Changement d’époque

PAR THIERRY SCHELLING | PHOTOS : DR

«Si nous voulons que tout reste tel quel, il faut que tout change», lit-on dans le célèbre ouvrage italien Il Gattopardo, mis en scène par Visconti (1963)… et cité par le pape François dans son discours à la Curie romaine (2019) ! Quel amalgame des genres ! Et le pontife de renchérir: «Nous ne sommes plus en chrétienté, nous ne le sommes plus! Nous ne sommes plus les seuls aujourd’hui à produire la culture, ni les premiers, ni les plus écoutés !» Voilà, c’est dit.

Devant un tel changement d’époque, soit on se rue sur le passé pour s’en gargariser, soit on le relit, certes, mais pour en détacher le dynamisme, l’évolution, les oscillations, et préparer l’avenir – explique-t-il en substance quelques lignes plus tard. Et de citer le compositeur allemand Gustave Mahler : « La tradition est la garantie du futur et non pas la gardienne des cendres ! »

Modernité zen

Malgré son âge (84 ans), Papa Bergoglio est d’une modernité sereine, loin de secouer le cocotier pour n’en agiter que les palmes. Mais convaincu que le catholicisme contemporain ressemble plus à la graine de moutarde, ou au grain semé dans les champs, les ronces, les pierres, et la bonne terre – où ne pousse qu’une « semaille » sur quatre ! – qu’à un hypothétique retour au clinquant d’antan (Benoît XVI ressortait les ornements de pontifes ayant vécu à la Renaissance ou à la toute fin du Risorgimento !).

Nouvelle évangélisation

Jean-Paul II avait répondu au même questionnement avec son concept de « nouvelle évangélisation », invitant l’Eglise à « s’avancer vers de nouvelles frontières » 1 ; Benoît XVI avait érigé l’impulsion wojtylienne en Conseil pontifical ; François, lui, opère le changement à partir de ces périphéries – migrants, pauvres, divorcés, gays, personnes âgées, malades – pour regarder toujours et d’abord le Christ (le centre
de l’Eglise) et se laisser évangé­liser à nouveau… Plus tant nova et vetera mais plutôt nova et cetera !

1 Redemptoris missio, 7 décembre 1990, no 30.

Culture et foi selon Paul (Philippiens 4, 8)

PAR FRANÇOIS-XAVIER AMHERDT | PHOTO : DR

C’est une véritable charte culturelle que saint Paul inscrit dans la lettre aux Philippiens. Cette épître rayonne d’appels à la joie («Réjouissez-vous sans cesse», placé juste avant notre passage, 4, 4), alors même que son auteur est en captivité. Elle convient donc parfaitement à la coloration d’allégresse que le pape François donne à son pontificat (La joie de l’Evangile, La joie de l’amour, Réjouissez-vous et soyez dans l’allégresse, pour citer les titres de trois de ses documents essentiels) et à la constitution du Concile Vatican II sur l’Eglise dans le monde de ce temps Gaudium et spes (Joie et espérance).

Cette dernière propose du reste de mettre en œuvre les intuitions pauliniennes avec son beau chapitre sur la culture au sein de la société actuelle [section II de la
2e partie, « Quelques principes relatifs à la promotion culturelle », no 57-62]. Au nom de l’Incarnation, affirme l’apôtre des nations, la culture chrétienne se tisse de « tout ce qu’il y a de vrai, de noble, de juste, de pur, d’aimable, d’honorable, tout ce qu’il peut y avoir de bon dans la vertu et la louange humaine ». (Philippiens 4, 8)

Participer de l’intérieur

Cela signifie, d’une part, que les chrétien·ne·s insérés dans le monde ont d’abord à valoriser ce qui se vit et se fait de beau et d’authentique dans le contexte contemporain. L’Esprit Saint est à l’œuvre en cet âge, il soulève la pâte de l’humanité, tel un ferment secret mais divin, et bien des réalités estimables, pertinentes, courageuses et dignes d’intérêt se vivent « en dehors des frontières ecclésiales ». La culture chrétienne, c’est participer de l’intérieur à la vie culturelle civile et y apporter un éclairage évangélique.

D’autre part, le patrimoine culturel chrétien n’est pas de l’ordre du passé à sauvegarder. Il offre des ressources inestimables pour aujourd’hui dans les registres anthropologiques de la dignité de la personne, dotée d’une liberté de conscience, enracinée dans une intériorité s’ouvrant à la Transcendance, appelée à s’épanouir en communauté. L’articulation entre foi, vie et culture dans la perspective chrétienne peut se traduire dans une proposition d’éducation intégrale (globale), des pratiques sociales libératrices et des relations en vue de la communion. Au service de ce qui est « juste, pur et vertueux » !

Jeux, jeunes et humour – mai 2021

Par Marie-Claude Follonier

Question d’enfant

Pourquoi les chrétiens dédient le mois de mai à Marie ?
L’une des explications provient du Moyen Age. Alors qu’on utilise encore le calendrier romain où les premiers mois de l’année sont associés à des divinités protectrices, les chrétiens transforment l’appellation Maius mensis (mois de Maïa, déesse de la fertilité et du printemps) en Madona mensis : mois de Notre Dame, donc de Marie et non pas de la chanteuse américaine.

par Pascal Ortelli

Humour

Une vieille dame veut mettre dans un journal une photo de son mari pour l’anniversaire de son décès. Elle téléphone au journal. Elle voudrait mettre une photo en couleurs mais malheureusement elle n’a qu’une photo de lui avec son chapeau et elle aimerait une photo sans chapeau. « Aucun problème, lui dit son interlocuteur, avec les procédés modernes on peut corriger n’importe quelle photo. Il suffit de nous dire la couleur de ses cheveux. » La dame répondit : « Quand vous aurez enlevé le chapeau, vous verrez bien la couleur ! »

par Calixte Dubosson

Via Jacobi: Moudon – Montpreveyres

Temple de Vucherens.

Texte et photos par Pascal Ortelli

Le mythique chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle traverse la Suisse romande, de Fribourg à Genève. Au-delà des sentiers battus, la Via Jacobi regorge de curiosités. Chaque mois, L’Essentiel prend son bâton de pèlerin et en réalise un tronçon sous forme d’une balade familiale à faire sur la journée. Aujourd’hui, cap sur Montpreveyres pour une étape entre rivières et forêts.

