subit un tort qui ne dépend pas nécessairement de lui. Ainsi cette souffrance n’est pas liée à une faute personnelle, comme l’explique le Christ lors du drame de Siloé – la chute d’une tour avait causé la mort de 18 personnes –, et il faut en écarter toute idée de châtiment (cf. Lc 13, 4). Ce mal naturel, aussi tragique ou pénible soit-il, n’affecte pas forcément la relation à Dieu, même si très souvent, il l’éprouve durement. Le livre de Job en est la meilleure illustration dans la Bible : après avoir tout perdu, Job élève sa plainte vers Dieu alors que ses amis cherchent, par des raisonnements, à justifier le mal qui le frappe. A la fin du texte, le Seigneur donne raison à Job tandis qu’il réprimande sévèrement ses compagnons, car ils ont voulu rendre Job responsable de ses souffrances.

Ces deux types de maux, le mal naturel et le mal qui dépend de l’homme, sont certes liés de manière mystérieuse dans l’histoire du monde, mais comme nous venons de le relever, ils ne le sont aucunement – sauf cas particuliers – dans l’histoire d’un individu. Ainsi, dans les situations les plus frappantes, nous voyons des saints souffrir de terribles maladies et affronter des événements tragiques, tandis que des hommes, qui ont commis de lourdes fautes, semblent traverser la vie sans la moindre maladie ni le moindre revers de fortune. Les uns pourtant cheminent péniblement vers leur salut, pendant que les autres courent allègrement loin de leur but. Nous ne pouvons résoudre cette équation existentielle si l’on s’en tient aux seuls faits extérieurs ; nous percevons en revanche, de manière obscure, que la joie d’une vie ne peut se mesurer à ces seuls critères.

Mais comment réagir face à ces maux qui nous atteignent ? Il y a tout d’abord une forme d’apprentissage de la douleur qui ressemble à l’entraînement des sportifs avant une compétition : telles sont les différentes formes d’ascèse, qui consistent en des privations de toutes sortes. Lorsqu’elle est vécue saintement, l’ascèse permet une maîtrise plus pleine de notre corps et de nos sens, tout en laissant notre sensibilité d’âme et de cœur intacte. Notons bien cependant que ce contact avec une certaine souffrance reste libre et volontaire : on en mesure la dose et les effets pour que les conséquences en soient positives.

Puis il y a cette vraie souffrance, qui n’est plus de l’ordre de l’exercice volontaire, mais de la réalité vécue et subie. Cette souffrance relève du mystère de la croix. L’ascèse peut y préparer lointainement, mais elle ne le fait pas complètement, car l’entraînement ne remplace jamais l’expérience. Dans ces cas-là, le contact avec
la douleur n’est plus choisi ni maîtrisé, mais subi contre sa volonté et éprouvé dans toute sa profondeur. Le Christ dans les évangiles nous invite à le suivre jusqu’à traverser de telles épreuves. Mais de même qu’il n’a pas cherché la douleur de la
Passion et qu’il a demandé au Père de l’en préserver si possible (cf. Mt 26, 39), de même il ne nous incite pas à chercher la souffrance ni la persécution ; elles apparaissent d’elles-mêmes lorsque nous marchons à sa suite.

Que dire pour conclure de cette dernière forme de douleur ? La croix est une expérience terrible, mais le chrétien sait que la présence du Christ l’habite, jusque dans son cri le plus bouleversant : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27, 46) Il connaît également la fécondité mystérieuse que seul Dieu
peut lui donner, car viendra le jour où elle s’effacera devant la lumière de Pâques.

 

Les Conférences Saint-Vincent-de-Paul

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Unités pastorales du Grand-Fribourg (FR), mars-avril 2021

Car j’avais faim et vous m’avez donné à manger;
j’avais soif et vous m’avez donné à boire. 

Matthieu 25, 35

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www.accueilsainteelisabeth.ch

PAR MAX HAYOZ, DIACRE, PRESIDENT DU CONSEIL PARTICULIER DES CONFERENCES SAINT-VINCENT-DE-PAUL DU DECANAT
PHOTO : DR

Pour perpétuer l’œuvre de saint Vincent de Paul (1581-1660) en faveur des plus démunis, le bienheureux Frédéric Ozanam (1813-1853) crée en 1833 avec d’autres personnes à Paris, les Conférences de Saint-Vincent-de-Paul. La Société de Saint-Vincent-de-Paul a pour objectif d’aider les pauvres afin de soulager leurs souffrances et de promouvoir leur dignité et leur intégrité humaines.

Une œuvre discrète

Le canton de Fribourg compte actuellement 30 Conférences, dont 8 sur le décanat de Fribourg. Ensemble, elles travaillent en toute indépendance et dans la discrétion pour venir en aide aux personnes dans le besoin, sans distinction de religion, d’idéologie, de race ou de classe sociale.

Elles offrent :

– un accueil discret et une écoute respectueuse,

– de l’aide rapide et efficace,

– un accompagnement (le cas échéant orienté vers les services sociaux régionaux),

– un soutien dans les démarches officielles,

– l’entremise vers d’autres institutions d’entraide (Caritas, les Cartons du cœur, SOS futures mamans…).

Au service des plus pauvres

Les Conférences Saint-Vincent-de-Paul ne peuvent qu’apporter des aides ponctuelles et ne sauraient offrir un soutien à long terme. Leur but est de donner un coup de main rapidement là où c’est nécessaire. Leurs moyens étant limités, les Conférences offrent un service de dépannages, principalement dans le domaine alimentaire.

En plus de l’aide individuelle, elles interviennent à l’occasion d’actions spéciales deux à trois fois par an, à Noël, à Pâques ou en automne.

Durant cette période de pandémie, les Conférences sont particulièrement sollicitées pour la prise en charge partielle ou totale de primes d’assurance maladie, de loyers en retard, de diverses factures (par exemple le dentiste), de l’achat de vivres, des aides souvent sollicitées à cause d’une diminution, d’une perte de salaire ou dans l’attente de toucher les indemnités journalières du chômage. Les demandes d’aide dans nos Conférences sont en constante augmentation.

Ces dernières souhaitent rester attentives aux besoins des gens, particulièrement de nos aînés afin de pouvoir offrir à chacun accueil, écoute et partage.

Rencontre avec Marguerite Carrupt…

… infirmière indépendante

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur des Deux-Rives (VS), mars 2021

TEXTE ET PHOTOS PAR VÉRONIQUE DENIS

Marguerite Carrupt est infirmière depuis plus de 35 ans. Après plusieurs années
à l’hôpital du Valais, elle complète sa
formation en soins palliatifs et en accompagnement de la personne âgée pour devenir infirmière indépendante. Elle a souhaité en quelque sorte se concentrer sur l’accompagnement des personnes
en fin de vie, car elle considère cette étape ultime primordiale pour toute personne. Un événement l’a fortement marquée :
l’accompagnement de son papa en fin de vie, il y a plus de 20 ans, en collaboration avec l’antenne François-Xavier Bagnoud. Suite à cette expérience forte en émotions, elle a entendu et répondu à cet appel : devenir infirmière indépendante.

Son choix a été aussi motivé par une prise en charge globale, pluridisciplinaire des patients à domicile, se développant sur un temps plus ou moins long, en lien étroit avec la famille et les proches.

Un mot pourrait résumer son travail : RELATION : relation d’aide, d’écoute sans jugement et dans une confiance réciproque. Marguerite précise en disant que l’essentiel de son travail, en plus des gestes techniques et des soins accomplis, consiste à être avec, à rejoindre la personne en souffrance là où elle est et l’accompagner à son rythme, jusqu’où elle veut aller. C’est une adaptation de tous les jours à vivre dans la confiance et l’abandon.

Les personnes qui arrivent au bout de leur chemin de vie sont confrontées à
une souffrance globale : douleurs physiques, souffrance psychologique, sociale (isolement, pertes des contacts) et spirituelle (Qu’ai-je fait de ma vie ?). Seule la personne peut exprimer ce qu’elle ressent. Ce qu’elle vit est parfois d’une violence extrême. Confrontée à ces situations de souffrances intenses, Marguerite se fait proche, chemine avec la personne, lui apporte ses connaissances professionnelles pour soulager, aider, anticiper, planifier les ressources disponibles. La souffrance reste un mystère, individualisé et vécu par chaque personne, de manière différente et particulière.

