Tout fout le camp…

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, paroisse catholique de langue française de Berne, septembre 2020

Par l’abbé Christian Schaller | Photo: www.bernalopez.org 

Dessin de Berna Lopez, 2020.

Inopinément et inéluctablement, nous sommes face à des bouleversements qui nous laissent pantois. Les changements climatiques interpellent notre agir envers la création. Les précautions dues à la pandémie mettent à mal bien des valeurs communautaires : distanciation, gestes barrières, confinement, port du masque, mise en quarantaine. Les interpellations politiques portent leur questionnement à savoir s’il faut garder le « C » dans le nom d’un parti. Les interrogations se posent quant à la transformation en mosquée de l’ancienne basilique Sainte-Sophie d’Istanbul. La recrudescence de la malnutrition renvoie à plus tard le rêve d’un monde sans famine. Et l’augmentation des dépenses mondiales pour l’armement militaire qui n’augure rien de pacifique.

Toutes ces transformations sont source d’inquiétude, donnent le sentiment de perdre le contrôle, nous rendent vulnérables et alimentent nos fantaisies parfois morbides. Le manque de repères nous laisse dans le désarroi. Cependant, croire en Jésus Christ, signifie mettre notre confiance et notre espérance en Lui. Aujourd’hui encore, il nous dit : « N’ayez pas peur ! » En rendant témoignage de cette espérance qui nous habite, nous pourrons contribuer à un renouvellement de la société dans laquelle nous vivons. Ce changement commence par et en chacun de nous. En paraphrasant Pagnol dans Topaze, nous pouvons affirmer que le monde utilise l’expression « foutre le camp », mais que tout baptisé, conscient de sa mission, « prend congé » de ses vieilles habitudes. Toute métamorphose intérieure, aussi petite soit-elle, sera une victoire pour un monde meilleur.

Hozana.org… que la prière règne!

Par Chantal Salamin
Photos: DR
Hozana, c’est le réseau social de prière… plus de 480’000 priants à ce jour et cela ne cesse d’augmenter. C’est le seul réseau sur internet qui ne connaît pas de coupure de connexion ! Mais pourquoi un réseau de prière ? Comment ça marche ? Et pour quel résultat ?

Pour s’encourager à prier, car c’est vital !
C’est Jésus qui nous le dit à travers l’évangéliste Jean (15, 4) : « Demeurez en moi, je demeurerai en vous. » Ni plus ni moins, la prière, c’est le sang nécessaire à notre vie en Dieu, dans un vrai cœur à cœur avec notre Père. Un immense cadeau exigeant au cœur de notre vie de chrétien-ne qui se reçoit dans le don gratuit de notre temps, bien avant la demande de grâces.

L’association Hozana s’est donné pour mission de nous encourager dans la prière en créant du contenu et en regroupant les priants en communautés, répondant ainsi à l’appel du pape François : « Dieu vous aime, n’ayez pas peur de l’aimer en retour ! Qu’est-ce que vous attendez pour prier ? »

Ces laïcs à la base de cette initiative nous donnent quelques conseils pour prier : prier, ce n’est pas penser à Dieu, mais reposer notre cœur en lui ; il ne s’agit pas de faire sa prière comme on ferait un devoir, mais d’accueillir ce don.

Mais comment ça marche ?
Concrètement, à travers cette application, Hozana nous invite à :

1. Rejoindre des communautés de prière que ce soit autour de l’évangile, de neuvaines, de saints, de la miséricorde, de la famille, etc.

2. Prier avec les publications écrites par des communautés animatrices rassemblées dans le coin prière ou envoyées par mail.

3. Inviter nos amis à rejoindre une communauté, à découvrir Hozana et les aider à prier.

Prier, c’est se rencontrer en communion de frères et sœurs !
Une rencontre qui consiste à croire en faisant confiance en un Dieu bien plus grand que ce que notre intelligence peut comprendre, à espérer dans l’attente qui s’enracine dans le credo « Seigneur, je crois en tes promesses, tu me donneras beaucoup » et enfin à aimer dans un échange de communion entre frères et sœurs en relation avec leur Père.

Version pour Android


Le site: hozana.org

Version pour Iphone

Le site: hozana.org

«A vin nouveau, outres neuves»

Par François-Xavier Amherdt
Photo: DRDe notre patrimoine commun, venu de la Tradition ecclésiale et sociale, nous sommes invités à tirer à la fois du neuf et de l’ancien : nova et antiqua, pour reprendre le nom d’un chœur polyphonique de Sion, dans lequel j’ai eu la joie de chanter quinze ans, sous la direction du diacre permanent de Savièse Bernard Héritier. Ce dernier a d’ailleurs appliqué cette maxime du premier évangile en fondant la Maîtrise de la cathédrale de Sion et en donnant une nouvelle jeunesse musicale à ce haut lieu classique.

« Tirer de notre trésor du nouveau et du vieux », comme le propriétaire mis en scène par Matthieu au terme du discours sur les paraboles (13, 52), c’est devenir disciple du Royaume des cieux, mettre la parole en pratique et construire sur du solide (cf. Matthieu 7, 24-27, à la fin du discours sur la montagne). Ce devrait être notre devise biblique, en cette rentrée pastorale à la saveur particulière. Tout bousculer, modifier, révolutionner, après ce que nous avons vécu, puisque « tout fout le camp », disent certains ? « Réinventer l’Eglise », puisque tout le monde ne fait que parler d’un univers post-Covid différent, dans tous les secteurs de l’économie et de la politique ?

Avec Jésus Epoux, le vin des noces est toujours nouveau (cf. Matthieu 9, 14-17). C’est le nectar de l’amour qui nous vient à travers les âges. Mais il exige sans cesse des outres nouvelles, comme lui-même l’a montré en transformant les pratiques de la Loi ancienne pour les mettre au service de l’être humain : le sabbat fait pour l’homme, et non le contraire ; le jeûne pour le bien-être de l’homme, et non pour l’asservir. Le pape François nous convie avec enthousiasme à dépasser le « on a toujours fait comme cela », dans son exhortation Evangelii gaudium (no 33). Nous n’avons pas à trouver un « Evangile inédit », mais à poursuivre l’élan de la nouvelle évangélisation, voulue déjà par Jean-Paul II, dans le courage, la solidarité, l’intériorité, l’humilité et la conscience de notre vulnérabilité.

«Tout fout le camp»

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Saint-Barnabé (VD), septembre 2020

Par Roger Mburente | Photo: Gildas Allaz

Tel est le thème central de ce numéro ! Les certitudes de l’« ancien monde » sont balayées. Nous sommes surpris par la vitesse à laquelle se produisent les changements dans notre société et dans la structure de l’Eglise, ainsi que par leurs dimensions. Il y a une certaine nostalgie ou une idéalisation démesurée des pratiques et des époques passées. C’est avec désarroi que les changements de temps et mœurs sont accueillis car, pour certains, ces changements signifient une perte de pouvoir et de contrôle. D’où, parfois, le retour à une certaine rigidité ou même à l’autoritarisme !

Pourquoi cette peur ? Si l’Eglise est dans le monde, elle n’est pas du monde. Nous connaissons des changements de structures et de modes de pensée mais, le Christ, Lui, est avec toutes les générations : « Il est le même, hier et aujourd’hui ; Il le sera pour l’éternité » (He 8, 13). Vivons donc l’aujourd’hui de Dieu ! (cf frère Roger de Taizé). Pour le père Florent Callerand, « le tout, c’est d’annoncer l’Evangile et de s’y consacrer intensément, d’une façon de plus en plus ajustée au monde d’aujourd’hui ».

Les souhaits, que je ne cesse de partager depuis des années, sont toujours les mêmes :

– que les structures de l’Eglise se préoccupent de construire l’avenir plutôt que de marcher dans le passé et qu’elles n’étouffent pas des élans authentiques de vie ;

– que, aujourd’hui et demain, chaque chrétien prenne sa part de responsabilité dans l’annonce de l’Evangile et dans la construction d’un monde plus juste et plus fraternel !

«Tout se disloque» dans le monde du travail?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, paroisse catholique de langue française de Berne, septembre 2020

Par Monique Bernau | Photo: getAbstract. Tous droits réservés

De 2001 à 2019, le nombre de personnes actives pratiquant occasionnellement le télétravail à domicile est passé de 10% à près de 25%. En 2020, d’après le Matin.ch, 48% l’auraient pratiqué pendant le semi-confinement. Allons-nous vers une institutionnalisation du travail à distance? Serait-ce un progrès pour les salariés? Tout d’abord, qu’entend-on par télétravail ?
Le Code du travail le définit comme toute forme d’organisation du travail, dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur, est effectué par un salarié hors de ces locaux, de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication.