Départ depuis la gare de Moudon, 3h45 aller simple, 14 km

1. Montez dans la Ville-Haute qui regorge de curiosités historiques. Au sommet, vous y découvrirez la fontaine de Moïse juste à côté du musée du Vieux-Moudon. Descendez à gauche dans la rue principale du bourg jusqu’à la Broye.

2. Longez la rivière jusqu’au pont de Bressonnaz que vous traverserez pour suivre sur quelques mètres le Carrouge avant de le franchir sur une frêle passerelle pour rejoindre la route principale à proximité de Syens. Suivez bien les panneaux jaunes car le tracé tourne plusieurs fois jusqu’au bois de Bioley que vous franchirez en lisière pour atteindre Vucherens.

3. Là, depuis le temple qui surplombe le village, ne manquez pas d’admirer les Préalpes. Longez la Bressonne par la route jusqu’à la bifurcation d’Ecorchebœuf où vous continuerez tout droit pour rejoindre le bois de la Côte.

4. Au milieu, tournez à droite et attaquez la descente sur le pont par des escaliers raides. La beauté du lieu vaut bien cet effort. Remontez ensuite la piste finlandaise jusqu’au temple de Montpreveyres.

5. De là, regagnez l’arrêt de bus du village, le long de la route de Berne. En 25 minutes vous pourrez rejoindre Moudon en transports publics.

Curiosité

Le temple de Montpreveyres où un vitrail rappelle que les chanoines du Grand-Saint-Bernard y avaient fondé un prieuré avant 1160.

Coup de cœur

Le musée Eugène Burnand à Moudon
C’est le seul peintre romand à avoir son propre musée. Une halte bienvenue pour commémorer en cette année le centenaire de sa mort.

La voix des mots

PAR MYRIAM BETTENS
PHOTO : CATH.CH/BERNARD HALLET

Un livre est une fenêtre ouverte sur le monde, dit-on. Mais certaines personnes sont empêchées de lire pour cause de cécité ou de handicap. La communauté des Bernardines de Collombey donne de la voix depuis 1964 pour rendre la littérature accessible à ceux qui en sont privés. Fermez les yeux et laissez-vous guider au travers de ce trésor sonore.

Du caractère au son

« Le récit originel racontant comment cet Ismaël Shumu’il devint le fils d’Abraham en Genèse 16, 1-2 conviendrait donc à un contexte du septième siècle », commence à lire Sœur Marie-Paule. La voix de la responsable de la bibliothèque sonore du monastère des Bernardines est posée et claire, mais « l’enregistrement d’un livre audio présente des difficultés qui n’existent pas lorsqu’on lit un livre pour soi ». Les noms propres issus d’une autre langue, ou même une lecture trop scolaire peuvent présenter certaines difficultés pour le lecteur et l’auditeur. Plus de trois mille titres constituent aujour­d’hui le catalogue de l’Etoile sonore, en majorité disponible sous forme numérique. Une cinquantaine de lecteurs étoffent ce fond sonore bénévolement. « Nous leur offrons une formation, un micro de bonne qualité et les livres pour enregistrer le support audio, indique Sœur Marie-Paule. La bibliothèque possède un peu de tout, mais s’est surtout spécialisée dans les livres de spiritualité et de philosophie. Lorsqu’une encyclique sort, elle est disponible en trois semaines chez nous. »

Lire et aimer lire

« Le livre le plus emprunté reste incontestablement la Bible », révèle encore la responsable. Auparavant, elle occupait toute une travée de la bibliothèque et grâce aux nouvelles techniques de numérisation, elle ne se compose « plus que » de six CDs. Cette sonothèque s’adresse à toute personne ne pouvant pas lire par elle-même. « La définition est volontairement assez vague pour étendre notre offre à tout auditeur dont la problématique empêche la lecture », comme dans le cas de la dyslexie, par exemple. « Une voix peut plaire à un auditeur et pas à un autre, mais on lit d’autant mieux ce qu’on aime », ajoute-t-elle encore. Ce que l’auditeur ressentira très certainement !

En librairie – mai 2021

Par Calixte Dubosson et la librairie Saint-Augustin

Des livres

Le soir approche et déjà le jour baisse
Nicolas Diat – Robert Sarah

« A la racine de l’effondrement de l’Occident, il y a une crise culturelle et identitaire. L’Occident ne sait plus qui il est, parce qu’il ne sait plus et ne veut pas savoir qui l’a façonné, qui l’a constitué, tel qu’il a été et tel qu’il est. De nombreux pays ignorent aujourd’hui leur histoire. » Cette constatation du cardinal Sarah est sans appel. Pourtant, tout en faisant prendre conscience de la gravité de la crise traversée, le cardinal démontre qu’il est possible d’éviter l’enfer d’un monde sans Dieu, d’un monde sans homme, d’un monde sans espérance.

Pluriel

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Pourquoi avons-nous si peur de la mort ?
Joël Pralong

Pourquoi avons-nous si peur de la mort ? La pire épidémie est celle de la peur. A cause d’elle, nous fuyons la vie sans éviter la mort. La foi devrait pourtant nous en prémunir. Est-ce aussi simple ? Le Père Joël Pralong décrit les mécanismes en jeu dans la peur de mourir et indique les moyens d’avancer dans la vie avec davantage de sérénité, adoptant un point de vue à la frontière du psychologique et du spirituel. Avec clarté et de manière concrète, Joël Pralong nous permet de prendre conscience des mécanismes qui nous empêchent d’avancer. Et nous propose les moyens de nourrir la paix de l’esprit et du cœur.

Artège

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7 jours – 7 dons – 7 béatitudes
François-Xavier Amherdt

Mettre en relation à chaque fois un jour de la semaine avec un don de l’Esprit et une béatitude : l’option est inédite et suscite des associations originales. L’ouvrage propose ainsi un petit aperçu de la vie spirituelle au quotidien, polarisée par le Christ, notre unique « trésor », et fournit même un scoop : le numéro personnel du mobile du Seigneur, afin de rester en contact permanent avec lui, au cœur de toute activité pastorale. 