Croyante et ayant accompli le parcours FAME VI, Marguerite confie son travail, ses patients à la prière. Elle prie avant chaque rencontre, et elle confie à l’amour du Père les personnes décédées. Elle dit trouver dans la prière les gestes appropriés, les attitudes compatissantes pour chaque personne. A sa manière, elle témoigne
de sa foi, non par des discours, mais
par des attitudes ajustées et des actions adaptées à chaque situation.

Merci Marguerite pour le feu sacré qui t’habite : puisse ta passion d’être et de cheminer avec les personnes vers qui
tu es envoyée, se développer et te combler de joie, longtemps encore.

 

Pas un jour sans une ligne

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Unités pastorales du Grand-Fribourg (FR), mars-avril 2021

L’Essentiel Unités pastorales du Grand-Fribourg

Trois curieux avant-bras seront bientôt déposés dans les niches de molasse de la solennelle chapelle du Saint- Sépulcre, à la cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg. Il s’agit des bras-reliquaires du patron de la cathédrale éponyme, saint Nicolas de Myre et de celui du saint patron de la Suisse, saint Nicolas de Flüe. Ces deux reliquaires actuelle- ment gardés dans le trésor de la cathédrale se verront ainsi exposés aux côtés d’un nouveau venu: le bras-reliquaire de saint Pierre Canisius, projet lauréat d’un concours inter- national organisé en 2019 par le Chapitre cathédral.

PAR DANIELE PERNET | PHOTOS : MAURICE PAGE/CATH.CH *

Saint Pierre Canisius, jésuite hollandais du XVIe siècle, grand acteur de la Contre-Réforme à Fribourg (un article lui est dédié en page 16 de ce même numéro), repose depuis près de 400 ans dans l’église du collège Saint-Michel, collège dont il fut le fondateur. En avril 2021, une partie de ses restes mortels sera déposée dans un nouvel écrin pensé et élaboré par l’architecte Marc-Laurent Naef et l’artiste Frédéric Aeby (fig. 1). Leur projet, intitulé Nulla die sine linea (signifiant « pas un jour sans une ligne ») rappelle l’importance de la prédication et de l’écriture pour cet infatigable saint, qui rédige de nombreux ouvrages dans lesquels il défend corps et âme l’attachement aux préceptes catholiques et qui participe également à la création d’une imprimerie en ville de Fribourg.

Les reliques et le reliquaire

Si les reliques sont les fragments d’ossements du corps de saints que les fidèles catholiques vénèrent, les reliquaires en sont les récipients. Souvent richement décorés, ils connaissent diverses formes et permettent la conservation des reliques. Généralement, leur forme renseigne sur les os qu’ils contiennent. Pour les cas fribourgeois de saint Nicolas de Myre et de saint Pierre Canisius, il n’en est pas exactement ainsi : le reliquaire de saint Nicolas renferme depuis le XVIe siècle l’humérus du saint évêque de Myre tandis que le bras reliquaire moderne de saint Pierre Canisius conservera des fémurs, des tibias et deux autres os (à noter que les os de sa tête resteront dans le gisant de l’église Saint-Michel).

Connaître des saints

Dès le 26 avril prochain, les trois saints se verront réunis dans un seul et même lieu et les pèlerins et fidèles pourront alors les vénérer et apprendre à les connaître davantage. Pour le chanoine Claude Ducarroz, en réunissant un éminent évêque d’Orient de l’Antiquité, un laïc suisse de la fin du Moyen Âge père de famille et un jésuite qui guida notre Église dans les voies de la Réforme après le Concile de Trente, on rassemble trois formes de la sainteté, trois grandes vocations. Il ne s’agit ainsi pas tant de vénérer l’objet religieux en tant que tel, mais de faire plus ample connaissance avec des saints de chez nous, souvent méconnus et qui peuvent devenir des exemples de foi pour chacun d’entre nous.

Une main bénissante, celle de l’évêque de Myre, une autre priante, celle du saint suisse originaire du canton d’Obwald et la main de saint Pierre Canisius tenant une plume et s’apprêtant à écrire seront déposées côte à côte (fig. 2) dans la chapelle du Saint-Sépulcre. Le projet lauréat proposé par Marc-Laurent Naef et Frédéric Aeby (fig. 3) consiste en un coffret en aluminium, moins lourd et délicat que la céramique – un tel objet étant amené à être déplacé, par exemple lors d’une procession – en verre antique et en bois (pour la plume). Les trois reliquaires seront placés dans des niches déjà existantes et protégées par des grilles de fer forgé rappelant le travail des artisans de la cathédrale et s’inscrivant ainsi dans une continuité harmonieuse.

Pour les deux artistes, le fait de placer ces reliquaires dans le mur au pied de la tour de la cathédrale est significatif ; ce mouvement vertical, de la terre jusqu’au ciel « transcende les reliques des trois saints avec le thème de la Résurrection ». Il est également très symbolique pour Frédéric Aeby, qui a réalisé dix panneaux explicatifs sur le panorama de la ville de Fribourg et qui a également dessinée l’étiquette du biscôme de la Saint-Nicolas il y a quelques années !

 

Plusieurs visites, publications, vidéos sont prévues à cette occasion, dont la fondation de la nouvelle Province d’Europe centrale des Jésuites sous l’égide de saint Pierre Canisius.

Plus d’informations sur le site jesuites.ch

 

* Les photos sont tirées de l’article de cath.ch à lire sur

https://www.cath.ch/newsf/nouveau-reliquaire-pour-pierre-canisius-a-la-cathedrale-st-nicolas/

 

Souffrir pour être sauvé ?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur des Deux-Rives (VS), mars 2021

TEXTE ET PHOTOS PAR JUDITH BALET HECKENMEYER

Jésus a souffert sous Ponce Pilate, disons-nous en récitant le symbole des apôtres.

Nous souffrons tous. En s’arrêtant un instant dans notre quotidien, nous trouvons facilement une douleur, une souffrance physique ou morale. Certaines restent dans l’ombre, d’autres sont évidentes.

A quoi peut servir la souffrance ? Nous laissons-nous écraser par elle ? Nous inviterait-elle à un dépassement ? Nous pousserait-elle à chercher à être meilleurs ?

Je rechigne à imaginer un Dieu qui serait assis sur son nuage, se délectant de la souffrance de son peuple pour mieux l’accueillir une fois trépassé. Permettez-moi un trait d’humour :

Un homme se réfugie sur le toit de sa maison car il y a une sévère inondation. Des voisins possédant une barque viennent lui demander de se joindre à eux pour aller se mettre en sécurité. L’homme répond : « Je suis très croyant, Dieu me sauvera. » L’eau monte de plus en plus. La protection civile est mise en action et vient trouver notre homme. Il ne veut toujours pas quitter son toit et redit la même phrase. L’eau monte encore et les secours héliportés viennent lui demander de partir. Il refuse toujours, et… il meurt noyé. Arrivé devant Saint Pierre, il est furieux : « Moi, je croyais fermement en Dieu. Il n’a rien fait pour me sauver ! » Sur ce saint Pierre réplique : « Les trois moyens de secours qui sont venus à toi, tu les as refusés. C’est pourtant Dieu qui te les a envoyés ! »

Un des choix de l’homme résiderait-il dans la manière de réagir à la souffrance ? Ce bref instant où tout peut changer. On parle de résilience dans la faculté à rebondir lors de traumatismes. Et si c’était cela être sauvé ? De pouvoir continuer son existence fort des expériences vécues, les utilisant comme des tremplins pour être un peu meilleur, plus aimant, plus tolérant envers soi et envers les autres, en bref plus vivant.