Quels en sont les avantages pour les salariés ?
Un certain nombre d’employés ayant pratiqué le télétravail pendant le semi-confinement aimerait poursuivre cette forme de collaboration. Les avantages sont divers : horaires de travail plus souples, autonomie et motivation plus grandes, diversification des tâches (en alternant travail professionnel et activités personnelles) ; moins de nuisances sonores pour les travailleurs en bureaux paysagés, réduction du stress et de l’empreinte écologique engendrés par les déplacements, gain de temps pour la vie de famille, les loisirs, le bénévolat…

Et pour les entreprises ?
A longue échéance, les entreprises sont également gagnantes : réduction des frais généraux et des dépenses (loyer, aménagement des locaux, déplacements grâce aux visioconférences) et de l’absentéisme et des retards. Il permet une augmentation de la flexibilité des ressources humaines ainsi que l’intégration de salariés handicapés. S’il est bien pratiqué, grâce à une motivation plus grande, la productivité des employés augmente. Enfin, le télétravail participe au développement durable et il est un atout pour attirer les générations « nomades » X & Y. 

Le télétravail, panacée des employés ?
Cependant, cette forme de travail n’est pas sans dangers. Certains télétravailleurs ont souffert du manque d’interaction, de la perte de lien social et ont vu leur fatigue augmenter, étant constamment en communication téléphonique ou via Internet. Il est parfois difficile de respecter les limites entre vies professionnelle et personnelle. Stéphane Haefliger, spécialiste RH, craint le risque de précarisation des salariés. Ceux-ci pourraient devenir une ressource externe et avoir ainsi un contrat de mandataire et non plus de collaborateur. Ils devraient alors assumer la caisse de pension et les charges sociales. Par ailleurs, Mark Zuckerberg reconnaît qu’au sein d’une entreprise, la distance peut empêcher « de créer une culture commune, de tisser des liens entre collègues, d’être créatif en groupe et d’avoir des conversations informelles ». Et c’est là le risque que « tout foute le camp » : les employés devenant des pions anonymes, congédiables à merci, assisterait-on à une autre forme de déshumanisation du travail ?

1 Petit clin d’œil à l’exposition du Musée des Beaux-Arts de Berne : Tout se disloque 13.12.2019 – 13.09.2020

Avant c’était mieux

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte Marguerite Bays (FR), septembre-octobre 2020

Par Nicole Curdy | Photo: DR

Qui parmi nous n’a pas entendu cette phrase si vite lancée en l’air et si souvent sur nos lèvres : avant c’était mieux, maintenant, tout fout le camp !  

Oui, nous avons souvent cette impression que le monde va de mal en pis et la nostalgie du passé revient en force ! 

N’y a-t-il pas une part de vrai ? Mais en y regardant de plus près, nous savons combien notre mémoire peut nous jouer des tours ! Et Jésus, là-dedans ? A-t-il une place ? N’est-il pas le même hier, aujourd’hui comme demain ? Alors, s’Il est là, ne peut-Il pas y mettre son grain de sel ? Avons-nous cette habitude de demander son aide avant de parler ? de demander à Jésus ce qu’Il pense de cette situation ? Que ferait-Il ? Et l’Esprit Saint ? Que nous souffle-t-il ? Ouvrons notre Bible ! Jésus, à peine baptisé, n’est-Il pas poussé au désert, puis d’un côté et de l’autre ? Et les premiers chrétiens ? Et nous osons nous plaindre ? 

Dieu sait tout et Il est là avec nous jusqu’à la fin du monde. Donc, dans l’audace de l’Esprit Saint, devant de nouveaux projets, des nouvelles manières de faire, disons plutôt : Tout en Dieu ! En avant !

Synodalité

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Unités pastorales du Grand-Fribourg (FR), septembre-octobre 2020

Par l’abbé Alexis Morard et cath.ch | Photo: Grégory Roth

Un nouvelle rubrique «La joie de l’évangile» s’invite dans votre magazine paroissial, afin d’approfondir la réflexion des équipes pastorales du décanat de Fribourg, s’agissant de l’exhortation du même nom du pape François à réformer nos structures paroissiales. Alexis Morard, doyen du décanat du Grand-Fribourg, souhaite placer la rentrée pastorale 2020 sous le thème de la «synodalité». Qu’est-ce à dire?Les équipes pastorales du décanat de Fribourg ont entrepris une réflexion sur la manière de vivre la coresponsabilité au service de la mission propre à la pastorale paroissiale. Héritées d’une vision centrée sur la figure du curé, nos paroisses sont invitées plus que jamais à se réinventer. Dans son exhortation apostolique La joie de l’Évangile, le pape François constate que « l’appel à la révision et au renouveau des paroisses n’a pas encore donné de fruits suffisants pour qu’elles soient encore plus proches des gens, qu’elles soient des lieux de communion vivante et de participation, et qu’elles s’orientent complètement vers la mission » (n. 27). 

Nous reprenons en partie, avec l’aimable autorisation de cath.ch, une interview de Philippe Becquart. *

Philippe Becquart, vous êtes enthousiaste à l’énoncé du mot « synodalité ». Est-ce une nouveauté du pape François ?
François a véritablement thématisé le concept de synodalité. « C’est le chemin de l’église du troisième millénaire », a-t-il déclaré, en ajoutant même : « le chemin que Dieu attend de l’église », dans son discours, en octobre 2015, à l’occasion des 50 ans de l’institution du Synode des évêques. Depuis sa première exhortation La joie de l’évangile, en 2013, tous ses textes suivent une certaine herméneutique, c’est-à-dire une interprétation de la synodalité, qui éclaire ses grandes intuitions pastorales. Pour le Pape, la synodalité n’est pas une technique ou un remède, mais c’est l’être même de l’église et la voie de son renouveau. Car l’église est synodale par nature.

Mais qu’est-ce que l’on dit quand on dit cela ?
Derrière ce mot technique se cache toute une compréhension de l’église qui s’est particulièrement « désenveloppée » depuis Vatican II. Le concept n’est pas nouveau : ce qu’il veut dire, c’est que tout baptisé est un « ministre » appelé à annoncer l’évangile. Autrement dit, nous sommes chacun, prêtres et laïcs, « disciples-missionnaires », disciples appelés à marcher à la suite du Christ et à l’annoncer selon l’état de vie et les lieux existentiels de nos engagements (famille, travail, mouvements, paroisses, communautés, société…). La synodalité, c’est le Peuple de Dieu qui chemine ensemble à la suite du Christ. Ce qui fonde cet être ensemble synodal, c’est le baptême. Le reste relève d’un dévoilement de nos vocations propres, en fonction des charismes et des ministères que le Seigneur nous a donnés ou confiés.

Comment a évolué notre compréhension de l’église au fil du temps ?
La figure de l’assemblée des baptisés que l’on nomme église a largement évolué au cours des siècles. De type épiscopal dans les premiers siècles de l’église, avec ses nombreux conciles pour formaliser le contenu de la foi, elle devient de plus en plus paroissiale, avec son curé, jusqu’à la Réforme. Le concile de Trente, en réponse à la Réforme, va formaliser, dans la liturgie et dans l’organisation territoriale de la paroisse, la figure centrale du prêtre. Nous avons une église pyramidale, avec au sommet le pape, les évêques, puis les prêtres et, tout en bas, les baptisés. Mais la charge pastorale revient en propre au prêtre qui est le pivot de la structure ecclésiale.

Il faut attendre le XXe siècle pour voir les choses évoluer…
Avec Vatican II, les baptisés laïcs changent de statut et deviennent aussi des missionnaires. Mais seulement dans leur champ propre: le monde. La division – que portent peut-être encore les constitutions Lumen Gentium et Gaudium et Spes (Vatican II) – est la suivante : la charge spirituelle, le bien des âmes, revient au ministre. Et le laïc, lui, est missionnaire ad extra : le Peuple de Dieu va témoigner du Christ dans la réalité du monde. Depuis ces dernières décennies toutefois, l’apostolat des laïcs a évolué considérablement. Et dans le concept de « disciples missionnaires » que propose François, le baptisé reçoit lui aussi la charge d’annoncer l’évangile et porte avec le prêtre le bien des âmes, y compris au sein de l’église. Pour le pape, la synodalité veut dire : penser l’église à partir de ceux qui la font, hommes et femmes, tous les baptisés. C’est une théologie du baptême, du peuple de Dieu, de la sainteté.