Lit Verlag

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Notre-Dame de Paris, la nuit du feu
Delalande, Bertorello, Fernandez

Paris, le 15 avril 2019. Vers 18h20, un feu démarre sous la charpente de Notre-Dame de Paris. Une demi-heure plus tard, l’incendie se généralise à l’ensemble de la cathédrale. Les yeux du monde entier assistent alors, impuissants, à ce qui pourrait devenir la destruction en direct de l’un des plus grands fleurons du patrimoine de l’humanité. A travers cette bande dessinée, revivez heure par heure les circonstances du drame et tentez de mieux comprendre. Par touches, revivez également les moments clés de la construction de Notre-Dame et plongez au cœur de l’histoire de ce monument, qui reste l’un des plus visités au monde à l’heure actuelle.

Glénat

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Pour commander

Les médias, source d’échanges inépuisables

PAR BÉNÉDICTE DROUIN-JOLLÈS | PHOTO : GETTY

Interrogez-vous vos enfants sur leurs sources d’information et de distractions ? Regardez-vous avec eux leurs chaînes et vidéos fétiches sur Youtube ? Allez-vous sur les réseaux sociaux qu’ils fréquentent ? Et vous, leur montrez-vous vos journaux préférés ? Voilà autant d’occasions de partage de moments enrichissants.

On peut penser que c’est une perte de temps, que leur vie privée ne nous regarde pas, préférer donner la priorité au travail… Personnellement je n’ai jamais regretté d’avoir favorisé ces échanges. Ils sont l’occasion de pénétrer dans leur univers culturel si différent du nôtre. Aujourd’hui les médias sont très segmentés selon les âges, les sexes et les centres d’intérêts. Des discussions passionnantes émergent ainsi. D’abord nos jeunes sont tellement heureux de nous faire découvrir ce que nous ignorons. A notre tour ensuite d’interroger, de souligner le positif ou au contraire d’inviter à la prudence face aux éventuels écueils. Nos ados, grands consommateurs d’écrans, acquièrent relativement vite une certaine méfiance vis-à-vis des fake news ou des clichés répétés en boucle. Mais, ils ont aussi tellement besoin d’interlocuteurs pour les aider à les identifier,
pour approfondir une réflexion encore parfois vacillante ou superficielle.

Pour peaufiner l’exercice, pourquoi ne pas prendre le temps nous aussi de montrer ce qui nous tient à cœur : un exemple d’attitude héroïque qui « tire vers le haut », un témoignage de foi et d’engagement, un reportage inédit qui nous enthousiasme. Tous les jours, grâce aux médias, nous pouvons trouver de quoi échanger, débattre, apprendre à s’émerveiller et ainsi éveiller petit à petit l’intelligence, l’esprit critique et la vie intérieure des plus jeunes.

Statue de la Vierge…

… Notre-Dame de Bourguillon, Fribourg

PAR AMANDINE BEFFA | PHOTO : JEAN-CLAUDE GADMER

A l’origine lieu de prière des bourgeois atteints de la lèpre, Notre-Dame de Bourguillon est devenu un des lieux de pèlerinage de Suisse romande. Depuis le XVe siècle, la statue de la Vierge a vu défiler les malades, mais aussi les croyants venant implorer sa protection dans les périodes troublées.

Les traits que l’artiste a donnés au visage de Marie sont très humains et doux. Elle porte les insignes royaux : la couronne, le sceptre et le manteau rouge. Si les symboles sont ceux de la royauté terrestre, ils rappellent la royauté spirituelle de la Mère de Dieu.

Les Vierges couronnées se répan­dent progressivement à partir du XIIe siècle. A la même période, les communautés religieuses rajoutent l’hymne du Salve Regina au dernier office de la journée, peut-être pour trouver le réconfort face aux angoisses de la nuit.

Nous n’avons peut-être pas l’habitude de chanter cet hymne et il est possible que nous n’en ayons jamais réellement écouté les paroles. Il peut toutefois guider notre méditation devant la statue de Bourguillon.

Salut, Reine, Mère de Miséricorde, notre Vie, notre Douceur, et notre Espérance, salut. Vers toi nous élevons nos cris, pauvres enfants d’Eve exilés. Vers toi nous soupirons, gémissant et pleurant dans cette vallée de larmes. Tourne donc, ô notre Avocate, tes yeux miséricordieux vers nous. Et, Jésus, le fruit béni de tes entrailles, montre-le-nous après cet exil. Ô clémente, ô pieuse, ô douce Vierge Marie !

Quelle que soit la difficulté des temps dans lesquels nous nous trouvons, Marie est une mère offerte à ceux qui souffrent. On pourrait être étonné que la Vierge de Bourguillon porte son fils sur le côté au lieu de le tenir devant elle. Le Christ a en effet longtemps été au centre des œuvres, la Vierge n’étant qu’au second plan. Porter Jésus sur la hanche lui laisse toutefois toute la place pour accueillir nos soupirs et nos larmes. Elle peut tourner son regard vers les enfants que nous sommes et nous guider avec douceur dans l’espérance.

Rites à la carte ?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, décanat de Sion (VS), avril 2021

PAR L'ABBÉ CHARLES AKA | PHOTO : PXHERE

La vie est jalonnée de rites qui pénètrent la totalité des activités humaines. Cela est surtout vrai dans le domaine de la religion. Un grand nombre de pratiques religieuses sont soumises à des règles précises, codifiées par l’autorité religieuse qui en fixe le déroulement. La forme se perpétue mais le contenu est méconnu par beaucoup aujourd’hui. Les célébrations sont de plus en plus vécues par des personnes qui sont en « conflit » avec les rites séculaires de l’Eglise. Ceux-ci sont célébrés en présence de non-croyants, de non-pratiquants, ou même de fidèles qui veulent « un rite à la carte ». On cherche le sacré, sans le sacrement. Comment réagir face à cette situation ? Rigorisme ou adaptabilité ad libitum ?