 

Une opportunité de changer

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Unités pastorales du Grand-Fribourg (FR), mars-avril 2021

PAR L’ABBE PHILIPPE BLANC, CURE MODERATEUR DE L’UP NOTRE-DAME
PHOTO : DR

En ces temps qui nous paraissent incertains, nous avons besoin de repères et de lumière. Nous pouvons choisir l’abattement ou le relèvement; le fatalisme ou l’espérance ; la fermeture ou la disponibilité à l’accueil et à l’ouverture. « De cette crise, nous pouvons sortir meilleurs ou pires. Nous pouvons régresser, ou bien nous pouvons créer quelque chose de nouveau. Pour l’instant, ce qu’il nous faut, c’est l’opportunité de changer, de laisser un espace à la nouveauté dont nous avons besoin ».1

Et si nous vivions le temps du carême comme un cadeau que le Seigneur nous fait pour nous rendre disponibles à cette nouveauté qu’il veut pour nous ! Bien souvent nous hésitons devant la nouveauté parce qu’elle évoque l’inconnu, l’inattendu, le surprenant. Nous préférons parfois nos sécurités au point de nous laisser enfermer en nous-mêmes. Ces quarante jours que nous parcourons dans la confiance et la joie nous invitent à la nouveauté de la liberté des enfants de Dieu ; à la nouveauté de la guérison de nos blessures par la tendresse du Seigneur ; à la nouveauté d’une écoute de la Parole de Dieu qui soit créatrice et réconciliatrice ; à la nouveauté de relations fraternelles qui s’enracinent dans l’amour du Père pour tous ses enfants.

Et sur le chemin, la belle figure de saint Joseph nous est proposée. Comme l’écrit le pape François : « Joseph n’est pas un homme passivement résigné. Il est fortement et courageusement engagé ».2 Lui aussi a été confronté à la nouveauté du projet de Dieu et « dans chaque circonstance de sa vie (il) a su prononcer son fiat, tout comme Marie à l’Annonciation, et comme Jésus à Gethsémani ».3

Ce temps de carême, c’est une « opportunité de changer » !… C’est le temps de la nouveauté de la grâce pour un fiat libre et joyeux !

 

1 Pape François, Un temps pour changer, Flammarion, 2020, p. 16.

2 Pape François, Lettre apostolique Avec un cœur de père, Éd. du Cerf, 2020, p. 39.

3 Id., p. 32.

 

40 jours pour revenir à Dieu

La situation sanitaire ne nous empêche pas de vivre le carême, elle nous invite à le faire de manière différente. Les Unités pastorales Notre-Dame et Saint-Joseph ont préparé de nombreuses propositions Covid-compatibles pour vivre ce temps de conversion. Vous trouverez toutes les informations nécessaires sur

– Les feuilles dominicales et les feuillets au fond des églises

– La newsletter et le site décanal : www.decanat-fribourg.ch

– Le site de l’UP Notre-Dame : www.notre-dame-de-fribourg.ch

– Le site de l’UP Saint-Joseph : www.upsaintjoseph.ch

 

Souffrir pour être sauvé…

… Vraiment ?

Tiré du magazine paroixssial L’Essentiel, UP Saint-Barnabé (VD), mars-avril 2021

PAR CORINNE GOSSAUER-PEROZ, AUMÔNIÈRE (ÉGLISE CATHOLIQUE VD) ET AUTEURE DE « GARDE-MOI VIVANT ! VIEILLIR ET LE DIRE »,
PARU EN 2020 AUX ÉDITIONS SAINT-AUGUSTIN
PHOTOS : GRÉGORY ROTH / CATH.CH, CORINNE GOSSAUER-PEROZ

Aumônière dans cinq EMS de la Broye, la souffrance est au cœur de mes visites et des échanges avec les résidents. Les souffrances physiques et leur palette de douleurs anciennes, nouvelles et quotidiennes. Souffrances psychiques quand un événement, un traumatisme, une situation passée ou présente ne cesse de tourmenter l’esprit. Souffrances relationnelles parce que les proches et les contemporains sont décédés, ceux avec lesquels il était possible de dire : « Tu te rappelles… » Souffrances relationnelles quand un enfant (de 60 ans et plus !) ne donne plus de nouvelles, peu importe la raison. Souffrance et solitude commencent par la même lettre…

Pourtant, au cœur de ces souffrances, je vois et j’entends aussi le courage, la dignité, l’endurance, l’espérance et la foi. Je n’entends personne parler de ses souffrances comme une opportunité de « gagner son paradis ». Du reste, je rappellerai que « le Christ a tout accompli » (Evangile de Jean 19, 30). Il a tout porté et donné sa vie pour notre salut.

Dans l’écoute et le partage des souffrances des résidents, il nous arrive souvent de faire ce constat : la foi n’explique pas la souffrance, elle n’apporte pas de réponse et si c’était le cas, les églises seraient pleines !… La phrase de Paul Claudel me semble dire l’essentiel et le mystérieux : « Dieu n’est pas venu supprimer la souffrance. Il n’est même pas venu l’expliquer, mais il est venu la remplir de sa présence ». Jésus, le fils de Dieu, venu aimer et sauver les hommes, a aussi souffert en donnant sa vie. En ayant traversé la souffrance et la mort, Il peut comprendre l’épreuve de tout individu. Sa présence est consolation dans le cœur de tant de personnes que je rencontre.

Avec ou sans souffrance, la foi se nourrit dans et par la prière, la Parole de Dieu et les sacrements. Les EMS ne font pas exception à ces ressources. Dans le cheminement spirituel des personnes, la prière tient une grande place. Elle est ce lieu secret où les cris, les soupirs, les questions (« Quand vas-tu me consoler ? » Psaume 118, 82) et la reconnaissance peuvent se dire. « Si je ne prie pas, je tangue », me disait une nonagénaire. Au cœur des pertes et de la vieillesse, la prière est et demeure un élément vital. « Aux jours de ma vieillesse et de mes cheveux blancs, ne m’abandonne pas, ô mon Dieu ! » (Psaume 70, 18).

 

Au Liban, l’espérance malgré tout

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Nyon-Founex (VD), mars-avril 2021

Le groupe missionnaire a reçu une lettre de Noël de Sœur Jocelyne Joumaah, supérieure générale de la congrégation des Sœurs du Bon Service de Jabboulé, au Liban, qui prennent soin d’orphelins. Cette lettre, que nous reproduisons ci-dessous, témoigne de chrétiens pleins d’espérance malgré les difficultés quotidiennes. Un projet soutenu par le groupe missionnaire.

PAR SŒUR JOCELYNE JOUMAAH
PHOTOS : DR

Amis, joyeux Noël ! Noël n’est pas un moment qui passe. Noël, c’est un état qui nous accompagne lorsque des personnes ont besoin d’un rédempteur, c’est le désir qui habite chacun de nous d’un monde meilleur, c’est Dieu qui se penche à chaque instant sur notre misère pour nous en relever. Dieu a créé la lumière pour qu’elle parle de lui, la lumière du monde, il s’est incarné et est présent à chaque instant, surtout là où les besoins sont les plus grands.

Et notre région a grand besoin de Dieu : en effet, de nombreux événements qui ont touché le pays au cours de l’année écoulée ont accru les traumatismes chez nous, provoquant des niveaux de stress élevés. Nous avons eu des séquelles émotionnelles et physiologiques qui se sont traduites sur notre lieu de travail (colère accrue, irritabilité, performan-
ces réduites, difficultés de concentra-
tion, …). Mais nous essayons toujours de nous relever, de secouer la poussière pour que tout cela n’ait pas un impact trop fort sur notre mission, nos enfants et nos
proches.

Aux côtés d’un troupeau menacé

Chers amis, je vous envoie mes vœux de ce coin de terre le plus ténébreux, mais en même temps le plus illuminé par la joie et la convivialité que les gens s’apportent les uns aux autres, la Bekaa du Nord.

Comment ce passage des ténèbres à la lumière se fait-il chez nous ? Loin des projecteurs, de nombreuses associations déploient de gros efforts pour alléger les souffrances des plus démunis. Plus du tiers des Libanais vivent avec quatre dollars par jour, 10% avec deux dollars seulement. Dans notre région, deux tiers des habitants vivent avec deux dollars par jour; beaucoup de nos connaissances ne disposent même pas d’un dollar par
jour.