Cette division, ministres à l’intérieur et laïcs à l’extérieur, n’est donc plus d’actualité…
Aujourd’hui, le gros de l’agir pastoral est porté par des théologiens et des laïcs formés. C’est une force pour l’église, mais c’est aussi un problème. Premièrement, car la structure canonique (droit de l’église) reste axée sur l’idée que la charge pastorale est l’affaire du prêtre. Deuxièmement, la raréfaction numérique du nombre de prêtres. Troisièmement, une déficience en termes de compétences autres que strictement théologiques.

Etre appelé au sacerdoce ne signifie pas forcément avoir des aptitudes de manager, d’organisateur d’une chaîne complexe de tâches où le prêtre s’épuise. Le ministre devient administrateur et beaucoup de prêtres se retrouvent dépossédés de leur vocation initiale. Beaucoup disent qu’ils ne vivent pas ce pour quoi ils ont choisi une vie toute donnée au Christ. C’est une souffrance et parfois même un drame.

Cela suppose de revisiter les représentations que nous avons du ministère…
La vision synodale oblige, en quelque sorte, à passer de la figure du « prêtre-père » qui dirige – ou de l’époux qui commande –, à celle du frère qui chemine. Fondamentalement, c’est une libération, à la fois au niveau affectif, psychologique et humain. Un frère chemine dans la communauté, il fait confiance et il délègue. Parfois, il demande de l’aide, parfois il chute, parfois il est devant, derrière ou dehors. Il n’est pas dans une représentation qui l’oblige à être ce qu’il n’est pas. D’ailleurs, j’ai moi-même constaté que certains prêtres, dans leur manière d’exercer leur ministère, s’inspirent de cette figure du frère qui chemine avec. C’est alors une grâce pour le prêtre, mais aussi pour la communauté qui ne peut vivre sans le pasteur.

N’est-ce pas contradictoire avec le fait que le prêtre représente Jésus ?
C’est justement une des lumières fondamentales du christianisme: Jésus est le Fils et il nous apprend à être des fils et des frères. Il est le Fils qui nous apprend la vraie filiation et la vraie fraternité. La façon dont Jésus chemine avec ses apôtres, ses disciples, hommes et femmes, nous montre comment vivre la fraternité du Fils. Être frères et sœurs dans le Christ. Il n’y a pas autre chose à inventer, que la vraie filiation que nous apprend le Fils.

Et n’est-ce pas aussi l’attitude du pape François ?
Mais bien sûr ! Si vous voulez savoir ce qu’est la vision synodale de François, observez-le lors des Synodes. Que ce soit lors des synodes sur la famille, en 2014-2015, sur les jeunes, en 2018, ou sur l’Amazonie, en 2019, le pape François adopte un comportement et de père et de frère, et il dévoile ce qu’est la synodalité. C’est-à-dire, il permet à l’Esprit Saint de parler à son Eglise. Cela suppose de sortir des textes préparés, d’accepter de remettre en cause les schémas préconçus, et d’oser faire autrement que comme on a toujours fait. La synodalité exige de l’audace, parce qu’elle crée de l’inattendu, du différent, de l’inconfort…

Cela suppose donc de changer, voire de bousculer les structures ?
Changer les structures ne change pas les problèmes. Je ne pense pas que la synodalité passe d’abord par des changements de structures, mais plutôt par des conversions personnelles. La transformation pastorale passe avant tout par une conversion, dont la première condition est d’accepter de se laisser regarder par le Seigneur. Les prêtres, les baptisés ne peuvent espérer une église qui écoute, qui parle vrai, qui accompagne, qui discerne, qui sert les plus pauvres… sans une conversion de toute la communauté.

C’est la responsabilité que nous avons chacun à assumer en conscience et devant le Seigneur. Le risque serait de passer du cléricalisme des prêtres au cléricalisme des laïcs. Cela ne m’intéresse pas spécialement. C’est même ce que je redoute, comme on le voit d’ailleurs avec plusieurs revendications au sein de l’église en Allemagne. Que l’on arrive à plus de désunions, voire à une forme de schisme pratique, ce n’est pas ce que je souhaite.

Que préconisez-vous alors ?
Les laïcs, hommes et femmes, doivent redécouvrir leur baptême : c’est cela le grand défi. Si l’église aujourd’hui, avec le peu de moyens qu’elle a, devait s’atteler à une tâche, ce serait de permettre aux laïcs de redécouvrir toute la potentialité de leur baptême. De cette tâche-là naîtra un renouveau de la mission, de la famille, de la diaconie. Faire confiance aux femmes, aux pauvres, par exemples. Et il ne faut pas avoir peur de penser l’altérité : l’altérité dans les ministères, l’altérité homme-femme, l’altérité pauvre-riche, etc. Ce qui constitue également un grand chantier de la synodalité.
* Philippe Becquart est un théologien français, natif du Vaucluse (France). établi à Fribourg depuis plus de vingt ans, après une formation en droit et en sciences politiques, il y a effectué ses études de théologie. Il a enseigné la philosophie pendant dix ans.
Marié et père de famille, il a été engagé en 2016 à la tête du département des Adultes de l’église catholique dans le canton du Vaud (ECVD).

Funérailles et coronavirus: faire son deuil malgré tout

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Unités pastorales du Grand-Fribourg (FR), septembre-octobre 2020

Par Jean-Marie Monnerat | Photo: Pixabay

Du 16 mars au 31 mai, près de 80 catholiques sont décédés dans le décanat du Grand-Fribourg. Comment est-ce que les familles des défunts ont-elles vécu ces disparitions dans le contexte du coronavirus durant lequel les grandes assemblées et les messes n’étaient plus possibles?« Le plus difficile pour les familles a certainement été de ne pas pouvoir accompagner la personne dans les derniers moments, que ce soit à l’hôpital ou dans un EMS » explique Jaga Loulier, membre de l’équipe des funérailles. « Certaines familles pensent que, dans cette période spéciale, leur proche en fin de vie était particulièrement confronté au chagrin et à la solitude », poursuit-elle. « Mais si ces instants étaient très durs à vivre, il n’y a pas eu de sentiment de révolte. Tout le monde comprenait la particularité de la situation provoquée par ce virus. Les familles étaient très solidaires et le fait que les funérailles, principalement les célébrations de la Parole, ne pouvaient recevoir que peu de personnes, approfondissaient la réflexion sur ce qui constitue la famille » raconte Jean-Guy Pannatier, Frère marianiste, également membre de l’équipe des funérailles. 

Durant la période la plus délicate, jusqu’à la fin mai, la plupart des funérailles ont été célébrées par des prêtres, parfois par des laïcs. Les familles qui ont renoncé à un geste d’adieu ou qui ont préféré attendre constituent une faible minorité. « Le coronavirus a eu comme conséquence de vivre des funérailles de manière très différente. « Forcées à vivre les funérailles de leur proche en strict cercle familial, certaines familles auraient peut-être souhaité les vivre dans une plus grande assemblée, ou demander une messe pour leur défunt, impossible dans ces circonstances. La liturgie de la Parole a permis de remplacer la messe et ainsi de répondre aux attentes des familles désirant dire adieu à leur proche, par une liturgie différente, mais nécessaire » explique Jean-Guy. 

« Nous avons pris grand soin de préparer ces célébrations avec convivialité, tout en respectant les distances sanitaires. Et nous nous sommes adaptés à tous les changements, tout en veillant à accueillir les personnes en deuil avec beaucoup d’empathie » poursuivent Jaga et Jean-Guy.

Des funérailles différentes, en petit comité, dans un contexte compliqué, ont-elles permis aux familles de faire leur deuil ? « Il nous semble que la réponse est affirmative. Car au mois de juin, après l’allègement des restrictions, nous avons écrit aux 80 familles en leur proposant une célébration du souvenir. Seules deux familles ont répondu à l’appel. Le vécu affectif a été très dur, mais le deuil a été fait et ces familles n’ont probablement pas eu envie de revenir en arrière » concluent Jaga et Jean-Guy.

Une nouvelle habitation

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur des Deux-Rives (VS), septembre 2020

Texte par l’Abbé Bruno Sartoretti | Photo: Véronique Denis

Voilà, c’est fait ! La cure de Riddes a repris ses airs de jeunesse. Elle a fait sa mue, elle a une nouvelle allure, celle de la tradition et de la nouveauté.