Rigorisme ou pas, c’est le sens même du rite qui est menacé. En effet, les rites font partie du trésor spirituel de l’Eglise. Ils aident notamment les communautés religieuses à ne pas perdre leurs racines et à vivre pleinement le mystère célébré. Ainsi la participation répétée aux célébrations selon un certain rite marque non seulement l’appartenance à la communauté religieuse, mais met ses membres en lien avec les générations passées dans la communion à la même foi. Le baptême d’un nouveau-né par exemple a une dimension privée et surtout communautaire. Par ce sacrement, l’enfant devient membre d’une communauté chrétienne qui a ses us et coutumes. La tendance à concevoir son rite ou à rejeter les rites établis par l’Eglise n’est-elle pas le signe d’un individualisme ? En effet, sans ressusciter le vieux débat sur les rites dans l’Eglise, l’apparition de « rite à la carte » peut être interprétée comme une réponse à ces questions issues de quêtes individuelles, puisque c’est désormais l’individualité qu’on tente de définir dans le contexte de la modernité. Les individus recherchent une assise à travers le rite qui permet de créer un marquage dans leur vie personnelle.

Ainsi la recherche de « rites à la carte » peut être vue comme les symptômes d’une ignorance du sens des rites doublée d’une recherche individuelle. Entre rigorisme et complaisance, ne serait-il pas indiqué d’appliquer un remède pastoral ? Sans exclure les situations particulières, il s’agit de vivre une sérieuse préparation aux différents sacrements avec une explication qui éduque les fidèles au sens des rites pour une belle et fructueuse célébration qui respecte la discipline des sacrements.

 

Pourquoi des rites ?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Sacré-Cœur, Ouchy-Lausanne (VD), avril 202 1

PAR MARC DONZÉ

PHOTOS : LEILA FORTIS

On a tous des habitudes.

Quand on se lave les dents, on n’a pas besoin de réfléchir sur la manière de mettre le dentifrice sur la brosse ou sur la manière de se rincer la bouche. Quand on met la table, on sait comment disposer les assiettes, les verres et les services. Quand, au travail, on se retrouve autour de la machine à café, on a des coutumes sur les conversations à entretenir ou sur l’horaire de ce temps de pause.

Les habitudes facilitent la vie de tous les jours… si elles sont bonnes et si elles ne deviennent pas un oreiller de paresse.

Il y a aussi des habitudes saisonnières : la fête de Noël en famille, la course des contemporains, la participation à un festival… et la liste pourrait être longue.

Pour la prière personnelle, il est bon d’avoir des habitudes, que l’on appellera plutôt des rites. Elle peut trouver place dans un lieu bien déterminé : un coin à prière, avec un tapis, une icône, une bougie, une Bible. Elle peut se vivre à un moment précis de la journée, par exemple tôt le matin quand tout est encore paisible. Elle peut se dérouler de façon structurée : mise en présence de l’Esprit ; lecture de l’Ecriture ; temps de silence et de méditation ; temps de louange et de demande et bénédiction pour la journée. A chacun de trouver son rite, en pensant que ce rite est important pour garder une régularité dans la prière. Mais il faut qu’il soit paisible, joyeux, libre, intérieur.

La prière communautaire est réglée par des rites. Il y a un missel pour l’eucharistie, des rituels pour les sacrements. Ces rites permettent de prier ensemble. Ils permettent aussi d’être reliés à l’Eglise à travers l’espace et le temps. Etre fidèles aux rites, bien sûr sans crispation, cela balise le déroulement de la prière et permet de la vivre avec un cœur paisible et en communion les uns avec les autres.

Que l’on cherche aujourd’hui les rites les mieux adaptés, en tenant compte aussi de l’histoire et de la foi, c’est bien légitime. Fidélité et aggiornamento doivent se tenir la main, comme il est écrit dans ce numéro.

 

Bénédiction des baptisés de l’année et de leur famille

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur de Saint-Maurice (VS), avril 2021

TEXTE ET PHOTOS PAR JEAN MARQUIS

Lors d’un baptême, les parents sont invités à concrétiser leur démarche en inscrivant le nom de l’enfant et la date de son accueil dans la communauté paroissiale et la grande famille de l’Eglise sur une pancarte en forme de fleur et de la fixer sur l’arbre des baptêmes à l’entrée de l’église. Cet arbre de Vie symbolise la vie éternelle et la mission de porter du fruit par la grâce du baptême.

Au terme de la messe dominicale du 7 février, Monsieur le Curé a béni ces familles ainsi que les parrains et marraines. Elles sont reparties avec leurs fleurs qui, au-delà du souvenir, évoquent leur souci d’être partout présence d’accueil, de bonté et d’amour.

Notons encore que Naomi et Maikol servaient la messe pour la dernière fois avec émotion et dignité. Après dix ans de fidélité, ils tenaient à témoigner devant l’assemblée de leur belle expérience au service de l’autel. Nous les remercions pour la joie de leur engagement et leur présentons nos meilleurs vœux pour leur avenir.

Et bienvenue aux futurs baptisés !

 

Une page vient de se tourner

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, paroisse catholique de langue française de Berne (BE), avril 2021

Que les visages sourient, se ferment ou se masquent, l’ambon, fidèle au-delà de sa fonction, traverse les temps ordinaires – et chacun des autres moments – sans jamais cesser de rendre témoignage. A Dieu qui l’a suscité, comme à l’homme qui l’a façonné.

PAR ISABELLE PERRENOUD | PHOTO : ISTOCK/JASPER CHAMBER

De simple morceau de matière, il est devenu endroit sacré où se dépose le Livre, lieu respecté d’où s’élève la Parole. Engendré par l’inspiration, réalisé par le savoir-faire, sobre ou paré, toujours vêtu de beauté, il offre au Verbe le tremplin qui donne à chaque syllabe assez d’élan pour toucher la profondeur des cœurs.

L’ambon est heureux de sa mission. Il se sent vibrer ; il se sent vivant : il se sait au service de plus grand. A sa surface, effleurée par une brise légère, une page vient de se tourner, un souffle de passer. Il frémit. Une voix retentit. A peine au-dessus de lui. Si près. Si anciens et si nouveaux, tirés d’un psaume, des mots prennent leur envol, clairs et transparents. Pareils à des jets de lumière, ils déploient leurs ailes, emplissent l’espace, frôlent les vitraux, s’appuient sur quelques notes, avant de se laisser porter jusqu’au seuil des consciences : « Tu ne voulais ni sacrifice ni oblation, tu m’as ouvert l’oreille. » Arrivés là, entre tympans et étonnement, ils demeurent quelque instant en suspens. Sciemment. Les mots ne sont pas pressés d’en rajouter : gardant le silence, ils commencent à creuser une brèche dans cette fausse croyance, obscure et épaisse, selon laquelle, sans souffrance, nul ne peut s’approcher de Dieu. Surprises autant qu’effrayées, de vieilles douleurs claquent des dents. Craignant de se révéler soudain inutiles, elles grattent nerveusement les plaies entretenues aux seules fins de servir de marchepied vers l’Eternité.