C’est pourquoi nous, religieuses de Notre-Dame du Bon Service, avons décidé, une fois de plus, de ne pas abandonner le troupeau aux loups qui le menacent de tous côtés. Nous avons lancé un appel à plusieurs organismes de bienfaisance : ils ont répondu et nous ont soutenues en nous faisant parvenir des colis de toutes sortes. Et si je vous écris cette circulaire, c’est pour partager avec vous les efforts faits et la joie vécue durant cette saison.

Des vêtements pour l’hiver

Notre premier projet fut de distribuer, dimanche 20 décembre, 150 colis aux familles à Jdeideh, Fakiha, Ras Baalbeck, Deir El Ahmar, Ain et Jabboulé. Des représentants des organismes de bienfaisance ont participé à cette action.

Les responsables de l’orphelinat ont organisé une fête pour les enfants et le Père Noël leur a offert des cadeaux qu’ils n’avaient jamais reçus dans leurs familles. A nos voisins syriens dans la détresse, nos soeurs qui travaillent dans le domaine social ont donné des vêtements d’hiver. Nous avons organisé une fête pour leurs enfants à qui nous avons offert des anoraks et des pantalons pour la saison de Noël.

Des amis sont venus me parler de quatre familles pauvres dans le village voisin d’Aïn. Elles ont des enfants handicapés qui passent leur temps allongés sur une vieille couverture, sans chauffage en hiver. Après avoir entendu cela, je suis allée chercher des tapis et des matelas au couvent, puis je les leur ai envoyés. J’ai aussi pu prélever une somme d’argent sur notre budget pour leur procurer du mazout afin qu’ils puissent se chauffer un certain temps.

Et comme le Bon Dieu nous demande de nous donner au maximum, il nous a envoyé à travers les gendarmes des nouveau-nés trouvés dans les poubelles et les rues. Maintenant, nous prenons soin de deux petites filles de cinq et six mois. Un jour, l’une d’elles a dû être opérée subitement suite à des problèmes intestinaux. Après une longue journée, j’ai dû courir à Beyrouth avec une autre soeur pour l’amener à l’hôpital de Baalbeck. Nous avons attendu toute la nuit jusqu’à ce que l’opération soit terminée.

Une joie partagée

A l’école, les élèves craignaient d’attraper le coronavirus. La mise en place des mesures sanitaires nous a demandé beaucoup d’efforts. Les enfants, eux, ne pensaient pas pouvoir se réjouir à Noël. Nous avons commencé par décorer les classes. Nous leur avons appris des chants de Noël ; nous avons mis de la musique à leur arrivée en classe et pendant la récréation.

Quand nous leur avons annoncé qu’ils pouvaient mettre leurs habits de Père Noël, certains n’ont pas cru qu’il était encore possible de faire la fête, d’autres ont sauté de joie, une lueur de vie a brillé dans leurs yeux, ils ont compris qu’avant de nous quitter pour les vacances de Noël, nous allions goûter une fois encore à la joie que nous avions l’habitude de vivre en cette saison.

Après le départ des élèves, les professeurs se sont rassemblés avec les religieuses à la chapelle pour vivre une messe. Nous avons rendu grâce pour tout ce que nous avons pu faire durant le premier semestre et pour demander à Dieu la force et la sagesse afin de rendre l’année 2021 plus fructueuse et plus bienfaisante que 2020. Nous avons prié pour tous nos bienfaiteurs et tous ceux qui dans ce pays soutiennent l’éducation et les enfants, souvent oubliés par les chefs d’Etat et ceux qui ne cherchent que le profit et la renommée.

Pendant ce temps, quelques sœurs préparaient le buffet qui nous a rassemblés ensuite. Nous nous sommes souhaité une bonne fête de Noël. C’était notre première réunion depuis le début de l’année.

Merci à vous

Au nom de tous les élèves, au nom de leurs parents, au nom des professeurs et du corps administratif de l’école, je m’adresse à vous, chers amis, avec les plus profonds sentiments de reconnaissance. Si nous pouvons continuer notre travail, c’est grâce à vos efforts et votre soutien. Si je partage la vie de chez nous avec vous, c’est parce que vous en faites partie même si vous êtes éloignés de nous géographiquement. Mais vous venez nous rejoindre dans ce dont nous avons besoin pour donner à notre vie le goût de Noël.

Que l’Emmanuel soit lumière pour toute l’humanité blessée. Qu’il assouplisse nos cœurs souvent endurcis et égoïstes et qu’il fasse de nous des instruments de son amour. Qu’à travers nos pauvres visages, il donne son sourire aux enfants du monde entier, à ceux qui sont abandonnés et à ceux qui ont subi des violences. Qu’à travers nos faibles bras, il soigne les malades. Par notre fragile compagnie, qu’il soit proche des personnes âgées et de celles qui sont seules, des migrants, des marginalisés. En ce temps de fête, qu’il donne à tous sa tendresse. Et qu’il illumine les ténèbres de ce monde.

 

Souffrir pour être sauvé ?

La théologie vit un immense renouveau durant tout le XXe siècle. Un des grands apports de cet élan est la découverte que le Christ n'est pas venu pour expier une quelconque dette que les hommes avaient à l’égard de Dieu – comme cela avait été compris jusque-là – mais pour que les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance (Jn 10, 10).
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Economies d’énergie : la paroisse s’engage

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Nyon-Founex (VD), mars-avril 2021

Les paroissiens sont de plus en plus sensibles aux économies d’énergie et au respect de la nature. Le Conseil de paroisse aussi, qui s’interroge sur les immeubles de la paroisse.

PAR OLIVIER CAZELLES | PHOTO : ANNE DE TREVERRET

Cela se remarque dans les conversations et les décisions : on pense à remplacer des fenêtres, on envisage de refaire l’isolation du toit, des murs, on achète une voiture électrique. On prend davantage les transports publics. L’application TooGoodToGo est très intéressante pour les clients et les magasins : elle permet de valoriser et de consommer les invendus qui sinon finiraient à la poubelle. Mais les déchets, hélas, ne vont pas toujours à la poubelle : quel plaisir, alors, de voir un voisin qui n’est pas concierge, main gantée, ramasser spontanément des masques de protection, des canettes vides, de petits emballages en carton, des sacs plastiques écrasés et même les mégots abandonnés près de notre immeuble.

Une meilleure isolation

Le Conseil de paroisse se pose les mêmes questions quant aux immeubles appartenant à la paroisse. A chaque rénovation revient la même interrogation : « Que peut-on faire de plus ? ». La loi sur les constructions et sur les restaurations est de plus en plus précise : elle fixe de nouvelles normes, exige des travaux d’isolation et définit la qualité des matériaux à employer. Ainsi, lors de la rénovation de la grande salle, et plus tard de la cure, toutes les fenêtres ont-elles été changées pour assurer une meilleure isolation thermique.

Lors des travaux à l’église à la Colombière, le Conseil de paroisse a mandaté un ingénieur pour proposer des mesures, car le toit est mal isolé. Ce travail est trop important pour être engagé maintenant. Quant à la future église de Gland, elle tient compte des nouvelles exigences : des panneaux solaires photovoltaïques sont intégrés au projet.

Les mentalités évoluent, nos points de vue changent. Nous commençons à voir les choses autrement et ce qui était impensable devient possible. Ce n’est qu’un début !

 

Un aumônier devenu patient

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel,secteur Aigle (VD), mars-avril 2021

TRAVERSER LE COVID – Les rescapés du Covid ont une convalescence longue et difficile. Lorsque le patient est précisément celui qui accompagne spirituellement les malades depuis des années, cela colore sensiblement la situation…

TEXTE ET PHOTOS PAR VINCENT LAFARGUE

L’abbé Gérald Carrel est aumônier d’hôpital depuis plus de vingt-cinq ans. D’abord à Genève puis à Lausanne, il est actuellement responsable de l’équipe œcuménique travaillant à l’Hôpital Riviera-Chablais. Lorsqu’il a été testé positif au Covid en décembre, il a dû être hospitalisé aux
soins intensifs puis intubé et placé en coma artificiel pendant plus d’une semaine.