Pour la tradition, c’est assez visible. L’extérieur a repris les codes de sa construction d’origine. Des couleurs un peu particulières, mais les monuments historiques ont veillé à ce qu’il en soit ainsi. A la fin juin, dans Le Nouvelliste, il était écrit que les bâtiments anciens étaient des documents du passé. Si nous passons à l’intérieur, il en est de même. Des boiseries repeintes selon ce qui se faisait à l’époque, chez les riches. Les pauvres n’avaient droit qu’au bois brut. L’église montrait alors sa richesse ; aujourd’hui, le Pape nous invite à une Eglise pauvre.

Pour la nouveauté, il faut se pencher sur les installations. Une cuisine presque professionnelle au rez-de-chaussée, une grande salle insonorisée avec un écran et son projecteur, un bureau fonctionnel au premier. Et une nouvelle répartition des espaces au second, formant un appartement agréable et très ouvert. Et encore, un chauffage au bois pour l’église, la cure et la crypte. Voilà pour le bâtiment !

Tout beau, tout neuf, dit l’adage. Nous verrons au fil des jours si nous parviendrons ensemble à faire du beau et du neuf dans le temps. Parce que le défi est aussi là. Nous devons, jour après jour, nous renouveler. Nous devons faire peau neuve dans notre vie de Foi. Nous devons remanier, repenser notre manière de vivre nos engagements de croyants.

Il est temps, donc, de repeindre notre communauté avec les couleurs de la vie. Parfois sombres, dans les séparations, les maladies, les oubliés ; parfois vives, dans les fêtes, les rencontres, les échanges, les célébrations. Nous le ferons avec le nouveau conseil de communauté et avec tous les membres de la paroisse.

Il est temps de mettre du professionnalisme et de la modernité dans nos rencontres, nos échanges, nos témoignages, nos disponibilités. Nous le continuerons avec les bonnes volontés, les commissions particulières (endeuillés, malades, intergénérationnelles…).

Il est temps de repenser, de remanier notre manière de vivre la catéchèse, la liturgie, la vie paroissiale. Nous le ferons avec tous les engagés de la paroisse et du secteur, mais aussi avec les acteurs habituels de la paroisse (chorale, servants, lecteurs, auxiliaires de l’eucharistie…).

Il est temps… que je m’arrête de parler pour passer au vivre ensemble et à l’être !

Oser le changement 

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur des Deux-Rives (VS), septembre 2020

Texte et photo par Jean-Christophe Crettenand

Tout fout le camp ! Notre traditionnelle, ancestrale, indémodable, essentielle, incontournable fête paroissiale n’a pas eu lieu cette année… Le 11 juin, jour de
la Fête-Dieu est arrivé, nous nous sommes rendus à la messe, ne sommes pas sortis pour l’adoration du Saint Sacrement et il n’y a même pas eu d’apéritif à la sortie, et surtout, il a fallu improviser dans l’après-midi.

Evidemment le contexte nouveau, apparu depuis les premiers mois de cette année, nous a forcés à nous adapter. C’est d’ailleurs l’occasion pour moi de faire un retour en arrière, de replonger dans ma mémoire, et de constater qu’en manière de Fête-Dieu – de fête paroissiale pour nous les paroissiens riddans – nous avons bien souvent osé le changement et le résultat a été à chaque fois réjouissant.

En remontant le plus loin possible, je me retrouve dans le pré situé à côté de l’église où se dressait une immense tente blanche. Mes papilles sourient en se remémorant le goût des gaufres de Madame Coquoz. J’essaie de déranger le moins longtemps possible mes parents qui jouent au loto afin de leur demander des sous pour acheter quelques bons qui me permettent de prendre part aux différents jeux organisés, desquels je reviens avec les poches pleines de bonbons et de petits gadgets.
Ce jour de fête est aussi l’occasion de manger des glaces. Enfin je rentre à la maison avec une belle pile de bandes dessinées achetées au stand de Maria Duc.

Quelques années plus tard, avec mon compère Christophe et bien d’autres, c’est nous – au nom des chœurs vaillants et âmes vaillantes (CVAV) – qui organisons les jeux pour les plus jeunes ; je découvrais enfin d’où venaient tous ces gadgets et tout particulièrement le fameux « Monsieur Patate ».

Un beau jour il a fallu sauter le pas, abandonner l’idée du « plein air » pour la salle de l’Abeille. J’y ai appris à racler, j’y ai même crié quelques lotos. Les jeux à l’extérieur se sont petit à petit transformés en bricolages ; les plus jeunes ne restaient plus forcément tout l’après-midi et voulaient se joindre aux parents pour découvrir le loto à l’envers.

Puis le lieu de la fête s’est déplacé une nouvelle fois et a pris ses quartiers au terrain de foot. Le ski-club et la jeunesse de Riddes ont pris le relais des CVAV pour l’animation des après-midi qui a parfois touché uniquement les jeunes, parfois les familles, voire même été combinée avec « Riddes Bouge ». 

En l’état des comptes, force est de constater que ceux qui se sont succédé à « oser le changement » ont permis d’aller de l’avant…

En librairie – septembre 2020

Par Calixte Dubosson et la librairie Saint-Augustin

Des livres

L’Eglise, des femmes avec des hommes
Anne-Marie Pelletier

La grande théologienne et bibliste française, membre de l’Académie pontificale pour la vie, que le pape François a invitée à prêcher au Vatican, livre ici son manifeste le plus essentiel sur la place passée, présente et future de la femme dans le christianisme. Celle qui s’est opposée à l’initiative d’Anne Soupa qui avait proposé sa candidature pour l’archevêché de Lyon en rappelant que le ministère se reçoit et ne se revendique pas, vient ici valoriser la part féminine de l’Eglise en nous posant la question : « Et si la femme était l’avenir… de l’Eglise ? »

Ed. du Cerf

Acheter pour 33.20 CHFUne autre Eglise est possible
Laurent Grzybowski – Anne Guillard

Les catholiques sont à un tournant de leur histoire. Les églises se vident, les scandales et les crimes se succèdent, laissant l’institution démunie et les croyants abasourdis. Pour inciter l’Eglise à sortir de son impuissance et aider les fidèles à dépasser la tristesse et la colère, un journaliste et une universitaire catholiques publient cet appel : oui, une autre Eglise est possible ! Moins dogmatique et plus incarnée, moins moralisatrice et plus joyeuse, moins infantilisante et plus égalitaire.
Au fil de vingt propositions, des pistes concrètes sont avancées. Un livre à lire, absolument !

Ed. Temps Présent

Acheter pour 17.00 CHFRéparer la maison de Dieu
Noël Ruffieux

Ce livre n’est pas une réflexion ecclésiologique théorique, même si sa démarche est sous-tendue par de nombreuses lectures. L’auteur tire profit d’une longue expérience de vie dans l’Eglise du Christ, côté catholique et côté orthodoxe. Il n’est pas une lamentation, mais, autant que possible, un chant d’espérance. L’auteur aimerait s’adresser aux chrétiennes et chrétiens, de quelque Eglise que ce soit, qui sont blessés par l’état de l’Eglise du Christ. A ceux qui sont partis. A ceux qui ont encore assez de foi pour rester, assez d’amour pour leur Mère meurtrie. Pour que tous entendent la voix du Crucifié leur dire : « Va et répare ma maison ! »

Ed. Mediaspaul

Acheter pour 27.70 CHFLouis et Zélie Martin
Marie et Olivier Malcurat
Marco Greselin

18 octobre 2015, place Saint-Pierre à Rome, le pape François déclare saints Louis et Zélie Martin. Ils deviennent ainsi les premiers époux et parents à être canonisés ensemble par l’Eglise. Non pas parce que leur fille Thérèse est sainte, mais parce que leur vie d’apparence très ordinaire, ancrée dans une foi à toute épreuve, abandonnée à la Providence divine, a façonné leurs âmes et celles de leurs enfants pour le Ciel. Dans l’une de ses lettres, sainte Thérèse écrivait d’ailleurs pleine de reconnaissance : « Le bon Dieu m’a donné un père et une mère plus dignes du Ciel que de la terre ». Très bonne BD à recommander aux familles chrétiennes.