Reprenant de la hauteur, frais et déroutants comme une source en plein désert, sans balbutier, avec autorité, les mots osent persister et signer : « Tu n’exigeais ni holocauste ni victime, alors j’ai dit : « Voici, je viens ! » » Stupeur ! Sueur sur les fronts de celles et ceux qui se sont créé mille maux, pensant réunir ainsi un capital de tourments suffisant pour leur permettre l’acquisition d’un morceau de Ciel. Se seraient-ils fourvoyés ? Leur monnaie d’échange, n’aurait-elle plus de valeur ? Salvateur questionnement.

A n’en pas douter, la brèche s’est élargie : à travers elle, l’amour s’avance. Une folle envie d’applaudir submerge l’ambon. Par souci des convenances, il se contient. Mais la joie est plus forte que la bienséance. Il exulte ; il répète : « Tu ne voulais ni sacrifice ni oblation, tu n’exigeais ni holocauste ni victime ; tu m’as ouvert l’oreille et voici, je viens ! Je viens ! » Qu’en retient l’assistance ? A-t-elle compris – enfin ! –, que le dolorisme ne sert qu’à avilir la dignité de l’homme et à massacrer l’innocence de Dieu ? Car le Père, tendrement mère, les bras grands ouverts, ne souhaite rien moins que le bien de chacun de Ses enfants. Sans souffrance.

 

Réjouissons-nous !

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur de l’Entremont (VS), avril 2021

PHOTO : DR

Le Christ est ressuscité des morts,

par la mort Il a vaincu la mort,

à ceux qui sont dans les tombeaux

Il a donné la vie !

Réjouissons-nous en ce jour de la Résurrection

car le Christ, hier accablé de moqueries,

couronné d’épines, pendu au bois,

aujourd’hui se relève du tombeau.

Réjouissons-nous car le Christ baigne

de sa clarté ceux que les ténèbres

de l’enfer retiennent captifs.

Réjouissons-nous en ce printemps de la vie,

car une espérance jaillit parmi les victimes

des guerres, des tremblements de terre,

parmi les affligés du corps et de l’âme.

Réjouissons-nous,

car par la croix toute tristesse est abolie,

et la joie inonde le monde.

Réjouissons-nous,

car le Seigneur est descendu au plus profond

de la terre, est descendu au plus profond

du cœur des hommes, où se tapit l’angoisse ;

Il les a visités, Il les a illuminés, et tourments, angoisse, enfer sont anéantis, engloutis

dans l’abîme d’amour ouvert au flanc percé

du Seigneur.

Réjouissons-nous, car Il est ressuscité le Christ,

la joie éternelle.

Père Michel Evdokimov, prêtre orthodoxe

 

OpenSky,le pari fou est lancé

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteurs de Sierre (VS), avril 2021

Chaque deux ans, le festival OpenSky rassemble, en temps normal, plus de mille trois cents jeunes de toute la Suisse romande sur un week-end à Fully pour prier, danser, chanter et louer Dieu.

Cette année, le festival aura bien lieu. Mais différemment.

PAR YVES CRETTAZ

Infos et inscriptions

sur www.opensky-fully.ch

 

Dans l’édition du mois de mars, on vous rapportait un interview de Pauline et Aurélie, deux sœurs croyantes, pratiquantes mais aussi récentes finalistes de la mythique émission Pékin Express sur M6. Elles devaient être les grandes invitées du festival OpenSky les 19 et 20 mars à Fully pour témoigner de leur parcours sur la chaîne française et de leur foi devant plus d’un millier de jeunes. Malheureusement, coronavirus oblige, elles n’ont pas pu se rendre dans le Bas-Valais.

Aujourd’hui, à la lecture de cet article, on peut donc en déduire que le festival OpenSky a été tout simplement annulé. Eh bien, non, détrompez-vous : le festival s’est réinventé et se passe actuellement, en mode corona-compatible bien évidemment. Les organisateurs ont décidé de maintenir cette quatrième édition dans un but d’évangélisation.

Se déroulant du 19 mars (jour de la Saint-­Joseph) au 23 mai (jour de la Pentecôte), la manifestation s’organise en présentiel à travers tout le Valais francophone.

Plus d’une vingtaine d’activités sur inscriptions et gratuites sont proposées, principalement réparties sur les week-ends. Les jeunes Valaisans (entre 16 et 30 ans) peuvent donc vivre différents temps d’adoration, de veillées, de célébrations, de témoignages, d’ateliers, mais également de formations.

En ce qui concerne la programmation, toutes les dates ne sont pas encore sorties mais on peut déjà vous confirmer la présence des deux sœurs lilloises Pauline et Aurélie. De plus, le groupe de pop louange français Be Witness sera également de la partie pour animer différents ateliers et célébrations, tout comme l’évêque suisse des jeunes, Alain de Raemy, qui revient pour célébrer une grande messe des jeunes. Plusieurs autres invités, principalement de la région, seront présents pour animer cette quatrième édition répartie sur plus de soixante-cinq jours.

Comme aiment bien dire les organisateurs, cette manifestation est « une porte d’entrée à la foi » pour permettre de montrer à chacun-e que la foi catholique sait aussi être jeune et dynamique. Cette année encore, malgré la pandémie et l’organisation différente, le comité a réussi le pari fou de faire vivre la foi aux jeunes dans un esprit jeune et solidaire… et en présentiel !

 

Catéchuménat

Catéchu… Quoi ?

 

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, décanat Sion (VS), avril 2021

 

PAR LYLIAN SEPPEY | PHOTOS : JHS

Et les plus jeunes ?

Les enfants en âge de scolarité ont également un parcours de catéchuménat avec les différentes étapes liturgiques. Dans nos paroisses, trois enfants l’ont suivi cette année : Bastien, Christophe et Kelly.

Belle route à eux !

Voici à quoi nous avons souvent droit quand nous disons ce mot «catéchumène» !