Se relier à Dieu
« Aux pires heures, je priais très simplement. » Il rit et ajoute : « Mais c’était à ras les pâquerettes, Notre Père, Je vous salue, Gloire à Dieu, Angelus… un élan vers Dieu, oui, mais depuis les profondeurs ! Je le priais parce que c’est ce qui a donné sens à toute ma vie et pour rester relié, c’est le sens du mot « religion » d’ailleurs. Je savais que je n’étais pas tout seul et j’ai peu à peu découvert le très grand nombre de personnes qui ont prié pour ma guérison. Impressionnant et très touchant ! J’insisterai désormais auprès des patients en leur disant : vous n’êtes pas seuls. »

Peur et culpabilité
Gérald Carrel découvre une peur qu’il ne connaissait pas. « Petit à petit, tu te rends compte que tu as frôlé la mort et cela fait peur. J’étais pendant quelque temps entre la mort et la vie, je ne voyais que quelques personnes, déguisées en cosmonautes. C’est angoissant. » Il découvre aussi une forme de culpabilité face à ses proches : « Il y a tout ce que j’ai subi… mais en tant qu’être de relation, je découvre aussi tout ce que je leur ai fait subir, sans en être responsable mais en étant en partie la cause de leurs tourments. »

La qualité de présence des soignants
L’abbé Gérald veut surtout mettre l’accent sur ces anges qui s’activaient autour de lui : « La qualité du personnel soignant est remarquable : soutien, optimisme, joie, humour… une attention à l’autre bien au-delà du geste médico-technique ! J’aimerais les remercier et leur dire de continuer à être empreints d’humanité. »

Humble dépendance
« J’ai aussi découvert ce que c’est que
d’être dépendant. Etre levé et lavé par d’autres, avec une immense douceur, fait naître une vraie humilité et non une humiliation, contrairement à ce que l’on pourrait croire. Une relation se crée entre le soignant et le patient mais la difficulté est de ne jamais savoir sur lequel on
va tomber, vu le roulement des équipes. Une nouvelle relation est chaque fois à reconstruire. Là encore, je comprendrai beaucoup mieux à l’avenir, pour l’avoir vécu de l’intérieur, ce que vivent les patients que je rencontre comme aumônier. »

 

L’œcuménisme, une réalité

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Nyon-Founex (VD), mars-avril 2021

La Semaine de prière pour l’unité des chrétiens a été célébrée du 18 au 25 janvier sur le thème « Demeurez dans mon amour et vous porterez du fruit en abondance » (Jean 15, 5-9). A Gland, chaque soir, du 18 au 22 janvier, des membres des différentes Eglises
se sont retrouvés à la chapelle Saint-Jean-Baptiste.

TEXTE ET PHOTO PAR MARLÈNE ADAMAH

Des membres des Eglises de Gland se sont retrouvés de 19h30 à 20h15 du 18 au
22 janvier à la chapelle Saint-Jean-Baptiste pour partager et réfléchir sur un texte biblique, puis prier ensemble. Un cadeau offert par nos aînés qui ont cultivé l’œcuménisme durant ces quarante dernières années.

Œcuménisme domestique

Marlène Adamah, membre de la communauté catholique et du groupe inter-Eglises, partage ici ce qu’elle vit au sein de ce groupe et sa communion profonde avec ses frères et sœurs des autres Eglises chrétiennes.

« Je suis issue d’une famille catholique du sud-ouest du Bénin, en Afrique de l’Ouest. J’ai fait mes premiers pas dans la foi à l’église Saint-Martin de Cotonou, la capitale : catéchèse, première communion et confirmation.

Très tôt mon père, ancien séminariste, avait à cœur que ses enfants évoluent dans les groupes et mouvements de la paroisse. Il nous a inscrits dans le mouvement cœurs vaillants âmes vaillantes (CVAV). A 16 ans, je suis entrée dans le chœur des jeunes tout en continuant à accompagner des enfants au sein du CVAV.

Mes études m’ont ensuite conduite en Allemagne. J’y ai rencontré mon mari évangélique, que j’ai rejoint plus tard à Gland. Je suis devenue membre de l’Eglise catholique de Gland, mon mari membre de l’Eglise évangélique Arc-en-ciel de Gland. Mon expérience œcuménique domestique m’a permis de m’ouvrir davantage à d’autres confessions religieuses, car à Gland, nous avons la chance de collaborer avec d’autres Eglises chrétiennes – réformée, adventiste et évangélique.

Pour échanger et collaborer, les différentes communautés chrétiennes de Gland se retrouvent dans le groupe inter-Eglises. C’est un creuset œcuménique où elles vivent l’unité dans la diversité, toutes appartenant au Corps du Christ. Ce groupe collabore avec les représentants de la commune.

 

Le groupe inter-Eglises

PAR MARLÈNE ADAMAH
PHOTO : DR

Quelles Eglises sont membres du groupe inter-Eglises ?

Le groupe inter-Eglises, un groupe intercommunautaire à vocation œcuménique, regroupait jusqu’en 2018 quatre Eglises : catholique, évangélique réformée, adventiste et évangélique Arc-en-ciel. S’y sont ajoutés le Gospel Center et l’église @home.

Quelles sont les actions et les activités du groupe ?

Ses membres se rencontrent périodiquement pour échanger et réfléchir sur des projets œcuméniques qui permettent aux fidèles des Eglises de Gland de se retrouver pour s’enrichir des différences et des richesses des uns et des autres.

Chaque année, le groupe inter-Eglises prépare la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, au cours de laquelle une communauté accueille, du lundi au vendredi, toutes les autres communautés pour des soirées de prière. La prière du vendredi soir est dirigée par le groupe GRACE, qui rassemble les jeunes des six communautés. La semaine est clôturée, le dimanche, par une célébration œcuménique. En raison de la pandémie, cette célébration a été retransmise cette année en streaming des locaux de l’Eglise Gospel Center La Côte.

Une célébration œcuménique a lieu chaque année durant le carême. Elle réunit surtout des réformés et des catholiques qui soutiennent ensemble un projet de développement. A l’issue de la célébration, une soupe est servie.

Le dimanche le plus proche du 1er août a lieu une célébration œcuménique et patriotique à laquelle participent toutes les Eglises membres ainsi que la fanfare de Gland. La prédication est faite à tour de rôle par un pasteur et un prêtre. Le 1er août, lors de la cérémonie officielle organisée par la commune, un prêtre ou un pasteur est invité à prononcer un discours.

L’éveil à la foi est aussi œcuménique. Les enfants de 2 à 6 ans des différentes communautés chrétiennes se retrouvent pour des activités ludiques autour de passages de la Bible. Les enfants sont accompagnés par leurs parents qui restent avec eux tout au long de la rencontre. Les rencontres ont lieu quatre samedis par an de 10h15 à 12h.

Enfin, une fois par an, le groupe invite la compagnie de la Marelle pour une pièce de théâtre à thème (spirituel ou social) à l’issue de laquelle il y a un moment d’échange avec les artistes. D’autres activités ont eu lieu ces dernières années, comme la crèche vivante devant le temple en décembre 2019 et la lecture de la Bible en continu durant 96 heures.

Autant de projets qui permettent de vivre une authentique collaboration et des échanges vrais. Réalisant l’unité dans la diversité. Car nous sommes tous membres du même corps, le Corps du Christ.

 

Une histoire de vie marquée par la maladie Stéphanie Schmäh témoigne

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte-Claire (FR), mars-avril 2021

TEXTE ET PHOTO PAR JOËL BIELMANN

Aucune maladie d’enfance (oreillons, coqueluche, varicelle…) ne l’a épargnée. Cela a induit bien des absences à l’école. A l’âge de 19 ans, elle perd 22 kilos en deux semaines. Les médecins s’interrogent : serait-ce dû à la drogue ? Faut-il conclure à une fragilité psychique particulière ? Finalement, 33 ulcères internes sont découverts. C’est cancéreux. Les médicaments prescrits à très hautes doses, brûlent son estomac au troisième degré. Il lui est impossible de manger. Elle est nourrie grâce à une sonde une période durant.