Ed. Artège

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Corona Expériences: «Comment allez-vous?»

es.pdf"]La période de pandémie a été pour chacun un temps d’expériences nouvelles et parfois douloureuses. Sur la proposition du Service diocésain de Diaconie (SDD), appuyée par notre évêque Mgr Jean-Marie Lovey, nous avons établi un petit questionnaire qui puisse recueillir vos témoignages : comment avez-vous vécu ce temps? Qu’est-ce qui vous a frappé?
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Des nouvelles de la catéchèse

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Nyon-Founex (VD), septembre-octobre 2020

Par Esther Bürki | Photo: Patricia Durrer

La catéchèse, c’est le département qui a pour mission de transmettre la grandeur et la beauté de la foi et de l’amour de Dieu aux plus jeunes de notre Unité pastorale (UP) et de les accompagner tout au long de leur parcours spirituel. Esther Bürki, coordinatrice de la catéchèse de l’UP, nous présente en profondeur ce qui est mis en place pour les enfants.En raison de la situation sanitaire mondiale, toutes les rencontres et sorties des quelque 700 enfants catéchisés de notre UP ont été annulées jusqu’aux vacances d’été. Néanmoins, avec l’aide du service cantonal de catéchèse, des temps à vivre à la maison ont été proposés aux familles, qui ont également été invitées à suivre les messes filmées sur notre chaîne YouTube. Par ailleurs, quelques familles de la catéchèse se sont mobilisées pour participer, de leurs foyers ou à l’église, aux lectures et aux prières universelles ainsi qu’à l’animation des chants. Cette diversité, à l’image de notre UP, a été très appréciée bien au-delà de notre territoire.

Cette situation particulière a causé bien des déceptions et de la tristesse chez les enfants qui devaient faire leur première communion au printemps. Le week-end de retraite à Saint-George est remplacé par une retraite à Nyon dans les salles sous l’église cet automne. Les célébrations se feront par petits groupes pour autant que la situation sanitaire le permette. Pour pouvoir continuer sereinement leur catéchèse dans leurs nouveaux lieux de vie, trois enfants qui ont quitté notre belle région cet été ont communié pour la première fois lors de la messe filmée du 21 juin.

Les jeunes qui se préparent à la confirmation ont eux aussi vu leur cheminement bousculé. Ils reprennent leurs rencontres en septembre et recevront le sacrement au printemps prochain après avoir vécu une retraite à Fribourg.

Nouvelle dynamique en catéchèse
L’équipe de la catéchèse réfléchit depuis deux ans à un cheminement catéchétique qui soit adapté au monde actuel. En effet, la vie des familles a beaucoup changé et la transmission de la foi ne va plus forcément de soi. Bien des enfants rejoignent la catéchèse pour se préparer au sacrement de l’eucharistie sans vraiment savoir qui est Jésus. Pour cette raison, en mars, de nouvelles orientations diocésaines ont été promulguées nous invitant à proposer une catéchèse qui ne soit plus en lien avec la célébration d’un sacrement à un âge précis, mais une catéchèse qui accueille chacun là où il en est. Car la « première des communions n’est pas un but en soi. Le but est de répondre à l’amour de Dieu qui veut se donner à nous de manière extraordinaire dans l’Eucharistie… ».

La catéchèse c’est une rencontre avec quelqu’un, Jésus, et pas seulement un savoir à intégrer. C’est aussi une expérience communautaire : on n’est pas chrétien tout seul. Pour cela il faut du temps, car pour avoir une relation avec une personne, il faut la connaître. Ainsi, à mesure que cette relation se construit naît l’envie de la nourrir par la vie sacramentelle. Cela demande de proposer des rencontres qu’un enfant ou un jeune peut rejoindre en tout temps et sans préalable et une préparation sacramentelle lorsque le désir de l’enfant aura mûri et non pas parce que l’âge est arrivé. 

Un parcours adapté à chacun
Une première sensibilisation à la foi est proposée dès l’âge de trois ans grâce à une narration en lien avec un texte biblique, des chants, des temps de prière et un bricolage. Ensuite, dès l’âge de six ans, les enfants et leurs familles découvrent les merveilles que Dieu fait dans nos vies. A l’écoute de sa Parole, les enfants apprennent à connaître Jésus et sont invités à reconnaître l’amour de Dieu pour nous. Cet itinéraire de deux ans avec l’évangéliste Luc raconte « dans l’ordre » la vie de Jésus. Les enfants ayant suivi la catéchèse familiale pourront se préparer à recevoir le pardon en 5e année, puis la communion en 6e.

Pour permettre l’intégration d’enfants qui n’ont pas suivi la catéchèse familiale dans les groupes de catéchèse existants, nous avons mis en place des rencontres qui leur permettront de découvrir les fondamentaux de notre foi (l’Alliance, l’Incarnation, la mort et la résurrection de Jésus et le don de l’Esprit Saint) qu’ils suivront en plus de la catéchèse ordinaire. L’année suivante, lorsqu’ils auront commencé à faire connaissance avec Jésus ils pourront, tout en suivant la catéchèse ordinaire, se préparer au premier pardon. L’année d’après, ils pourront se préparer au sacrement de l’eucharistie tout en suivant la catéchèse ordinaire avec les jeunes de leur âge. Ainsi nous privilégions l’intégration de chaque enfant dans le groupe de son âge tout en lui laissant le temps de cheminer à son rythme et de mûrir son désir de recevoir les sacrements.

L’équipe de la catéchèse ainsi que les bénévoles engagés dans le beau ministère de l’annonce de la Bonne Nouvelle se réjouissent de reprendre les activités dans le respect des normes sanitaires. Mais surtout de partager des moments agréables avec les familles après cette longue pause forcée.

Renseignements et inscriptions : catechese.nyon-terresainte@cath-vd.ch

L’église = 100% de pécheurs

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Unités pastorales du Grand-Fribourg (FR), septembre-octobre 2020

Par Véronique Benz | Photo: Rachel Benz

Au début de l’été, j’ai été ébranlée, sans doute comme beaucoup d’entre vous, par les informations découvertes dans la presse concernant le futur curé modérateur de l’unité pastorale Notre-Dame. À vrai dire, j’ai été surtout choquée par la forme de ces révélations : la vie privée d’un homme étalée dans un magazine, sans considération de sa personne, un voyeurisme malsain visant à détruire un être humain ! Certes, cet homme est un pécheur, mais il n’a commis aucun délit ! Qui sommes-nous pour nous permettre de juger et de condamner ainsi une personne ? 

Il m’est soudain revenu en mémoire le passage de l’évangile de la femme adultère (Jean 8, 1-11). Lorsque les scribes et les pharisiens condamnent la femme adultère à être lapidée, « Jésus leur dit : que celui d’entre vous qui est sans péché lui jette en premier une pierre ! […] Mais eux, entendant cela, s’en allèrent un à un, à commencer par les plus vieux. » 

L’Église est composée d’hommes et de femmes, de laïcs, de religieux et de clercs. Ce Peuple de Dieu, du plus humble des baptisés au pape François, est formé à 100% de pécheurs. L’histoire des grands saints est à ce sujet édifiante. L’Église a pour but de nous conduire sur les chemins de la sainteté et condamne par conséquent tout ce qui nous éloigne de l’amour de Dieu, mais comme le dit la règle de saint Benoît, il convient « de haïr le vice, mais d’aimer le pécheur ».

Lorsque Jésus se retrouve seul avec la femme adultère, il lui dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, désormais ne pèche plus. » Ces mots, le Christ nous les adresse à chacun d’entre nous lorsque nous vivons le sacrement du pardon, fruit de sa grande miséricorde. Puissions-nous, avant de juger et de condamner, nous laisser habiter par l’amour miséricordieux de Jésus.

Comme un signe

Faire tomber les barrières qui peuvent séparer les personnes: le credo de la Communauté œcuménique des sourds et malentendants de Genève (COSMG). Par une communication respectueuse des besoins de chacun et un œcuménisme vécu au quotidien, sourds et malentendants des deux confessions font partie intégrante de l’Eglise. Rencontre avec Anna Bernardo, aumônière en charge de cette communauté.

Texte et photos par Myriam BettensLa parole peut être à la fois un espace de liberté, ou parfois vécue comme un enfermement. Anna Bernardo aime le langage et son inépuisable richesse. Elle accompagne dans sa profession de logopédiste ceux pour qui la magie des mots n’a pas opéré. Depuis plus de trente-trois ans, elle offre des clés pour « déverrouiller » une prononciation difficile ou une phobie de la lecture. Cette mission la passionne toujours autant, ainsi lorsqu’elle rencontre Mgr Farine pour concrétiser le souhait de s’engager en Eglise, Anna Bernardo lui demande expressément une fonction lui permettant de continuer à exercer sa profession en parallèle. Elle s’engage en tant qu’aumônière de la communauté des sourds et malentendants de Genève en octobre 2014. « Moi-même entendante, je n’ai que quelques petites notions de langue des signes française (LSF) », avoue-t-elle. La plupart des activités de la COSMG s’adressent à un public composé de sourds et d’entendants réunis. Les célébrations et toutes les activités organisées par la communauté sont toujours bilingues : LSF et français parlé. « En général, un interprète LSF est présent et nous projetons tous les textes de la célébration sur un écran », complète encore Anna Bernardo.