Il est vrai qu’il n’est pas courant de l’entendre et pourtant, ce mot définit toute personne « qui accepte en toute liberté de suivre le Christ et d’être initiée à la vie chrétienne par les sacrements du baptême, de la confirmation et de l’eucharistie ».

Ce temps de « catéchuménat » (faire retentir aux oreilles) indique le temps où la Parole de Dieu résonne dans le cœur des jeunes et des adultes en route vers un des trois sacrements de l’initiation. C’est une expérience de conversion.

Cette année, dans notre décanat, Viviane s’est mise en route vers le baptême tandis que Lucie, Patrick, Raquel et Joao se sont mis en route vers la confirmation.

Plusieurs étapes marquent leur chemin et nous, « chrétiens confirmés », sommes invités à les accompagner et à revivre pour nous-même cette catéchèse du berceau de la foi, par la fréquentation de la Parole de Dieu, la conversion de vie, l’entrée dans une vie liturgique et dans la prière de l’Eglise.

Avec Viviane, depuis cet automne, nous avons pu célébrer l’entrée en catéchuménat et l’appel décisif, ce dernier marque l’importance d’être appelé par l’Eglise, par l’évêque, à dire son « oui » définitif aux sacrements de Pâques après en avoir été jugé apte.

Durant le Carême, ultime étape, nous avons célébré les trois « scrutins » qui ont pour but de purifier les cœurs et les intelligences, de fortifier contre les tentations, de convertir les intentions, de stimuler les volontés, afin que les catéchumènes s’attachent plus profondément au Christ et poursuivent leur effort pour aimer Dieu.

Pendant ce temps, qui se vit au fil des trois derniers dimanches durant lesquels nous entendrons les évangiles de la Samaritaine (l’Eau vive) de l’Aveugle-né (la Lumière) et de Lazare (la Résurrection et la Vie), les catéchumènes seront appelés electi (ceux qui sont choisis, élus), illuminandi (ceux qui marchent vers la Lumière de la foi), competentes (ceux qu’habite un profond désir de recevoir les sacrements). Nous célébrerons les traditions du Notre Père et du Credo.

Avec Lucie, Patrick, Raquel et Joao nous avons pu vivre la « mémoire du baptême » afin de nous souvenir aussi du nôtre. Nous avons aussi redit le Notre Père et le Credo afin de professer la foi de l’Eglise puisqu’ils font partie de la « traditio » (transmettre) et du « Credo » (croire, tenir pour vrai, avoir confiance). Ils recevront tous trois l’Esprit Saint par ces mots : « Sois marqué de l’Esprit Saint le don de Dieu » dans le sacrement de « Confirmation » et deviendront de réels témoins de la mort et de la résurrection du Christ dans la foi et la charité au mois de mai prochain.

Que cette Montée vers Pâques soit pour eux et pour nous une montée vers la Vie ! Que notre prière les accompagne !

 

Le chanoine Bernard Gabioud

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteur de l’Entremont (VS), avril 2021

En ce début d’année 2021, les paroisses d’Entremont accueillent un nouveau desservant,
le chanoine Bernard Gabioud qui a rejoint officiellement la communauté occupant la cure d’Orsières. C’est l’occasion rêvée d’une rencontre. Celle-ci se déroule dans la grande salle
de la cure, si belle avec son plafond voûté et si chaleureuse avec sa cheminée dans laquelle
le feu crépite. Un moment privilégié qui favorise les confidences…

PAR MICHEL ABBET | PHOTOS : BERNARD GABIOUD

Bernard Gabioud : venir habiter

à Orsières, c’est un retour aux sources ?

C’est un lieu chargé de vie pour ma famille : mes parents ont vécu leur jeunesse dans cette commune, un chalet à Commeire a d’ailleurs maintenu et développé des liens forts entre notre « tribu » et cette région.

La famille a une grande importance

pour vous ?

Oh oui ! Je suis l’aîné d’une fratrie de dix enfants. Donc j’ai appris très jeune ce que voulait dire vivre en communauté, se frotter aux personnalités et aux caractères différents. Et surtout s’aimer très fort, au point d’être un peu malheureux quand l’autre était absent ! Ce qui n’empêchait pas une dispute sitôt que l’on se retrouvait…

Un prélude à la vie religieuse ?

Il y a quelques similitudes. Dans une famille comme dans une communauté, on ne se choisit pas, on s’accueille, avec ses qualités, ses défauts, ses capacités ou ses incapacités… On apprend à mettre son ego au deuxième plan, ce n’est pas un mal.

Votre vocation ?

Le premier souvenir marquant me vient de mes 11 ans, lorsque j’étais seul à travailler aux champs, suite à une dispute avec mon frère qui nous avait valu une punition paternelle. J’étais en rage contre mon frère, quand, soudain, une grande paix m’a envahi au moment où j’ai ressenti le désir de devenir prêtre… sans savoir très bien ce que cela signifiait. Le soir, je me suis confié à ma maman, qui a « accueilli » cette nouvelle un peu à la manière de Marie : tout en douceur !

Devenir prêtre, (il a été ordonné en 1970)

c’est donc l’aboutissement d’un long

cheminement ?

Cela signifierait qu’on aurait atteint un sommet… Oh non, le cheminement continue, c’est l’œuvre de toute une vie. En fait chacune de nos vies demande de « cheminer » pour parvenir à l’aboutissement qui ne viendra qu’en bout de course…

En plus de la vie religieuse, vous avez

un amour fort pour la montagne,

ce qui vous a poussé à devenir guide.

Je dirais que le métier de guide m’a appris à être prêtre au milieu et au service de mes frères et sœurs… Oui, la montagne a eu une énorme importance dans mon existence… A travers elle, j’ai pu vivre pleinement ma vie de prêtre et de religieux

Comment ?

J’avais besoin de ces espaces silencieux pour ressentir pleinement ma vocation. Gravir une montagne à deux ou trois, atteindre un sommet, ce n’est pas anodin. On « rentre » ensuite transformé, riche d’une expérience nouvelle.

L’idée d’un exploit vous a titillé ?