Aujourd’hui, Stéphanie Schmäh approche des 50 ans. Depuis sa jeunesse, elle ne cesse de combattre les maladies. Cancers et autres maux se sont enchaînés. Stéphanie ne connaît pas le nombre d’interventions chirurgicales qu’elle a subies. Durant des années, elle aspire fortement à devenir mère. Après plusieurs fausses couches, des soins invasifs l’obligent à vivre le deuil de la maternité.

A 34 ans, son activité professionnelle – elle est secrétaire de direction dans une société internationale – la conduit en Chine. Une très forte fièvre, des difficultés respiratoires et l’impossibilité de se mouvoir impliquent l’appel à une ambulance. Cette dernière arrive le lendemain sur les lieux, juste au moment où Stéphanie est frappée d’un infarctus. Le plongeon dans l’inconscience amène alors un étrange rêve. « Je disais au revoir à tout le monde, dit Stéphanie : aux membres de ma famille, à mes amis, aux personnes rencontrées en Chine. Je devais me dépêcher, n’oublier personne. Et tout à coup, ce fut la nuit totale. Je me voyais dans un train qui roulait à toute allure. Le crash semblait inévitable. Subitement vint la lumière. Je me suis réveillée, ai pris un peu de temps pour réaliser où je me trouvais. Puis ce fut l’évidence : c’était Dieu, la Trinité, les anges… comment dire… la puissance du Seigneur était entrée en moi. » L’expérience relève manifestement de l’indicible. Durant tout le trajet en ambulance, Stéphanie a serré la main d’un soignant à un point tel que les os en furent brisés. Elle a été transportée par l’une des deux ambulances que comptait l’île chinoise de deux millions d’habitants. Elle a bénéficié du seul défibrillateur dont disposait l’hôpital et qui se trouvait exceptionnellement dans l’ambulance. Un vrai miracle !

Depuis lors, tout a changé pour Stéphanie. Les sacrements, la prière, l’éducation religieuse d’antan ont pris des couleurs totalement renouvelées. Dès son retour de Chine, elle a été hospitalisée durant six mois. Elle recevait alors chaque jour la communion. Elle déclare avoir demandé au Seigneur pourquoi elle a été choisie pour vivre tant d’épreuves. « J’ai compris, ajoute-t-elle, que je dois être généreuse, aider mon prochain, prier pour les malades, la justice et entre autres pour mes ennemis, garder le sourire et la joie de vivre. » Sa générosité se concrétise par divers engagements personnels. Bénévole, elle est sacristine à l’église du Saint-Sacrement à Marly et membre de l’équipe de préparation au baptême pour notre unité pastorale.

« Il existe manifestement un registre chrétien comme un appel à faire face à la souffrance, à mystérieusement aussi s’y confronter et la vivre comme un possible espace de grâce sans pour autant la rechercher pour elle-même.1 » Stéphanie, par votre témoignage en paroles et en actes, vous nous laissez entrevoir ce « possible espace de grâce ». Merci à vous !

 

1 Dominique Jacquemin, La souffrance : une porte vers le ciel ? Revue Lumen Vitae, n° 3, 2016, p. 290.

«Souffrir pour être sauvé?»

Entretien avec l’iman Warith Deen Mohammed avant son discours à 3000 personnes dans la mosquée de Harlem (New-York) en 1997.

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Clins Dieu sur les Contrées (VS), mars 2021

Par l’abbé Etienne Catzeflis
Photo: DR

Puisse cette page participer un peu au délicat éclairage de l’abbé Amherdt dans l’Essentiel de ce mois sur le sujet de la souffrance. Il me plaît de redonner simplement diverses considérations de Chiara Lubich 1 (CL) sur la « face cachée » de la spiritualité de l’unité, prônée par le Mouvement des Focolari.

Car c’est habituellement un « château extérieur » plutôt souriant, jovial, plein d’optimisme (certains y voient même de la naïveté), que nous observons chez les membres et dans les réalisations de cette OEuvre, connue pour son dialogue à 360 degrés avec les hommes et femmes, quelles que soient leurs religions ou leurs convictions spirituelles.

Dans une série de conseils pratiques CL précise : « On ne peut pas aimer la souffrance pour elle-même, parce qu’elle est un nonêtre (…). Par contre, c’est Jésus crucifié et abandonné que nous pouvons aimer. Il est présent en toute souffrance et en toute personne qui souffre. »

« Jésus crucifié et abandonné » est l’image qu’elle garde constamment présente à son esprit et à son coeur. Le Maître est tendu vers son « heure », celle de sa Passion (Mc 14,35), qui est celle de sa glorification (Jn 17,1) ; pour Le suivre, Il nous invite à renoncer chacun à soi-même et prendre sa propre croix, Il rappelle (non sans s’émouvoir) la nécessité que le grain de blé jeté en terre meure pour porter du fruit en abondance (Jn 12,24).

Il s’agit donc de comprendre que sa croix et sa mort à Lui sont la réalité du plus grand amour. Nous nous sommes dit : « C’est dans l’abandon que Jésus a le plus souffert. Suivons-le donc là. A l’époque, ce n’était que des mots, ensuite c’est devenu la réalité. »

Pratiquement, « comment donc nous comporter lorsque la douleur se présente ? Nous pouvons nous recueillir et dire :’ Jésus, je veux Te suivre, même sur la croix, même abandonné. Or voilà que j’en ai l’occasion. Je T’offre cette souffrance, je suis heureux d’avoir cette souffrance à T’offrir. ’ Ensuite nous nous mettons à aimer le frère, ou bien nous continuons à faire la volonté de Dieu, quelle qu’elle soit. »

Convaincue par l’expérience, elle affirme : « De fait, si on se jette à accueillir, à ‘ embrasser ’ la croix, on ne trouve pas la souffrance, mais bien plutôt l’amour : on trouve Dieu, donc la joie. (…) Essayez de vivre ainsi, vous serez surpris ! » Et elle appuie : « Aimer Jésus abandonné en essayant de le faire (…) toujours, tout de suite, avec joie. Le matin je me consacre donc à nouveau à Jésus abandonné. Je veux, si possible, L’aimer encore plus fréquemment, le faire encore plus vite et ‘ avec joie ’ ».

Il n’est pas étonnant que de telles paroles, reposant sur la Parole de Dieu et sur la constance de la pratique, aient un fort retentissement sur diverses autres spiritualités, notamment asiatiques, qui s’interrogent sur cette dimension universelle de la souffrance.

1 Fondatrice de l’Oeuvre de Marie, nom sous lequel le Mouvement a été approuvé par l’Eglise catholique. Les citations viennent toutes du petit opuscule: Chiara Lubich, La Souffrance, Nouvelle Cité, 1998, pages 9, 63, 19, 30, 34).

Le temps du courage

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Nyon-Founex (VD), mars-avril 2021

PAR GENEVIÈVE DE SIMONE-CORNET
PHOTO : JEAN-CLAUDE GADMER

« Bon courage ! » Combien de fois, sortant de la messe, n’ai-je pas entendu cette exhortation à ne pas baisser les bras alors que la Covid-19 ne nous lâche pas, prolongeant les restrictions ? C’est que s’installe une fatigue psychologique qui rabote les bonnes volontés les plus enthousiastes.

Et voilà que nous chrétiens sommes entrés dans le temps du Carême… mais à quoi renoncer encore alors que la pandémie nous prive de relations sociales et de culture ? De quoi nous passer alors que nous peinons à retrouver la communauté, essentielle à notre vie chrétienne ? Où puiser courage pour repartir ?

Et si ce temps si étrange était propice au changement ? Le pape François en est si convaincu qu’il nous a offert, l’an dernier, ses propres réflexions sur la Covid-19 nées de conversations avec le journaliste britannique Austen Ivereigh sous le titre « Un temps pour changer. Viens, parlons, osons rêver… » (Flammarion). Un livre tonique qui invite au déplacement.