Le murmure du geste

Ces moments de partage et d’œcuménisme ont lieu tous les 3e dimanches du mois à la paroisse protestante de Montbrillant située à quelques encablures de la gare Cornavin, à Genève. Dans les jours précédant la rencontre, Anna Bernardo et sa consœur, la pasteure Katharina Völlmer Mateus, mettent au point le support visuel de la célébration ainsi que le script que recevra l’interprète LSF. Le dimanche matin, les deux femmes se rendent à l’église aux alentours de 8h30 afin de finaliser les préparatifs de la liturgie. Peu avant 10h, les premiers paroissiens pénètrent dans le temple, un lieu à l’architecture moderne devant son nom au Mont Blanc qui lui fait face. « Les cérémonies sont tout sauf silencieuses », glisse l’aumônière. Le lieu de culte bruisse du perpétuel murmure des gestes échangés, « du corps dans son entier entrant en prière ». Les personnes présentes à la cérémonie sont d’ailleurs toujours invitées à s’approprier la langue des signes dans la liturgie. Comme pour joindre le geste à la parole, l’aumônière dévoile quelques-uns des gestes du Notre Père. Elle décrit ensuite le moment de la salutation de paix des célébrations de la COSMG : « Les paroissiens se prennent dans les bras, se serrent la main ou encore s’embrassent. » Un moment d’émotion, qui inclut chacun.

La Parole incarnée

Aujourd’hui, les personnes sourdes sont mieux prises en compte dans la société. Cependant, elles ont été victimes de préjugés divers au cours de l’histoire. La croyance populaire associait, par exemple, la surdité à l’absence de raison. Une assertion qu’Aristote prenait à son compte en affirmant que celui qui ne parle est aussi dénué de pensée. La chrétienté n’a malheureusement pas amélioré le sort des sourds. Un des quatre Pères de l’Eglise latine, saint Augustin, restait persuadé que la personne sourde ne pouvait apprendre à lire puisque la parole lui manquait. Par extension, il estimait donc que la surdité rendait la foi impossible. « Pendant un siècle, les sourds étaient obligés de s’asseoir sur leurs mains. On les obligeait à utiliser la voix comme seul moyen de communication », affirme l’aumônière. Ce n’est que dans les années 1980 que la LSF est admise en tant que langue à part entière. Pour Anna Bernardo, elle offre la possibilité à toute personne qui signe de penser en images, les termes deviennent visibles et donc vivants. « Le corps est valorisé et devient un lieu de communion avec Dieu », décrit-elle. Plus encore, le message biblique « s’incarne dans le corps et le vécu des paroissiens ». La Parole de Dieu devient signe.

Un œcuménisme vécu

→ 8h30
Mise en place de la salle et du matériel à la paroisse protestante de Montbrillant, à Genève

→ 10h
Début de la célébration

→ 11h
Après-culte convivial constitué d’un temps de partage et d’un apéritif

→ 12h
Repas communautaire

→ 14h à 15h30
Rangement de la salle paroissiale

Le règne.
Le pain.
Pardonne-nous.
A…
… men.

Donner le goût de la messe aux enfants

Beaucoup de paroisses manquent de jeunes,  mais certaines réussissent à les impliquer. Pourquoi et comment? Interview du Père Cettou, curé de Sainte-Thérèse à Lausanne.

Par Bénédicte Jollès
Photos: DR, Flickr

Le Père Cettou.

Comment transmettre ce goût de la messe ?
Tout commence en famille : l’enfant reçoit le plus important de ses parents. Impossible de faire aimer la musique ou le sport sans les pratiquer. Il en va de même avec l’eucharistie : est-elle le centre de notre semaine ? Ses lectures sont-elles lues en famille ? Sommes-nous enthousiasmés par la présence de Jésus qui se donne durant l’Eucharistie ? Aux prêtres de faire sentir cette présence, en posant le regard bienveillant de Dieu sur chacun. La messe permet normalement aussi une vie de famille plus joyeuse et plus paisible, les enfants en ont soif. 

Que répondre à un enfant qui dit s’ennuyer ?
Il est normal que l’enfant préfère jouer. Ses devoirs lui pèsent aussi, mais les parents persuadés de leurs bienfaits insistent.

L’enfant qui s’ennuie à la messe, n’en voit pas le sens, il n’a sans doute pas été assez préparé. Favorisons-nous les échanges à propos de la foi ? Répondons-nous à ses questions ? Demandons aussi au Christ que nos enfants le rencontrent : Il n’a que ce désir-là !

Pourquoi invitez-vous les familles chrétiennes à ne pas rester isolées ?
Elles ont besoin de soutien. Les propositions de retraites familiales sont nombreuses, y naissent des amitiés profondes. Quelle joie quand, à la sortie de la messe, chacun retrouve des amis. Ensuite, les parents peuvent passer le relais à des mouvements de jeunes, ils fortifient ceux qui se sentent isolés. 

Pourquoi avez-vous autant de servants d’autel ou servantes d’assemblée ?
Sur la paroisse, une quarantaine d’enfants sont engagés. Etre proche de l’autel, aide à être attentif à ce qui s’y déroule. Chacun peut en assumer une responsabilité, par exemple : chants, lectures, quête ou procession qui donnent rythme et sens à la liturgie et aident à rencontrer le Seigneur. Il ne s’agit pas de chercher d’abord à occuper les jeunes, mais de leur apprendre à être disponibles : silence et adoration intérieure sont aussi importants. Les servantes d’assemblée portent par leur recueillement la prière des fidèles, elles continuent à prier pour eux dans la semaine. Les enfants ont une grande profondeur spirituelle ; entourés d’adultes à la foi vivante, ils prennent leur place.

La pause de midi

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Unités pastorales du Grand-Fribourg (FR), septembre-octobre 2020

Par Kéli Kpego | Photo: FJ

Fribourg compte de nombreux étudiants : à l’université, dans les hautes écoles, dans les collèges et les écoles professionnelles. La plupart de ces établissements disposent d’une aumônerie qui propose des temps de réflexion et des activités. Et sur la pause de midi ? Au centre Sainte-Ursule, Formule Jeunes met à disposition des étudiants une salle pour manger leur repas au chaud durant l’hiver ou la terrasse pour profiter du soleil durant l’été. Le « service des tables » est assuré par une équipe de « concierges » âgés de moins de 25 ans. Ces jeunes sont parfois au chômage ou en rupture scolaire. Certains vivent des situations difficiles. Cet engagement régulier, qui demande de la ponctualité et de l’attention, leur permet de garder un pied dans la vie active et de recevoir une petite rémunération. Jehan, l’un des « concierges », a accepté de donner son témoignage :

« Durant cinq ans, j’ai eu la possibilité de participer en tant que «  concierge  » à la pause de midi au centre Sainte-Ursule. J’ai trouvé cette expérience intéressante pour plusieurs raisons. Premièrement, c’est un lieu où se vivent toutes sortes d’évènements : réunions importantes au niveau religieux, cours et formations, expositions, ateliers créatifs, etc. Il y avait tout le temps du changement et des thèmes différents, ce qui rendait l’ambiance de travail intéressante. Deuxièmement, cette variété des évènements m’a permis de rencontrer un grand nombre de personnes de divers horizons et de partager avec elles. J’ai eu l’opportunité de travailler et échanger avec d’autres collègues, mais aussi avec des personnalités religieuses importantes. Ces échanges ont été très enrichissants. Cette activité m’a également permis d’avoir un pied dans le monde professionnel ainsi qu’une certaine stabilité. Elle m’a apporté beaucoup de choses, que ce soit au niveau personnel ou au niveau social. Je suis vraiment reconnaissant d’avoir eu l’opportunité d’œuvrer dans ce cadre : ça a été une expérience positive et instructive. »

Tout fout le camp!

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, UP Sainte Marguerite Bays (FR), septembre-octobre 2020

Texte et photos de Nicole Monney

Tout fout le camp ! Je suis sûre que bien des personnes ont déjà entendu cette phrase voire l’ont dite elles-mêmes.

Il est vrai qu’elle est déstabilisante, cette sensation que nos repères partent. Nous avons beau vivre dans une monde individualiste, où le « je » a une place privilégiée, toutefois, nous tenons à certains principes ou valeurs. Ils sont aussi nos points de repères qui malgré tout nous permettent d’avancer certes, mais surtout nous rassurent.