Une première par exemple…

L’exploit pour être connu ou reconnu ne m’a jamais tenté. Mais la montagne a fait éclore en moi le désir… du désert, cet endroit dépouillé de tout, espace de solitude et de conditions extrêmes qui annihile vanité et superficialité pour permettre la rencontre avec son Seigneur en vérité !

Le désert ?

Oui. J’ai été marqué par une personne : Charles de Foucauld que j’ai eu l’occasion de « connaître » en préparant et prêchant une retraite à des petites sœurs de Jésus, au début de mon ministère. Son regard m’a frappé et interpellé. Dans ses yeux, il me semblait pouvoir lire une Présence immense et fascinante… D’où cette envie irrésistible d’aller au désert, pour rejoindre cette Présence en moi et mieux me connaître.

Qu’est-ce que cela signifie

« se connaître » ?

Vaste question… C’est aller chercher au plus profond de soi-même pour trouver son essence. Etty Hillesum dit cela beaucoup mieux que moi.

Etty Hillesum ?

Une personnalité incroyable, juive hollandaise qui a tenu un journal intime de 1941 à 1943, année de sa mort dans le camp d’Auschwitz. Sa relation intime avec Dieu, dans les conditions atroces qui étaient les siennes lors de la guerre, est pour moi une source inépuisable d’émerveillement. Voici un court passage qui pourrait nous éclairer : « Il y a en moi un puits très profond. Et dans ce puits, il y a Dieu. Parfois, je parviens à l’atteindre. Mais plus souvent, des pierres et des gravats obstruent ce puits et Dieu est enseveli. Alors il faut le remettre au jour. » Ces mots sont une invitation pour chacun à quitter la superficialité pour faire silence afin de trouver ou retrouver l’« être » qui est relation avec Dieu.

Une dernière confidence…

Quel sera votre ministère ici ?

J’ai passé le temps d’agir, d’ailleurs mes forces actuelles ne me le permettent plus. Je ne désire plus « faire », mais « être ». Alors, je serai « avec » les paroissiens d’Entremont comme Jésus est « avec » nous, dans un ministère de compassion.

 

Les rites?

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Clins Dieu sur les Contrées (VS), avril 2021

Par l’abbé Alexandre Barras
Photo: Sœur Catherine Jerusalem

Le thème de ce mois nous invite à réfléchir sur les rites. Notre vie quotidienne n’est-elle pas remplie de rites profanes ? Le petit café du matin à heure fixe et dans le même bistrot. Le sport exercé tous les mercredis soir. Le passage de l’enfance à l’âge adulte avec le permis de conduire, le départ à l’armée, l’acquisition de la majorité, etc. Nous avons besoin de ces rituels qui rythment nos existences et les ponctuent de moments-clés.

De même en Eglise. Nous en percevons l’importance, par exemple, en regardant vivre les moines et les moniales : les prières à heures fixes, les processions cadencées, le travail et le repos planifiés sont le lot de chaque jour, et ceci depuis des temps anciens. La fidélité de ces frères et de ces sœurs nous fait comprendre l’importance de ces rites, en particulier dans la durée.

Le rite procure la sécurité, la fidélité et il invite à la constance. Pour nous chrétiens, les prières que nous récitons, les messes, dont le rituel est fixé par l’Eglise, les actes de charité qui habitent ces rites et les animent de l’intérieur, sont le lieu d’une rencontre avec Dieu ; la régularité nous permet de toucher sa présence et son amour pour nous, dans la foi. Certes, on pourrait arguer que les rites sont répétitifs, mais grâce à cela, nous sommes portés par quelque chose qui est plus grand que nous : le rite nous permet de nous concentrer, non pas sur le « faire », mais sur « l’être avec ». En célébrant la messe, que je connais par cœur, je peux tourner mon âme vers Jésus Eucharistie ; de même pour la prière personnelle : les prières que nous connaissons par cœur, par exemple le chapelet, sont comme une douce mélodie que nous lançons à Celui qui veut être le Tout de notre vie – les amoureux se disent bien des « je t’aime » des centaines de fois, sans jamais se lasser !

Un autre aspect important est que le rite, que nous recevons de l’Eglise, nous permet un temps de rencontre vraie avec le Dieu Vivant : nous prêtons notre voix, nos gestes, notre désir d’aimer, à la prière de toute l’Eglise. Le rituel liturgique, qui n’est pas notre petite invention individuelle et subjective, glorifie le Seigneur, le met à la première place. Enfin, il marque les différentes étapes de notre vie dès la naissance, par le baptême, et jusqu’à notre fin dans ce dernier rite de l’Au-revoir qui accompagne nos défunts dans leur passage vers l’autre rive. C’est alors toutes les étapes de notre vie qui prennent une autre dimension et une autre signification.

L’eau bénite

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, Clins Dieu sur les Contrées (VS), avril 2021

Par Thérèse Gerber
Photo: DR

L’eau bénite à la Veillée pascale invite-t-elle le croyant à rappeler son baptême ? Pourquoi et quand se signer avec de l’eau bénite ? Le temps de pandémie donne l’occasion d’apporter quelques précisions sur ce rite du signe de croix avec l’eau du bénitier à l’entrée de l’église.

Réservoir d’eau bénite, Lens.

Depuis plus d’une année, en entrant dans une église, c’est devenu naturel de prendre du désinfectant et de se frotter les mains, sans même faire le signe de croix. Se désinfecter est vraiment nécessaire, ça ne devrait pas pour autant supprimer les rites d’entrée dans un lieu saint. Certains diocèses en France ont trouvé la parade : un distributeur à pédale. En Italie, en 2009 déjà, lors de la pandémie de grippe A H1N1, Luchiano Marabese, a eu l’idée de créer un bénitier électronique, répondant aux besoins d’hygiène.

Une église est un lieu de prière et de célébration des offices liturgiques. Elle abrite le Saint Sacrement mais aussi parfois des objets de vénération, tels que des reliques de saints et martyrs ou des icônes. Il est important d’en prendre conscience au moment d’entrer. Gardons au moins le signe de la croix pour tourner son esprit vers Dieu, physiquement présent dans l’église.

« Dans l’Eglise catholique, l’eau bénite est considérée comme un sacramental, au même titre que les crucifix, médailles, images pieuses, rosaires, cendres et rameaux. Elle est utilisée pour les baptêmes, bénédictions de personnes, objets, ou lieux, mais aussi comme protection contre le démon.