Au fil des chapitres qui le composent – un temps pour voir, un temps pour choisir, un temps pour agir –, François invite à « laisser un espace à la nouveauté » : « Soyez les créateurs de votre avenir ». Pour cela « il nous fait voir clair, bien choisir et agir correctement ». Commencer par regarder la réalité qui nous entoure, nous laisser toucher par elle et nous interroger : « Que pouvons-nous faire ? Comment puis-je aider ? » pour bâtir une culture du service et de la rencontre. Puis discerner « les chemins du bien qui mènent à l’avenir » en nous appuyant sur la dignité de la personne, les Béatitudes et la doctrine sociale de l’Eglise. Enfin, poser des gestes concrets : « Pour agir, tu dois te concentrer sur les petites actions concrètes et positives que tu peux entreprendre, en semant l’espoir ou en travaillant pour la justice ».

Beau programme ! A condition de nous ouvrir à l’action de l’Esprit pour « explorer des endroits que nous n’avions jamais remarqués auparavant ». Pour mettre en chantier des nouveautés qui « débordent de nos schémas et de nos catégories mentales ». « Laisse-toi entraîner, secouer, défier », lance le pape, décentre-toi, « ouvre des portes et des fenêtres ».

Un programme pour ici et maintenant, et pour chacun de nous. En paroisse, au travail, à la maison. Retroussons nos manches, il y a encore tant à inventer dans le tissu du quotidien ! Tant de couleurs neuves à trouver ensemble pour faire de ce temps le terreau d’une société de fraternité et de solidarité.

 

Vivre en témoin du Christ aujourd’hui, un défi ?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Troinex, Veyrier-Vessy et Compesières (GE), mars 2021

PAR ISABELLE HIRT
PHOTO : DR

L’humanité tout entière vient de vivre, et vit encore pour un temps, une épreuve. L’isolement, la solitude, la peur, la souffrance, l’appauvrissement, la précarité, la mort, l’acceptation d’une situation qui nous échappe.

Dans cette même période, nos communautés de Veyrier-Troinex -Compesières connaissent une mutation majeure. Notre Unité pastorale Salève se trouve unie à l’Unité pastorale Carouge-Acacias. Une évolution conséquente à laquelle nous adhérons avec plus ou moins d’enthousiasme et beaucoup d’appréhension, mais qui, néanmoins, requiert une participation active de notre
part.

Enfin, dans quelques semaines, les chrétiens du monde entier commémoreront Pâques, la Passion et la Résurrection de notre Sauveur, Jésus-Christ.

Ces trois événements nous rappellent qu’ici-bas, tout a une fin, que la vie est une succession de pertes et de ruptures, et que notre chemin sur cette terre est semé de peurs, de renoncement et de souffrances. Or, le message au cœur de notre foi, la mort et la Résurrection du Christ, ainsi que sa vie et sa Parole, nous révèle que notre Père Créateur n’est pas à la source du mal, de la souffrance ou de l’angoisse et que ces états de vie ne lui font aucun plaisir, mais au contraire l’attristent.

Quand on appréhende le mal de l’extérieur, trois possibilités s’offrent à nous spontanément : la première consiste à se résigner, la deuxième à se révolter et la troisième à désespérer. Ce sont en réalité des impasses. En bref, soit notre résignation justifie le mal pour vivre, soit on rejette la vie pour le rejeter, soit on désespère pour ne pas le justifier ni rejeter la vie ! !

Les réponses apportées longtemps par l’Eglise ne sont pas satisfaisantes non plus. On ne paie pas pour le mal provoqué par les générations antérieures, ni pour le mal que nous avons pu faire et encore moins pour gagner une vie meilleure. Jamais le message de l’Evangile n’a été tel.

La réponse à la souffrance ne se trouve pas hors de nous, mais en nous. Il n’y a pas de solution, nous sommes la solution. Le mot « martyr » vient du grec et signifie « témoin », il n’implique aucun masochisme ! Alors ouvrons-nous à cette minuscule part de l’Amour infini de Dieu qui est en chacun d’entre nous, laissons-la rayonner et aspirons uniquement à sa croissance. C’est ainsi et seulement ainsi que nous nous ouvrirons à Son véritable dessein, celui de faire de nous des êtres vivants, ses enfants dignes d’entrer dans sa Gloire. Job, Jésus-Christ et des témoins de tous les temps nous ont montré et nous montrent encore le chemin.

Un chemin vers la liberté

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Clins Dieu sur les Contrées (VS), mars 2021

Qui peut imaginer le chemin de souffrance et les traumatismes que vivent les migrants ? Chacun d’eux vit une histoire unique et peu d’entre eux osent s’exprimer sur ce qu’ils ont dû vivre pour échapper à l’horreur de leur quotidien. Efrem livre avec émotion son récit poignant.

Par Efrem Ghirmay
Photos: DR, Unicef

Le chemin de souffrance pour être sauvé, ici, dans ce témoignage est un chemin pour la liberté…

Voici l’histoire d’Efrem, jeune érythréen, qui a dû déserter son armée car accusé d’avoir critiqué son gouvernement. Pour lui, alors, plus d’autres choix que de s’enfuir…

« Je suis né en 1996 à Asmara, capitale de l’Erythrée. J’ai eu la chance d’aller à l’école. Comme tous les jeunes de mon pays, j’ai dû aller à l’armée en continuant les études car le gouvernement l’exige.

Un soir, j’étais avec des amis et nous discutions. Soudain un responsable vint vers nous et nous accusa de comploter contre l’armée. Nous nous sommes défendus mais il n’a rien voulu en savoir et nous avons été battus. J’étais très en colère de voir que notre parole n’avait pas d’importance. Après quelques jours, un chef nous a dit qu’on allait nous interroger. J’ai eu très peur, je savais qu’on allait nous mettre en prison. Ma situation était désespérée : une seule chose : s’enfuir…

Nous étions 5 jeunes à partir de nuit de Sawa vers le Soudan. Les soldats, qui ont remarqué notre fuite, ont commencé à tirer vers nous et des balles tombaient dans le sable devant moi. J’avais très peur et j’ai couru…

On a marché pendant 5 jours par grande chaleur tout en se cachant dans les forêts et les rochers avec pour toute nourriture quelques dattes. On avait très soif. Heureusement, nous avons trouvé un endroit humide où des dromadaires avaient dû boire. Nous avons creusé et trouvé de l’eau très épaisse car mélangée avec du sable… Nous nous sommes presque battus pour boire ce liquide blanchâtre qui nous a sauvé la vie… La sensation de soif est une souffrance terrible.

Arrivés enfin à Kassala au Soudan, on s’est fait rattraper par les policiers qui nous ont demandé de réciter les prières des musulmans mais comme je suis chrétien, j’ai été vendu à la mafia du pays.

J’ai passé plusieurs jours en prison attaché avec un autre chrétien. Les gardiens de cette prison nous battaient. Plus tard, j’ai pu rejoindre Kartoum, capitale du Soudan. J’y ai vécu quelque temps mais jamais en sécurité. Avec d’autres réfugiés, j’ai trouvé des passeurs qui nous ont emmenés en voiture jusqu’en Lybie. Ils nous ont bandé les yeux pour que l’on ne connaisse ni le chemin ni les passeurs…Le voyage a duré 5 jours très difficiles, peu de nourriture et d’eau.

Nous sommes enfin arrivés en Lybie et là, les passeurs nous ont mis directement dans une prison pour qu’on leur paie le voyage. Ils téléphonaient à nos parents en nous battant et leur faisaient peur… Je suis resté plusieurs semaines dans cette prison dans des conditions difficiles.

Enfin, j’ai pu partir dans un camion qui, pour tromper la police, transportait des cailloux. Nous étions cachés sous une séparation de fer, accroupis les uns contre les autres, avalant énormément de poussière et cela durant des heures…Ce terrible voyage a duré 6 jours.

Durant ce trajet, des gens armés nous ont arrêtés et nous ont demandé notre religion et notre pays. J’avais très peur et je croyais que c’était mon dernier jour car on égorgeait beaucoup de chrétiens en Lybie.