Changements en catéchèse
Ma dernière expérience d’un changement majeur qui a chamboulé bien des personnes date d’il y a deux ans. Les réflexions étaient les habituelles : « Pourquoi changer quelque chose qui fonctionne bien ? Changer pour changer, ça n’a pas de sens ! Nous ne voulons pas être des cobayes ! A-t-on pensé aux conséquences ? Ça sert à quoi ? On était bien comme cela. »

Ce changement était la sortie du cheminement vers la vie eucharistique (première communion) de l’école. Aussi, cela impliquait que les enfants soient accompagnés d’un adulte et de réserver 2 à 3 heures pour une rencontre qui se déroulerait soit le mercredi après-midi, soit le samedi, trois fois dans l’année ! 

En réalité, je ne faisais que suivre les nouvelles directives du diocèse qui souhaitait que les enfants suivent la préparation en paroisse, entourés des adultes de la famille, de la communauté pastorale et de tous les fidèles. Ainsi, ils seraient plus intégrés dans la vie communautaire et la communauté se rendrait plus compte du cheminement de ces jeunes chrétiens en devenir en les suivant pas à pas et non plus en étant juste présente au moment de la messe de leur première communion.

Bilan des changements
C’est ainsi, que maintenant depuis deux ans, les enfants et les parents suivent cette nouvelle manière de faire, malgré les contradictions lors de la séance d’information. Le bilan a été plutôt positif dès la première année. Les échos des parents dans la majorité étaient : nous craignions l’ennui, la catéchèse à haute dose, la moralisation comme l’Eglise savait si bien le faire et non, nous avons été surpris en bien. Nous apprenons certaines choses, mais surtout, c’est sympa de passer un temps privilégié avec mon enfant, sans ses frères et sœurs. Pour certaines personnes cela a été même une réconciliation avec l’Eglise sans pour autant passer dans un autre extrême, mais toujours est-il que l’image est moins négative. 

Les échos des enfants sont aussi très positifs, ils apprécient de se sentir accompagnés dans leur démarche, de partager ce moment privilégié avec l’adulte. C’est moins barbant que le catéchisme à l’école ! 

Attention, tout n’était pas rose. Il y a évidemment eu aussi des parents insatisfaits qui continuaient à penser que l’« ancien » système était mieux ou tout aussi bien, voire que le nouveau était une perte de temps et qu’ils n’avaient pas besoin d’un rafraîchissement de catéchèse. 

De cette première année, « fameuse année de transition », un peu chaotique au niveau de l’organisation aussi, il faut relever que le contenu n’a convenu ni aux animatrices, ni aux familles. C’est pourquoi, l’année passée, le programme a été modifié et nous l’avons axé davantage sur la messe et le sacrement. Ce qui a conduit que les rencontres soient suivies d’une messe afin d’appliquer ce qui avait été vu juste auparavant. C’est avec joie et beaucoup de respect que nous constatons que les enfants et les adultes ont joué le jeu de participer à la rencontre et à la messe qui suivait. 

Les propositions pastorales pour la famille
Covid-19 oblige, nous n’avons pas encore les échos de tous les parents concernant le cheminement de cette année. En effet, comme les messes de premières communions ont dû être déplacées en automne, nous n’avons pas encore fait les bilans avec les parents et les enfants. Ce qui est sûr, c’est que de mon côté, je suis bien heureuse de voir l’évolution de cette manière de faire. On a beau dire que « tout fout le camp », que nos rituels viennent à changer, mais dans le cas présent, c’est un mal pour un bien. Il a toujours manqué, et il manque encore, de la pastorale des familles. On pense aux enfants en leur proposant du catéchisme à l’école. On pense aux seniors en leur proposant des rencontres dans le cadre de la vie montante ou des messes en semaine. Mais les familles ? Qu’y a-t-il pour vivre la foi en famille ? Certes il y a les messes dominicales, mais vous conviendrez avec moi que ce n’est pas un succès fou. Il y a l’Eveil à la foi pour les enfants de 0 à 6 ans environ, mais malheureusement, pas dans toutes les paroisses. Et pourtant, bien des paroisses essaient de mettre sur pied des messes des familles, des rencontres en famille autour d’un moment de convivialité, comme la chandeleur à Romont. Mais la réponse est minime. Que faire, faut-il faire plus de pub ? Ou est-ce le reflet de cette génération qui ne souhaite plus de contact avec l’Eglise ou alors consommer juste ce qui est nécessaire, comme lorsqu’on va dans un magasin, et où on ne prend que ce dont on a besoin ? Ceci pourrait être le thème d’un autre article.

Ainsi, si ce moyen de préparation peut contribuer à faire vivre la pastorale des familles, je ne peux qu’y adhérer. Est-ce qu’il y a plus de monde dans les églises ? Je ne sais pas, mais peut-être que les familles s’y ennuieront moins lorsqu’elles iront à la messe dorénavant. Ce n’est plus de mon ressort. Dieu agit selon le plan qu’il a pour chacun.

Moralité : ne soyons pas réfractaires à tous les changements. Essayons, avançons, parce que cela nous permet parfois de découvrir d’autres facettes de la foi. Dieu ne veut pas nous confiner dans une manière de vivre notre foi, mais au contraire, nous ouvrir à la nouveauté. Rappelons-nous, Jésus nous a montré l’exemple, il a été le premier à chambouler les habitudes et les traditions juives. Comme pour beaucoup de choses, tant qu’on n’a pas essayé, on ne peut pas savoir.

«On m’a changé mon curé!»

«Tout fout le camp»: messe de 8h30 supprimée, nouveau curé, plus de secrétaire de paroisse, un inconnu comme président du conseil économique… «Je ne reconnais plus ma paroisse», peut-on parfois ouïr à la rentrée pastorale… Pourquoi donc tant d’émotionnel face à ces changements pourtant usuels?

Par Thierry Schelling
Photos: Jean-Claude Gadmer, Pxhere, Pixabay, DRMuter un prêtre ou réorganiser un horaire de messes déstabilise plus qu’il ne faudrait. A un point même qui peut surprendre. Il est vrai qu’inhérent à toute pratique religieuse s’expérimente con gusto la sécurité de la routine : « Dans la société, tout bouge, se déplace, y compris les citadins. Je peux comprendre que temple ou église doivent rester immuables afin de rassurer tout un chacun qu’au moins ça, ça ne change pas », confie la syndique d’une commune de l’Ouest lausannois.

Changement de prêtre

Il n’y a pas un manque de vocation dans nos contrées, à compter le nombre d’hommes et de femmes engagés à tous les niveaux (ou presque !) de la vie d’Eglise. Mais force est de constater qu’il y a raréfaction de prêtres. Cependant, on oublie que leur déplacement est souvent dicté par la nécessité d’équilibrer les forces (et les faiblesses !) sacerdotales sur tout le territoire diocésain, et est parfois décidé sur demande du concerné, pour des raisons objectives – sentiment du « devoir accompli », études spécialisées… – ou plus personnelles (santé, incompatibilité, etc.). 

Il n’en demeure pas moins vrai que le curé « clef de voûte » de toute une communauté qui le considère comme père, psy, conseiller, entremetteur, entrepreneur, c’est fini. Depuis des décennies. Ce qui, peut-être, est devenu habitude au sein du clergé – soit changer régulièrement – n’a pas été absorbé encore par maintes ouailles : « A la suite du départ de notre curé, nous nous sommes sentis orphelins », gémit une paroissienne très affectée par la réorganisation de son UP. Il y a désormais trois autres prêtres qui viennent, lui fait remarquer le modérateur, mais rien n’y fait : « Notre curé est parti. » Silence inconfortable de part et d’autre.

Horaires de messe

Les changements d’horaire des messes, un thème qui interpelle.

Un autre sujet qui mobilise fortement le « peuple de Dieu » : le changement d’horaire de la messe ! La sacro-sainte tabelle des célébrations est gage d’inviolable pérennité : « Mais… on a toujours fait ainsi ici, Monsieur le curé », fredonne-t-on sur divers tons plus ou moins mélodieux.

Or, leur réajustement est décidé, souvent pour faciliter la mobilité des célébrants qui, c’est vrai, diminuent, ou par justice envers plusieurs communautés « convivant » sur un même lieu ou parce que des travaux dans un sanctuaire en exigent la fermeture temporaire. Un paradoxe s’ensuit : alors que l’attachement des paroissiens à un horaire aurait semblé nourrir et renforcer leurs liens réciproques, dès le changement, dûment expliqué, annoncé, préparé, d’aucuns partent ailleurs illico presto pour retrouver avant tout… leur horaire fétiche ! Faisant fi de la communauté et du curé, les voilà soudainement mobiles ! Et le secrétariat essuiera pendant quelque temps les foudres des mécontents qui brandissent leur résolution : « Veuillez ne plus m’adresser de courrier de mon ex-paroisse ! »

Pourquoi ?