Cette eau qui a reçu la bénédiction d’un prêtre est utilisée pour tracer le signe de la croix et éloigner le démon de ceux qui accomplissent ce geste avec foi, rompant avec l’agitation du monde extérieur. Le moment de tracer le signe de croix est le moment opportun pour tourner son esprit vers Dieu.

L’eau a toujours été associée à Dieu, dans la tradition biblique. C’est un élément purificateur, qui donne vie à la nature et à l’homme.

L’eau a toujours fait partie des rituels liturgiques bibliques. Jésus a été baptisé dans le Jourdain, a marché sur l’eau, a proclamé être la source d’eau vive : « Jésus lui répondit : – Quiconque boit de cette eau aura encore soif ; mais celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif, et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau qui jaillira jusque dans la vie éternelle » (Jean 4, 14). » 1

Tous les ans, prêtres catholiques et orthodoxes profitent respectivement des fêtes de Pâques et de Noël pour bénir leurs eaux.

Mais évidemment, il n’est pas question ici de remettre de l’eau bénite à l’entrée des églises, mais de revenir à ce rite et de le faire chez soi, à la maison, le matin en se levant, en partant pour un voyage, le soir avant d’aller se coucher, en bénissant nos enfants ou en apportant une petite bouteille à une personne malade. N’hésitons pas à demander au sacristain, à la sacristine ou même au prêtre s’il est possible d’avoir de l’eau bénite. Dans certaines églises la réserve est à disposition, vous pouvez aisément venir durant la semaine, avec votre propre bouteille et vous servir.

La parole de Dieu nous dit bien : « En vérité, en vérité, je te le dis, nul, s’il ne naît de nouveau de l’eau et de l’esprit ne peut voir le royaume de Dieu » (Jean 3, 3).

1 GAMERDINGER, Aliénor, « L’eau bénite purifie l’âme du péché et repousse le démon », Aleteia, mars 2016.

Litanies de saint Joseph

Tiré du magazine paroissial L’Essentiel, secteurs de Sierre (VS), avril 2021

PAR LÉONARD BERTELLETTO

PHOTO : RAPHAEL DELALOYE

Père céleste qui êtes Dieu, ayez pitié de nous.

Fils, Rédempteur du monde qui êtes Dieu,

ayez pitié de nous.

Esprit Saint qui êtes Dieu, ayez pitié de nous.

Trinité Sainte qui êtes un seul Dieu, ayez pitié de nous.

 

Saint Joseph, priez pour nous.

Illustre descendant de David, priez pour nous.

Lumière des patriarches, priez pour nous.

Epoux de la Mère de Dieu, priez pour nous.

Gardien de la Sainte Famille, priez pour nous.

Père nourricier du Fils de Dieu, priez pour nous.

 

Joseph très juste, priez pour nous.

Joseph très chaste, priez pour nous.

Joseph très prudent, priez pour nous.

Joseph très fidèle, priez pour nous.

 

Miroir de patience, priez pour nous.

Modèle des travailleurs, priez pour nous.

Soutien des familles, priez pour nous.

Consolation des malheureux, priez pour nous.

Espérance des malades, priez pour nous.

Terreur des démons, priez pour nous.

Protecteur de la Sainte Eglise, priez pour nous.

 

Agneau de Dieu, qui enlevez les péchés du monde,

ayez pitié de nous.

Agneau de Dieu qui enlevez les péchés du monde,

ayez pitié de nous.

Agneau de Dieu, qui enlevez les péchés du monde,

donnez-nous la paix.

 

Dieu, qui dans votre providence avez choisi saint Joseph pour être l’époux de la Mère de votre Fils, faites que l’honorant ici-bas comme protecteur, nous méritions de l’avoir comme intercesseur dans le ciel. Par Jésus, le Christ, notre Seigneur. Amen.

 

Tobit: enterrer les morts

PAR FRANÇOIS-XAVIER AMHERDT | PHOTO : DR

Déporté à Ninive en Assyrie, le Galiléen Tobit, père de Tobie le héros du livre qui porte son nom, se fait un point d’honneur de « récupérer » les corps de ses compatriotes exilés et tués pour les enterrer, selon les rites de leurs pères. En effet, le roi assyrien Sennakérib, de retour de Judée où il n’avait pas remporté le succès militaire escompté, entreprit de se venger en exécutant un grand nombre d’Israélites qu’il faisait ensuite jeter par-dessus les remparts de Ninive. Avant que le souverain ne pût retrouver les corps, Tobit s’empressait de les dérober pour les ensevelir.

Cette pratique de « fossoyeur clandestin », dénoncée au monarque par un Ninivite, lui valut ensuite d’être dépossédé de ses biens et le contraignit à la fuite. Mais il put revenir dans la cité assyrienne après le décès du tyran, grâce à l’intercession de son neveu Ahikar, maintenu comme échanson, garde du sceau, administrateur et maître des comptes par Asarhaddone, le fils de Sennakérib (Tobie 1, 15-22).

La fidélité de Tobit à l’Alliance se traduisait donc par l’accomplissement de démarches concrètes mettant en pratique les commandements. A côté de la sépulture procurée aux morts, il exerçait
en effet également l’aumône, remontait à Jérusalem en pèlerinage et s’acquittait de la dîme (Tobie 1, 3-9). Eloigné de sa terre et de son peuple, Tobit se maintenait donc dans « le chemin de la vérité » (1, 3) par la mise en œuvre des prescriptions prévues par la Loi, celles-ci pouvant être accomplies dans n’importe quel contexte, même en exil.

C’est tout l’enjeu de la réalisation et de l’évolution des rites. Rester attaché à ceux issus de la Tradition permet de conserver un sentiment d’appartenance et de communion : cela donne une identité, structure la foi, facilite l’expression extérieure des convictions et sentiments intérieurs. Mais en même temps, il convient de savoir les adapter aux cadres nouveaux auxquels nous sommes confrontés à chaque époque, afin que les formes renouvelées mises en place correspondent à l’esprit fondamental des rituels. Et ainsi procurer une sépulture digne a constitué dans la Tradition chrétienne issue de l’Ecriture l’une des « sept œuvres de miséricorde corporelle », quelle que soit la forme qu’elle ait prise
au long des siècles.

 

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