Arrivés à Tripoli au bord de la mer Méditerranée, ils nous ont mis à nouveau dans une prison pour payer le passage de Libye jusqu’en Italie. Dans cette terrible prison, il y avait des gens qui souffraient beaucoup, qui étaient malades et même qui mouraient…

J’avais très peur et j’avais tout le temps faim, j’avais la peau qui me grattait, je me suis dit plusieurs fois « pourquoi suis-je venu jusqu’ici… » Après plusieurs mois, mes parents ont payé le voyage… Enfin ! Un soir, ils nous ont pris et nous ont mis dans un bateau. Nous étions plus de 300, très serrés, adultes, jeunes et enfants.

Les passeurs ont expliqué à un passager comment conduire le bateau et ils nous ont envoyés vers l’inconnu.

Une maman m’a donné un de ses petits enfants sur mes genoux. Nous avons voyagé toute la nuit sans lumière, nous n’avions ni nourriture ni eau, il faisait froid et j’ai pensé « C’est peut-être ma dernière nuit ».

Le lendemain, un grand bateau est venu nous sauver juste à temps…Il y avait de l’eau qui rentrait dans la coque du bateau. Ils nous ont embarqués jusqu’en Sicile… et quelques jours plus tard, je suis arrivé à Rome puis en train jusqu’à Milan. Ensuite je suis arrivé en Suisse où j’ai vécu dans plusieurs foyers pour réfugiés pendant 2 ans. Depuis mars 2017, j’habite dans une famille d’accueil où j’ai appris le français et je fais un apprentissage d’assistant en soins… je fais même partie d’une fanfare où j’ai trouvé des amis… »

Prier avec saint Joseph

Joseph, frère des réfugiés
L’Ange du Seigneur apparaît en songe à Joseph et lui dit : « Lève-toi, prends l’Enfant et sa mère et fuis en Egypte, car Hérode va rechercher l’Enfant pour le faire périr » (Mt 2,13)

Joseph, tu pars vers l’inconnu pour sauver le fils de Marie. Saint Joseph, apprends-nous ce que veut dire être réfugié, persécuté, exilé. Donne-nous d’être proches de ceux qui ont dû tout quitter : familles, amis, situation, pays… Ouvre notre coeur à l’accueil de ceux qui souffrent dans leur âme et dans leur corps, de la misère ou de la famine, de la torture et de toute violence.

Joseph, frère des réfugiés, apprends-nous à accueillir la volonté de Dieu.

Nyon, une paroisse multiculturelle

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Nyon-Founex (VD), mars-avril 2021

Le samedi soir et le dimanche matin, l’église de la Colombière accueille, pour des messes, les communautés espagnole, portugaise et italienne de la région.
Et le dimanche après-midi, deux fois par mois, la communauté coréenne. Espagnols et Portugais prennent la plume, dans ce numéro, pour se présenter.

PAR ELVIRA RÖLLI-PEREZ, COPRÉSIDENTE | PHOTO : NÉLIDA RUIZ

La communauté espagnole de Nyon

La communauté espagnole de Nyon appartient à la Mission catholique de langue espagnole du canton de Vaud, composée des communautés de Lausanne-Renens-Morges, Vevey-Montreux-Aigle, Yverdon et Nyon. Sa finalité est d’accueillir, d’accompagner et de servir les personnes de langue espagnole résidant dans le canton de Vaud. On y trouve
trois catégories de membres : des Espagnols, des Latino-Américains et des personnes de diverses nationalités ayant vécu dans un pays hispanophone ou / et
ayant un lien familial avec un tel pays et, de ce fait, se sentant attachées à la communauté.

Ouvriers en quête de travail

Les premiers émigrants espagnols arrivent à Genève en 1957. A partir de cette date, et de manière progressive, entrent en Suisse des milliers d’ouvriers, hommes et femmes, de toutes les régions d’Espagne. Certains ont un contrat de travail fixe, d’autres en cherchent un. La majorité possède le fameux et triste permis temporaire de saisonnier. Tous arrivent en train à Genève et une fois sur le quai, ils subissent un lourd examen médical.

Le 1er août 1960 est créée l’Association de la Mission catholique de langue espagnole de Genève : la mission acquiert une personnalité juridique aux yeux de l’Etat de Genève. Les premiers prêtres à travailler au sein de cette mission sont des religieux de l’ordre des Servites de Marie. C’est ainsi que naît, cette année-là, la première mission catholique espagnole. En 1958, on trouvait déjà une présence pastorale pour les émigrants espagnols de Lausanne.

Nombreux changements

La Mission de Nyon est fondée en 1975 sous l’impulsion de l’abbé José Maria Catalán, originaire de Navarre. Il guidera la communauté espagnole de Nyon jusqu’en 2011, créant l’association des familles de langue espagnole, organisant avec elle les fêtes de fin d’année et des cours de flamenco. Puis, jusqu’à aujourd’hui, plusieurs prêtres se succèdent, apportant de nouvelles dynamiques.

Nous gardons un magnifique souvenir du Père Willinton López Vega, arrivé chez nous en 2014. Il a insufflé un bel élan de renouveau en mettant en place une catéchèse et une liturgie accessibles aux enfants avec de belles messes des familles. C’est grâce à lui que nous avons découvert Rafael Zamora, animateur de la chorale, merveilleux chanteur et guitariste.

Aujourd’hui, notre communauté traverse une période difficile, car beaucoup de personnes très engagées dans l’animation sont reparties chez elles (Amérique du Sud, Espagne). Il y a aussi eu beaucoup de changements au niveau des prêtres, ce qui ne facilite pas la continuité.

Une fois que la situation sanitaire si exceptionnelle et bouleversante que nous traversons sera passée, nous espérons pouvoir mettre à nouveau en place la catéchèse et les fêtes qui réunissaient nos fidèles: fête de Noël, kermesse et autres réunions conviviales. Nous y arriverons tous ensemble.

 

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Campagne de Carême : la justice climatique

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte-Claire (FR), mars-avril 2021

PAR RAÏSSA LARROSA (VOIR-ET-AGIR.CH/INFO-CAMPAGNE)
PHOTO : FLICKR.COM

Affiche Carême 2021

La Campagne œcuménique 2021, qui se déroule du 17 février au 4 avril, braque les projecteurs sur la justice climatique […]. Les populations des pays du Sud souffrent déjà cruellement des conséquences des changements climatiques. Pain pour le prochain, Action de Carême et Etre Partenaires exigent que les pays responsables de la majeure partie des émissions de gaz à effet de serre assument leurs responsabilités […]. Nous revendiquons que la justice climatique soit rendue sans attendre ! Pour préserver la Création, il est nécessaire que nous adoptions un mode de vie plus sobre. Nous devons limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5° C. Pour que la justice climatique soit rendue, il est devenu indispensable que nous aspirions à consommer « moins » de ressources et que nous fassions preuve de « plus » de solidarité envers les populations qui subissent les conséquences des changements climatiques. Si, en tant qu’individus, nous sommes capables d’agir dans ce sens, les secteurs de l’économie et de la politique, ainsi que les Eglises sont, eux aussi, appelés à faire de même. […]

Le thème de notre campagne […] nous permet de révéler la face cachée de nos comportements et d’attirer l’attention sur les conséquences qu’ils entraînent dans d’autres régions du monde. Par exemple, une consommation excessive de viande nécessite une production importante de fourrage et de grandes superficies de pâturages. Cela exige entre autres de brûler la forêt tropicale pour la défricher. L’absence de forêt tropicale provoque à son tour des changements climatiques importants.

La Campagne œcuménique vous invite à plusieurs reprises à participer à la rédaction d’un scénario. C’est le cas par exemple dans le calendrier de carême (p. 15), dans les modules pédagogiques (à partir de la p. 6) ou à l’adresse justiceclimatique.ch, où vous pouvez visionner votre film personnalisé sur le thème du climat (p. 13). N’attendez plus et participez à la rédaction de ce scénario pour construire un avenir meilleur […].

 

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