Ignace de Loyola parlerait-il d’« un attachement désordonné » ?

La religion, opium du peuple, garante des traditions, assurance-vie éternelle face à une vie terrestre ardue… La religion… on a dit tant de choses et l’on constate, c’est vrai, qu’elle a notamment la tâche d’encadrer et de transmettre. Encadrer un groupe humain pour le faire devenir communauté et lui faire vivre, célébrer et rencontrer son Dieu – en lui transmettant des manières de dire, d’agir et de vivre qui identifient ce groupe et le distinguent par rapport à « la masse » environnante.

Or, ce qui caractérise la vie actuelle, c’est bien l’horaire, le timing. Et ce qui assure la transmission, c’est bien l’officiel de la religion : prêtre, catéchiste, rabbin, imam, c’est-à-dire quelqu’un  légitimement formé pour « livrer » la religion, pour ainsi dire, aux adhérents, afin qu’ils ne s’égarent pas, ne se « désalimentent » pas et, à leur tour, qu’ils puissent partager ce qu’ils reçoivent, en sachant que c’est juste… Et tout cela, dans un rythme familier et rassurant.

Du coup, lorsque horaires et ministres du culte sont modifiés, c’est – apparemment – toute la religion qui s’étiole. Mais n’y a-t-il pas là plutôt des relents d’infantilisme et de « cléricisme » 1 ?

Infantilisme : Ignace de Loyola parlerait-il d’« un attachement désordonné » lorsque le ministre des sacrements n’est jugé qu’au prisme de sa fonctionnalité et/ou de l’affect qu’on lui porte et non pas d’abord comme une personne à part entière ? « Ils ne sont même pas venus à la messe d’au revoir pour me saluer », raconte, ému, un confrère lors de son départ. Où est l’« adulte dans la foi » qui, dans tous les autres domaines de la vie – professionnel, marital, familial, amical – vit ces changements structurels régulièrement, mais qui, quant à la vie ecclésiale, est complètement déboussolé ? L’écart entre vie « normale » et vie « chrétienne » a-t-il atteint son paroxysme ?

« Cléricisme » : le Concile Vatican II a renversé le schéma ecclésial prévalant alors : il a fait des clercs – le traditionnel haut de l’édifice – les serviteurs de la base qui pour le coup se retrouve sur le devant de la scène du monde et de l’ecclésiologie moderne. L’Eglise, c’est d’abord le Peuple de Dieu, laios tou theou2, les laïcs. Et malgré les notions de sacerdoce universel au nom du baptême, d’égalité entre femmes et hommes devant Dieu, de rapports synodaux et complémentaires non de par la différence sexuelle mais par les compétences (qui, elles, sont asexuées !) entre laïcs et ordonnés/consacrés, le réflexe que l’Eglise, c’est le clergé – voire le Pape ! – est encore bien vivace. C’est vrai, le Concile n’a que 60 ans à peine…

1 Néologisme pour éviter l’écueil du mot cléricalisme par trop galvaudé tant par ses défenseurs que ses pourfendeurs…
2 Terme grec pour Peuple de Dieu.

Alors, cette rentrée ?

Depuis que les célébrations, les écoles, l’industrie, la vie en quelque sorte, ont repris, des horaires auront été modifiés (cf. encart en page II), et des prêtres déplacés. Peut-on imaginer que ces changements sont accueillis « adultement » ? « Dans le fond, la communauté me manque », écrit une paroissienne à son curé sur le blog qu’il a ouvert dès les débuts de la crise du Coronavirus. Eh bien, moins de messes pour « groupuscules par trop rivés à leur banc d’église » et plus de regroupements intercommunautaires ne sont-ils pas souhaitables désormais ? Et pourquoi ne pas continuer à « skyper » les liturgies pour qui ne saurait réussir à venir à 10h le dimanche parce que malade, occupé avec des enfants en bas âge ou simplement désireux de revivre la profondeur de son attention participative comme lors du confinement ? On peut toujours écrire d’autres traditions…

Rentrée post-Corona

Pendant la pandémie, pasteurs et prêtres ont constaté que les célébrations liturgiques transmises par les multiples formes de réseaux sociaux ont attiré plus de monde que celles célébrées aux temples et églises… Qu’est-ce à dire ? Pour bien des paroissiens, ce fut une occasion inouïe de (re)découverte des gestes et des paroles de la célébration chrétienne qui, même par communion de désir, semblait remplir les cœurs et les esprits de manière plus bénéfique, plus sereine et plus adéquate qu’en « live » ! Il convient d’y réfléchir sérieusement. Comment prolonger cette qualité de participation ? Moins pour mieux, probablement. Et peut-être aussi lentement que nécessaire, mais rapidement que possible…

Et aujourd’hui, où es-tu?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, paroisse catholique de langue française de Berne, septembre 2020

Par Isabelle Perrenoud | Photo: RP

Désertées, les rues se terrent, les avenues se taisent : le monde s’est mis entre parenthèses. Sans tergiverser. Dans l’urgence et par obligation. Dans le désarroi et la consternation.

Basilique de la Trinité, Berne

Mal à l’aise, confiné, à l’étroit, il se replie, retient son souffle. Il étouffe. Pourtant, il se soumet. Du mieux qu’il peut. Il se protège. Son avenir est en jeu. La peur de la mort l’oppresse, effrayante ; et puis celle du manque, plus lancinante. 

Alors qu’il se nourrissait de bruit et s’abreuvait de tumulte, le voilà condamné au silence ; alors qu’il s’adonnait à la consommation à outrance, il se voit contraint à l’abstinence. Du jour au lendemain, il n’a plus rien à se mettre sous la dent. Plus possible d’assouvir son besoin de croissance. Ses envies traînent la patte, ses désirs font la manche, ses rêves d’expansion se heurtent à des barrières sans repères. Quelle galère ! Pas même de quoi tromper l’angoisse du vide qui, grandissante, l’étreint. Ne lui reste, pour seule distraction, que le râle de sa propre respiration : un son rauque, une longue plainte, un gémissement. Funestes parenthèses. Rien ne va plus ! Où est l’issue ? 

Le monde tremble, pâlit, serre d’un cran sa ceinture. Il a faim d’activités et de mouvement ; il a soif d’antan. Il regarde ses projets qui, brisés, gisent à terre. Plus que des miettes. Et des pertes. Abasourdi, le ventre creux, sevré de profits, il s’ennuie, dépérit. Deux mois suffisent pour mettre en lambeaux son économie. Pauvre de lui ! Il végète. Et parce que l’ennemi le guette, à peine ose-t-il encore un œil par la fenêtre. Ruines et désolation ! Il tire les rideaux : le spectacle est terminé. 

Où étais-tu, à ce moment-là ? Où étais-tu quand le dimanche ne t’invitait plus à communier au pied de l’autel ? Où étais-tu quand l’ambon, planté sans voix au milieu d’un chœur désert, attendait en vain l’arrivée des fidèles ? Où étais-tu quand tes pas solitaires ne pouvaient plus rejoindre l’élan communautaire ? Et quand les cloches ne sonnaient que pour éveiller le souvenir douloureux d’un peuple dispersé, où étais-tu ? 

Tu n’avais eu d’autre choix que de te retirer dans ta chambre. Tu avais fermé la porte sur toi et priais ton Père, qui est là, dans le secret. Sans bruit, tu Lui as dit : « Me voici ! » Comme tu étais, Il t’a accueilli. Il t’a vu et te l’a rendu : tout à coup, tu as perçu que là, dans le mystère de ton cœur, tu n’étais nulle part ailleurs que dans la maison de Dieu. Quand tu as ouvert les yeux, quelque chose avait changé. Mais quoi ? Du silence, la réponse est venue : à ce moment-là, tu as su que partout – partout ! – tu n’es jamais que dans la demeure de Dieu. 

Tu as soulevé le rideau, osé un œil par la fenêtre. Tout ruisselait de beauté et de vie. Dans le souci de ne rien profaner, le pas aussi respectueux qu’à l’approche du tabernacle, tu as poussé la porte de ta chambre. Tu as traversé la rue, longé l’avenue. En chaque lieu, en chaque souffle, dedans comme dehors, en ton chez-toi comme sous l’immensité du ciel, tu as compris que tu n’étais jamais que chez Lui. 

Et aujourd’hui, où es-tu ?

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